Antoine de Lumbres

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Antoine de Lumbres est un diplomate français, seigneur d'Herbinghen, de Marquise, de Dannes et de Longvilliers, né en 1598, mort à Longvilliers le .

Biographie[modifier | modifier le code]

Antoine de Lumbres est le fils unique de Jacques de Lumbres, écuyer, lieutenant général au bailliage de Montreuil, et de Jeanne de Cormette, veuve de Charles de Poucques dont elle avait eu François de Poucques.

Antoine de Lumbres était un juriste. Il a été président du gouvernement de la ville d'Hesdin et de la ville de Saint-Pol en 1639.

Présenté par le duc de Longueville, il a été distingué par le cardinal de Richelieu qui a apprécié son esprit élevé et instruit, son caractère ferme et loyal. Il l'a envoyé en mission diplomatique auprès de l'électeur de Trèves, en 1635. En 1641, il est choisi comme procureur du roi dans le procès du chevalier Saint-Preuil, gouverneur d'Arras, qui a été décapité.

Après la paix de Tongres[1], conclue le et publiée le , entre le parti des Grignoux de la ville de Liège et le prince-évêque de Liège, il n'y avait plus de résident de France dans la principauté de Liège. Après la victoire de Rocroi, le , les troupes françaises occupent une partie des Pays-Bas espagnols. Le , au passage à Huy du duc de Longueville se rendant à Münster rejoindre Abel Servien et le comte d'Avaux pour participer aux négociations préliminaires des traités de Westphalie il reçoit une députation des États de la principauté lui demandant de venir à Liège. Celui-ci accepte à condition de recevoir les charges contre les proscrits Grignoux réfugiés à Maastricht. Ces documents sont envoyés au printemps 1646. Ils sont examinés par Antoine de Lumbres, alors collaborateur du duc de Longueville pendant les négociations de Münster. Il est envoyé à Liège en où il est résident sans lettres de créance entre et , résident auprès de la cité de Liège et des États de Liège entre le et le . Le prince-évêque Ferdinand de Bavière souhaitait faire élire son neveu Maximilien-Henri de Bavière comme coadjuteur, ce qui a été possible après l'armistice d'Ulm entre Maximilien Ier duc de Bavière avec le roi de France, le . Antoine de Lumbres a maintenu l'influence française à Liège. Négociateur français à Münster d'un traité entre la France et l'Espagne, il est revenu à Liège en , après la rupture des pourparlers due au blocus de Paris pendant la Fronde. Il a rencontré à Liège les députés liégeois qui avaient rencontré Mazarin. Mais celui-ci avait préféré rester hors des affrontements entre les États et le prince-évêque. Ferdinand de Bavière, aussi archevêque de Cologne, envoie une armée pour combattre une révolte des Grignoux qui s'empare de la ville de Liège le . Antoine de Lumbres a dû se réfugier dans le palais des princes-évêques de Liège. Les partisans de la France sont arrêtés et les deux bourgmestres de la ville favorables à la France sont décapités. N'ayant pas reçu d'accréditation auprès du prince-évêque, il n'a pas pu empêcher l'élection de Maximilien-Henri de Bavière comme coadjuteur, le . Il a protesté contre la prise de quartier d'hiver des troupes espagnoles et lorraines dans la principauté de Liège. Le coadjuteur considérait qu'il ne pourrait pas être maître de la ville tant qu'Antoine de Lumbres y serait présent. Il a donc cherché à le faire partir. Il obtient des États de Liège d'empêcher la levée de troupes pour les Frondeurs. Antoine de Lombres a quitté Liège le [2].

Antoine de Lumbres a failli être envoyé auprès d'Oliver Cromwell à son retour en France. À partir de 1655, il est envoyé auprès de la diète de députation de Francfort qui s'est tenue d' à , pour y rencontrer les délégués des princes et électeurs du Saint-Empire sous prétexte d'empêcher toute infraction à la paix de Westphalie, mais en réalité pour détourner les électeurs de procéder à l'élection de l'archiduc Léopold comme roi des Romains[3]. Il se déplace en divers autres endroits de l'Allemagne où il doit rechercher à rapprocher les princes allemands de la France. Il est ensuite envoyé auprès de l'électeur de Brandebourg, et arrive à Berlin en [4]. Il y reste jusqu'en 1656. Il a conclu un traité défensif entre l'électeur de Brandebourg et le roi de France pour six ans, le [5]. La France cherche alors à conserver l'alliance entre le roi de Suède et l'électeur de Brandebourg, mais en 1657, l'électeur de Brandebourg va s'inquiéter des attaques du roi de Suède. Antoine de Lumbres part ensuite près du roi de Pologne, où il reste jusqu'en 1665.

