Récidive en droit français

Un article de Wikipédia, l'encyclopédie libre.
Ceci est une version archivée de cette page, en date du 10 janvier 2015 à 23:30 et modifiée en dernier par Maitre So (discuter | contributions). Elle peut contenir des erreurs, des inexactitudes ou des contenus vandalisés non présents dans la version actuelle.

En droit pénal français, la récidive légale est la réitération d'une infraction proche ou équivalente d'une infraction précédemment et définitivement condamnée. C'est une circonstance aggravante qui permet le prononcer d'une peine plus lourde, jusqu'au doublement de la peine[1].

Les règles de la récidive varient selon que l'infraction est contraventionnelle, délictuelle ou criminelle. La récidive, régie par les articles 132-8 et suivants du Code pénal français, est dite « perpétuelle » et « générale » en cas de crime ; en cas de délit, elle est soit, perpétuelle ou temporaire, générale ou spéciale. La récidive de contravention est toujours « spéciale » et « temporaire ».

Si les conditions de la récidive légale ne sont pas réunies, il s'agit d'une réitération d'infractions ou d'un concours idéal ou réel d'infractions.

Les conditions de la récidive

Une condamnation pénale définitive prononcée par une juridiction française ou européenne.

Pour que l'aggravation résultant de la récidive s'applique à une personne, il faut d'abord qu'à la date de commission des nouveaux faits, cette personne ait déjà été condamnée pénalement, à titre définitif, c'est-à-dire qu'une décision ayant « force de chose jugée », non susceptible de recours, et devenant alors exécutoire, ait été émise par une juridiction pénale compétente.

Depuis la loi n° 2005-1549 du 12 décembre 2005 relative au traitement de la récidive des infractions pénales, est inséré dans le code pénal un article 132-16-6 assimilant les condamnations pénales prononcées par un état membre de l'Union européenne à celles des juridictions françaises dans la prise en compte de l'état de récidive.

La commission d'une nouvelle infraction

Pour que l'aggravation résultant de la récidive s'applique à une personne, il faut ensuite qu'elle commette une nouvelle infraction.

Pour que le magistrat puisse juger qu'il y a eu récidive, la nouvelle infraction peut être :

  • soit différente de la première infraction commise, c'est la « récidive générale » ;
  • soit identique (ou assimilée) à la première infraction, c'est la « récidive spéciale ».

Par ailleurs, la récidive peut être encourue dans certains cas sans tenir compte du temps passé depuis la commission de la première infraction, c'est la « récidive perpétuelle ». En revanche, dans d'autres cas, la récidive ne pourra être prononcée si un certain délai fixé par la loi s'est déjà écoulé depuis la première infraction, c'est la « récidive temporaire ».

L'application de la récidive

Nature de la première infraction Nature de la nouvelle infraction Délai de commission de la nouvelle infraction Aggravation de peine encourue du fait de la récidive Article du code pénal
Crime ou délit puni de 10 ans d'emprisonnement Crime passible de 20 ans ou 30 ans de réclusion Pas de délai Réclusion criminelle à perpétuité 132-8
Crime passible de 15 ans de réclusion 30 ans de réclusion
Délit passible de 10 ans d'emprisonnement 10 ans Doublement de l'emprisonnement et de l'amende encourue 132-9 alinéa 1
Délit puni de moins de 10 ans d'emprisonnement Délit passible d'un emprisonnement inférieur à 10 ans et supérieur à 1 an 5 ans Doublement de l'emprisonnement et de l'amende encourue 132-9 alinéa 2
Délit identique ou assimilé 5 ans 132-10, 132-16 et 321-5
Contravention de la 5e classe Contravention identique si le règlement prévoit la récidive 1 an Amende portée à 3000 € 132-11

Il y a récidive criminelle, lorsqu'une personne physique, déjà condamnée définitivement pour un crime ou un délit puni de dix ans d'emprisonnement par la loi, commet une infraction emportant une peine criminelle. Quel que soit l'objet du deuxième crime (ce peut être un crime de sang succédant à un vol aggravé ou l'inverse), quel que soit le lieu de la commission, quel que soit le délai écoulé depuis l'expiration ou la prescription de la première peine. Lorsque le maximum de la peine fixé par la loi pour ce crime est de vingt ans ou trente ans, le maximum de la peine devient la réclusion criminelle ou la détention criminelle à perpétuité. Lorsque le maximum de la peine fixé par la loi pour ce crime est de quinze ans, le maximum de la peine est porté à trente ans de réclusion criminelle ou de détention criminelle.

La récidive en matière contraventionnelle

La récidive en matière contraventionnelle n'est prévue que pour les contraventions les plus graves, c’est-à-dire les contraventions de la 5e classe. A contrario, les contraventions de la 1ère à la 4ème classe ne sont jamais susceptibles de récidive.

L'article 132-11 énonce plusieurs conditions pour que la récidive soit encourue en matière de contraventions. Il faut d'abord que le règlement ait expressément prévu la récidive. Il faut ensuite que la nouvelle contravention soit identique, c’est-à-dire soit une contravention de la 5e classe. Il faut enfin que la nouvelle contravention ait été commise dans le délai d'un an à compter de l'expiration ou de la prescription de la précédente peine.

Débats en 2010

Suite aux polémiques enclenchées par l'affaire Hodeau[2], Michèle Alliot-Marie annonce sa volonté de réformer le régime legislatif de la récidive. Cette intention se concrétise par le dépôt du « projet de loi tendant à amoindrir le risque de récidive criminelle et portant diverses dispositions de procédure pénale », examiné en procédure accélérée en novembre 2009 par l'Assemblée nationale[3]. Tous deux spécialistes des questions pénitentiaires, Jean-Paul Garraud (UMP) et Jean-René Lecerf[4] sont nommés rapporteurs du projet de loi, respectivement pour l'Assemblée nationale et le Sénat.

