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La '''Corneille d'Hawaï''' ou '''Alala''' (''Corvus hawaiiensis'') est une [[espèce]] de [[passereau]] de la [[famille (biologie)|famille]] des [[Corvidae]], considérée comme étant éteinte à l'état sauvage. Elle est [[Endémisme|endémique]] de l'île d'Hawaï. Son nom autre nom, ''alala''<ref>Treaties and international agreements registered or filed and recorded with the Secretariat of the United Nations. VOLUME 979. 1983. http://publications.gc.ca/collections/collection_2014/ec/CW66-113-1-1990-fra.pdf</ref>{{,}}<ref>Le baguage des oiseaux en Amérique du Nord, volume 1 / [Publ. en collab. avec] : U.S. Fish and Wildlife Service, Mars 1991. http://publications.gc.ca/collections/collection_2014/ec/CW66-113-1-1990-fra.pdf</ref>, provient de l'[[hawaïen]].
La '''Corneille d'Hawaï''' ou '''Alala''' (''Corvus hawaiiensis'') est une [[espèce]] de [[passereau]] de la [[famille (biologie)|famille]] des [[Corvidae]], considérée comme étant éteinte à l'état sauvage. Il s'agit d'un oiseau [[Endémisme|endémique]] à l'île d'[[Hawaï (île)|Hawaï]].
== Étymologie ==
Le nom scientifique de l'espèce, hawaiiensis, est une référence à la zone de diffusion de ces oiseaux et leur nom commun n'est autre que la traduction du nom scientifique.
Le nom ''alala'' est aussi utilisé pour désigner l'animal<ref>Treaties and international agreements registered or filed and recorded with the Secretariat of the United Nations. VOLUME 979. 1983. http://publications.gc.ca/collections/collection_2014/ec/CW66-113-1-1990-fra.pdf</ref>{{,}}<ref>Le baguage des oiseaux en Amérique du Nord, volume 1 / [Publ. en collab. avec] : U.S. Fish and Wildlife Service, Mars 1991. http://publications.gc.ca/collections/collection_2014/ec/CW66-113-1-1990-fra.pdf</ref>, terme qui provient de la [[hawaïen|langue hawaïenne]].

== Histoire ==
Lorsque le capitaine [[James Cook]] est arrivé dans les îles en 1778, il fut averti de ne pas déranger l'alala dans le village de Ka’awaloa et ses tentatives d'acheter des specimens étaient sans succès<ref>Cook and King, 1784.</ref>. Après la domination de la culture occidentale, de nombreux alala auraient été abattus par des agriculteurs<ref>Munro, 1944a.</ref>. L'altération et la destruction généralisées de son habitat, la réduction des ressources alimentaires, l'introduction de maladies et de prédateurs ont finalement mené au déclin de l'espèce<ref>Giffin et al. 1987, Duckworth et al. 1992.</ref>.


== Description ==
== Description ==
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Dans l’ensemble, la corneille d’Hawaï rappelle beaucoup la taille et la couleur de la [[corneille noire]], mais il se distingue par son bec plus court et plus robuste, et ses ailes plus arrondies.
Dans l’ensemble, la corneille d’Hawaï rappelle beaucoup la taille et la couleur de la [[corneille noire]], mais il se distingue par son bec plus court et plus robuste, et ses ailes plus arrondies.


