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Abbaye Saint-Michel de Frigolet

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Abbaye Saint-Michel de Frigolet
Présentation
Type
Fondation
IXe siècleVoir et modifier les données sur Wikidata
Diocèse
Paroisse
Unité pastorale Sainte-Marthe (d)Voir et modifier les données sur Wikidata
Dédicataire
Religion
Ordre religieux
Propriétaire
Commune
Privée
Patrimonialité
Site web
Localisation
Département
Commune
Coordonnées
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L’abbaye Saint-Michel de Frigolet est une abbaye de chanoines prémontrés, située près de Tarascon à l'intérieur de la Montagnette, dans le département des Bouches-du-Rhône. Fondée au XIIe siècle, elle est isolée dans un vallon sauvage au milieu des pins, des oliviers et des cyprès, elle tire son nom de ferigoulo, le thym en langue provençale. L'abbaye accueille une communauté de Prémontrés et dispose de deux hôtelleries monastiques, une librairie et un restaurant.

Du Moyen Âge à la Révolution

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Si des premières traces de constructions sont datées du VIIe siècle, l'histoire de Frigolet commence au XIIe siècle où s’installe la première communauté religieuse. En 1133, le nom du prieuré est mentionné pour la première fois. Une communauté de chanoines réguliers de saint Augustin est regroupée autour de son prieur Guillaume de Loubières. Le pape Adrien IV confirme cette installation en 1155. Les premières constructions sont alors élaborées : cloître, église romane et chapelle Notre-Dame[1],[2].

Au début du XIVe siècle le rattachement de Frigolet à la cathédrale de Notre-Dame-des-Doms par le pape Jean XXII entraîne le départ de la plus grande partie des chanoines qui ont dû délaisser l'abbaye pour occuper les stalles avignonnaises[3]. Ce n'est qu'au XVIIe siècle que l'abbaye est de nouveau occupée par des augustins et des religieux hiéronymites (ou Pères de Saint-Jérôme) qui font revivre le prieuré jusqu'à la Révolution ; la chapelle est richement décorée. En , le lieu est désormais appelé Notre-Dame du Bon Remède[1].

Le , la bibliothèque est détruite par un incendie.

En , tandis que la Révolution fait rage, le couvent est saisi et les quatre derniers chanoines présents dans l'abbaye sont dispersés[1].

Habit des prémontrés.
Au XVIIe siècle.
Au XVIIIe siècle

Renaissance et fermeture du site

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De la reconstruction à la reconnaissance

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Au début du XIXe siècle, le site devient un collège que fréquente Frédéric Mistral entre et . Quelques années plus tard, en , les bâtiments anciens sont rachetés par le père Edmond Boulbon, religieux trappiste du diocèse d'Aix devenu prémontré, à l'origine de la restauration de l'ordre en France. La vie conventuelle y est rétablie et la construction de l'ensemble actuel peut alors débuter, dont la grande abbatiale dédiée à l'Immaculée Conception et à Saint Joseph, qui enchâsse la chapelle romane Notre-Dame[1].

Le , le pape Pie IX élève le prieuré de Frigolet au rang d'abbaye et, le , autorise le couronnement de la statue de Notre-Dame du Bon Remède dont la cérémonie a lieu le [1],[4]. Le , c'est la statue de saint Joseph qui est couronnée[5].

Le siège de l'abbaye

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Le père Edmond Boulbon devient alors le premier abbé et connaît en , l'expulsion des religieux par l'armée[6]. Le , les Prémontrés doivent être expulsés par la police qui, appuyée par la gendarmerie, ne peut pas procéder à l'application des décrets, la soixantaine de religieux s'étant retranchée dans l'abbaye avec 3 000 laïcs[7], dont Frédéric Mistral[8], Joseph de Cadillan, ancien député et maire de Tarascon, Hyacinthe Chauffard, ancien maître des requêtes, le comte Hélion de Barrème, publiciste et le comte Pierre Terray, futur maire de Barbentane[9].

