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En [[1663]], Sir Boyle observa une lueur en réchauffant un [[diamant]] dans l'obscurité au contact de son corps.
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Vers [[1930]] des [[Physique des solides|physiciens du solide]] (ex : Urbach et Frisch) découvrent l’existence de « ''pièges à électrons'' » dans les [[cristaux]].
Vers [[1930]] des [[Physique des solides|physiciens du solide]] (ex : Urbach et Frisch) découvrent et étudient l’existence de « ''pièges à électrons'' » dans les [[cristaux]].
En effet, dans la nature, tout cristal est imparfait. Il contient des défauts apparus lors de sa formation ([[Lacune (cristallographie)|lacunes]], dislocations, intégration d'atomes étrangers). Quand ce cristal est irradié, les ionisations apparaissant au cœur du matériau, qui conserve alors une partie de l'énergie qu’il a reçue sous forme d’électrons piégés à un niveau d’énergie intermédiaire (dit {{Citation|''niveau discret''}}, faisant que cet électron ne peut contribuer ni à la [[conduction électrique]], ni aux [[Valence (chimie)|cortèges de valence des atomes]]. Plus la [[radioactivité]] subie par le cristal aura été importante, plus il contiendra d’[[électron]]s prisonniers de ses défauts. Chauffer un tel cristal libère ces électrons ; ils circulent alors librement dans le cristal jusqu’à se recombiner avec un autre type de défaut (mais de charge apparente positive, ce qui rétablir la neutralité électrique du matériau. Cette recombinaison peut s’accompagner de l’émission d’un [[photon]]. Le « défaut » qui permet cette recombinaison est dit ''centre F'' (pour « centre fluorescent » ou centre coloré ; typiquement il s’agit d’un point du cristal où manquait un [[anion]]).
En effet, dans la nature, tout cristal est imparfait. Il contient des défauts apparus lors de sa formation ([[Lacune (cristallographie)|lacunes]], dislocations, intégration d'atomes étrangers). Quand ce cristal est irradié, les ionisations apparaissant au cœur du matériau, qui conserve alors une partie de l'énergie qu’il a reçue sous forme d’électrons piégés à un niveau d’énergie intermédiaire (dit {{Citation|''niveau discret''}}, faisant que cet électron ne peut contribuer ni à la [[conductivité électrique]], ni aux [[Valence (chimie)|cortèges de valence des atomes]]. Plus la [[radioactivité]] subie par le cristal aura été importante, plus il contiendra d’[[électron]]s prisonniers de ses défauts. Chauffer un tel cristal libère ces électrons ; ils circulent alors librement dans le cristal jusqu’à se recombiner avec un autre type de défaut (mais de charge apparente positive, ce qui rétablir la neutralité électrique du matériau. Cette recombinaison peut s’accompagner de l’émission d’un [[photon]]. Le « défaut » qui permet cette recombinaison est dit ''centre F'' (pour « centre fluorescent » ou centre coloré ; typiquement il s’agit d’un point du cristal où manquait un [[anion]]).


Daniels voit dans la thermoluminescence un potentiel pour la datation de [[roches éruptives]] et de [[céramique]]s.
Daniels voit dans la thermoluminescence un potentiel pour la datation de [[roches éruptives]] et de [[céramique]]s.
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La thermoluminescence ne peut être utilisée concrètement à des fins de datation (ou d'authentification) qu’avec l’apparition des [[photomultiplicateur]]s ([[1950]]) qui permettent de mesurer de très faibles quantités de lumière.
La thermoluminescence ne peut être utilisée concrètement à des fins de datation (ou d'authentification) qu’avec l’apparition des [[photomultiplicateur]]s ([[1950]]) qui permettent de mesurer de très faibles quantités de lumière.