== Histoire ==
== Distribution et habitat ==
Avant que le corbeau d'Hawaï ne s'éteigne à l'état sauvage, l'espèce n'était présente que dans l'ouest et le sud-est d'Hawaï. Il habitait des forêts sèches et [[Habitat mésique|mésiques]] sur les pentes du [[Mauna Loa]] et de [[Hualālai]], à une altitude de 3 000 à 6 000 pieds. L'[[Metrosideros polymorpha|Ōhiʻa lehua]] (metrosideros polymorpha) et le [[Acacia koa|koa]] (acacia koa) étaient des arbres importants dans son habitat naturel. Une grande étendue de [[sous-bois]] était nécessaire pour protéger l'alala de la prédation par la [[buse d'Hawaï]] (ou ʻio). Les sites de nidification de l'alala reçevaient 600 à 2 500 millimètres (24–98 po) de précipitations annuelles<ref>U.S. Fish and Wildlife Service. 2003. Draft revised recovery plan for the ‘Alala (Corvus hawaiiensis). </ref> Les restes de fossiles indiquent que la corneille d'hawaï était relativement abondante sur toutes les îles principales d'Hawaï, parallèlement à quatre autres espèces de corvidés éteintes<ref>{{Lien web|langue=en-US|titre=Scientific Publications and Technical Reports|url=https://pacificrimconservation.org/publications/|site=Pacific Rim Conservation|consulté le=2019-05-26}}</ref>
Lorsque le capitaine [[James Cook]] est arrivé dans les îles en 1778, il fut averti de ne pas déranger l'alala dans le village de Ka’awaloa et ses tentatives d'acheter des specimens étaient sans succès<ref>Cook and King, 1784.</ref>. Après la domination de la culture occidentale, de nombreux alala auraient été abattus par des agriculteurs<ref>Munro, 1944a.</ref>. L'altération et la destruction généralisées de son habitat, la réduction des ressources alimentaires, l'introduction de maladies et de prédateurs ont finalement mené au déclin de l'espèce<ref>Giffin et al. 1987, Duckworth et al. 1992.</ref>.

En 2012, la population actuelle du corbeau d'Hawaï comptait 114 oiseaux, dont la grande majorité se trouvait dans les réserves hawaïennes<ref>{{Lien web|titre=Alala - The Hawaiian Crow {{!}} BirdNote|url=https://www.birdnote.org/show/alala-hawaiian-crow|site=www.birdnote.org|consulté le=2019-05-26}}</ref>.

== Mode de vie ==

=== Alimentation ===
La corneille d'Hawaï est un oiseau [[omnivore]], se nourrissant de tout ce qu'elle peut trouver en fonction de la disponibilité du moment, et capable de manger tout en cherchant de la nourriture.

Le régime alimentaire de ces oiseaux est principalement composé d'invertébrés et de larves découvertes en inspectant avec le bec le feuillage et les fissures de l'[[écorce]], la [[Bryophyta|mousse]] et les [[Lichen|lichens]] des arbres afin de déloger les proies possibles, d'une manière [[Niche écologique|écologique]] analogue à celle des [[Picidae|pics]]<ref>{{Article|prénom1=Howard F.|nom1=Sakai|prénom2=C. John|nom2=Ralph|prénom3=C. D.|nom3=Jenkins|titre=Foraging Ecology of the Hawaiian Crow, an Endangered Generalist|périodique=The Condor|volume=88|numéro=2|date=1986|issn=0010-5422|doi=10.2307/1368918|lire en ligne=https://www.jstor.org/stable/1368918|consulté le=2019-05-26|pages=211–219}}</ref>. Il se nourrit également de fruits (notamment à coques, qui sont fendus à l'aide du bec comme poinçon), de [[Baïes|baies]], de fleurs et de [[Nectar (botanique)|nectar]] : ​​ces derniers sont recherchés et consommés activement, en particulier entre février et en mai pour nourrir les oisillons<ref>{{Lien web|langue=en|titre=Hawaiian Crow (Corvus hawaiiensis)|url=http://www.hbw.com/species/hawaiian-crow-corvus-hawaiiensis|site=www.hbw.com|consulté le=2019-05-26}}</ref>. L'alala est, avec le [[Psittirostre palila|palila]], le seul oiseau hawaïen à se nourrir également de [[Pétale|pétales]] : ces oiseaux, quand ils étaient encore nombreux, jouaient un rôle essentiel dans la [[Dissémination des graines|dispersion des graines]] de certaines espèces d’arbres<ref>{{Article|prénom1=Susan|nom1=Culliney|prénom2=Liba|nom2=Pejchar|prénom3=Richard|nom3=Switzer|prénom4=Viviana|nom4=Ruiz-Gutierrez|titre=Seed dispersal by a captive corvid: the role of the 'Alalā (Corvus hawaiiensis) in shaping Hawai'i's plant communities|périodique=Ecological Applications|volume=22|numéro=6|date=2012|issn=1051-0761|lire en ligne=https://www.jstor.org/stable/41722888|consulté le=2019-05-26|pages=1718–1732}}</ref>.

