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« Trichocéphalose » : différence entre les versions

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C'est une parasitose mineure, mais [[Répartition cosmopolite|cosmopolite]], extrêmement répandue. Elle est le plus souvent asymptomatique et donc non traitée.
C'est une parasitose mineure, mais [[Répartition cosmopolite|cosmopolite]], extrêmement répandue. Elle est le plus souvent asymptomatique et donc non traitée.


== Histoire ==
Cette parasitose existe au moins depuis le [[néolithique]]. Des œufs de ''T. trichuria'' sont retrouvés dans des [[Coprolithe|coprolithes]] humains sur des sites archéologiques, dans l'ancien comme dans le nouveau monde<ref name=":4">{{Ouvrage|langue=en|auteur1=Michel Drancourt|directeur1=oui|nom2=Didier Raoult|directeur2=oui|nom3=Matthieu Le Bailly|titre=Paleomicrobiology of Humans|passage=148-149.|lieu=|éditeur=ASM Press|date=2016|pages totales=|isbn=978-1-55581-916-3|lire en ligne=|numéro chapitre=14|titre chapitre=Past Intestinal Parasites}}</ref>. Ils se retrouvent aussi dans des restes humains momifiés, comme la momie [[Ötzi]] (Europe occidentale)<ref>{{Article|langue=en|prénom1=Matthieu|nom1=Le Bailly|prénom2=Stéphanie|nom2=Harter|prénom3=Françoise|nom3=Bouchet|titre=The state of the art of paleoparasitological research in the old world|périodique=Memórias do Instituto Oswaldo Cruz|volume=98|date=2003-1|issn=0074-0276|doi=10.1590/S0074-02762003000900015|lire en ligne=http://www.scielo.br/scielo.php?script=sci_abstract&pid=S0074-02762003000900015&lng=en&nrm=iso&tlng=en|consulté le=2019-06-24|pages=95–101}}</ref>, ou dans des latrines historiques<ref>{{Article|langue=en|auteur1=Martin Jensen|titre=Ancient DNA from latrines in Northern Europe and the Middle East (500 BC–1700 AD) reveals past parasites and diet|périodique=PLoS One|date=25 avril 2018|issn=|lire en ligne=https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC5918799/|pages=}}</ref>.

Ces données suggèrent que ''T. trichiura'' a accompagné les migrations humaines préhistoriques sur tous les continents, partout où les conditions climatiques ont permis la reproduction de son cycle de vie<ref name=":4" />.

La première mention médicale de cette parasitose parait être celle de [[Jean-Baptiste Morgagni|Jean Baptiste Morgagni]] (1682-1771) dans ''Epistolae anatomicae'' (XIV, 42) publiées en 1740<ref>{{Chapitre|langue=en|prénom1=Dickson D.|nom1=Despommier|prénom2=Robert W.|nom2=Gwadz|prénom3=Peter J.|nom3=Hotez|titre chapitre=Trichuris trichiura (Linnaeus 1771)|titre ouvrage=Parasitic Diseases|éditeur=Springer New York|date=1995|isbn=9781461224761|doi=10.1007/978-1-4612-2476-1_2|lire en ligne=https://doi.org/10.1007/978-1-4612-2476-1_2|consulté le=2019-06-24|passage=6–11}}</ref>.

Une description précise du trichocéphale est le fait de {{Lien|langue=de|trad=Johann Georg Roederer|fr=Johann Georg Roederer}}(1726-1763) et de {{Lien|langue=de|trad=Carl Gottlieb Wagler|fr=Carl Gottlieb Wagler}} (1731-1778). Elle est publiée dans leur ouvrage ''De morbo Mucoso'' (1762) qui rassemble les observations faites lors d'une épidémie de [[Fièvre typhoïde|typhoïde]]<ref>{{Ouvrage|langue=|auteur1=Jean Théodoridès|titre=Histoire de la parasitologie|passage=162.|lieu=|éditeur=Albin Michel / Laffont / Tchou|date=1980|pages totales=|isbn=|lire en ligne=}}{{commentaire biblio|dans Jean-Charles Sournia (dir), Histoire de la médecine, tome VIII.}}</ref> , traduites en français sous le titre ''Traité de la maladie muqueuse'' (1808)''.''

