Philippe Tissié

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Philippe Tissié
Description de l'image Philippe Tissié.jpg.
Naissance à
La Bastide-sur-l'Hers
Décès
Pau
Nationalité Française
Profession
Médecin-aliéniste
Formation
Médicale

Philippe Auguste Tissié né en 1852 à La Bastide-sur-l'Hers (Ariège) et mort à Pau (Pyrénées-Atlantiques) en 1935[1] est un médecin français hygiéniste et l'un des premiers neuropsychiatres en France. Il est surtout l'un des trois principaux personnages avec le baron Pierre de Coubertin et Paschal Grousset, et malgré leurs différences, qui a fait évoluer le système scolaire et la vie à l'école en y intégrant des jeux organisés et des sports.

Biographie

Philippe Auguste Tissié est né en 1852 à La Bastide-sur-l'Hers, en Ariège dans une famille protestante. Orphelin il doit travailler très tôt et devient sous-bibliothécaire adjoint de la Faculté de Médecine. Il passe tardivement son brevet d'officier de santé puis soutient le 16 février 1887 sa thèse Les aliénés voyageurs : Essai médico-psychologique sous la direction d'Albert Pitres, un disciple de Jean-Martin Charcot[G 1] où il examine le cas d'Albert Dadas. Il souscrit par ailleurs aux discours d’Auguste Comte. Sa devise, reprise par de nombreuses villes d'Aquitaine est Fortitudo mea civium fides (Je tire ma force de la loyauté de mes citoyens).

L'aliéniste

Ses travaux à la société médicale de Pau, à sa clinique de « psycho-dynamie », à la maison de l’enfance ainsi qu’à l’orphelinat protestant de Saverdun l'amènent à poser une taxonomie du fonctionnement de l’être humain en trois classes : les passifs, les affectifs et les affirmatifs. Plus tard, il voit dans la gymnastique suédoise un traitement approprié à de nombreux cas et surtout un médicament de salubrité nationale. Les propos tenus en 1926 en témoignent : La génération de la guerre est indisciplinée … il serait intéressant de les soumettre à une éducation analytique frénatrice des impulsions que les sports favorisent quand ils ne les provoquent pas[2]. Il reste toute sa vie persuadé de la prééminence du cerveau et la fonction respiratoire qui le préoccupe en tant que militant de l'éducation physique ne vient qu'en seconde place[G 2].

Le militant des jeux traditionnels

Pratiquant le vélo, médecin du Véloce-club Bordelais et membre de la société de gymnastique La Bastidienne fondée par Charles Cazalet, il se caractérise par son indépendance tant vis-à-vis de Paschal Grousset que de Pierre de Coubertin[3] : ses opinions vont à l'encontre des sensibilités de gauche[4] et, en tant qu'hygiéniste, il s'oppose à l'idée de compétition, à ses violences et donc à la notion de sport véhiculée par le Comité de propagande des exercices physiques. Mais la gymnastique traditionnelle qu'il a connue à la Bastidienne ne le satisfait pas plus : L'homme est fait pour vivre sur terre et non dans les arbres[G 3]. Il crée le 19 décembre 1888 une Ligue girondine d'éducation physique afin de promouvoir les jeux traditionnels en plein air. Le premier Lendit se déroule le 12 mai 1890 et il crée La revue des jeux scolaires[G 4]. Délégué du ministère de l'éducation au congrès olympique du Havre de 1897 il y prône une éducation physique par les jeux locaux et nationaux de préférence aux jeux anglo-saxons. Il développe cependant dans le cadre scolaire le rugby à XV dans le sud-ouest ainsi que son dérivé régional la Barrette aquitaine.