Les autres aliments de cette espèce comprennent les œufs et les oisillons de petits [[Passeriformes|passereaux]], notamment d'oiseaux locaux tels que les endémiques [[Amakihi d'Hawaï]], le [[Iiwi rouge|ʻiʻiwi]] et l'[[Picchion cramoisi|apapane]] et ainsi la [[Buse d'Hawaï|buse d’Hawaï]], et d'oiseaux introduits [[Espèce envahissante|envahissants]] tels que le [[Léiothrix jaune|rossignol du Japon]] et le [[zostérops du Japon]]), par pillage des nids, activité surtout réalisée en avril-mai par les corneilles<ref>''Hawaiian Crow (Corvus hawaiiensis)'', su ''Handbook of the Birds of the World''. <small>URL consultato il 9 novembre 2018</small>. https://www.hbw.com/species/hawaiian-crow-corvus-hawaiiensis</ref>, lorsque les activités liées à la reproduction augmentent les besoins en énergie de ces oiseaux<ref>{{Article|prénom1=Howard F.|nom1=Sakai|prénom2=C. John|nom2=Ralph|prénom3=C. D.|nom3=Jenkins|titre=Foraging Ecology of the Hawaiian Crow, an Endangered Generalist|périodique=The Condor|volume=88|numéro=2|date=1986|issn=0010-5422|doi=10.2307/1368918|lire en ligne=https://www.jstor.org/stable/1368918|consulté le=2019-05-26|pages=211–219}}</ref>.

Semblable à beaucoup de [[Corvidae|corvidés]], la corneille d’Hawaï a également une [[intelligence]] marquée : avec le [[corbeau calédonien]] et le [[Géospize pique-bois|pinson pic]] des [[Îles Galápagos|Galápagos]], il est l’un des rares à utiliser des ustensiles (branches minces qu"il insère dans des fissures) pour la recherche de nourriture, faculté apparemment innée<ref>{{Article|prénom1=Christian|nom1=Rutz|prénom2=Barbara C.|nom2=Klump|prénom3=Lisa|nom3=Komarczyk|prénom4=Rosanna|nom4=Leighton|titre=Discovery of species-wide tool use in the Hawaiian crow|périodique=Nature|volume=537|numéro=7620|date=09 15, 2016|issn=1476-4687|pmid=27629645|doi=10.1038/nature19103|lire en ligne=https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/27629645|consulté le=2019-05-26|pages=403–407}}</ref>{{,}}<ref>Alicia Graef, Scientists Discover Tool Use in Brilliant Hawaiian Crow, 2016 http://www.care2.com/causes/scientists-discover-tool-use-in-brilliant-hawaiian-crow.html</ref>.


== Rôle environnemental ==
== Rôle environnemental ==
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== Statut et conservation ==
== Statut et conservation ==
La corneille d'Hawaï est l'espèce de [[Corvidae|corvidés]] la plus menacée au monde et la seule espèce restante à Hawaï. Comme d'autres espèces en danger critique d'extinction, il est illégal denuire à cette espèce, en vertu de la loi fédérale américaine. En 1994, la population avait diminué à 31 individus; 8 à 12 étaient sauvages et 19 en captivité<ref>{{Lien web|titre=Hawaiian crow photo - Corvus hawaiiensis - G117026 {{!}} ARKive|url=https://web.archive.org/web/20151120023237/http://www.arkive.org/hawaiian-crow/corvus-hawaiiensis/image-G117026.html|site=web.archive.org|date=2015-11-20|consulté le=2019-05-26}}</ref>. Les deux derniers individus sauvages connus du corbeau d'Hawaï ont disparu en 2002<ref>{{Lien web|titre=Conservation In Practice - Do No Harm|url=https://web.archive.org/web/20070927035408/http://www.conbio.org/cip/article74har.cfm|site=web.archive.org|date=2007-09-27|consulté le=2019-05-26}}</ref>, et l'espèce est maintenant classée comme étant éteinte à l'état sauvage par la [[Liste rouge de l'UICN]]<ref>{{Lien web|titre=The IUCN Red List of Threatened Species|url=https://www.iucnredlist.org/en|site=IUCN Red List of Threatened Species|consulté le=2019-05-26}}</ref>. Alors qu'il restait environ 115 individus (en août 2014)<ref>{{Chapitre|titre chapitre=The Breeding Season : Nesting Success|titre ouvrage=The Lapwing|éditeur=Poyser|isbn=9781472596901|lire en ligne=http://dx.doi.org/10.5040/9781472596901.ch-011|consulté le=2019-05-26}}</ref> dans deux installations d'élevage en captivité gérées par le [[zoo de San Diego]], les tentatives de réintroduction d'oiseaux élevés en captivité dans la nature ont été gênées par la [[prédation]] de la [[buse d'Hawaï]], elle-même répertoriée comme [[espèce quasi menacée]]. Les efforts de reproduction ont également été compliqués par le fort taux de consanguinité provoqué par le déclin de la population de la corneille<ref>{{Lien web|titre=Corvus hawaiiensis: BirdLife International|url=http://dx.doi.org/10.2305/iucn.uk.2013-2.rlts.t22706052a47991276.en|site=IUCN Red List of Threatened Species|date=2013-11-01|consulté le=2019-05-26}}</ref>.