Dès les [[années 1950]] la méthode est au point pour certains minéraux ; en [[1953]] Farrington Daniels, Charles A. Boyd et Donald F. Saunders songent à utiliser la datation par luminescence en archéologie (a priori pour la première fois), pensant que la réponse à la thermoluminescence des éclats de poterie pourrait traduire la dernière incidence du chauffage<ref>{{Cite journal|author= Daniels, F., Boyd, C.A., & Saunders, D.F. |title=Thermoluminescence as a research tool |journal=Science|volume=117|issue = 3040|year=1953|pages=343–349|doi=10.1126/science.117.3040.343|url=http://science.sciencemag.org/content/117/3040/343|access-date=March 15, 2016}}</ref>.
En Europe, Aitken (Oxford), Mejdahl (Riso) et de Valladas (Gif-sur-Yvette) ont développé l'analyse par thermoluminescence dans leurs laboratoires respectifs.


Dans les années 1960 Grögler et al. conduisent des expériences sur la datation des céramiques<ref>{{Cite journal|author= Grögler, N., Houtermans, F.G., & Stauffer, H. |title= Über die datierung von keramik und ziegel durch thermolumineszenz. |journal= Helvetica Physica Acta|volume=33|year=1960|pages=595–596 |url= http://retro.seals.ch/digbib/view2?pid=hpa-001:1960:33::601 | access-date=February 16, 2016 }}</ref>.
La méthode est au point pour certains minéraux dès les [[années 1950]] et elle a depuis pris un essor important.

<br />Initialement réservée aux céramiques<ref>Bouvier A (2011). ''Production et utilisation des terres cuites architecturales au début du haut Moyen Âge: apport de la chronologie par luminescence'' (Doctoral dissertation, Bordeaux 3)|[http://www.theses.fr/2011BOR30078 résumé]</ref>, elle a acquis des applications dans la datation d’objets d’anciens et archéologiques, dans l’étude des [[paléoenvironnement]]s naturels (ex : [[Zerafshan|delta du Zerafshan]] (actuelle oasis de Boukhara en [[Ouzbékistan]] <ref>Zink A.J, Porto E, Fouache E & Rante R (2017). ''Paléocours du delta du Zerafshan (oasis de Boukhara, Ouzbékistan): premières datations par luminescence.' L'Anthropologie, 121(1), 46-54. </ref>) ou humains<ref>Hernandez M (2011). « ''Cadre chronologique des peuplements humains et des paléoenvironnements dans le Sud-Ouest de la France au Pléistocène moyen: apport des datations par luminescence stimulée optiquement'' » (Doctoral dissertation, Université de Bordeaux 3)|[ http://www.theses.fr/2011BOR30059 Notice/résumé]</ref>, mais aussi dans la détection de copies ou de faux ou de réemploi de matériaux anciens<ref> Guibert P & Urbanová P (2017). « ''[http://mefrm.revues.org/3633 La mesure du temps par luminescence : datation de réemplois dans la crypte de Saint-Seurin à Bordeaux ]'' ». Mélanges de l'École française de Rome-Moyen Âge (129-1). </ref>.
En [[1963]], Aitken et al. notent que les pièges de type TL dans la calcite pouvaient être blanchis par la lumière du soleil comme par la chaleur<ref name = "Aitken 1963">{{Cite journal|author= Aitken, M.J., Tite, M.S. & Reid, J. |title=Thermoluminescent dating: progress report |journal=Archaeometry|volume=6|year=1963|pages=65–75 |url=http://onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1111/j.1475-4754.1963.tb00581.x/abstract|access-date=February 16, 2016 | doi=10.1111/j.1475-4754.1963.tb00581.x}}</ref> et en 1965 Shelkoplyas et Morozov furent les premiers à utiliser la TL pour dater des sédiments non chauffés.<ref>{{Cite journal|author1=Shelkoplyas, V.N. |author2=Morozov, G.V. |lastauthoramp=yes |title=Some results of an investigation of Quaternary deposits by the thermoluminescence method |journal=Materials on the Quaternary Period of the Ukraine|volume=7th International Quaternary Association Congress, Kiev|year=1965|pages=83–90 }}</ref> . Ensuite dans les [[années 1970]] et au début des [[années 1980]] la datation par TL de sédiments d’origine terrestre et marine s’est développée<ref>{{Cite journal|author1=Wintle, A.G. |author2=Huntley, D.J. |lastauthoramp=yes |title=Thermoluminescence dating of sediments |journal=Quaternary Science Reviews|volume=1|year=1982|pages=31–53|url=http://www.sciencedirect.com/science/article/pii/027737918290018X | access-date=February 16, 2016 | doi= 10.1016/0277-3791(82)90018-X }}</ref>.