La conversion suédoise

Envoyé en mission en Suède l'année suivante, il y découvre la gymnastique suédoise et en devient alors partisan inconditionnel[5]. L'apôtre des jeux traditionnels en plein air devient disciple de Pehr Henrik Ling sans renoncer pour autant aux précédents : à partir de ce moment son éducation physique scolaire associe une gymnastique de formation suédoise à une gymnastique d'application empruntée aux jeux sportifs. La première ne remplace pas la seconde et les deux sont complémentaires. Fixé à Pau à partir de 1903, il œuvre bénévolement à sa propagation à travers l'école normale de jeunes filles de 1904 à 1912 où il délivre un certificat d'aptitude à l'enseignement de la gymnastique. Cependant ses critiques à l'égard de la gymnastique de l'Union des sociétés de gymnastique de France (USGF) et du nouveau manuel de gymnastique militaire de 1902 lui valent une semi-disgrâce : il est déchargé de ses missions d'inspection en 1907 et les lendits sont interdits par le ministère[6].

La Ligue nationale d'éducation physique

Il ne renonce cependant pas et la Ligue française de l'éducation physique étant en sommeil après le décès de Grousset en 1909, Tissié en reprend le titre l'année suivante pour élargir le champ de l'LGEP. C'est pour lui le moyen de réagir à la suppression des lendits et à sa révocation en tant qu'inspecteur de la gymnastique dans le Sud-Ouest à la suite de la polémique avec Georges Demenÿ à propos du nouveau manuel de gymnastique militaire de 1902. Celle-ci ainsi que l'importance prise chez Tissié par l'éducation physique de la mère est au cœur de cette transformation dont il affirme vouloir faire une "œuvre d’art et de science en même temps qu’une œuvre pratique et nationale"[2]. Son objectif est de rendre l'enfant « simple, bon et beau » sans contrainte, ni violence grâce à l'éducation physique.

Le lendit scolaire au début du XX° siècle

Entre le cerveau et les muscles qui agissent la volonté et l'attention, chères à Théodule Ribot, poussent l'individu à agir. Toute l'éducation de Tissié repose sur son éducation par l'exercice. Ainsi, l'éducation physique ne peut être secondaire à l'éducation générale. Car il faut avoir aussi conscience de sa propre utilité collective : améliorer sa santé devient autant éducation physique qu'éducation morale. L'exercice respiratoire conscient dont l'enfant comprend l'utilité individuelle et sociale donne à la gymnastique suédoise - analytique avec recours au mouvement volontaire - une place privilégiée dans l'éducation de base. Malgré ses différends avec les ministères, il reste ferme sur ses valeurs : défense du bénévolat, de l’accès aux sports et à la gymnastique par toutes les couches sociales des deux sexes et de l'éducation morale, patriotique et citoyenne : Fortitudo mea civium fides.

Le renouveau de l'éducation physique scolaire

Après la guerre, pour promouvoir sa conception face aux enseignements de Georges Demenÿ inféodé à l'USGF qui finance son cours supérieur de la Sorbonne jusqu'en 1923[7] et ceux de Georges Hébert estimés trop empiristes, il est à l'origine en 1927 de l'Institut régional d'éducation physique de Bordeaux annexé à la faculté de médecine[G 5]. Suivi de 11 autres créations dans l'année qui suit, ceux-ci préfigurent les actuelles UFRAPS[7]. Tissié est aussi dans les années qui suivent à l'origine de la renaissance du sport scolaire par la mise en œuvre des journées de la jeunesse créées par le sous-secrétariat d'État à l'éducation physique en 1932. Le ministère de l'Instruction Publique accepte alors une mise en œuvre expérimentale de 5 ans dans le sud-ouest sous la forme de lendits secondaires. Le premier a lieu à Bordeaux le 3 juin 1934 en présence de Philippe Tissié. Celui-ci décède l'année suivante.