=== Extinction ===
=== Extinction ===
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=== Cause ===
=== Cause ===
L’homme ayant modifié son habitat, la corneille d'Hawaï a dû se réfugier sur des étendues plus restreintes, peu propices à son développement. D'autre part, d’autres animaux qui ont été introduits par l'homme dans l’habitat naturel de la corneille se sont attaqués aux oiseaux, comme les [[chats]] sauvages, les [[mangoustes]] ou les [[Rat|rats]]. Ces prédateurs s’en prennent à la fois aux adultes, mais aussi et surtout aux poussins qui vivent au sol avant de pouvoir voler. Enfin, les [[Moustique|moustiques]] véhiculant des maladies ainsi que des virus extérieurs ont contaminé les individus les uns après les autres, ce qui a condamné peu à peu tous ceux vivant à l’état sauvage<ref>{{Lien web|langue=|titre=Les animaux éteints à l’état sauvage|url=http://mag.monchval.com/les-animaux-eteints-a-letat-sauvage/|site=|périodique=|date=2017|consulté le=}}</ref>.
L’homme ayant modifié son habitat, la corneille d'Hawaï a dû se réfugier sur des étendues plus restreintes, peu propices à son développement. D'autre part, d’autres animaux qui ont été introduits par l'homme dans l’habitat naturel de la corneille se sont attaqués aux oiseaux, comme les [[chats]] sauvages, les [[mangoustes]] ou les [[Rat|rats]] qui en ont fait leur proie. Ces prédateurs s’en prennent à la fois aux adultes, mais aussi et surtout aux poussins qui vivent au sol avant de pouvoir voler. Enfin, les [[Moustique|moustiques]] véhiculant des maladies ainsi que des virus extérieurs ont contaminé les individus les uns après les autres, ce qui a condamné peu à peu tous ceux vivant à l’état sauvage<ref>{{Lien web|langue=|titre=Les animaux éteints à l’état sauvage|url=http://mag.monchval.com/les-animaux-eteints-a-letat-sauvage/|site=|périodique=|date=2017|consulté le=}}</ref>. Les chats sauvages, qui s'en prenaient également à des poussins encore incapables de voler, ont aussi introduit le [[toxoplasma gondii]] chez les oiseaux.