Avancée approximatives de la Suède (bleu) et de la Russie (vert) en Pologne-Lituanie

La Pologne était attaquée par le roi de Suède, l'électeur de Brandebourg[6], à l'ouest et au nord, à l'est et au sud par le tsar de Russie Alexis Ier, le prince de Transylvanie Georges II Rákóczi[7] et les cosaques d'Ukraine menés par Bohdan Khmelnytsky. Ce moment de l'histoire de la Pologne, au cours de la première guerre du Nord, est appelé le Déluge. Inquiet de l'avance des Suédois, le tsar met le siège à Riga, ville tenue par les Suédois, en , permettant à la république des Deux Nations de regrouper ses forces après la défaite à la bataille de Varsovie et signe la trêve de Vilnius avec la Pologne le . Antoine de Lumbres est appelé par Charles d'Avaugour du Bois, ambassadeur de France auprès du roi de Suède alors qu'il est le représentant du roi de France auprès de l'électeur de Brandebourg pour se rencontrer à Heiligenbeil. Mazarin avait envoyé en [8] des instructions à d'Avaugour de conclure une alliance avec Charles X Gustave qui serait un prélude à un rapprochement avec la Pologne. D'Avaugour lui propose de passer en Pologne pour éviter que le roi de Pologne s'allie à l'empereur du Saint-Empire et le tsar de Russie contre la Suède et amener les Polonais à faire la paix avec les Suédois. Il reçoit de Jacques Ier Kettler, duc de Courlande, le , une lettre avec le titre d'ambassadeur de sa Majesté Très Chrétienne pour les traités de Pologne et de Suède. Face aux prétentions du roi de Suède à dominer les côtes de la mer Baltique[9] et aux destructions qu'ils ont faites, la noblesse polonaise souhaite continuer la guerre contre la Suède et s'allier à l'empereur du Saint-Empire et avec le tsar. Face à Antoine de Lumbres qui défend les intérêts du roi de France, François-Paul de Lisola représente l'empereur du Saint-Empire. En 1657, l'électeur de Brandebourg[10], le roi de Danemark et l'empereur du Saint-Empire entrent en guerre contre la Suède, ruinant les espoirs français d'une conclusion rapide de la paix. L'empereur n'a pas les moyens financiers nécessaires pour s'engager fortement dans le conflit, de même que l'électeur de Brandebourg. La Suède qui doit combattre du Danemark aux provinces baltes s'épuise. Finalement, à l'automne 1659, les délégations polonaises et suédoises se rencontrent à Thorn. Antoine de Lumbres a été le médiateur des négociations. La conclusion du traité des Pyrénées, en , permet de libérer la France de la menace espagnole. La mort de Charles X Gustave en accélère les discussions. Le traité d'Oliva est conclu le à l'abbaye d'Oliva près de Dantzig entre le roi de Suède et le royaume des Deux-Nations et ses alliés, l'empereur du Saint-Empire romain germanique et l'électeur de Brandebourg[11],[12].

Il a terminé sa carrière diplomatique à la cour de Brunswick de à .

À son retour en France, il acquiert la seigneurie de Longvilliers en 1669 pour la somme de 180 000 livres.

Il est conseiller du roi en ses Conseils d'État et privé.

Il s'est marié à Marthe de Liévrin dont il n'a pas eu d'enfants.

Distinction[modifier | modifier le code]

Manuscrits[modifier | modifier le code]

  • Négociations d'Antoine de Lumbres, seigneur d'Herbinghem, à Liège, en Allemagne, en Prusse et en Pologne. Relations originales (1646-1665) (lire en ligne)
  • Registre des dépêches adressées à la Cour, principalement à Henri-Auguste de Loménie de Brienne, à Mazarin et à Hugues de Lionne, par Antoine de Lumbres, seigneur d'Herbinghem, ambassadeur en Allemagne et en Pologne. Minutes. (1652 et 1655-1666.). III - (lire en ligne)

Publications[modifier | modifier le code]

  • Relations de Antoine de Lumbres, seigneur d'Herbinghem, Marquise, Danne et autres lieux, châtelain de Longvilliers, chevalier de l'Ordre du Roy, conseiller de Sa Majesté en ses Conseils d'Estat et privé, et son ambassadeur en Pologne et en Allemagne, touchant ses négociations et ambassades 1646-1650, Ouvrage publié pour la Société d'histoire diplomatique par le Cte Georges de Lhomel, Plon-Nourrit et Cie, Paris, 1911-1913, tome 1, 1646-1656, tome 2, 1656-1660, tome 3, 1660-1666.