En 1771, [[Carl von Linné|Carl Von Linné]] (1707-1778) propose de l'appeler ''Ascaris trichiura (''en grec « Ascaris à la queue fine comme un cheveu »), mais il se trompe en prenant la partie céphalique plus fine comme une partie terminale<ref name=":3" />. Aussi plusieurs dénominations différentes ont cours au {{S-|XIX}} comme ''trichocephalus hominis'' ou ''trichocephalus dispar'' ; la dénomination définitive ''Trichuris Trichiura'' ne sera fixée qu'en 1941<ref name=":5">{{Ouvrage|langue=en|auteur1=Gerald Hesch|titre=Parasites and Infectious Diseases: Discovery by Serendipity and Otherwise|passage=222.|lieu=|éditeur=Cambridge University Press|date=2007|pages totales=|isbn=978-0521675390|lire en ligne=}}</ref>.

Parmi les auteurs qui ont étudié le trichocéphale, on trouve [[Karl Asmund Rudolphi]] (1771-1832), qui montre l'existence d'infestations massives, et[[Casimir Davaine]] (1812-1882) qui montre que l'œuf éliminé par les selles n'est pas embryonné, et qu'il peut survivre plusieurs années dans des conditions favorables d'humidité. Davaine est aussi l'un des premiers à pratiquer le diagnostic par la [[Examen parasitologique des selles|recherche d'œufs dans les selles]]<ref>{{Ouvrage|langue=|auteur1=Ian Humphery-Smith|titre=Sept siècles de parasitologie en France|passage=85.|lieu=|éditeur=Société Française de Parasitologie - Paris.|année=2006|pages totales=|isbn=|lire en ligne=}}</ref>.

{{Lien|langue=it|trad=Salvatore Calandruccio|fr=Salvatore Calandruccio}} (1858-1908), qui travaillait dans le laboratoire de [[Giovanni Battista Grassi]] (1854-1925), a analysé ses propres selles pendant 6 mois, pour être certain qu'il n'était pas infesté par un trichocéphale. Il avale alors des œufs embryonnés, et analyse de nouveau ses selles. Il retrouve en moins d'un mois des œufs non embryonnés de nouvelle génération. Ces résultats ont été repris par Grassi qui publia les travaux de son élève comme s'ils avaient été les siens<ref name=":5" />.

