Viguerie (Catalogne)
La Catalogne est divisée en huit divisions territoriales, appelées vigueries (vegueries en catalan). Les vigueries sont subdivisées en comarques et en communes, à l'exception d'Aran, considérée comme une "entité territoriale unique"[1].
C'était une institution de la Principauté de Catalogne créée au XIIe siècle, remplacées par les corregiments lors des Décrets de Nueva Planta de 1716[2]. En Catalogne du Nord, les vigueries ont existé jusqu'en 1790, elles ont disparu avec la Révolution Française. Le Statut d'autonomie de la Catalogne de 2006 rétablit la viguerie comme division territoriale étant une personnalité juridique propre et ayant deux fonctions : le gouvernement intermunicipal de coopération locale et l'organisation des services de la Généralité de Catalogne[3].
Bien que les vigueries soient destinées à devenir la division administrative principale de la Catalogne et à remplacer complètement à l'avenir les quatre députations des provinces catalanes officielles dans le système espagnol, et à créer un conseil pour chaque viguerie[4], ces quatre provinces sont toujours utilisées administrativement au niveau de l'État[5],[6], car toute modification du système des provinces de l'État est anticonstitutionnelle[7].
Liste des vigueries
[modifier | modifier le code]Viguerie | Nom officiel | Chef-lieu[8],[9] | Population
(1er janv. 2022)[10] |
Date d'approbation[11] |
---|---|---|---|---|
Hautes-Pyrénées | Alt Pirineu | La Seu d'Urgell | 63 892 | Juillet 2006 |
Barcelone | Barcelona | Barcelone | 4 916 847 | Avril 2010 |
Camp de Tarragone | Camp de Tarragona | Tarragone | 536 453 | Janvier 2010 |
Centre | Catalunya Central | Manresa | 413 349 | Septembre 2008 |
Girona | Girona | Girona | 761 690 | Octobre 2010 |
Ponent | Ponent | Lleida | 365 289 | Juillet 2007 |
Penedès | Penedès | Vilanova i la Geltrú | 497 764 | Février 2017[12] |
Terres de l'Èbre | Terres de l'Ebre | Tortosa | 182 231 | Août 2010 |
Aran[13] | Aran | Vielha e Mijaran | 10 194 | Juillet 2006 |
Histoire
[modifier | modifier le code]La fonction du viguier provient de l'ancien vicari (du latin vicarius), fonctionnaire comtal du IXe au XIe siècle, de rang inférieur au vicomte et avec des fonctions de défense du territoire d'un château[14]. Avec le temps, les territoires se sont étendus et les droits ont été transférés au château. Les fonctions de délégation du comte, sont quant à elles passées au viguier. Celui-ci avait des responsabilités judiciaires et de représentation, il était aidé dans ses fonctions par des sous-viguiers.
Les vigueries étaient un outil de contrôle royal du territoire, qui devait régulièrement affronter le pouvoir de la Généralité et les pouvoirs municipaux. D'autres divisions territoriales existaient : l'ecclésiastique (évêchés), la juridiction (baronnies majestueuses et baillis royaux), et la fiscal (collectes). Mais la viguerie était la division basique et la plus emblématique. Il y a eu de nombreux changements, autant dans le nombre de vigueries comme dans leurs limites. Certaines d'entre elles avaient des dimensions régionales, comme celles de Gérone et Lérida. D'autres vigueries, ainsi que la plupart de sous-vigueries, étaient relativement petites, d'une échelle comarcale.
Vigueries historiques
[modifier | modifier le code]Au XIIe siècle existaient dix vigueries, qui se sont progressivement élargies[15]. À l'époque de Jacques II d'Aragon, les vigueries en vigueur étaient : Bages (ou Manresa), Barcelone, Berguedà (ou Berga), Besaltú, Camarasa, Camprodon, Cervera, Lérida, Montblanc, Osona (ou Vic), Pallars, Ral, Ribagorça, Ripoll (ou Ripollès), Tarragonne, Tàrrega, Tortosa et Vilafranca del Penedès.
En plus, dans le Royaume de Majorque (dépendant de Jacques II de Majorque), il y avait les vigueries du Roussillon, de Cerdagne (ou de Puigcerdà), de Vilafranca del Conflent (ou Conflent) et de Majorque.
Le Val d'Aran, le comté d'Urgell et le comté d'Empúries avaient un statut particulier et n'étaient pas des[16] .
Plus tard, les vigueries d'Urgell, de Balaguer et d'Agramunt sont apparues et la sous-viguerie de Lluçanès. Pendant la deuxième moitié du XVIIe siècle, après que la France a annexé les vigueries de Perpignan et de Vilafranca de Conflent, la Catalogne est divisée en 15 vigueries, 9 sous-vigueries et le district du Val d'Aran, avec un statut particulier.
L'article 30 du décret de Nova Planta du a remplacé les vigueries par des corregiments. Les 24 unités de vigueries et sous-vigueries se sont regroupées en 12 corregiments sans modification de frontières. D'un point de vue géographique, il y avait une continuité des vigueries avec un meilleur équilibre. Ces changements ont été imposés par le royaume de Castille. Dans l'usage, l'appellation de viguerie a été conservée comme synonyme de corregiment[16].