Ce nouveau projet de loi sur la récidive, qui fait suite à la loi Perben II (qui avait notamment créé le FIJAIS), la loi du 13 décembre 2005 et la loi Dati de 2007 (créant la « surveillance de sûreté »), prévoit notamment[3]:

  • d'interdire à l'auteur d'une agression sexuelle, une fois purgé sa peine, d'élire domicile près de son ancienne victime;
  • de contraindre les auteurs d'agressions sexuelles à se soumettre à un traitement hormonal, dit de « castration chimique »; en cas d'acceptation d'un tel traitement, le refus ultérieur de s'y soumettre conduirait à être incarcéré à nouveau;
  • de créer un nouveau fichier, intitulé « Répertoire des données à caractère personnel collectées dans le cadre des procédures judiciaires », s'appliquant aux « personnes poursuivies ou condamnées pour l'une des infractions pour lesquelles le suivi socio-judiciaire est encouru » (art. 706-56-2 du CPP), et d'élargir les cas d'inscription au FNAEG (fichier national automatisé des empreintes génétiques);
  • sur proposition du rapporteur Jean-Paul Garraud et contre l'avis de la Garde des sceaux, Michèle Alliot-Marie[réf. nécessaire], d'étendre le champ de la surveillance de sûreté, introduit par la loi du 25 février 2008, aux personnes condamnées à plus de dix ans de prison (contre 15 précédemment); en cas de non-respect des obligations de la surveillance de sûreté (en particulier du port du bracelet électronique de localisation GPS), la personne serait passible d'une rétention de sûreté.
  • enfin, l'art. 6a de la loi prévoit que les sections locales de la police et de la gendarmerie soient informées de l'identité et de l'adresse de toute personne ayant été condamnée à une peine de 3 ans ou plus[5].
  • l'ordonnance du 2 février 1945 sur l'enfance délinquante est modifiée, afin d'introduire la possibilité de l'assignation à résidence par surveillance électronique des mineurs de 16 ans (art. 8 quater du projet de loi adopté par le Sénat le 18 février 2010)

Lors de son examen du projet de loi, le Sénat a retiré la mention explicite du traitement hormonal du texte de loi, et transforment l'obligation faite aux médecins d'informer le juge du traitement médical suivi par son patient en une simple possibilité.

Débats en 2014

Dans le cadre des objectifs de réformes voulus par Christiane Taubira, ministre de la justice depuis 2012 sous la présidence de François Hollande, le ministère de la justice a publié en avril 2014 une étude statistique chiffrée sur la récidive portant sur 500 000 condamnations prononcées en 2004, analysant les parcours des condamnés 8 ans avant et 8 ans après cette date[6]. Il en ressort que globalement environ 40 % de ces personnes condamnées étaient des récidivistes. De plus l'âge est un paramètre crucial : « plus un condamné est jeune (moins de 26 ans), plus il aura de risques de récidiver et plus il le fera rapidement  » : « Un mineur condamné a 1,5 fois plus de risques de récidiver qu'un 18-25 ans, et 2,2 fois plus qu'un 30-39 ans » ; et « une autre étude de 2012 (Sébastien Delarre, Infostat n° 119) a montré que 6 mineurs sur 10 ne retournent pas devant la justice après des mesures d'accompagnement »[6]. Deuxième paramètre important : « un condamné déjà récidiviste sera aussi plus enclin et plus prompt à récidiver[6] ». Enfin, la nature de l'infraction a un réel impact : « les condamnés pour stupéfiants sont 46 % à être recondamnés pour les mêmes délits, les auteurs de vol ou recel aggravés (avec effraction, en bande organisée, etc.) 44 %, et les auteurs de violences volontaires 40 % : c'est le noyau dur des récidivistes[6] ». Les délits routiers, qui représentent 40 % des délits, sont traités à part et il ressort de leur étude, notamment, que 70 % des délinquants routiers rechutent dans les huit ans[7].

Annexes

Notes et références

Articles connexes

Histoire pénale par ordre chronologique

Liens externes

Rapports publics
  • Commission santé-justice présidée par Monsieur Jean-François Burgelin, Santé, justice et dangerosités : pour une meilleure prévention de la récidive, Paris, Ministère de la justice, , 196 p. (présentation en ligne, lire en ligne)
  • Pascal Clément, Gérard Léonard, Rapport d'information déposé en application de l'article 145 du Règlement par la Commission des lois (...) en conclusion des travaux d'une mission d'information constituée le 4 mars 2004 sur le traitement de la récidive des infractions pénales, Paris, Assemblée Nationale, coll. « Documents d'information de l'Assemblée nationale », , 84 p. (présentation en ligne, lire en ligne)
  • Laboratoire d'étude et de recherche sociales du groupement d'intérêt public Droit et Justice, Institut du développement social, Le Traitement des intraitables : l'organisation sociale de la récidive chez les jeunes, Canteleu, , 188 p. (présentation en ligne, lire en ligne)
Débats sur la récidive

Bibliographie

  • Louis André, La Récidive, Paris, Chevalier-Marescq, 1892.

Notes bibliographiques

  1. Jean-Lucien Sanchez, « La relégation (loi du 27 mai 1885) », Criminocorpus, revue hypermédia [En ligne], Les bagnes coloniaux, Articles, mis en ligne le 01 janvier 2005, consulté le 07 décembre 2012. URL : http://criminocorpus.revues.org/181 ; DOI : 10.4000/criminocorpus.181
  2. Article 132-16-7 du code pénal