Le génome complet de ''Trichuris trichiura'' est publié en 2014<ref name=":6" />.
== Morphologie ==
== Morphologie ==
La forme adulte de ''[[Trichuris trichiura]]'' est celle d'un ver rond, long de 3 à 5 cm, de couleur variant du blanc au rougeâtre, d'aspect caractéristique.
La forme adulte de ''[[Trichuris trichiura]]'' est celle d'un ver rond, long de 3 à 5 cm, de couleur variant du blanc au rougeâtre, d'aspect caractéristique.
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Des insectes peuvent être porteurs mécaniques d'œufs de ''T. trichuria'' : mouches ''[[Cyclorrhapha]]s'' non-mordantes comme ''[[Musca domestica]]'', blattes... mais ces œufs ne sont pas toujours infectants, et leur rôle épidémiologique n'est pas démontré<ref>Monzon, R. B., Sanchez, A. R., Tadiaman, B. M., Najos, O. A., Valencia, E. G., De Rueda, R. R., & Ventura, J. V. (1991). [http://www.tm.mahidol.ac.th/seameo/1991-22-2/1991-22-2-222.pdf ''A comparison of the role of Musca domestica (Linnaeus) and Chrysomya megacephala (Fabricius) as mechanical vectors of helminthic parasites in a typical slum area of Metropolitan Manila'']. Southeast Asian J Trop Med Public Health, 22(2), 222-228.</ref>{{,}}<ref>{{Article|langue=|auteur1=Fetene T & Worku N|titre=Public health importance of non-biting cyclorrhaphan flies.|périodique=Transactions of the Royal Society of Tropical Medicine and Hygiene,|volume=103|numéro=2|date=Février 2009|issn=|lire en ligne=https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/18817940|pages=187-191.}}</ref>.
Des insectes peuvent être porteurs mécaniques d'œufs de ''T. trichuria'' : mouches ''[[Cyclorrhapha]]s'' non-mordantes comme ''[[Musca domestica]]'', blattes... mais ces œufs ne sont pas toujours infectants, et leur rôle épidémiologique n'est pas démontré<ref>Monzon, R. B., Sanchez, A. R., Tadiaman, B. M., Najos, O. A., Valencia, E. G., De Rueda, R. R., & Ventura, J. V. (1991). [http://www.tm.mahidol.ac.th/seameo/1991-22-2/1991-22-2-222.pdf ''A comparison of the role of Musca domestica (Linnaeus) and Chrysomya megacephala (Fabricius) as mechanical vectors of helminthic parasites in a typical slum area of Metropolitan Manila'']. Southeast Asian J Trop Med Public Health, 22(2), 222-228.</ref>{{,}}<ref>{{Article|langue=|auteur1=Fetene T & Worku N|titre=Public health importance of non-biting cyclorrhaphan flies.|périodique=Transactions of the Royal Society of Tropical Medicine and Hygiene,|volume=103|numéro=2|date=Février 2009|issn=|lire en ligne=https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/18817940|pages=187-191.}}</ref>.


Classiquement, les humains sont le seul réservoir de ''T. trichuria'', mais les données zoologiques (classifications complexes) ne concordent pas toujours avec les données médicales (biologie simplifiée, à incidence médicale pratique)<ref name=":2" />{{,}}<ref name=":3" />.
Classiquement, les humains sont le seul réservoir de ''T. trichiura'', mais les données zoologiques (classifications complexes) ne concordent pas toujours avec les données médicales (biologie simplifiée, à incidence médicale pratique)<ref name=":2" />{{,}}<ref name=":3" />.