En Europe, Aitken (Oxford), Mejdahl (Riso) et de Valladas (Gif-sur-Yvette) développent peu à peu l'analyse par thermoluminescence dans leurs laboratoires respectifs.

Initialement réservée aux céramiques<ref>Bouvier A (2011). ''Production et utilisation des terres cuites architecturales au début du haut Moyen Âge: apport de la chronologie par luminescence'' (Doctoral dissertation, Bordeaux 3)|[http://www.theses.fr/2011BOR30078 résumé]</ref>, la méthode a acquis des applications dans la datation de toutes sortes d'objets d’anciens et archéologiques, mai aussi pour l'étude des [[paléoenvironnement]]s naturels (ex : [[Zerafshan|delta du Zerafshan]] (actuelle oasis de Boukhara en [[Ouzbékistan]] <ref>Zink A.J, Porto E, Fouache E & Rante R (2017). ''Paléocours du delta du Zerafshan (oasis de Boukhara, Ouzbékistan): premières datations par luminescence.' L'Anthropologie, 121(1), 46-54. </ref>) ou humains<ref>Hernandez M (2011). « ''Cadre chronologique des peuplements humains et des paléoenvironnements dans le Sud-Ouest de la France au Pléistocène moyen: apport des datations par luminescence stimulée optiquement'' » (Doctoral dissertation, Université de Bordeaux 3)|[ http://www.theses.fr/2011BOR30059 Notice/résumé]</ref>, mais aussi dans la détection de copies ou de faux ou de réemploi de matériaux anciens<ref> Guibert P & Urbanová P (2017). « ''[http://mefrm.revues.org/3633 La mesure du temps par luminescence : datation de réemplois dans la crypte de Saint-Seurin à Bordeaux ]'' ». Mélanges de l'École française de Rome-Moyen Âge (129-1). </ref>.
Elle s'est étendue à aux pierres brûlées (silex) aux sédiments chauffés.
Elle s'est étendue à aux pierres brûlées (silex) aux sédiments chauffés.


Depuis les [[années quatre-vingts]] elle permet de dater certains cratères de [[météorite]]<ref name=FicheLGMT> [http://geochrono.free.fr/fr/tech/thermo/principe/tlprin2.html Datation par luminescence ], fiche LGMT consultée le 04 oct 2017</ref>, des sédiments (sables éoliens ou fluvio-glaciaires, loess) ou d’anciens niveaux marins<ref>Lamothe M (2017). « ''La contribution de la luminescence à la datation des hauts niveaux marins du Pléistocène'' ». L'Anthropologie, 121(1), 19-24 | [http://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0003552117300146 résumé]</ref>.
Dans les [[années quatre-vingts]] de nouveaux progrès techniques permettent de dater certains cratères de [[météorite]]<ref name=FicheLGMT> [http://geochrono.free.fr/fr/tech/thermo/principe/tlprin2.html Datation par luminescence ], fiche LGMT consultée le 04 oct 2017</ref>, des sédiments (sables éoliens ou fluvio-glaciaires, loess) ou d’anciens niveaux marins<ref>Lamothe M (2017). « ''La contribution de la luminescence à la datation des hauts niveaux marins du Pléistocène'' ». L'Anthropologie, 121(1), 19-24 | [http://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0003552117300146 résumé]</ref>.
<br />La fluorescence optiquement stimulée ou OSL pour “Optically stimulated luminescence” ne s’est vraiment développée qu’à partir de [[1984]] avec les essays de David Huntley et son équipe<ref>{{Cite journal|author=Huntley, D. J., Godfrey-Smith, D. I., & Thewalt, M. L. W. |title=Optical dating of sediments |journal=Nature|volume=313|year=1985| pages=105–107 |url = http://www.nature.com/nature/journal/v313/n5998/abs/313105a0.html| access-date=February 16, 2016|doi=10.1038/313105a0}}</ref>.
<br />En [[1988]] Hütt et al. jetaient de leur côté les bases d’une datation par la luminescence stimulée par l’infrarouge (IRSL) des feldspaths de potassium<ref>{{Cite journal|author= Hütt, G., Jaek, I. & Tchonka, J. |title= Optical dating: K-feldspars optical response stimulation spectra |journal=Quaternary Science Reviews|volume=7|year=1988| pages=381–385 |url = http://www.sciencedirect.com/science/article/pii/0277379188900339|access-date=February 16, 2016|doi=10.1016/0277-3791(88)90033-9}}</ref>.