=== Protection ===
=== Protection ===
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== Symbolique culturelle ==
== Symbolique culturelle ==
Les [[Hawaïens|autochtones hawaïens]] accordaient une grande importance à l'alala parmi les oiseaux. Ses plumes ont notamment été utilisées à des fins cérémonielles<ref>Brigham 1899, Munro 1944a.</ref>. Aujourd'hui encore, l'alala est considéré par certains comme une [[divinité du foyer]], dite « aumakua » dans la [[mythologie hawaïenne]]<ref>Brigham 1899, Munro 1944a.</ref>{{,}}<ref>{{Lien web|langue=en|titre=Hawaiian Crow - Introduction
Les [[Hawaïens|autochtones hawaïens]] accordaient une grande importance à l'alala parmi les oiseaux. Ses plumes ont notamment été utilisées à des fins cérémonielles<ref>Brigham 1899, Munro 1944a.</ref>. Aujourd'hui encore, l'alala est considéré par certains comme une [[divinité du foyer]], dite « aumakua » dans la [[mythologie hawaïenne]]<ref>Brigham 1899, Munro 1944a.</ref>{{,}}<ref>{{Lien web|langue=en|titre=Hawaiian Crow - Introduction
| Birds of North America Online|url=https://birdsna.org/Species-Account/bna/species/648/articles/introduction|site=birdsna.org|consulté le=2019-05-26}}</ref>. Il est dit qu'il conduit les âmes à leur dernier lieu de repos sur les falaises de Ka Lae, la pointe la plus méridionale de la grande île d'Hawaï. Les prêtres autochtones appellent l'alala durant les prières et les chants en raison de son appel distinctif<ref>Brigham 1899, Munro 1944a.</ref>.
| Birds of North America Online|url=https://birdsna.org/Species-Account/bna/species/648/articles/introduction|site=birdsna.org|consulté le=2019-05-26}}</ref>. Il est dit qu'il conduit les âmes à leur dernier lieu de repos sur les falaises de Ka Lae, la pointe la plus méridionale de la grande île d'Hawaï. En raison de son rôle [[psychopompe]], les prêtres autochtones l'invoquent en l'appelant par son nom (alala) durant les prières et les chants, en raison de son appel distinctif<ref>Brigham 1899, Munro 1944a.</ref>.


== Notes et références ==
== Notes et références ==

Version du 26 mai 2019 à 08:53

Corvus hawaiiensis

La Corneille d'Hawaï ou Alala (Corvus hawaiiensis) est une espèce de passereau de la famille des Corvidae, considérée comme étant éteinte à l'état sauvage. Il s'agit d'un oiseau endémique à l'île d'Hawaï.

Étymologie

Le nom scientifique de l'espèce, hawaiiensis, est une référence à la zone de diffusion de ces oiseaux et leur nom commun n'est autre que la traduction du nom scientifique.

Le nom alala est aussi utilisé pour désigner l'animal[1],[2], terme qui provient de la langue hawaïenne.

Histoire

Lorsque le capitaine James Cook est arrivé dans les îles en 1778, il fut averti de ne pas déranger l'alala dans le village de Ka’awaloa et ses tentatives d'acheter des specimens étaient sans succès[3]. Après la domination de la culture occidentale, de nombreux alala auraient été abattus par des agriculteurs[4]. L'altération et la destruction généralisées de son habitat, la réduction des ressources alimentaires, l'introduction de maladies et de prédateurs ont finalement mené au déclin de l'espèce[5].

Description

Illustration de Frohawk.

La corneille d'Hawaï a à peu près la taille de la corneille noire, et mesure entre 48 et 50 centimètres de long[6] et pèse 485-555 g[7]. Au même âge, les mâles sont presque trois fois plus grands et plus lourds que les femelles[8].

Son plumage est doux, noir-brunâtre et brillant avec de vagues reflets brun-violets sur le dos, la poitrine et la région ventrale : les plumes présentent des reflets métalliques violets lorsqu'elles sont directement exposées à la lumière. Ses yeux sont de couleur marron foncé. Ses ailes sont longues et arrondies, son bec est épais, conique et pas très long. Ses pattes, ses jambes et son bec sont noirs. Ces oiseaux sont robustes et massifs, avec une grosse tête par rapport à ce que l'on peut voir chez de nombreuses autres espèces de corneilles. Ses pattes sont fortes et queue est longue rectangulaire.

Dans l’ensemble, la corneille d’Hawaï rappelle beaucoup la taille et la couleur de la corneille noire, mais il se distingue par son bec plus court et plus robuste, et ses ailes plus arrondies.