De plus, l'avènement de la biologie moléculaire, et de techniques comme la PCR, amènent à mieux reconnaitre des espèces de ''Trichuris'' et à distinguer de nouvelles sous-espèces. Par exemple, ''T. trichuria'' considéré comme strictement humain, peut se retrouver (sous-espèce ?) chez des primates non-humains en captivité ; des chiens, classiquement parasités par ''T. vulpis'', peuvent aussi héberger des œufs de ''T. trichuria'' ; des œufs de ''T. suis'' parasitant classiquement le porc peuvent être présents chez l'homme. Mais là encore, l'importance épidémiologique est discutée, la transmission zoonotique relevant plutôt d'une potentialité à surveiller<ref> {{article|langue=|auteur1=|prénom=Pannatat|nom=Areekul|auteur2=Jongwutiwes|titre=Trichuris vulpis et infections à T. trichiura chez des écoliers d'une communauté rurale du nord-ouest de la Thaïlande: rôle possible des chiens dans la maladie transmission|journal=biomédecine asiatique|volume=4|numéro=1|date=février 2010|issn=|lire en ligne=https://pdfs.semanticscholar.org/a277/fb1ac0702854266cbbe21d216219166388d2.pdf?_ga=2.63046312.62232145.1561288892-48280357.1560697648|pages=49–60}} </ref>{{,}}<ref>Nejsum P, Betson M, Bendall RP, Thamsborg SM, Stothard JR, [https://www.cambridge.org/core/journals/journal-of-helminthology/article/assessing-the-zoonotic-potential-of-ascaris-suum-and-trichuris-suis-looking-to-the-future-from-an-analysis-of-the-past/1C07A831E23E4A7BB1183E9EF5BFF3EA ''Assessing the zoonotic potential of Ascaris suum and Trichuris suis: looking to the future from an analysis of the past''], J Helminthol, 2012;86:148–155</ref>{{,}}<ref>{{Article|langue=en|prénom1=Martha|nom1=Betson|prénom2=Martin Jensen|nom2=Søe|prénom3=Peter|nom3=Nejsum|titre=Human Trichuriasis: Whipworm Genetics, Phylogeny, Transmission and Future Research Directions|périodique=Current Tropical Medicine Reports|volume=2|numéro=4|date=2015-12-01|issn=2196-3045|doi=10.1007/s40475-015-0062-y|lire en ligne=https://doi.org/10.1007/s40475-015-0062-y|consulté le=2019-06-23|pages=209–217}}</ref>{{,}}<ref name=":3" />.
De plus, l'avènement de la biologie moléculaire, et de techniques comme la PCR, amènent à mieux reconnaitre des espèces de ''Trichuris'' et à distinguer de nouvelles sous-espèces. Par exemple, ''T. trichiura'' considéré comme strictement humain, peut se retrouver (sous-espèce ?) chez des primates non-humains en captivité ; des chiens, classiquement parasités par ''T. vulpis'', peuvent aussi héberger des œufs de ''T. trichiura'' ; des œufs de ''T. suis'' parasitant classiquement le porc peuvent être présents chez l'homme. Mais là encore, l'importance épidémiologique est discutée, la transmission zoonotique relevant plutôt d'une potentialité à surveiller<ref> {{article|langue=|auteur1=|prénom=Pannatat|nom=Areekul|auteur2=Jongwutiwes|titre=Trichuris vulpis et infections à T. trichiura chez des écoliers d'une communauté rurale du nord-ouest de la Thaïlande: rôle possible des chiens dans la maladie transmission|journal=biomédecine asiatique|volume=4|numéro=1|date=février 2010|issn=|lire en ligne=https://pdfs.semanticscholar.org/a277/fb1ac0702854266cbbe21d216219166388d2.pdf?_ga=2.63046312.62232145.1561288892-48280357.1560697648|pages=49–60}} </ref>{{,}}<ref>Nejsum P, Betson M, Bendall RP, Thamsborg SM, Stothard JR, [https://www.cambridge.org/core/journals/journal-of-helminthology/article/assessing-the-zoonotic-potential-of-ascaris-suum-and-trichuris-suis-looking-to-the-future-from-an-analysis-of-the-past/1C07A831E23E4A7BB1183E9EF5BFF3EA ''Assessing the zoonotic potential of Ascaris suum and Trichuris suis: looking to the future from an analysis of the past''], J Helminthol, 2012;86:148–155</ref>{{,}}<ref name=":6">{{Article|langue=en|prénom1=Martha|nom1=Betson|prénom2=Martin Jensen|nom2=Søe|prénom3=Peter|nom3=Nejsum|titre=Human Trichuriasis: Whipworm Genetics, Phylogeny, Transmission and Future Research Directions|périodique=Current Tropical Medicine Reports|volume=2|numéro=4|date=2015-12-01|issn=2196-3045|doi=10.1007/s40475-015-0062-y|lire en ligne=https://doi.org/10.1007/s40475-015-0062-y|consulté le=2019-06-23|pages=209–217}}</ref>{{,}}<ref name=":3" />.


== Clinique ==
== Clinique ==

Version du 24 juin 2019 à 20:07

La trichocéphalose ou trichiurose est une maladie parasitaire humaine due à Trichuris trichiura, nématode ou ver rond (le trichocéphale) de 40 à 50 mm.

C'est une parasitose mineure, mais cosmopolite, extrêmement répandue. Elle est le plus souvent asymptomatique et donc non traitée.

Histoire

Cette parasitose existe au moins depuis le néolithique. Des œufs de T. trichuria sont retrouvés dans des coprolithes humains sur des sites archéologiques, dans l'ancien comme dans le nouveau monde[1]. Ils se retrouvent aussi dans des restes humains momifiés, comme la momie Ötzi (Europe occidentale)[2], ou dans des latrines historiques[3].

