Antonello de Messine

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Antonello de Messine
Portrait d'homme (faux autoportrait), 1473, 35,5 × 25,5 cm, huile sur bois, Londres, National Gallery
Naissance
Décès
Nom de naissance
Antonello di Giovanni di Antonio
Nationalité
Activité
Maître
Élève
Mouvement
Influencé par
Père
Giovanni Di Michele Degli Antoni (d)Voir et modifier les données sur Wikidata
Enfants
Jacobello d'Antonio
Paola da Messina (d)Voir et modifier les données sur Wikidata
Œuvres principales

Antonello de Messine, né vers 1430 à Messine en Italie où il meurt en février 1479, est un peintre italien de la Renaissance.

Biographie

Formation et premières années

Antonello de Messine est le fils de Giovanni de Antonio, magister mazonus ("maitre maçon") et de Garita (Margherita). Une lettre de l'humaniste napolitain Pietro Summonte au gentilhomme vénitien Marcantonio Michiel présente Antonello comme un élève du peintre Antonio Colantonio, établi à Naples : « Celui-ci [Colantonio] n’arriva pas, faute de temps, à la perfection du dessin des choses antiques, comme y arriva son disciple Antonello de Messine » (Costui [Colantonio] non arrivò, per colpa delli tempi, alla perfezione del disegno delle cose antique, sì come ci arrivò lo suo discepolo Antonello da Messina). Cet apprentissage se situe probablement entre 1445 et 1455. Naples est alors un point de convergence artistique (et parfois politique) des grands maîtres flamands et catalans.

L'artiste

En 1457, Antonello travaille pour son propre compte, puisqu’en mars il reçoit la commande d’un étendard pour la confrérie de San Michele dei Gerbini de Reggio de Calabre. En 1460, il est de retour à Messine.

La Vierge de l’Annonciation du Museo Civico de Côme, la Madone Forti (Venise, collection particulière) et la Madone Salting (Londres, National Gallery) sont les premières œuvres communément attribuées au jeune Antonello. Dès ses premières œuvres, il affirme une personnalité suffisamment forte pour assimiler avec profit les apports extérieurs les plus variés. Relativement peu marqué par la tradition locale, il fera toujours preuve, en fait, de la plus grande originalité. La peinture flamande, en particulier celle de Jan van Eyck et celle de Petrus Christus, a une forte influence sur lui, notamment sur sa pratique du portrait, dont il est le plus grand représentant en Italie de son vivant.

Entre 1474 et 1476, il se rend à Venise : ce séjour est considéré comme le sommet de sa carrière et revêt une grande importance pour l' histoire de la peinture vénitienne. Il y peint notamment le Retable de San Cassiano, aujourd'hui fragmentaire, considéré comme le prototype de la Sacra conversazione à la vénitienne.

A Venise, Antonello se montre original avec le Saint Jérôme dans son cabinet de travail (1475, Londres, National Gallery). Il a assimilé les principes de la perspective florentine et la minutie et le sens du détail flamand. La pureté et la luminosité de son œuvre, ainsi que la fermeté de dessin lui valent un prestige considérable.

Le Condottiere (1474-1476, Paris, musée du Louvre) reste le portrait le plus énergique, le plus volontaire, montrant toute la détermination du portraituré. L'équilibre, l'ampleur, la rigueur, et la plénitude sont servis par des chromatismes qui devancent les trouvailles d'un Giorgione. D'autres portraits d'Antonello célèbres pour leur forte caractérisation psychologique sont celui dit du marin, conservé à Cefalù (au Museo Mandralisca), et le portrait Trivulzio, à la Galerie Sabauda de Turin, où l'ironie et la malice de l'expression des portraiturés donne vie aux modèles.

La sobriété et la modernité de la composition de La Vierge de l'Annonciation, peinte fort probablement circa 1475, en font une œuvre majeure de la Renaissance italienne (palais Abatellis, Palerme), toute en retenue et en sobriété.

Rentré à Messine, Antonello livre son testament au début de l'année 1479. Son fils, Jacobello, reprendra son atelier et honorera ses contrats.

Œuvres

Le Condottière (1474-1476), musée du Louvre, Paris.
Ecce Homo (1475 ca), Piacenza, Galleria di Collegio Alberoni.
Polyptyque de saint Grégoire, Messine, Museo Regionale.
Annonciation (1474-1475 ca), Syracuse, Galleria regionale di Palazzo Bellomo.
Portrait de jeune homme (1478), Berlin, Gemäldegalerie.