Distribution et habitat

Avant que le corbeau d'Hawaï ne s'éteigne à l'état sauvage, l'espèce n'était présente que dans l'ouest et le sud-est d'Hawaï. Il habitait des forêts sèches et mésiques sur les pentes du Mauna Loa et de Hualālai, à une altitude de 3 000 à 6 000 pieds. L'Ōhiʻa lehua (metrosideros polymorpha) et le koa (acacia koa) étaient des arbres importants dans son habitat naturel. Une grande étendue de sous-bois était nécessaire pour protéger l'alala de la prédation par la buse d'Hawaï (ou ʻio). Les sites de nidification de l'alala reçevaient 600 à 2 500 millimètres (24–98 po) de précipitations annuelles[9] Les restes de fossiles indiquent que la corneille d'hawaï était relativement abondante sur toutes les îles principales d'Hawaï, parallèlement à quatre autres espèces de corvidés éteintes[10]

En 2012, la population actuelle du corbeau d'Hawaï comptait 114 oiseaux, dont la grande majorité se trouvait dans les réserves hawaïennes[11].

Mode de vie

Alimentation

La corneille d'Hawaï est un oiseau omnivore, se nourrissant de tout ce qu'elle peut trouver en fonction de la disponibilité du moment, et capable de manger tout en cherchant de la nourriture.

Le régime alimentaire de ces oiseaux est principalement composé d'invertébrés et de larves découvertes en inspectant avec le bec le feuillage et les fissures de l'écorce, la mousse et les lichens des arbres afin de déloger les proies possibles, d'une manière écologique analogue à celle des pics[12]. Il se nourrit également de fruits (notamment à coques, qui sont fendus à l'aide du bec comme poinçon), de baies, de fleurs et de nectar : ​​ces derniers sont recherchés et consommés activement, en particulier entre février et en mai pour nourrir les oisillons[13]. L'alala est, avec le palila, le seul oiseau hawaïen à se nourrir également de pétales : ces oiseaux, quand ils étaient encore nombreux, jouaient un rôle essentiel dans la dispersion des graines de certaines espèces d’arbres[14].

Les autres aliments de cette espèce comprennent les œufs et les oisillons de petits passereaux, notamment d'oiseaux locaux tels que les endémiques Amakihi d'Hawaï, le ʻiʻiwi et l'apapane et ainsi la buse d’Hawaï, et d'oiseaux introduits envahissants tels que le rossignol du Japon et le zostérops du Japon), par pillage des nids, activité surtout réalisée en avril-mai par les corneilles[15], lorsque les activités liées à la reproduction augmentent les besoins en énergie de ces oiseaux[16].

Semblable à beaucoup de corvidés, la corneille d’Hawaï a également une intelligence marquée : avec le corbeau calédonien et le pinson pic des Galápagos, il est l’un des rares à utiliser des ustensiles (branches minces qu"il insère dans des fissures) pour la recherche de nourriture, faculté apparemment innée[17],[18].

Rôle environnemental

Autrefois l'alala formait l'une des plus grandes populations d'oiseaux indigènes à Hawaï. Sa disparition à l'état sauvage a eu des effets en chaîne sur l'environnement, en particulier concernant la dissémination des graines de plantes indigènes. Bon nombre de ces plantes dépendent normalement de l'alala non seulement pour la dispersion des graines, mais également pour leur germination, car les graines passent dans le système digestif du corbeau. Sans dissémination des graines, les plantes ne disposent d'aucun moyen de faire croître une autre génération. L'alala jouait un rôle important dans le maintien de nombreuses espèces de plantes endémiques, qui pourraient devenir d'une grande rareté dans les écosystèmes d'Hawaï, en particulier pour les forêts sèches, qui se retrouvent démunies de leur principal moyen de dissémination des semences[19]. La corneille d'Hawaï est devenue un espèce indicatrice, la disparition de l'alala dénotant de graves problèmes environnementaux[20].

Statut et conservation

La corneille d'Hawaï est l'espèce de corvidés la plus menacée au monde et la seule espèce restante à Hawaï. Comme d'autres espèces en danger critique d'extinction, il est illégal denuire à cette espèce, en vertu de la loi fédérale américaine. En 1994, la population avait diminué à 31 individus; 8 à 12 étaient sauvages et 19 en captivité[21]. Les deux derniers individus sauvages connus du corbeau d'Hawaï ont disparu en 2002[22], et l'espèce est maintenant classée comme étant éteinte à l'état sauvage par la Liste rouge de l'UICN[23]. Alors qu'il restait environ 115 individus (en août 2014)[24] dans deux installations d'élevage en captivité gérées par le zoo de San Diego, les tentatives de réintroduction d'oiseaux élevés en captivité dans la nature ont été gênées par la prédation de la buse d'Hawaï, elle-même répertoriée comme espèce quasi menacée. Les efforts de reproduction ont également été compliqués par le fort taux de consanguinité provoqué par le déclin de la population de la corneille[25].

