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Anesthésie générale

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L'anesthésie générale Écouter, ou AG, est un acte médical dont l'objectif principal est la suspension temporaire et réversible de la conscience et de la sensibilité douloureuse, obtenue à l’aide de médicaments (drogues anesthésiques) administrés par voie intraveineuse et/ou inhalés. À cet objectif essentiel, permettant la réalisation sans mémorisation et sans douleur des interventions chirurgicales et de certains examens invasifs, s'associe la nécessité d'une surveillance continue et souvent d'un contrôle artificiel (physique et/ou pharmacologique) des fonctions vitales : respiration (fréquence et volumes respiratoires, oxymétrie), hémodynamique (fréquence et rythme cardiaques, pression artérielle), thermorégulation, tonus musculaire.

En raison des spécificités de l'approche technique, physiopathologique et pharmacologique du patient anesthésié et de l’impératif de sécurité qui entourent cet acte à toutes les étapes, la pratique médicale de l'anesthésie n'est légalement possible en France que par un médecin anesthésiste-réanimateur (décret du )[1].

À gauche, un appareil d'anesthésie standard équipé d'un cardioscope et d'un respirateur. À droite, un chariot d'anesthésie contenant drogues anesthésiques et dispositifs médicaux.

Modalités

À l'exception des cas d'urgence, l'anesthésie générale est toujours réalisée à jeun (six heures minimum pour les adultes et les enfants concernant aliments solides et lait, concernant les liquides clairs deux heures de jeûne suffisent), car le relâchement corporel s'accompagne d'une perte des réflexes de protection des voies aériennes et d'un risque d'inhalation du contenu gastrique, dont les conséquences peuvent être gravissimes (pneumopathie d'inhalation).

Elle se déroule en quatre étapes :

  • une consultation d'anesthésie ;
  • une visite pré-anesthésique (la veille ou dans les heures précédant l'anesthésie)
  • l'anesthésie en elle-même ;
  • le réveil sous surveillance.

La consultation d'anesthésie a plusieurs buts :

  1. examiner le patient et évaluer son état
  2. prescrire les examens complémentaires si nécessaire
  3. décider de la technique anesthésique en fonction des éléments précédents, voire renoncer à l'anesthésie si nécessaire
  4. informer le patient de la procédure et des risques de l'anesthésie

La prémédication consiste à la prise d’un tranquillisant comme le Midazolam (Hypnovel) ou l'Hydroxyzine (Atarax) par voie orale qui commence à relaxer le patient (qui est souvent angoissé de subir une intervention chirurgicale).

"La visite pré-anesthésique", qui a lieu dans les heures précédant l'anesthésie, recherche l'absence d'événements nouveaux, survenus depuis la consultation d'anesthésie, pouvant contre-indiquer l'anesthésie (infection en cours par exemple).

L'anesthésie générale repose sur l'association d'une narcose (sommeil) et d'une analgésie (lutte contre la douleur), suivant le type de chirurgie une curarisation associée peut être nécessaire pour permettre un relâchement musculaire (intervention viscérale par exemple).

L'anesthésie générale s'accompagne d'une perte de conscience et en général d'une perte des réflexes de protection des voies aériennes ; c'est pourquoi elle s'accompagne souvent de l'intubation trachéale ou de la pose d'un masque laryngé. Néanmoins des anesthésies générales courtes et pour des gestes chirurgicaux peu agressifs peuvent être menées sans intubation, avec un masque facial ou laryngé, en conservant la ventilation (la respiration) spontanée du patient, ou en l'assistant au ballon par l'intermédiaire du masque.

Du fait de la dépression de la fonction respiratoire, l'anesthésie générale peut aussi nécessiter une ventilation assistée, normalement après intubation. Durant l’intubation, le patient est en apnée totale. La première phase consiste à faire respirer de l'oxygène pur au patient afin que ses poumons contiennent 100 % d'oxygène ; cette opération, destinée à chasser le diazote (composant majoritaire de l'air), est appelée dénitrogénation ou préoxygénation. Cette saturation des poumons permet d'assurer une alimentation du sang en oxygène durant le court moment entre l'arrêt ventilatoire consécutif à l'anesthésie et le début de la ventilation artificielle (délai d'intubation). Depuis quelques années, on utilise aussi le masque laryngé en remplacement de l'intubation : son placement est plus simple et moins traumatisant mais il n'offre pas de protection sûre des voies aériennes contre l'inhalation de liquide gastrique. L'étanchéité est parfois difficile à obtenir.