En [[1994]], les principes de base de la datation optique par [[thermoluminescence]] ont été élargis pour intégrer de nouveaux matériaux (surfaces de granit, basalte et grès) permettant la datation ou une confirmation de datation peintures préhistoriques<ref>Sauvet F (2013) [https://www.researchgate.net/profile/Georges_Sauvet2/publication/289376793_A_la_recherche_du_temps_perdu_methodes_de_datations_en_art_prehistorique_L'exemple_des_sites_aurignaciens/links/568c0e1f08ae197e42689524.pdf A la recherche du temps perdu]. Méthodes de datations en art préhistorique : l'exemple des sites aurignaciens.|Aurignacian Genius : art, technologie et société des premiers hommes modernes en Europe ; Actes du Symposium international, 8-10 avril 2013, NY University </ref>, de [[pétroglyphe]]s<ref> Huyge, D., Vandenberghe, D. A., De Dapper, M., Mees, F., Claes, W., & Darnell, J. C. (2012). [http://www.academia.edu/download/30458999/95829_Huyge_13_Huyge.pdf Premiers témoignages d’un art rupestre pléistocène en Afrique du Nord: confirmation de l’âge des pétroglyphes de Qurta (Egypte) par datation OSL de leur couverture sédimentaire]. The Signs of Which Times, 257-268.</ref>, de [[menhir]]s<ref> Cassen, S., Blain, S., Guibert, P., Querré, G., & Chaigneau, C. (2013). [http://archeosciences.revues.org/4057 ''Les pierres dressées de la forêt du Gâvre (Loire-Atlantique): nature et origine des matériaux, premiers éléments de chronologie (14C, OSL)'']. ArchéoSciences, (1), 173-188. </ref>, oude roches sculptées provenant de monuments ou d'objets anciens. [[Ioannis Liritzis]] est le premier à utiliser cette méthode pour dater des bâtiments anciens, variés<ref>{{Cite journal|author=Liritzis, I.|title=Surface Dating by Luminescence: An Overview|journal=Geochronometria|volume=38 | issue = 3|year=2011|pages=292–302|publisher=Silesian University of Technology, Poland|url=https://link.springer.com/article/10.2478/s13386-011-0032-7#page-1|doi=10.2478/s13386-011-0032-7}}</ref>{{,}}<ref>{{Cite journal|author=Liritzis, I., Polymeris, S.G., and Zacharias, N.|title=Surface Luminescence Dating of 'Dragon Houses' and Armena Gate at Styra (Euboea, Greece)|journal=Mediterranean Archaeology and Archaeometry|volume=10 | issue = 3|year=2010|pages=65–81}}</ref>{{,}}<ref>{{Cite journal|author=Liritzis, I.|title=Strofilas (Andros Island, Greece): new evidence for the cycladic final neolithic period through novel dating methods using luminescence and obsidian hydration|journal=Journal of Archaeological Science|volume=37|year=2010|pages=1367–1377|publisher=Elsevier|doi=10.1016/j.jas.2009.12.041}}</ref>.

