Maquis de Picaussel

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Maquis de Picaussel
La grange, rénovée en mémorial, qui était l'ancien poste de commandement.
Géographie
Pays
Division territoriale française
Région
Département français
Coordonnées
Fonctionnement
Statut
Carte

Le maquis de Picaussel est un maquis du département de l'Aude, sur le plateau prépyrénéen de Sault, proclamé le . Il était placé sous le commandement du colonel Lucien Maury (1915-1989), instituteur.

Le maquis de Picaussel tire son nom de la forêt dans laquelle celui-ci s'est installé. Vaste et dense sapinière du Pays de Sault proche de la haute vallée de l'Aude, difficile d'accès et aux versants abrupts, la forêt de Picaussel était un lieu facile à défendre pour les maquisards, d'autant plus que ceux-ci bénéficiaient du soutien d'une large partie de la population locale (Puivert, Lescale, Belvis...).

Le maquis assurait trois fonctions principales : base de départ des guérillas, base de repos pour les soldats en transit et centre de ravitaillement[1].

Organisation[modifier | modifier le code]

La grange du maquis.
L'intérieur de la grange devenue un mémorial (commune de Belvis).
Hommes

Des hommes de diverses origines (Audois, militaires, guérilleros espagnols, soldats nord-africains) composaient les effectifs du maquis. Ils étaient regroupés en 8 sections de combat (entre 30 et 40 soldats) elles-mêmes divisées en deux ou trois groupes, et une section de services polyvalents (artificiers, mécaniciens, médecins). À cela s'ajoutait un groupe de commandement.

Équipement
  • Armes et munitions
Les maquisards étaient équipés en armes parachutées par les Alliés depuis les « drop zones » (zones de saut) du plateau de Sault, semblables à celles du Vercors. Parmi les armes possédées : fusils (Remington, Mauser, Springfield), mitraillettes (Sten), mitrailleuses (Browning, Hotchkiss) pistolets , grenades (Mills, Gammon), lance-roquettes PIAT, mortiers (50 mm), mines, explosifs[1]...
  • Équipement mobile
Trois camions, deux Citroën Traction Avant, deux motos et un side-car, plus une citerne d'eau[1].
  • Équipement divers
Téléphone de campagne, émetteurs-récepteurs de type AMK, brassards tricolores ou à la croix de Lorraine, lampes de poche[1]etc.

Historique[modifier | modifier le code]

Genèse[modifier | modifier le code]

Le maquis de Picaussel naît dans la nuit du 15 au de manière fortuite. Un avion allié largue par erreur[2], à l'Est du hameau de Lescale près de Puivert, un container renfermant 3 postes émetteurs, 54 revolvers et 20 kilos d'explosifs. Malgré l'intervention de l'armée allemande, quelques jeunes du hameau parviennent à récupérer le matériel et le confient à leur instituteur, Lucien Maury.

Cet événement inattendu est à l'origine, quelques semaines plus tard, de la création du secteur « J » de l'armée secrète des MUR. Il couvre la région de Puivert, Nébias, Chalabre, Limoux, Lescale, Rivel, Sainte-Colombe-sur-l'Hers, et Sonnac-sur-l'Hers. Lucien Maury, alias Franck en est le chef désigné. Il fait équipe avec un adjoint, lui aussi instituteur, Marius Olive, alias Simon.

Dans diverses localités du Pays de Sault, se développent des groupes armés. Entre mars et avril, deux parachutages de matériel sont organisés aux abords de Puivert. Olive crée le premier maquis du secteur « J » au mois d', aux Roudiès, dans la région de Chalabre. Quelques réfractaires au STO y sont incorporés, mais dénoncés en décembre de la même année, ils sont contraints à la fuite.

En , traqués par la Gestapo, les hommes de Maury établissent un poste de commandement dans la grotte de Lescale. Là, ils se voient confier la mission d'acheminer à Toulouse et à Montpellier, le lieutenant Amédée et deux agents radios, Joseph et Émile, parachutés le . La mission est un franc succès[1]. Un troisième agent radio, François Le Berre dit Stéphan, est parachuté en même temps qu'eux et restera à Picaussel jusqu'à la Libération[3].

Combats et guérillas[modifier | modifier le code]

Combats et guérillas[1].

Juin 1944[modifier | modifier le code]

Le 6, le jour où les Alliés débarquent en Normandie, l'ouverture du maquis de Picaussel est proclamée. Les groupes armés des localités environnantes lui font allégeance et viennent grossir les effectifs du maquis. Les parachutages de matériel permettent d'équiper les nouvelles recrues.

Le 10, sous le commandement de Raymond Sarie, les maquisards attaquent un camion allemand sur la nationale 117 ; le 15, ils cambriolent un poste de guet à Alaigne, avec l'aide d'aviateurs français ; le , ils pénètrent dans un dépôt de munitions à Narbonne, et volent fusils, munitions, grenades, mines... sous la direction de Marius Olive.

Juillet 1944[modifier | modifier le code]

Le , ils capturent un soldat allemand au cours de la mission Arréco ; Le 25, ils acheminent à Quillan des blessés à la suite d'une explosion de mortier qui fit par ailleurs cinq morts. Ils bloquent la ville pour donner le temps aux interventions chirurgicales ; le 27, sous le commandement de Guy David, ils tendent une embuscade à un convoi de miliciens dans les gorges de Cascabel, près d'Alet-les-bains.