En fin d'intervention, le patient est toujours conduit dans une salle de surveillance post-interventionnelle (salle de réveil) pour y être surveillé de manière continue avant de regagner sa chambre ou de quitter l’hôpital.

Sécurité

Un coussin chauffant ou une couverture chauffante à air pulsé permet de diminuer la perte de chaleur corporelle. Les moniteurs de la respiration, de l’ECG, de l’oxygénation tissulaire (saturation prise au doigt à l'aide d'un oxymètre) et de la pression sanguine sont des appareils très utiles pour le monitoring du patient. La surveillance continue par un médecin anesthésiste, un(e) inhalothérapeute ou un(e) infirmier(e) anesthésiste et la compilation des données dans un rapport d’anesthésie offrent des avantages très importants au niveau de la sécurité.

Anesthésie au gaz

Système et substances pour l'anesthésie (XIXe siècle)

C'est le fameux masque noir (ou d'autres coloris voire transparent) qui fait dormir le patient. Bien qu'il soit possible d'obtenir l'inconscience, ces agents n'ont pas d'effet analgésique propre et ils créent un blocage neuromusculaire (paralysie) très modéré. Ces agents sont assez rarement utilisés seuls, à l'exception de l'anesthésie pédiatrique ; dans ce cas, ils permettent l'induction de l'anesthésie sans "piqûre".

Le protoxyde d'azote permet d'obtenir une euphorie (gaz hilarant) et une certaine analgésie (utilisé pour des soins douloureux ou accouchement quand une péridurale n'est pas réalisable).

pour une description complète de ces agents, de leurs effets et de leurs utilisations.

Anesthésie par injection

Classe de médicament Effet recherché
Analgésiques Analgésie pour diminuer le retentissement des actes douloureux
Hypnotiques Perte de conscience, maintien de l'inconscience.
Curares Blocage neuromusculaire, autrement dit paralysie. Pour empêcher les mouvements nuisibles à la chirurgie ou faciliter celle-ci en relâchant les muscles.

Il y a plusieurs sortes de morphinomimétiques (analgésiques) en fonction de leur puissance ; ce sont des dérivés morphiniques:

  • le sufentanil (Sufenta) qui est 1000 fois plus puissant que la morphine. C’est le plus utilisé dans les actes chirurgicaux lourds car il a une durée d’action élevée (50 à 70 minutes). Son pic d'action maximum est atteint en environ 6 minutes.
  • le fentanyl qui est 100 fois plus puissant que la morphine, est un dérivé plus ancien. Son inconvénient principal est son accumulation lors de l'utilisation prolongée (chirurgie longue, sédation en réanimation...).
  • il y a aussi Alfentanil (Rapifen) qui, lui, est seulement 10 fois plus puissant que la morphine. Il a une durée d’action de 7 à 15 minutes et un délai d’action de 20 secondes par voie intraveineuse.
  • le Rémifentanil (Ultiva) est un analgésique de très courte durée, très puissant. Son originalité vient de son effet "on/off". Il ne s'accumule pas même en cas d'utilisation prolongée. Il est utilisé en anesthésie, les études pour son utilisation large en réanimation sont en cours. Il est incriminé dans la survenue de phénomènes d'hyperalgésie post opératoire.
  • le chef de file des hypnotiques intraveineux et le premier utilisé (vers 1940) est le thiopental (Pentothal). L’hypnotique moderne le plus utilisé est le Propofol (Diprivan). Il a un délai d’action de 30 à 50 secondes et une durée d’action de 5 à 10 minutes. Il s'accumule peu, et a un effet anti émétique très utile. La douleur lors de l'injection intraveineuse peut parfois être importante (injection rapide sur une veine de petit calibre).

Les curares agissent au niveau de la plaque motrice en s'opposant à la conduction de l'influx nerveux entre le nerf et le muscle. L'utilisation de curare entraîne un arrêt respiratoire par paralysie du diaphragme et des muscles intercostaux, ce qui implique une assistance respiratoire pendant la durée de leur effet.