Cette méthode a par exemple permis de dater des couches anciennes de [[Landes (Charente-maritime)|sable des Landes]] et d’ainsi préciser d’autres datations ou la [[palynologie]].<ref>Sitzia L, Bertran P & Leroyer C (2012) [https://f.hypotheses.org/wp-content/blogs.dir/2709/files/2015/06/livret_2012_part6.pdf ''Faciès et chronologie du Sable des Landes: la coupe de Cestas-Pot-aux-Pins. Quaternaire continental d’Aquitaine: un point sur les travaux récents''], Guidebook of the AFEQ-ASF, 122e135.</ref>


== Conditions de réussite ==
== Conditions de réussite ==

Version du 4 octobre 2017 à 20:23

La datation par luminescence stimulée optiquement(LSO ou OSL pour "Optical Stimulated Luminescence dating" pour les anglophones) désigne un groupe de techniques de datation mesurant le délai écoulé depuis le moment où certains minéraux ont pour la dernière fois été exposés au soleil ou à une chaleur importante. C’est l’une des techniques de datation par la thermoluminescence.
Elle permet aux géologues et archéologues et à des experts en Histoire de l'art de dater le moment ou ces minéraux ont été enfouis (ou transformé en ciment ou mortier « historique » par exemple dans le cas d’une construction ou d’une réparation ancienne[1],[2],[3],[4] (Il faut cependant que le mortier n’ait pas été exposé à de fortes températures (foyer, cheminée, mortier de four, ou exposition à un incendie)[5],Erreur de référence : Balise fermante </ref> manquante pour la balise <ref>. En cas de doute, on cherche à lever les incertitudes de mesures par intercomparaison et intercalibration et en croisant plusieurs méthodes de datation[6].

Historique

En 1663, Sir Boyle observa une lueur en réchauffant un diamant dans l'obscurité au contact de son corps.

Vers 1930 des physiciens du solide (ex : Urbach et Frisch) découvrent et étudient l’existence de « pièges à électrons » dans les cristaux. En effet, dans la nature, tout cristal est imparfait. Il contient des défauts apparus lors de sa formation (lacunes, dislocations, intégration d'atomes étrangers). Quand ce cristal est irradié, les ionisations apparaissant au cœur du matériau, qui conserve alors une partie de l'énergie qu’il a reçue sous forme d’électrons piégés à un niveau d’énergie intermédiaire (dit « niveau discret », faisant que cet électron ne peut contribuer ni à la conductivité électrique, ni aux cortèges de valence des atomes. Plus la radioactivité subie par le cristal aura été importante, plus il contiendra d’électrons prisonniers de ses défauts. Chauffer un tel cristal libère ces électrons ; ils circulent alors librement dans le cristal jusqu’à se recombiner avec un autre type de défaut (mais de charge apparente positive, ce qui rétablir la neutralité électrique du matériau. Cette recombinaison peut s’accompagner de l’émission d’un photon. Le « défaut » qui permet cette recombinaison est dit centre F (pour « centre fluorescent » ou centre coloré ; typiquement il s’agit d’un point du cristal où manquait un anion).

Daniels voit dans la thermoluminescence un potentiel pour la datation de roches éruptives et de céramiques.

Houtermans envisage d’appliquer la technique à des météorites pour étudier leur histoire thermique, mais des intérêts existent aussi en paléoclimatologie, géothermie, dosimétrie...

La thermoluminescence ne peut être utilisée concrètement à des fins de datation (ou d'authentification) qu’avec l’apparition des photomultiplicateurs (1950) qui permettent de mesurer de très faibles quantités de lumière.

Dès les années 1950 la méthode est au point pour certains minéraux ; en 1953 Farrington Daniels, Charles A. Boyd et Donald F. Saunders songent à utiliser la datation par luminescence en archéologie (a priori pour la première fois), pensant que la réponse à la thermoluminescence des éclats de poterie pourrait traduire la dernière incidence du chauffage[7].

Dans les années 1960 Grögler et al. conduisent des expériences sur la datation des céramiques[8].

En 1963, Aitken et al. notent que les pièges de type TL dans la calcite pouvaient être blanchis par la lumière du soleil comme par la chaleur[9] et en 1965 Shelkoplyas et Morozov furent les premiers à utiliser la TL pour dater des sédiments non chauffés.[10] . Ensuite dans les années 1970 et au début des années 1980 la datation par TL de sédiments d’origine terrestre et marine s’est développée[11].