Ces données suggèrent que T. trichiura a accompagné les migrations humaines préhistoriques sur tous les continents, partout où les conditions climatiques ont permis la reproduction de son cycle de vie[1].

La première mention médicale de cette parasitose parait être celle de Jean Baptiste Morgagni (1682-1771) dans Epistolae anatomicae (XIV, 42) publiées en 1740[4].

Une description précise du trichocéphale est le fait de Johann Georg Roederer (de)(1726-1763) et de Carl Gottlieb Wagler (de) (1731-1778). Elle est publiée dans leur ouvrage De morbo Mucoso (1762) qui rassemble les observations faites lors d'une épidémie de typhoïde[5] , traduites en français sous le titre Traité de la maladie muqueuse (1808).

En 1771, Carl Von Linné (1707-1778) propose de l'appeler Ascaris trichiura (en grec « Ascaris à la queue fine comme un cheveu »), mais il se trompe en prenant la partie céphalique plus fine comme une partie terminale[6]. Aussi plusieurs dénominations différentes ont cours au XIXe siècle comme trichocephalus hominis ou trichocephalus dispar ; la dénomination définitive Trichuris Trichiura ne sera fixée qu'en 1941[7].

Parmi les auteurs qui ont étudié le trichocéphale, on trouve Karl Asmund Rudolphi (1771-1832), qui montre l'existence d'infestations massives, etCasimir Davaine (1812-1882) qui montre que l'œuf éliminé par les selles n'est pas embryonné, et qu'il peut survivre plusieurs années dans des conditions favorables d'humidité. Davaine est aussi l'un des premiers à pratiquer le diagnostic par la recherche d'œufs dans les selles[8].

Salvatore Calandruccio (it) (1858-1908), qui travaillait dans le laboratoire de Giovanni Battista Grassi (1854-1925), a analysé ses propres selles pendant 6 mois, pour être certain qu'il n'était pas infesté par un trichocéphale. Il avale alors des œufs embryonnés, et analyse de nouveau ses selles. Il retrouve en moins d'un mois des œufs non embryonnés de nouvelle génération. Ces résultats ont été repris par Grassi qui publia les travaux de son élève comme s'ils avaient été les siens[7].

Le génome complet de Trichuris trichiura est publié en 2014[9].

Morphologie

La forme adulte de Trichuris trichiura est celle d'un ver rond, long de 3 à 5 cm, de couleur variant du blanc au rougeâtre, d'aspect caractéristique.

La tête ou partie antérieure est filiforme de 100 μ de diamètre (d'où son nom tricho- fil ou cheveu, et cephalo- tête), représentant les 3/5 de la longueur totale. La partie postérieure est plus courte, plus épaisse, renflée « en banane » ou en « manche de fouet » de 500 μ[10],[11],[12].

Le mâle est légèrement plus petit, et sa partie postérieure un peu plus enroulée, que chez la femelle[12].

Les œufs sont à coque épaisse, brun jaune, de 50 à 55 μ de long et 25 μ de large, en forme typique de « citron » avec un bouchon muqueux à chaque pôle[10],[11].

Épidémiologie

Ce parasite est strictement humain et cosmopolite, mais plus fréquent en climat chaud et humide. Son importance est très variable selon les régions, tant par l'intensité de la parasitose que par le pourcentage de sujets atteints.

En France, on trouve moins de dix vers par malade, et jusqu'à plusieurs centaines ou milliers dans les pays tropicaux. De même des études régionales indiquent une prévalence de 23 % au Viêtnam, 55 % dans certaines régions du Sud des États-Unis, jusqu'à plus de 90 % d'infestations dans certains foyers tropicaux (par exemple Malaisie)[10].

Parmi les 1 050 millions de personnes infectées dans le monde par Trichuris trichiura, on trouve 114 millions de petits enfants et 233 millions d'âge scolaire[13]. 220 millions de personnes présentaient des formes symptomatiques de cette verminose cosmopolite occasionnant 10 000 décès annuels, selon l'OMS[14].