Des vigueries sont également apparues en Occitanie, la région des Fenouillèdes a été une viguerie dépendante de Carcassonne. Dans le duché d'Athènes y a eu trois vigueries : Athènes, Thèbes et Levàdia.
Reconstitution des vigueries
[modifier | modifier le code]Pendant la Seconde République, entre 1931 et 1939, la Generalitat republicana (Généralité républicaine en français) a reconstitué la Catalogne en la séparant en neuf régions appelées vegueries (vigueries en français), supprimées en 1939 par le gouvernement du dictateur Francisco Franco. Aujourd'hui, la Généralité de Catalogne reconstitue les vigueries, désormais au nombre de huit.
Généralité républicaine
[modifier | modifier le code]Le 1931, la Généralité a créé la Ponència de la Divisió Territorial (Commission de la Division Territoriale en français) formée, entre autres, par Ventura Gassol, Pau Vila i Dinarès et Antoni Rovira i Virgili, pour remplacer la division territoriale de 1833 par une nouvelle structure administrative. Après une large enquête municipale, le rapport de la commission a été publié en 1933. Il préconisait le découpage de la Catalogne en 38 comarques et 9 vigueries. Les évènements du six octobre ont bloqué son approbation qui ne sera effective qu'à partir du , avec le décret de Division Territoriale de Catalogne, en changeant le nom des vigueries par des régions numérotées de I à IX[17],[18].
Numéro | Subdivisions | Capitale |
---|---|---|
I | Baix Llobregat, Barcelonès, Maresme, Vallès Occidental et Vallès Oriental | Barcelone |
II | Alt Empordà, Baix Empordà, Garrotxa et Gironès (dont le Pla de l'Estany), et la Selva | Gérone |
III | Alt Camp, Alt Penedès, Baix Penedès, Garraf et Tarragonès | Tarragone |
IV | Baix Camp, Conca de Barberà, Priorat et Ribera d'Ebre | Reus |
V | Baix Ebre, Montsià et Terre Alta | Tortosa |
VI | Cerdanya, Osona et Ripollès | Vic |
VII | Anoia, Bages, Berguedà et Solsonès | Manresa |
VIII | Garrigues, Noguera, Urgell, Segarra et Segrià | Lérida |
IX | Alt Urgell, Pallars Jussà (dont le Haut Ribagorça), Pallars Sobirà et Val d'Aran | Tremp |
L'appellation de région fut remplacée par celle de viguerie le 1er décembre 1937, en pleine Guerre Civile espagnole, par le président de la Généralité Lluís Companys, sous la pression de Rovira i Virgili. Cette division a été supprimée en 1939 mais les géographes ont continué de l'utiliser par la suite.
Généralité actuelle
[modifier | modifier le code]Le Statut de 1979 n'a pas prévu la régionalisation de la Catalogne, mais chaque service de la Généralité a été organisé avec une structure régionale. En 1995, le Pla territorial general de Catalunya (Plan territorial général de Catalogne) délimitait six zones, puis en 2001, le statut de l'Alt Pirineu i Aran ont été modifiés comme nouvelle entité distincte de la région du Ponent[19],[20]. La Loi 23/2010 du a porté le nombre de domaines à huit avec la création de l'ambit functional du Penedès. Fin 2017, la loi a été modifiée pour créer une huitième viguerie, laquelle comprend le Haut Penedès, le Bas Penedès, le Garraf et partie de l'Anoia (toute moins huit communes, lesquels suivent attribués au domaine des Comarques Centrales)[21],[22].
Rapport Roca
[modifier | modifier le code]Le Parlement de Catalogne a confié le redécoupage territorial à une commission d'experts, composée de quatre géographes et présidée par Miquel Roca. En , cette commission a rendu son verdict, connu sous le nom de Rapport Roca. Les régions sont renommées vigueries, pour éviter la confusion avec les eurorégions. En plus de quelques modifications dans la carte municipale et comarcale, le rapport prône la création de six à huit nouvelles comarques, de six vigueries et d'une sous-viguerie : Barcelone, Camp de Tarragona, Catalunya Central, Girona, Ponent et Terres de l'Elbre.
Llei de l'Organització Veguerial de Catalunya
[modifier | modifier le code]Le Statut de 2006 a rétabli les vigueries en tant que divisions territoriales avec une personnalité juridique propre. Selon l'avant-projet de Llei de l'Organització Veguerial de Catalunya de , initialement, il devait y avoir sept vigueries : Alt Pirineu i Aran, Barcelone, Camp de Tarragona, Gérone, Central, Lérida et Terres de l'Ebre.
Les sièges institutionnels des vigueries sont à Barcelone, Tarragone, Gérone, Lérida, Tortosa. Les sièges des vigueries Central et d'Alt Pirineu i Aran ne sont pas connus[23].
Finalement, la Généralité a accepté que le Val d'Aran reste en dehors de cette organisation territoriale, même s'il était prévu qu'elle fasse provisoirement partie de la viguerie pyrénéenne et que son conseil délègue ses fonctions au Conseil Général d'Aran[24].