En Europe, Aitken (Oxford), Mejdahl (Riso) et de Valladas (Gif-sur-Yvette) développent peu à peu l'analyse par thermoluminescence dans leurs laboratoires respectifs.

Initialement réservée aux céramiques[12], la méthode a acquis des applications dans la datation de toutes sortes d'objets d’anciens et archéologiques, mai aussi pour l'étude des paléoenvironnements naturels (ex : delta du Zerafshan (actuelle oasis de Boukhara en Ouzbékistan [13]) ou humains[14], mais aussi dans la détection de copies ou de faux ou de réemploi de matériaux anciens[15]. Elle s'est étendue à aux pierres brûlées (silex) aux sédiments chauffés.

Dans les années quatre-vingts de nouveaux progrès techniques permettent de dater certains cratères de météorite[16], des sédiments (sables éoliens ou fluvio-glaciaires, loess) ou d’anciens niveaux marins[17].
La fluorescence optiquement stimulée ou OSL pour “Optically stimulated luminescence” ne s’est vraiment développée qu’à partir de 1984 avec les essays de David Huntley et son équipe[18].
En 1988 Hütt et al. jetaient de leur côté les bases d’une datation par la luminescence stimulée par l’infrarouge (IRSL) des feldspaths de potassium[19].

En 1994, les principes de base de la datation optique par thermoluminescence ont été élargis pour intégrer de nouveaux matériaux (surfaces de granit, basalte et grès) permettant la datation ou une confirmation de datation peintures préhistoriques[20], de pétroglyphes[21], de menhirs[22], oude roches sculptées provenant de monuments ou d'objets anciens. Ioannis Liritzis est le premier à utiliser cette méthode pour dater des bâtiments anciens, variés[23],[24],[25].

Cette méthode a par exemple permis de dater des couches anciennes de sable des Landes et d’ainsi préciser d’autres datations ou la palynologie.[26]

Conditions de réussite

Chaque sédiments ou échantillon de sols contient des traces d’isotopes radioactifs d’éléments tels que le potassium 40, l’uranium, le thorium et/ou le rubidium.
Ces derniers sont caractérisés par une lente dégradation radioactive associée à l’émission de radiations ionisantes qui sera absorbée par des minéraux environnants courant dans le sédiment tels que le quartz, zircons et certains minéraux (feldspaths potassiques (notamment trouvés dans les roches volcaniques).
Chez ceux-ci la radiation induit une charge qui est emprisonnée dans le minéral, dans un « piège à électron » structurellement instable". La charge ainsi piégée s'accumule au cours du temps à un taux déterminé par la quantité de rayonnement de fond du lieu où l'échantillon a été enfoui.

Si ensuite ces grains minéraux sont stimulés par une lumière (bleue ou verte pour l’OSL, infrarouge pour IRSL) ou par une source de chaleur (pour TL), un signal de luminescence est émis chaque fois que l'énergie électronique instable stockée est libérée. L’intensité de ce signal varie selon sur la quantité de rayonnement absorbée durant l'inhumation et selon les propriétés spécifiques du minéral.

La plupart des méthodes de datation par luminescence reposent sur l'hypothèse que les grains minéraux utilisés étaient suffisamment « blanchis » au moment de l'événement daté (ainsi pour le sable/quartz, une courte exposition à la lumière du jour (1-100 secondes avant l'enfouissement) suffit pour « réinitialiser efficacement l'horloge de datation OSL »[27] Ceci est généralement (mais pas toujours) le cas des dépôts d’origine éolienne (ex dépôts de sable dunaire et de loess et des sédiments éoliens qui se déposent dans les eaux.

Précision de la datation

Les datation de quartz par OSL peuvent être déterminés typiquement pour des âges de 100 à 350 000 ans, avec des datations fiables si des méthodes et contrôles appropriées sont effectués[28].
Les techniques IRSL basés sur les Feldspaths peuvent potentiellement allonger la gamme de datation à un million d'années, car leur niveau de saturation de dose est plus élevé que pour le quartz, mais avec précaution, d’éventuels problèmes de « décoloration » anormale devant d’abord être abordés [27] ; une incertitude de 5-10% de la datation est à prendre en compte dans avec ce type de datation [29].