Biologie

Les trichocéphales sont des nématodes ovipares, parasites de l'intestin. On ne connait pas exactement leur longévité qui serait de quelques années (de un à cinq ans, voire dix ans[10]).

Cycle

Le cycle est direct et très simple, sans hôte intermédiaire.

Les œufs embryonnés sont avalés avec l'eau, les aliments souillés de terre (fruits et légumes non lavés), ou par les mains sales. L'œuf est dissout et la larve est libérée au niveau de l'intestin. Elle reste enfouie dans les villosités intestinales pendant environ deux à trois jours, jusqu'à ce qu'elle soit complètement développée ; puis elle migre vers le cæcum[12].

Devenus adultes, les individus s'accouplent. Hématophages, les trichocéphales s'installent sur la muqueuse du cæcum et de l'appendice, fixés par la partie antérieure effilée, fichée « en séton » jusqu'à la sous-muqueuse. Les femelles commencent à pondre environ un à deux mois après l'ingestion infestante, de plusieurs milliers jusqu'à 30 000 œufs par jour[10].

Les œufs sont éliminés avec les selles. Très résistants, ils évoluent dans le sol où ils se développent, d'abord en un stade à 2 cellules (œuf segmenté), jusqu'à la formation complète de l'embryon, en cinq mues et quatre stades larvaires (L1 à L4). Il n'y a pas d'auto-infestation possible, puisque les œufs, non embryonnés à la ponte, doivent séjourner dans le milieu extérieur pour devenir infestants[15],[6].

La durée de ce processus extérieur varie en fonction du climat et des différents types de sol. Dans les zones tempérées, les œufs ne sont embryonnés qu'au bout de six à douze mois, alors que dans les régions tropicales, en conditions optimales (chaleur et humidité), les œufs sont embryonnés dans un laps de temps bien plus court, de l'ordre de 15 jours à un mois[6].

Une fois embryonnés, les œufs peuvent demeurer plusieurs années dans le sol ou l'humidité avant d'être ingérés par des humains. Grâce à leur coque de protection, ils peuvent résister aux agents atmosphériques, en particulier au froid, mais pas à la chaleur sèche (ils sont détruits par dessication)[10].

Contamination et autres données

La contamination se fait par ingestion des œufs embryonnés du parasite, notamment en situation de péril fécal dont l'utilisation d'engrais humain pour les cultures maraîchères. Il n'existe pas de contamination directe interhumaine[10], puisque les œufs doivent séjourner d'abord dans le milieu extérieur, au moins trois semaines dans le meilleur des cas.

Des insectes peuvent être porteurs mécaniques d'œufs de T. trichuria : mouches Cyclorrhaphas non-mordantes comme Musca domestica, blattes... mais ces œufs ne sont pas toujours infectants, et leur rôle épidémiologique n'est pas démontré[16],[17].

Classiquement, les humains sont le seul réservoir de T. trichiura, mais les données zoologiques (classifications complexes) ne concordent pas toujours avec les données médicales (biologie simplifiée, à incidence médicale pratique)[12],[6].

De plus, l'avènement de la biologie moléculaire, et de techniques comme la PCR, amènent à mieux reconnaitre des espèces de Trichuris et à distinguer de nouvelles sous-espèces. Par exemple, T. trichiura considéré comme strictement humain, peut se retrouver (sous-espèce ?) chez des primates non-humains en captivité ; des chiens, classiquement parasités par T. vulpis, peuvent aussi héberger des œufs de T. trichiura ; des œufs de T. suis parasitant classiquement le porc peuvent être présents chez l'homme. Mais là encore, l'importance épidémiologique est discutée, la transmission zoonotique relevant plutôt d'une potentialité à surveiller[18],[19],[9],[6].

Clinique

Verminose peu pathogène, souvent simple découverte de laboratoire lors d'examens coprologiques systématiques, une symptomatologie clinique, traduisant des actions traumatique, toxi-infectieuse et anémiante, manifeste dans les cas, assez rares, d'infestations massives, ne doit pas faire négliger les troubles constatés souvent chez l'enfant jeune moyennement infesté (crises douloureuses abdominales, pâleur, nervosisme…) et qui répondent parfaitement au traitement spécifique. Elle peut se manifester par des douleurs abdominales, une diarrhée chronique, voire, un prolapsus rectal[20]. L'appendicite à trichocéphales existe[21] mais est peu fréquente.