Revendications
[modifier | modifier le code]Le Conseil Général d'Aran a réclamé à plusieurs reprises que la comarque n'appartienne à aucune viguerie. Le Val d'Aran s'est constitué en Régime Spécial d'Aran depuis la promulgation de la loi 1/2015.
La création de nouvelles vigueries sont réclamées :
- Viguerie de l'Alt Ter, avec les comarques d'Osona et le Ripollès[25].
- Viguerie du Penedès, avec les comarques de l'Alt Penedès, l'Anoia, le Baix Penedès et le Garraf, créée comme Domaine fonctionnel territorial par la loi 23/2010 en 2010 (à exception de quelques communes d'Anoia) puis comme viguerie en 2017[26],[27].
Notes et références
[modifier | modifier le code]- (ca) ACN, « La Val d'Aran celebra 30 anys d'autogovern - 17 juny 2021 », sur El Punt Avui, (consulté le )
- « decrets de Nova Planta | enciclopedia.cat », sur www.enciclopedia.cat (consulté le )
- « vegueria | enciclopedia.cat », sur www.enciclopedia.cat (consulté le )
- (ca) òscar palau, « Traient l'entrellat a les vegueries - 12 març 2010 », sur El Punt Avui (consulté le )
- (ca) femVallès, « La Catalunya de 9 vegueries (en 4 províncies) - femVallès », (consulté le )
- « Se impide crear veguerías alterando los límites provinciales | Barcelona | elmundo.es », sur www.elmundo.es (consulté le )
- (ca) 324cat, « El Constitucional només admet les vegueries si es conserven les províncies », sur CCMA, (consulté le )
- « Document »
- Conformément à la loi sur les vigueries, les régions des Hautes Pyrénées, de la Catalogne centrale et du Penedès ont les villes les plus peuplées comme capitales de facto jusqu'à ce qu'une loi les détermine.
- « Idescat. Anuari estadístic de Catalunya. Població a 1 de gener. Comarques i Aran, àmbits i províncies. », sur www.idescat.cat (consulté le )
- (es) Marga Torre, « Pla territorial de l'àmbit metropolità de Barcelona: naturalesa, gènesi i contingut. », Butlletí d'innovació i recerca, vol. Notícies, (lire en ligne)
- « Catalunya ja té vuit vegueries: El Parlament aprova la creació de la vegueria del Penedès »,
- Le Val d'Aran est une "entité territoriale unique" et non pas une comarque, mais il est parfois inclus dans la région des Hautes-Pyrénées (Alt Pirineu) sous le nom de ''Hautes-Pyrénées-et-Aran'' (''Alt Pirineu i Aran'').
- (ca) « Viguerie (Catalogne) », Gran Enciclopèdia Catalana, sur enciclopedia.cat, Barcelone, Edicions 62.
- (ca) « Viguerie (Catalogne) », Gran Enciclopèdia Catalana, sur enciclopedia.cat, Barcelone, Edicions 62.
- Pau Vila, La divisió territorial de Catalunya, Barcelone, Seix Barral, (ISBN 84-322-9508-6) Facsímil de l'edició Barcelona: Conselleria d'Economia de la Generalitat de Catalunya, 1937.
- Generalitat de Catalunya, « Decret del Conseller d'Economia i Serveis Públics, de 27 d'agost de 1936 », Diari Oficial de la Generalitat de Catalunya, Barcelona, vol. any IV vol. III, no núm. 253, , p. 1379-1380 (lire en ligne [PDF], consulté le )
- Cartell editat per la Generalitat, del 1936.
- Pla Territorial de Catalunya, Llei 1/1995, de 16 de març.
- Aprovació del Pla territorial parcial de l'Alt Pirineu i Aran
- Departament de la Presidència, « Llei 23/2010, del 22 de juliol, de modificació de la Llei 1/1995 i de la Llei 23/1983 per a fixar l'àmbit de planificació territorial del Penedès », Diari Oficial de la Generalitat de Catalunya, no núm. 5681, (lire en ligne, consulté le )
- « Catalunya ja té vuit vegueries: el Parlament aprova la creació de la vegueria del Penedès », Ara.cat
- « Dia històric per l'Alt Pirineu amb l'aprovació de la Llei de vegueries », Viure als Pirineus (consulté le )
- « El tripartit accepta que la Vall d'Aran quedi fora de la llei de vegueries », El Periódico de Catalunya (consulté le )
- Manifest per la vegueria de l'Alt Ter
- Campanya per la vegueria del Penedès
- « Llei 23/2010, del 22 de juliol, de modificació de la Llei 1/1995 i de la Llei 23/1983 per a fixar l'àmbit de planificació territorial del Penedès | DEPARTAMENT DE LA PRESIDÈNCIA | Legislació » (consulté le )
Voir aussi
[modifier | modifier le code]Articles connexes
[modifier | modifier le code]Liens externes
[modifier | modifier le code]- Les vigueries de Catalogne
- Cartes des Fonds numériques de la Cartothèque de Catalogne, avec les vigueries de 1359 et de 1708