Œuvres

  • Les aliénés voyageurs : essai médico-psychologique, Paris, O. Doin, [8]
  • L'hygiène du vélocipédiste, Paris, O. Doin, .
  • Les rêves, physiologie et pathologie, Paris, Alcan, .
  • La fatigue et l'entraînement physique, Paris, Alcan, .
  • Cent ans d'erreur, in La Revue Scientifique du 12 mai 1900,
  • Les Basques et leurs jeux en plein air in La Revue scientifique du 20 octobre 1900
  • L'éducation physique : au point de vue historique, scientifique, technique, critique, pratique et esthétique, Paris, Larousse, .
  • Précis de gymnastique rationnelle de plain-pied et à mains libres : gymnastique éducative (scolaire et militaire), gymnastique athlétique, gymnastique hygiénique de chambre, Bordeaux, C. Gaulon et fils, .
  • De la méthode en éducation physique par le mouvement discipliné, rapport à l'Association française pour l'avancement des sciences. Imp. Empéranger. 1910
  • Une oeuvre nationale par les normaliennes de Pau. Le moteur humain. La mère et l'institutrice. Le témoignage des faits. 1913
  • L'esprit clinique en éducation physique. Suite de Cent ans d'erreur. Rapport au congrès international de l'éducation physique de Paris. Imp. Garet & Haristoy. 1913
  • Congrès national de l'éducation physique : rapports, Lyon, Léon Sézanne, .
  • Après le cyclone : la tâche de demain Imp. Garet et Haristoy . 1915
  • Pendant le cyclone. Causerie dans la tranchée : pour demain par aujourd'hui Imp. Garet et Haristoy. 1915
  • Ligue française de l'éducation physique. 1916
  • L'éducation physique et la race : Santé, travail, longévité, Paris, Flammarion, .
  • L'éducation physique rationnelle : la méthode, les maîtres, les programmes. Paris. Alcan. 1922
  • L'éducation physique et la médecine : contribution au traitement de la prétuberculose pulmonaire et des maladies des voies respiratoires par la gymnastique analytique Bordeaux. Gounouihou. 1924
  • L'ombre de l'âne. 1924
  • L'éducation physique et l'économie politique. 1924
  • Le sport tabou : la forge de Vulcain, Pau, Revue des jeux scolaires et d'hygiène sociale, .

Notoriété

Un stade à Pau,situé en face de la Gare de Pau porte son nom.

Références

  • Gilbert Andrieu² :

Autres références

  1. Jean Zorro 2002, p. 36
  2. a et b Jean Saint-Martin 2006, p. 119-132
  3. "La Ligue estime qu'un lendit est un concours général du muscle et que l'émulation ne peut exister sans concours", correspondance avec Pierre de Coubertin in Jean Durry Tissié et Coubertin, à la page 82 (format pdf)
  4. Pierre de Coubertin, Le sport contre l'éducation physique dans la IIIe République
  5. Claude Piard 2001, p. 43
  6. Jean Zorro 2002, p. 38
  7. a et b Claude Piard 2001, p. 76
  8. réédité à L'Harmattan, 2005, introduction de Serge Nicolas, sous le titre Les aliénés voyageurs : Le cas Albert, (ISBN 2747588696) (BNF 40002822); en ligne sur Gallica-Bnf

Bibliographie

  • Gilbert Andrieu, L'éducation physique au XX° siècle, Joinville-le-Pont, Librairie du sport, (ISBN 2-90-8617-00-5, BNF 35088368).Document utilisé pour la rédaction de l’article
  • Gilbert Andrieu, La gymnastique au XIX° siècle, Joinville-le-Pont, Actio, (ISBN 2-90-6411-25-6, BNF 37182088).Document utilisé pour la rédaction de l’article
  • Claude Piard, Éducation physique et sport, Paris, L’Harmattan, (ISBN 2-7475-1744-6, BNF 37716034).Document utilisé pour la rédaction de l’article
  • Jean Saint-Martin, Yves Travaillot, Pierre-Alban Lebecq, Yves Morales, L'œuvre du Dr Philippe Tissié : une croisade sociale en faveur de l'éducation physique (1888-1914), Bordeaux, Presses Universitaires de Bordeaux, (ISBN 978-2-86781-780-9)
  • Jean Saint-Martin, « Philippe Tissié ou l’éducation physique au secours de la dégénérescence de la jeunesse française (1888-1935) », Revue d’histoire de l’enfance « irrégulière », no 8,‎ , p. 119-132 (lire en ligne)
  • Jean Zorro, 150 ans d'EPS, Le Havre, AEEPS, (ISBN 2-90-2568-13-4, BNF 41209035).Document utilisé pour la rédaction de l’article

Articles connexes

Liens externes