Extinction

L'espèce s'est éteinte à l'état sauvage en 2002[26], date à laquelle le couple des deux derniers individus connus à l'état sauvage ont été aperçus pour la dernière fois[27]. Le 14 juin 2002, le biologiste Jeff Burgett entreprit à son habitude la route de gravier située dans les forêts nuageuses du volcan Mauna Loa sur la grande île d'Hawaï, afin de surveiller la dernière paire de corneilles à l'état sauvage. Burgett a déclaré : « Ils étaient exactement au même endroit où ils avaient l'habitude d'être. La femelle dormait beaucoup et semblait très fatiguée. Le mâle la nourrissait de quelques fruits. Il a essayé de la pousser, mais elle semblait ne pas répondre. ». Burgett ne se doutait pas à ce moment-là les observations de ce jour-ci marqueraient la dernière observation de l'espèce dans la nature[27].

L'alala a disparu de l'état sauvage en 2002

Cause

L’homme ayant modifié son habitat, la corneille d'Hawaï a dû se réfugier sur des étendues plus restreintes, peu propices à son développement. D'autre part, d’autres animaux qui ont été introduits par l'homme dans l’habitat naturel de la corneille se sont attaqués aux oiseaux, comme les chats sauvages, les mangoustes ou les rats qui en ont fait leur proie. Ces prédateurs s’en prennent à la fois aux adultes, mais aussi et surtout aux poussins qui vivent au sol avant de pouvoir voler. Enfin, les moustiques véhiculant des maladies ainsi que des virus extérieurs ont contaminé les individus les uns après les autres, ce qui a condamné peu à peu tous ceux vivant à l’état sauvage[28]. Les chats sauvages, qui s'en prenaient également à des poussins encore incapables de voler, ont aussi introduit le toxoplasma gondii chez les oiseaux.

Protection

L'alala est déclaré espèce protégée par l'État d'Hawaï en 1931, et a été reconnu comme étant en danger de d'extinction par le gouvernement fédéral en 1967. Depuis les années 1990, des sites situés sur les flancs du Mauna Loa et d'autres aires naturelles sont réservés à la reconstruction de l'habitat et au rétablissement des oiseaux indigènes.

Réintroduction

En 1993 et en 1994, 17 œufs ont été retirés de nids sauvages et transportés dans des couveuses temporaires dans le district de Kona, à Hawaii. Des marionnettes imitant les corneilles adultes servaient à nourrir les poussins afin de minimiser les risques d'empreinte anormale ou de socialisation humaine. Trois des œufs récupérés étaient infertiles, 13 poussins ont éclos et 12 d'entre eux ont été élevés avec succès. Un œuf n'a pas éclos en raison d'une malposition embryonnaire et un autre poussin est décédé des suites d'une infection du sac vitellin[29].

En décembre 2016, cinq corneilles d'Hawaï mâles juvéniles ont été relâchées dans la réserve naturelle de Pu'u Maka'ala, sur la Grande île, marquant la première fois que des oiseaux étaient présents à l'état sauvage depuis 2002[30]. Cependant, moins d'une semaine après la réintroduction, trois des cinq oiseaux ont été retrouvés morts[31]. Deux des décès ont été causés par la buse d'Hawaï, l'autre étant mort de famine[32]. Les deux alala restants ont été retirés de la nature puis retournés en captivité.

Essais de reproduction en captivité

Dans le but de sauver l'alala, des efforts ont été déployés pour élever l'espèce en captivité. Une majorité de ces efforts se sont avérés hautement infructueux. Des études ont montré que chez cette espèce les femelles sont les principales constructrices des nid, et si le mâle reste trop longtemps autour du nid et tente de s'y asseoir, la femelle cesse ses efforts pour achever le nid ou, dans d'autres cas, développe une agressivité conflictuelle dans le couple. Ce comportement perturbateur peut inhiber la production d'œufs. En moyenne, la taille des couvées élevées en captivité est beaucoup plus faible que celle observée à l'état sauvage. Cela peut être attribué aux coquilles d'œufs minces résultant de la consanguinité[33] et aux complications comportementales des hommes. Élevés en isolement, certains mâles manifestent un comportement agressif envers leur partenaire et sont incapables de comprendre les gestes amicaux. Pour que la reproduction soit la meilleure possible, il est important que les cages imitent un comportement environnemental réel, et les mâles élevés socialement sont mis ensemble avec les femelles[34].