Août 1944[modifier | modifier le code]

Le 1er août, ils accueillent un détachement du corps-franc de la Montagne Noire, en déroute depuis le  ; le 3, ils essuient un accrochage à Limoux contre une colonne de la Wehrmacht. Les Allemands tuent deux civils, et l'on compte deux blessés chez les maquisards ; le 6, a lieu un combat contre une compagnie motorisée de la 11e Panzerdivision, au col de la Babourade, suivi d'un accrochage contre une embuscade allemande à Lescale. Deux maquisards tués ; le 7, deux colonnes allemandes, appuyées par quelques chars, attaquent la maquis par le nord. Les assaillants sont repoussés par l'efficacité des maquisards, qui se replient sur Quérigut ; les 8 & 9, deuxième attaque contre Picaussel. Les Allemands investissent le maquis. Ils le trouvent vide. Le lendemain, furieux de leur échec, ils incendient le hameau de Lescale (Puivert)[4].

Dans la nuit du 12 au , nouvelle embuscade du maquis contre une colonne allemande, au sud de Formiguères. Six Allemands tués.

Le 17, seconde attaque dans le gorges de Cascabel contre une colonne allemande. Un fusil-mitrailleur ouvre le feu sur le convoi, mais les Allemands ripostent en montrant qu'ils ont à leur possession des otages. L'attaque tourne au drame : troublée, l'équipe du fusil-mitrailleur décroche et laisse à découvert les artificiers postés aux abords de l'itinéraire emprunté par le convoi. Ceux-ci se font prendre à revers par un déploiement rapide des troupes allemandes qui ouvrent le feu et tuent quatre des jeunes maquisards. Sévèrement touché et retardé de plusieurs heures, le convoi est finalement intercepté par un commando américain du Lieutenant Paul Swank, complété par un détachement de F.T.P. du maquis de Salvezines. Swank paye de sa vie son engagement[5], mais l'efficacité de son intervention entraîne la chute du dépôt d'armes de Couiza et de sa garnison.

Le 22, une colonne motorisée allemande est détruite à Limoux. Les maquisards font cinquante-trois prisonniers et saisissent trois camions ; les 23 et 24, le maquis participe à l'occupation de Carcassonne et combat à Villegailhenc ; le , l'Aude est libérée.

Après la libération du département de l'Aude, le maquis se cantonne à Carcassonne puis à Pennautier. Il est rejoint à cet endroit par de nombreux combattants volontaires qui forment deux unités régulières de la 1re Armée française du général Jean de Lattre de Tassigny :

  • 1er bataillon du 81e régiment d'infanterie, dit « Bataillon Picaussel », commandant :  Lucien Maury.
  • 7e compagnie du 80e régiment d'infanterie, dit « Compagnie Picaussel », commandant : Marius Olive.

Ces deux unités combattent dans l'Est de la France à partir de novembre 1944, puis en Allemagne. Elles finissent la guerre en mai 1945.

Kidnapping et torture de Christian de Lorgeril[modifier | modifier le code]

Le 22 août 1944, des membres du maquis de Picaussel kidnappent et torturent le comte de Lorgeril, pour ses convictions monarchistes[6].

Il subira un supplice atroce : assis sur une baïonnette, mains et pieds broyés, transpercé par une baïonnette, puis aspergé de pétrole enflammé. Il mourra après 55 jours d'agonie[7].

Maquisards morts au combat ou en déportation[modifier | modifier le code]

Listes des maquisards morts au combat ou en déportation[1].

Stèle sur la RD 16.

Morts au combat[modifier | modifier le code]

  • Azam Adrien – – Alsace
  • Baudry Justin – – Picaussel
  • Bournet Charles – – Gorges de Cascabel
  • Berthier Jean – – Picaussel
  • Calmet Jean-Baptiste – – Picaussel
  • Carbou Jean – – Lescale
  • Duhamel Roger – – Picaussel
  • Escriva Auguste – – Col de la Babourade
  • Eychenne Adrien – – Alsace
  • Fabre Pierre – – Chalabre
  • Folchet Espérance – – Picaussel
  • Jouillet Émile – – Gorges de Cascabel
  • Lebret Joseph – – Lescale
  • Malayrac François – – Picaussel
  • Martin Christophe – – Alsace
  • Papon Albert – – Picaussel
  • Paret Urbain – – Belvis
  • Perez Jean – – Gorges de Cascabel
  • Peyrade Emmanuel – – Campmarcel
  • Soligno Marino – – Gorges de Cascabel

Morts en déportation[modifier | modifier le code]

  • Arnaud Baptiste, arrêté le (Camurac)
  • Bayle René, arrêté le (Belcaire)
  • Fournet René, arrêté le (Camurac)
  • Peyrade Ernest, arrêté le (Puivert)
  • Vaquié Jacques, arrêté le (Camurac)
  • de Volontat Raoul, arrêté le (Quillan)

Morte après déportation[modifier | modifier le code]

  • Miquel Jeanne, arrêtée le (Rivel) et décédée à Coursan en

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. a b c d e f et g Amicale des anciens du Maquis de Picaussel, Picaussel 1944-1994, .
  2. Archives départementales de l'Aude, Résistances et clandestinité dans l'Aude, Conseil général de l'Aude, .
  3. Lucien Maury, La Résistance audoise, Tome II, Comité d'Histoire de la Résistance du département de l'Aude, , 434 p., p. 41-49.
  4. « Le hameau de Lescale se souvient du 9 août 1944 », L'Indépendant,‎ (lire en ligne)
  5. « Limoux. On n'oublie pas Paul Swank », sur www.ladepeche.fr, 29/07/2013 à 09:39 (consulté le ).
  6. (en) « Family tree of Christian de LORGERIL », sur Geneanet (consulté le )
  7. « La chasse aux notables en 1944 », sur www.histoire-en-questions.fr (consulté le )

Voir aussi[modifier | modifier le code]

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