Renaissance ukrainienne

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En vert clair, les États ukrainiens historiques : principauté de Galicie-Volhynie et hetmanat Zaporogue. En vert foncé : les régions traditionnelles ukrainiennes.

La renaissance ukrainienne (en ukrainien : Українське відродження), dans une perspective historique « renaissance culturellle ukrainienne » (en ukrainien : Українське культурне відродження) et dans une perspective nationaliste « renaissance nationale ukrainienne » (en ukrainien : Українське національне відродження) est une période de l’histoire du peuple ukrainien et de la langue ukrainienne allant du XVIIIe au XXIe siècle, et qui commence à une époque où le territoire de l’Ukraine moderne était divisé entre l’Empire autrichien (où le mouvement ukrainien faisait partie de l’austroslavisme), le Royaume de Hongrie (où le mouvement ukrainien faisait partie du panslavisme) et l’Empire russe après les partitions de la Pologne.

Descriptif[modifier | modifier le code]

Territoires ukrainophones concernés par la Renaissance ukrainienne.

La population ukrainienne a longtemps vécu dans l’ombre d’états plus puissants : d’abord la Lituanie et la Pologne puis les empires autrichien et surtout russe. Une partie des populations ukrainiennes s’est durant cette période acculturée, surtout dans l’est du pays, mais une autre partie, surtout dans l’ouest du pays, a conservé son identité (alors appelée « ruthène », « rusyne » ou encore « petit-russienne ») et la mémoire historique des États ukrainiens qui ont existé antérieurement : la principauté de Galicie-Volhynie du XIe au XIIIe siècle et le hetmanat Zaporogue du XVIe au XVIIIe siècle. Après une première tentative d'indépendance entre 1918 et 1920 l’Ukraine a acquis plus durablement son indépendance en 1991 pendant la dislocation de l'Union soviétique, mais cette indépendance est à nouveau menacée au XXIe siècle. Cette histoire est ponctuée d’épisodes magnifiés par la culture populaire et chantés par les kobzars, comme les épopées des Cosaques zaporogues en lutte contre l'Empire ottoman et contre les raids esclavagistes du Khanat de Crimée, ou encore comme les soulèvements de Haïdamaks de l’ancien hetmanat cosaque[1].

Tandis que l’Empire russe franchit le Dniepr et s’étend vers l’Europe centrale et la mer Noire, la littérature ukrainienne contemporaine commence à se développer. Plusieurs historiens ukrainiens tels que Volodymyr Dorochenko et Mykhaïlo Hrouchevsky divisent cette période en trois étapes :

  1. de la fin du XVIIIe siècle aux années 1840 ;
  2. des années 1840 aux années 1850 ;
  3. la seconde moitié du XIXe siècle.

À l’époque soviétique, cette période d'émergence ukrainienne était présentée comme une résistance populaire du prolétariat local, tournée contre l’impérialisme et l’exploitation impitoyable des souverains et des aristocrates polonais, des Kaisers autrichiens et des aristocrates germano-hongrois, des Tsars et des boyards russes, en fraternité avec les « peuples-frères » russe et biélorusse également opprimés[2]. Dans les manuels d’histoire ukrainiens du XXIe siècle postérieures à 2014, cette période est présentée comme le triomphe du nationalisme ukrainien face au pouvoir central russe.

Comme chez d’autres peuples en Europe, le mouvement de la renaissance ukrainienne émerge à partir du début du XIXe siècle. Vienne et Budapest craignent alors qu’il ne soit un vecteur de l’influence russe, tandis que Saint-Pétersbourg estime que ce mouvement est manipulé par les Polonais[3]. Des cercles nationaux (hromady) sont dissous, leurs membres pourchassés par l’Okhrana, et il est prohibé d’imprimer en ukrainien[3]. Les gouvernants russes considèrent les Ukrainiens comme des « Petits-Russes » à assimiler[3].

La culture ukrainienne connaît une renaissance dans les régions de la Ruthénie, de la Volhynie, de la Podolie et autour de Zaporijjia. C’est alors qu’apparaît de plus en plus le terme d’« Ukraine » — Oukraïna signifiant « la marche » —, terme employé surtout dans la langue ecclésiastique depuis le XVIe siècle, et relancé par les intellectuels à la fin du XIXe siècle. Officiellement, les pouvoirs impériaux autrichien et russe n'utilisent pas le terme d'« Ukraine ». Comme partout dans l'Empire russe, les territoires de l’actuelle Ukraine sont divisés en « gouvernements » : seul le grand-duché de Finlande échappe à cette division et forme un territoire unitaire. L’actuelle Ukraine est donc partagée, en Russie, entre les gouvernements de Kiev, Tchernigov, Ekaterinoslav, Volhynie, Podolie, Kherson, Tauride, Poltavie et Kharkov, regroupés en deux entités : Petite Russie et Nouvelle Russie. D’autres territoires aujourd’hui ukrainiens étaient à l’époque des parties de la Bessarabie moldave ou du district des Cosaques du Don. En 1876, l'Empire russe interdit la langue ukrainienne dans les écoles, et la limite dans les journaux et la littérature. Cette limitation provoque en retour un manifeste idéologique qui permet de comprendre les revendications linguistiques actuelles. Les différentes formes d’ukrainien ne sont plus parlées que par une frange de la paysannerie et certains cercles cultivés de régionalistes : instituteurs, universitaires, ecclésiastiques (surtout uniates[4], car les orthodoxes dépendent alors du Patriarcat de Moscou[5]).

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Références[modifier | modifier le code]

  1. [Anon.]. "2. The Ukrainian National Revival: A New Analytical Framework". The Roots of Ukrainian Nationalism, Toronto: University of Toronto Press, 2016, p. 38-54. https://doi.org/10.3138/9781442682252-005
  2. Représentations du monde dans l’espace postsoviétique, 2011, Terra hostica : la Russie dans les manuels scolaires d’histoire ukrainiens, Andriy Portnov, p. 39-61, https://doi.org/10.4000/anatoli.489.
  3. a b et c Alexandra Goujon, « L’Ukraine cherche à s’émanciper d’une tutelle de plusieurs siècles » Accès limité, sur Le Monde, (consulté le )
  4. Didier Rance, Catholiques d'Ukraine : Un pays, une Église, un message, Éditions Artège, Paris, 2022 (ISBN 979-10-336-1316-9).
  5. Bernard Dupuis, L'Église orthodoxe (§ Destin de l'Église russe) in Encyclopédie des religions, Universalis, Paris, 2002, p. 113