Notes et références

  1. Goedicke C (2003) Dating historical calcite mortar by blue OSL: results from known age samples, Radiation Measurements, 37, n°4-5, 409-16
  2. Goedicke C (2011) Dating Mortar by Optically Stimulated Luminescence : a Feasibility Study, Geochronometria, 38-1, 42-49.
  3. Jain M, Thomsen K.J, Botter-Jensen L & Murray A.S (2004). Thermal transfer and apparent-dose distributions in poorly bleached mortar samples: results from single grains and small aliquots of quartz, Radiation Measurements, 38, 101-109
  4. Gueli A.M, Stella G, Troja S.O, Burrafato G, Fontana D, Ristuccia G.M & Zuccarello A.R (2010), Historical buildings: luminescence dating of fine grains from bricks and mortar, Il Nuovo Cimento, 125B, 5-6, 719-729
  5. Jin Z.Y., Wu Y., Li G., Fan A., Cheng G & Yan L (2012). Luminescence determination of firing temperature of archaeological pure sand related to ancient Dian bronze casting, China. Quaternary Geochronology, 10, 387-393.
  6. Erreur de référence : Balise <ref> incorrecte : aucun texte n’a été fourni pour les références nommées Bechtel19997
  7. Daniels, F., Boyd, C.A., & Saunders, D.F., « Thermoluminescence as a research tool », Science, vol. 117, no 3040,‎ , p. 343–349 (DOI 10.1126/science.117.3040.343, lire en ligne, consulté le )
  8. Grögler, N., Houtermans, F.G., & Stauffer, H., « Über die datierung von keramik und ziegel durch thermolumineszenz. », Helvetica Physica Acta, vol. 33,‎ , p. 595–596 (lire en ligne, consulté le )
  9. Aitken, M.J., Tite, M.S. & Reid, J., « Thermoluminescent dating: progress report », Archaeometry, vol. 6,‎ , p. 65–75 (DOI 10.1111/j.1475-4754.1963.tb00581.x, lire en ligne, consulté le )
  10. Shelkoplyas, V.N. et Morozov, G.V., « Some results of an investigation of Quaternary deposits by the thermoluminescence method », Materials on the Quaternary Period of the Ukraine, vol. 7th International Quaternary Association Congress, Kiev,‎ , p. 83–90
  11. Wintle, A.G. et Huntley, D.J., « Thermoluminescence dating of sediments », Quaternary Science Reviews, vol. 1,‎ , p. 31–53 (DOI 10.1016/0277-3791(82)90018-X, lire en ligne, consulté le )
  12. Bouvier A (2011). Production et utilisation des terres cuites architecturales au début du haut Moyen Âge: apport de la chronologie par luminescence (Doctoral dissertation, Bordeaux 3)|résumé
  13. Zink A.J, Porto E, Fouache E & Rante R (2017). Paléocours du delta du Zerafshan (oasis de Boukhara, Ouzbékistan): premières datations par luminescence.' L'Anthropologie, 121(1), 46-54.
  14. Hernandez M (2011). « Cadre chronologique des peuplements humains et des paléoenvironnements dans le Sud-Ouest de la France au Pléistocène moyen: apport des datations par luminescence stimulée optiquement » (Doctoral dissertation, Université de Bordeaux 3)|[ http://www.theses.fr/2011BOR30059 Notice/résumé]
  15. Guibert P & Urbanová P (2017). « La mesure du temps par luminescence : datation de réemplois dans la crypte de Saint-Seurin à Bordeaux  ». Mélanges de l'École française de Rome-Moyen Âge (129-1).
  16. Datation par luminescence , fiche LGMT consultée le 04 oct 2017
  17. Lamothe M (2017). « La contribution de la luminescence à la datation des hauts niveaux marins du Pléistocène ». L'Anthropologie, 121(1), 19-24 | résumé
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