Elle peut être révélée par une anémie ferriprive, par hémorragie digestive à bas bruit[22].

Diagnostic

Le diagnostic se fait par la découverte des œufs caractéristiques dans les selles (examen parasitologique des selles) ou sur pièce opératoire après appendicectomie. Une coloscopie peut parfois faire le diagnostic[23].

Traitement

L'albendazole et le mébendazole, par voie orale, permettent l'éradication du parasite[20] mais plusieurs cures sont parfois nécessaires[24]. L'association oxantel-albendazole serait plus efficace[25], le premier pouvant être utilisé également seul[26].

Notes et références

  1. a et b (en) Michel Drancourt (dir.), Didier Raoult (dir.) et Matthieu Le Bailly, Paleomicrobiology of Humans, ASM Press, (ISBN 978-1-55581-916-3), chap. 14 (« Past Intestinal Parasites »), p. 148-149.
  2. (en) Matthieu Le Bailly, Stéphanie Harter et Françoise Bouchet, « The state of the art of paleoparasitological research in the old world », Memórias do Instituto Oswaldo Cruz, vol. 98,‎ , p. 95–101 (ISSN 0074-0276, DOI 10.1590/S0074-02762003000900015, lire en ligne, consulté le )
  3. (en) Martin Jensen, « Ancient DNA from latrines in Northern Europe and the Middle East (500 BC–1700 AD) reveals past parasites and diet », PLoS One,‎ (lire en ligne)
  4. (en) Dickson D. Despommier, Robert W. Gwadz et Peter J. Hotez, « Trichuris trichiura (Linnaeus 1771) », dans Parasitic Diseases, Springer New York, (ISBN 9781461224761, DOI 10.1007/978-1-4612-2476-1_2, lire en ligne), p. 6–11
  5. Jean Théodoridès, Histoire de la parasitologie, Albin Michel / Laffont / Tchou, , p. 162.
    dans Jean-Charles Sournia (dir), Histoire de la médecine, tome VIII.
  6. a b c d et e (en) « Trichuris trichuria », sur waterpathogens.org, (consulté le )
  7. a et b (en) Gerald Hesch, Parasites and Infectious Diseases: Discovery by Serendipity and Otherwise, Cambridge University Press, (ISBN 978-0521675390), p. 222.
  8. Ian Humphery-Smith, Sept siècles de parasitologie en France, Société Française de Parasitologie - Paris., , p. 85.
  9. a et b (en) Martha Betson, Martin Jensen Søe et Peter Nejsum, « Human Trichuriasis: Whipworm Genetics, Phylogeny, Transmission and Future Research Directions », Current Tropical Medicine Reports, vol. 2, no 4,‎ , p. 209–217 (ISSN 2196-3045, DOI 10.1007/s40475-015-0062-y, lire en ligne, consulté le )
  10. a b c d e f et g Patrice Bourée, « Trichocéphale : trop souvent négligé », La Revue du Praticien - médecine générale, vol. 26, no 889,‎ , p. 721-722.
  11. a et b Fritz H. Kayser, Manuel de poche de microbiologie médicale, Flammarion Médecine-Sciences, (ISBN 978-2-2571-1335-1), p. 644-645.
  12. a b c et d Y. J. Golvan, Elements de parasitologie médicale, Flammarion, (ISBN 2-257-12589-4), p. 43-46.
  13. (en) LS Stephenson, « The public health significance of Trichuris trichiura », Parasitology, vol. 121,‎ , Suppl:S 73-95 (lire en ligne)
  14. (en) Partnership for Parasite Control, Second Meeting Rome, avril 2002 [PDF]
  15. « Trichocéphalose », sur campus.cerimes.fr (consulté le )
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