Chronologie probable (dates incertaines) :

Avant 1470

  • Vierge de l'Annonciation (1452 ca), huile sur tableau, 57 cm × 39 cm, Côme, Pinacoteca Civica.
  • Vierge lisant (1460-1462 ca), tempera et huile sur tableau, 38,7 cm × 26 cm, Venise, collection Mino Forti.
  • Vierge lisant (1461 ca), huile sur tableau, 43 cm × 34,5 cm, Baltimore, Walters Art Museum.
  • Saint Jérôme pénitent (1460-1465 ca), technique mixte sur noyer, 40,2 cm × 30,2 cm, Reggio de Calabre, Museo Nazionale della Magna Grecia.
  • La Visite des trois anges à Abraham (1460-1465 ca), technique mixte sur noyer, 21,4 cm × 29,3 cm, Reggio de Calabre, Museo Nazionale della Magna Grecia.
  • La Crucifixion (1463-1465 ca), tempera sur bois (fruitier, peut-être pêcher), 39,4 cm × 23,1 cm, Sibiu, Bruckenthal Museum, Roumanie.
  • Christ de pitié (recto) ; La Vierge et l'Enfant bénissant avec un franciscain en adoration (verso), (1465-1470 ca), tempera grasse sur bois, 15 cm × 10,7 cm, Messine, Museo Regionale.
  • Portrait d'homme (1465-1470 ca), tempera grasse sur noyer, 27 cm × 20 cm, Pavie, Pinacoteca Malaspina.

Années 1470-1475

  • Ecce Homo (recto) ; Saint Jérôme ermite (verso) (1470 ca), tempera grasse sur bois, 19,5 × 14,3 cm, New York, collection privée.
  • Ecce Homo (1470 ca), huile sur peuplier (?), 40 cm × 33 cm, Gênes, Galleria Nazionale di Palazzo Spinola.
  • La Vierge à l'Enfant (Vierge Salting) (1470 ca), huile sur bois, 43 cm × 34,5 cm, Londres, National Gallery.
  • Portrait d'un marin inconnu (1470-1472 ca), huile sur noyer, 30 cm × 25 cm, Cefalù, Museo della Fondazione Mandralisca.
  • Portrait de jeune homme (1472-1473 ca), huile sur bois, 27 cm × 20 cm, New-York, Metropolitan Museum of Art.
  • Saint Augustin (1472-1473 ca), tempera grasse sur bois transférée sur toile, 46,5 cm × 35,5 cm, Palerme, Galleria Regionale della Sicilia di Palazzo Abatellis.
  • Saint Jérôme (1472-1473 ca), tempera grasse sur bois transférée sur toile, 39 cm × 31 cm, Palerme, Galleria Regionale della Sicilia di Palazzo Abatellis.
  • Saint-Grégoire le Grand (1472-1473 ca), tempera grasse sur bois transférée sur toile, 46,5 cm × 35,5 cm, Palerme, Galleria Regionale della Sicilia di Palazzo Abatellis.
  • La Vierge à l'Enfant et deux anges portant une couronne (1472-1475 ca), huile sur peuplier, 114,8 cm × 54,5 cm, Florence, Galerie des Offices.
  • Saint Jean l'évangéliste (1472-1475 ca), huile sur peuplier, 114,3 cm × 38,5 cm, Florence, Galerie des Offices.
  • Saint-Benoît (1472-1475 ca), huile sur peuplier, 105 cm × 43,5 cm, Milan, Castello Sforzesco, Civiche Raccolte d'Arte.
  • La Crucifixion avec la Vierge de douleur et saint Jean (1473 ca), tempera et huile (?) sur bois, 41,9 cm × 25,4 cm, Londres, National Gallery.
  • Polyptyque de saint Grégoire (1473 ca), tempera grasse sur bois, probablement de cerisier, Messine, Museo Regionale.
  • Portrait de jeune homme (1473-1474 ca), huile sur peuplier, 35,5 cm × 25,5 cm, Londres, National Gallery.
  • Portrait de jeune homme (1474 ca), huile sur noyer, 31,5 cm × 26,7 cm, Philadelphie, Philadelphia Museum of Art.
  • Ecce Homo (1474, huile sur bois, 36,7 cm × 28,8 cm, autrefois au château de Radoszewnica, collection Ostrowski.
  • Portrait de jeune homme (1474 ca), huile sur peuplier, 32 cm × 26 cm, Berlin, Staatliche Museen, Gemäldegalerie.
  • Portrait d'homme (1474 ca), huile sur bois, 31,5 cm × 26 cm, Vienne, collection Schwarzenberg.
  • Annonciation (1474-1475 ca), huile sur panneau de noyer, 180 cm × 180 cm, Syracuse, Galleria Regionale di Palazzo Bellomo.
  • Saint Jérôme dans son cabinet de travail (1474-1475 ca), huile sur tilleul, 45,7 cm × 36,2 cm, Londres, National Gallery.