Il en existe deux types principaux

  • curares dépolarisants ou leptocurares : utilisés en urgence car leur action est rapide et rapidement réversible. Ils permettent une intubation rapide dans de bonnes conditions, ce qui permet de protéger l'appareil respiratoire de l'inhalation du contenu de l'estomac. Le seul représentant de cette classe est la succinylcholine (Celocurine). Son utilisation est limitée par un certain nombre d'effets indésirables, parmi lesquels: douleurs musculaires secondaires, hyperkaliémie, troubles du rythme cardiaque, hyperthermie maligne, anaphylaxie avec risque de choc.
  • curares non dépolarisants ou pachycurares : pendant l’AG, sert au relâchement des muscles (par exemple en chirurgie digestive et dans les cœlioscopies.)

Quels sont les risques de l'anesthésie générale ?

Le risque anesthésique a considérablement diminué en France ces vingt dernières années. La création des “salles de réveil” a beaucoup contribué à cela. Même si l’anesthésie n’est directement responsable que d’un décès sur 100 000 en moyenne, elle est encore responsable de la mort de 600 à 800 patients chaque année. Les techniques d’anesthésie, l’organisation et l’équipement des lieux d’activité, l’organisation rationnelle des programmes opératoires (faits en commun par les chirurgiens, les anesthésistes et les infirmiers de bloc opératoire) et la progression de la sécurité dans l’exercice de ce métier particulièrement anxiogène pour ceux qui le pratiquent sont en hausse chaque année.

  • Les nausées et les vomissements au réveil sont devenus moins fréquents avec les nouvelles techniques et les nouveaux médicaments. Les accidents liés au passage du contenu de l'estomac dans les poumons sont très rares si les consignes de jeûne sont respectées.
  • L'introduction d'un tube dans la trachée (intubation) ou dans la gorge (masque laryngé) pour assurer la respiration pendant l'anesthésie peut provoquer des maux de gorge ou un enrouement passagers.
  • Des traumatismes dentaires sont également possibles. C'est pourquoi il est important que le patient signale tout appareil ou toute fragilité dentaire particulière.
  • Une rougeur douloureuse au niveau de la veine dans laquelle les produits ont été injectés peut s'observer. Elle disparaît en quelques jours.
  • La position prolongée sur la table d'opération peut entraîner des compressions, notamment de certains nerfs, ce qui peut provoquer un engourdissement ou, exceptionnellement, la paralysie d'un bras ou d'une jambe. Dans la majorité des cas, les choses rentrent dans l'ordre en quelques jours ou quelques semaines.
  • Des troubles passagers de la mémoire ou une baisse des facultés de concentration peuvent survenir dans les heures suivant l'anesthésie.
  • Des complications imprévisibles comportant un risque vital comme une allergie grave, un arrêt cardiaque, une asphyxie, sont extrêmement rares. Pour donner un ordre de grandeur, une complication sérieuse ne survient que sur des centaines de milliers d'anesthésies.

En 20 ans, la mortalité due aux anesthésies a été divisée par 10 selon André Lienhart, chef du service d'anesthésie-réanimation du CHU Saint-Antoine à Paris ce qui donne un taux de mortalité de 0,69/100 000 anesthésies pour les patients bien portants[2].

Anesthésie combinée

Cette technique combine l'utilisation de plusieurs agents, ayant chacun des propriétés particulières utiles lors d'une anesthésie. Il existe 3 catégories principales de produits utilisés pour une anesthésie générale :

  1. opiacé (ex. : sufentanil) Ils permettent de diminuer ou d'éliminer la sensation douloureuse.
  2. hypnotique (ex. : propofol) Ils induisent le sommeil et l'amnésie des évènements. Ils sont administrés par voie intraveineuse ou sous forme de gaz que l'on respire : ex. : isoflurane, sevoflurane…
  3. curare (ex. : succinylcholine) Ils permettent le relâchement musculaire total souvent nécessaire au déroulement d'une opération (notamment en chirurgie abdominale).

Le patient recevant ces médicaments est plongé dans un coma artificiel, et il sera par la suite intubé et ventilé artificiellement avec un mélange d'oxygène, d'agent anesthésique volatil et de protoxyde d'azote ou d'air.

  • Des bolus de curare ou de narcotique seront administrés au besoin par la suite.

Références

  1. Source: www.sfar.org
  2. Paul Benkimoun, « L'anesthésie générale est devenue plus sûre », Le Monde,‎ (lire en ligne, consulté le )