Projets de conservation

Le 16 avril 2009, l'United States Fish and Wildlife Service (USFWS) a annoncé un plan quinquennal prévoyant de dépenser plus de 14 millions de dollars pour empêcher l'extinction de l'alala grâce à la protection des habitats et à la gestion des menaces (gestion cynégétique) pesant sur l'espèce[35].

Symbolique culturelle

Les autochtones hawaïens accordaient une grande importance à l'alala parmi les oiseaux. Ses plumes ont notamment été utilisées à des fins cérémonielles[36]. Aujourd'hui encore, l'alala est considéré par certains comme une divinité du foyer, dite « aumakua » dans la mythologie hawaïenne[37],[38]. Il est dit qu'il conduit les âmes à leur dernier lieu de repos sur les falaises de Ka Lae, la pointe la plus méridionale de la grande île d'Hawaï. En raison de son rôle psychopompe, les prêtres autochtones l'invoquent en l'appelant par son nom (alala) durant les prières et les chants, en raison de son appel distinctif[39].

Notes et références

  1. Treaties and international agreements registered or filed and recorded with the Secretariat of the United Nations. VOLUME 979. 1983. http://publications.gc.ca/collections/collection_2014/ec/CW66-113-1-1990-fra.pdf
  2. Le baguage des oiseaux en Amérique du Nord, volume 1 / [Publ. en collab. avec] : U.S. Fish and Wildlife Service, Mars 1991. http://publications.gc.ca/collections/collection_2014/ec/CW66-113-1-1990-fra.pdf
  3. Cook and King, 1784.
  4. Munro, 1944a.
  5. Giffin et al. 1987, Duckworth et al. 1992.
  6. (en) Sakai Howard F., Ralph C.John et Jenkins C.D., « Foraging Ecology of the Hawaiian Crow, an Endangered Generalist », The Condor, vol. 88, no 2,‎ , p. 211–219 (DOI 10.2307/1368918, lire en ligne)
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  9. U.S. Fish and Wildlife Service. 2003. Draft revised recovery plan for the ‘Alala (Corvus hawaiiensis).
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  15. Hawaiian Crow (Corvus hawaiiensis), su Handbook of the Birds of the World. URL consultato il 9 novembre 2018. https://www.hbw.com/species/hawaiian-crow-corvus-hawaiiensis
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  18. Alicia Graef, Scientists Discover Tool Use in Brilliant Hawaiian Crow, 2016 http://www.care2.com/causes/scientists-discover-tool-use-in-brilliant-hawaiian-crow.html
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  27. a et b « Conservation In Practice - Do No Harm », sur web.archive.org, (consulté le )
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  32. Ashe, Ivy (March 18, 2017). "Experts work to improve alala's chances after release deaths". West Hawaii Today. Retrieved March 20, 2017.
  33. N.B. : la consanguinité est due à l'extinction de l'espèce, contraignant les animaux en captivité à s'accoupler entre eux.
  34. Harvey, Nancy C.; Farabaugh, Susan M.; Druker, Bill B. (2002-01-01). "Effects of early rearing experience on adult behavior and nesting in captive Hawaiian crows (Corvus hawaiiensis)". Zoo Biology. 21(1): 59–75.
  35. "$14M Effort Announced to Save Rare Hawaiian Bird". Science, Global edition. The New York Times. AP. April 17, 2009. Retrieved 2013-08-10. http://www.boston.com/news/science/articles/2009/04/18/14m_effort_announced_to_save_rare_hawaiian_bird/
  36. Brigham 1899, Munro 1944a.
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  38. (en) « Hawaiian Crow - Introduction », sur birdsna.org (consulté le )
  39. Brigham 1899, Munro 1944a.

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