Après 1475

  • Ecce Homo (1475 ca), tempera et huile sur panneau de peuplier, 42,5 cm × 30,5 cm, New-York, Metropolitan Museum of Art.
  • La Crucifixion (Calvaire) (1475 ca), huile sur bois, 52,5 cm × 42,5 cm, Anvers, Koninklijk Museum voor Schone Kunsten[1].
  • Christ bénissant (1475 ca), huile sur bois, 38,7 cm × 29,8 cm, Londres, National Gallery.
  • Ecce Homo (1475 ca), huile sur bois, peut-être de chêne, 43 cm × 32,4 cm, Plaisance, Galleria di Collegio Alberoni.
  • Le Condottière (1475 ca), huile sur peuplier, 36,4 cm × 30 cm, Paris, Musée du Louvre.
  • Portrait d'homme (Michele Vianello?) (1475-1476, tempera et huile sur bois, 31 cm × 25,2 cm, Rome, Galerie Borghèse.
  • Portrait de jeune homme (1475-1476 ca), huile sur bois collé sur panneau de contreplaqué, 27,5 cm × 21 cm, Madrid, Musée Thyssen-Bornemisza.
  • La Vierge à l'Enfant en trône, entre les saints Nicolas de Bari, Lucie, Ursule et Dominique, (Retable de San Cassiano) (1475-1476 ca), huile sur bois, 115 cm × 65 (panneau central), 55,9 cm × 35 cm (panneau latéral gauche), 56,8 cm × 35,6 cm (panneau latéral droit), Vienne, Kunsthistorisches Museum.
  • La Vierge de l'Annonciation (1475-1476), huile sur tilleul, 42,5 cm × 32,8 cm, Munich, Alte Pinakothek.
  • Le Christ mort soutenu par trois anges (1475-1476 ca), huile sur peuplier, 115 cm × 85,5 cm, Venise, Museo Correr.
  • Le Christ mort soutenu par un ange (1475-1478 ca), techniques mixtes sur panneau de peuplier noir, 74 cm × 51 cm, Madrid, Musée du Prado[2].
  • Le Christ à la colonne (1475-1479), huile sur bois, 29,8 cm × 21 cm, Paris, Musée du Louvre[3].
  • La Vierge de l'Annonciation (1476 ca), tempera et huile sur bois, 45 cm × 34,5 cm, Palerme, palais Abatellis.
  • Portrait d'homme (1476), huile sur peuplier, 37,4 cm × 29,5 cm, Turin, Museo Civico di Arte Antica.
  • Saint Sébastien (1476-1477), huile sur bois transférée sur toile, 171 cm × 85 cm, Dresde, Staatliche Kunstsammlungen.
  • Vierge à l'Enfant (Vierge Benson) (1477-1479 ca), tempera et huile sur bois, transféré sur panneau de contreplaqué, 58,9 cm × 43,7 cm, Washington, National Gallery of Art.
  • Portrait de jeune homme (1478 ca), huile sur noyer, 20,4 cm × 14,5 cm, Berlin, Staatliche Museen, Gemäldegalerie.
  • Dix femmes drapées sur une place (1478 ca), pinceau et encre brune, traits au stylet sur papier, 21,2 cm × 19,1 cm, Paris, musée du Louvre, département des Arts graphiques.

Antonello et l'influence flamande

La légende d'Antonello par Vasari

Une légende encore tenace, quoique démentie depuis longtemps, attribue à Antonello la paternité de l'usage de la peinture à l'huile en Italie. Celle-ci trouve sa source au XVIe siècle dans Le Vite de Giorgio Vasari[4]. Le biographe raconte qu'Antonello serait un jour tombé en extase devant un tableau de Jan van Eyck de la collection du roi Alphonse à Naples. Toutes affaires cessantes, il serait parti pour Bruges rencontrer le maître, duquel il aurait obtenu, en gagnant son amitié et sa confiance, le secret de la peinture à l'huile. Il ne serait retourné à Messine, puis à Venise, qu'après la mort de celui-ci, « pour doter l'Italie de son précieux secret », qu'il aurait alors transmis à Maestro Domenico.