Hommage[modifier | modifier le code]

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Mathieu-Lambert Polain, « La Mal Saint-Jacques ou les Chiroux et les Grignoux », Revue belge, t. 1,‎ , p. 137-153 (lire en ligne, consulté le )
  2. Bruno Demoulin, Recueil des Instructions aux ambassadeurs et ministre de France, vol. XXXI : Principauté de Liège, Ministère des affaires étrangères, (lire en ligne), chap. I (« Antoine de Lumbres »), p. 27-35
  3. C'est Robert de Gravel qui est envoyé à la diète de députation de Francfort en avril 1656 (Recueil des instructions données aux ambassadeurs et ministres de France depuis les traités de Westphalie jusqu'à la Révolution française avec une introduction et des notes par Bertrand Auerbach, XVIII, Diète germanique, Ministère des affaires étrangères, 1912, p. 28-36).
  4. Antoine de Lumbres est envoyé auprès de l'électeur de Brandebourg en 1655 comme le montre ses instructions et non en 1651 comme l'a écrit François-Marie Guérard dans Liste des ambassadeurs, envoyés, ministres et autres agents politiques de la cour de France auprès des principales puissances européennes, 1833.
  5. Traité entre Louis XIV & Frédéric-Guillaume, électeur de Brandebourg, fait à Conigsberg, le 24 février 1624, dans Recueil des traitez de paix, de trêve, de neutralité, de suspension d'armes, de confédération, d'alliance, de commerce, de garantie, et autres actes publics..., depuis la naissance de Jésus-Christ jusqu'à présent, servant à établir les droits des princes et de fondement à l'histoire, tome 3, Depuis MDCI jusqu'en MDCLXI, chez Henry et la veuve de T. Boom, Amsterdam, 1700, p. 686-687 (lire en ligne)
  6. Frédéric-Guillaume Ier de Brandebourg, duc de Prusse, a révoqué son serment de fidélité envers son suzerain le roi Jean II Casimir de Pologne et s'est allié avec le roi Charles X Gustave de Suède qui l'a reconnu souverain en Prusse et en Varmie par le traité de Labiau, signé le 20 novembre 1656.
  7. Par le traité de Radnot, signé le 6 décembre 1656, Charles X Gustave accepte de reconnaître Georges II Rákóczi de Transylvanie comme roi de Pologne et grand-duc de Lituanie en échange de son entrée dans la guerre.
  8. Commission des archives diplomatiques du Ministère des affaires étrangères, Recueil des instructions données aux ambassadeurs et ministres de France depuis les traités de Westphalie jusqu'à la Révolution française introduction et des notes par A. Geffroy, II, Suède, Félix Alcan éditeur, Paris, 1885, p. 14-29 (lire en ligne)
  9. Ladislas Konopczynski, « Le problème baltique dans l'histoire moderne », dans Revue historique, septembre-décembre 1929, tome 162, p. 314 (lire en ligne)
  10. Inquiet de l'ambition du roi de Suède de dominer la mer Baltique, Frédéric-Guillaume Ier de Brandebourg, l'électeur de Brandebourg, s'est allié au roi de Pologne par le traité de Wehlau, signé le 19 septembre 1657, qui a reconnu l'entière souveraineté de l'électeur de Brandebourg sur le duché de Prusse.
  11. Christophe-Guillaume Koch, Histoire abrégée des traités de paix, entre les puissances de l'Europe depuis le traité de Westphalie ouvrage entièrement refondu, augmenté et continué jusqu'au traité de Vienne et aux traités de Paris de 1815 par Frédéric Schoell, chez Gide fils, Paris, 1818, tome 12, p. 295 (lire en ligne)
  12. Éric Schnakenbourg, « Les tentatives de médiations françaises dans les conflits suédo-polonais du XVIIe siècle : une diplomatie de la périphérie ? », dans sous la direction d'Éric Schnakenbourg et Frédéric Dessberg La France face aux crises et aux conflits des périphéries européennes et atlantiques du XVIIe au XXe siècle, Presses universitaires de Rennes, Rennes, 2010, p. 19-20, (ISBN 978-2-7535-0994-8) (aperçu)

Annexes[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Émile-Victor-Charles de Boyer de Sainte-Suzanne, Les intendants de la généralité d'Amiens (Picardie et Artois) l'administration sous l'ancien régime, Librairie administrative de Paul Dupont, 1865, p. 557 (lire en ligne)
  • Commission des archives diplomatiques au ministère des affaires étrangères, Recueil des instructions données aux ambassadeurs et ministres de France depuis les traités de Westphalie jusqu'à la Révolution française avec une introduction et des notes par Louis Farges, IV, Pologne, Félix Alcan éditeur, Paris, 1888, tome 1, 1648-1729, p. 21-35 (lire en ligne)
  • Commission des archives diplomatiques au ministère des affaires étrangères, Recueil des instructions données aux ambassadeurs et ministres de France depuis les traités de Westphalie jusqu'à la Révolution française avec une introduction et des notes par Albert Waddington, XVI, Prusse, Félix Alcan éditeur, Paris, 1901, p. 1-45, 583, 612 (lire en ligne)
  • Roger Rodière, Répertoire des noms de famille contenus dans les chartes des Prieurés de Beaurain et de Maintenay : Lumbres, dans Mémoires de l'Académie des sciences, lettres et arts d'Arras, 1906, tome 37, p. 70 (lire en ligne)
  • Bruno Demoulin, Recueil des Instructions aux ambassadeurs et ministre de France, vol. XXXI : Principauté de Liège, Ministère des affaires étrangères, (lire en ligne), chap. I (« Antoine de Lumbres »), p. 27-35

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]