Le caractère purement romanesque de cette anecdote ne fait aujourd'hui aucun doute, mais, de même que la légende de l'invention de la peinture à l'huile par Jan van Eyck, racontée par Vasari dans cette même « Vie d'Antonello de Messine », elle n'en a pas moins été largement relayée au fil des siècles.

Influences flamandes

L'influence de la peinture flamande sur Antonello de Messine est indéniable. Celle-ci était admirée par les rois de Naples, du roi René à Alphonse d'Aragon, qui possédait la plus importante collection d'œuvres de Jan van Eyck et de Roger van der Weyden[5], à une époque où Naples était un grand centre politique et culturel.

Antonello n'apporte certes pas la technique à l'huile, déjà connue des Italiens, mais il familiarise ses concitoyens à certains de ses effets exploités par les maîtres flamands, notamment la transparence des couleurs. De plus, il est un des premiers peintres italiens à reprendre le modèle du portrait de trois-quart illustré par van Eyck, avec cadrage élargi et fond abstrait généralement noir[6], tout en développant le goût pour les petits formats[7].

Antonello de Messine dans la littérature

Dans son roman Au temps où la Joconde parlait, paru en 1993 aux éditions J'ai lu, Jean Diwo s'inspire de la biographie inventée par Vasari pour faire du peintre italien un des précurseurs de la Renaissance. Il développe notamment l'idée du voyage d'Antonello en Flandre pour faire la rencontre de Jan van Eyck, qui lui apprend la technique de peinture à l'huile utilisant la térébenthine comme solvant. De retour de sa quête, il peint sa Vierge de l'Annonciation (vers 1476-1477). Une telle affirmation étant bien évidemment sans fondement historique, puisque van Eyck est mort en 1441.

Georges Perec a consacré son premier roman, Le Condottière (rédigé en 1957-1960, parution posthume 2012) à un faussaire perdant la raison à force de s'acharner sur sa copie du Condottiere d'Antonello.

Paru récemment aux éditions Plon, l'ouvrage de François Cérésa Antonello, Léonard de Vinci et moi[8] restitue une figure haute en couleurs et émouvante de ce peintre et de l'univers dans lequel il a vécu.

L'influence d'Antonello de Messine

Le designer industriel québécois Michel Dallaire s'inspirera de la peinture Saint Jérôme dans son cabinet de travail d'Antonello de Messine pour le design de l'ameublement de la Grande Bibliothèque de la société d'État Bibliothèque et Archives nationales du Québec à Montréal[9].

Notes et références

  1. Après une restauration qui a duré trois ans et s'est terminée en 2011, le tableau est provisoirement exposé au Museum aan de Stroom, le MAS.
  2. (es) Fiche de l'œuvre sur le site du musée du Prado.
  3. Acquis en 1992 pour la somme de 42 millions de francs. Auparavant, le Louvre ne possédait du peintre que le portrait dit du Condottiere. Télérama, n° 2234, 4 novembre 1992, p. 25. Site du musée du Louvre.
  4. Giorgio Vasari, Vies des peintres, sculpteurs et architectes, traduites par L. Leclanché et commentées par Jeanron et L. Leclanché, tome troisième, Paris, Just Tessier, 1840, p. 10-15
  5. Claude Mignot et Daniel Rabreau (dir) - Histoire de l'art - Temps modernes XVe-XVIIIe siècles - page 72.
  6. Claude Mignot et Daniel Rabreau (dir) - Temps modernes XVe-XVIIIe siècles - Histoire de l'art, Flammarion, 1996, p. 93.
  7. Claude Mignot et Daniel Rabreau (dir) - Temps modernes XVe-XVIIIe siècles - Histoire de l'art, Flammarion, 1996, p. 114.
  8. (ISBN 2-259-21005-8)
  9. L'Actualité, novembre 2011

Annexes

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Articles connexes

Bibliographie

Liens externes

Giorgio Vasari le cite et décrit sa biographie dans Le Vite :
Page ?? - édition 1568