Devant cette résistance imprévue, le préfet des Bouches-du-Rhône Eugène Poubelle réquisitionne — sur la demande du général Farre, ministre de la Guerre — le général Guyon-Vernier et le met à la tête du 26e régiment de dragons pour aller déloger les Prémontrés. Disposant de trois escadrons, c'est-à-dire 240 cavaliers, le général met en place un blocus de la forteresse, empêchant quiconque d'entrer mais permettant aux assiégés de sortir, ce que ces derniers mettent à profit pour faire évacuer les femmes[10]. Des canons sont aussi installés, pointant vers l'abbaye[8].

Pendant que les catholiques enfermés dans l'abbaye chantent des cantiques et rédigent des bulletins, les troupes continuent le blocus. Guyon-Vernier fait relever deux escadrons de cavalerie par 500 hommes d'infanterie[10] du 141e de ligne[8] et conserve 80 dragons pour continuer à mailler les environs. Beaucoup de laïcs ayant quitté la forteresse, il ne reste plus que 800 hommes avec les religieux, tandis qu'une foule de 2 000 catholiques sont rassemblés dans les environs et tenus à distance par les troupes[10].

C'est le moment que choisit Guyon-Vernier pour lancer l'assaut : l'autorité civile procède aux sommations légales et, devant le refus des Prémontrés, les portes de la place-forte sont enfoncées[10] et la grille crochetée. Au moment de son interpellation, le révérend père déclare : « Nous sommes dans le douloureux devoir de vous déclarer que, vous et vos commettants, vous tombez sous le poids de l'excommunication majeure réservée au pape »[8]. 68 religieux en habit sont interpellés et escortés à Tarascon par les dragons, tandis que deux religieux malades sont autorisés à demeurer sur les lieux[10].

Les chanoines sont finalement contraints à l'exil au prieuré de Storrington, en Angleterre. S'ils reviennent quelques années plus tard, ils subissent une nouvelle expulsion des congrégations en 1903. Ils partent alors en exil à l'abbaye Notre-Dame de Leffe, en Belgique où ils participent à la reconstruction des bâtiments. Ils ne retrouvent Frigolet que 20 ans plus tard[1].

Époques moderne et contemporaine

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En , l'évêque Jean-Baptiste Penon s'y retire puis y meurt 3 ans plus tard.

En , l'abbatiale est élevée au rang de basilique par le pape Jean-Paul II, suite à l'afflux constant de pèlerins[1],[11].

Les bâtiments devenant insalubres, d'importants travaux sont entrepris entre et  ; puis une étude est menée.

Depuis , l'abbaye abrite une école catholique et un collège hors contrat.

Le 14 juillet 2022 au soir, un incendie dans le massif forestier de la Montagnette est déclenché par le passage d'un train, responsable de trois départs de feu. Le lendemain, les 80 personnes sur place doivent quitter l'abbaye, pour ne revenir que trois jours plus tard. L'abbaye, au cœur de massif, a pu être sauvée des flammes grâce à l'intervention des pompiers sur place et aux largages des canadairs[12],[13]. Le , un épisode similaire se produit en Bretagne, où la chapelle du Mont Saint-Michel de Brasparts échappe à un terrible incendie qui l'encercle[13].[pertinence contestée]

Abbés de Frigolet

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Liste des abbés de Frigolet depuis la restauration de l'ordre de Prémontré.

  1. Edmond Boulbon (16 septembre 1869-18 mars 1881), est élu lors de l'élévation du prieuré au rang d'abbaye[14], puis démissionne[15]. Auparavant il avait été prieur du monastère (1858-1869)[16].
  2. Paulin Boniface (11 avril 1881-1893), est nommé par décret pontifical[15], puis contraint de démissionner[17].
  3. Denis-Hubert Bonnefoy (21 mars 1899-20 septembre 1899), est nommé par l'abbé général de l'ordre et décède en fonction[17].
  4. Godefroid Madelaine (10 octobre 1899-1920), est élu par les chanoines de l'abbaye[17], puis démissionne[18].
  5. Adrien-Auguste Borelly (15 janvier 1920-1928), est élu, puis démissionne pour cause d'infirmité[18],[19].
  6. Léon Perrier (1928-1946)[20].
  7. Norbert Calmels (9 mai 1946-19 septembre 1962), est élu puis démissionne après son élection comme abbé général de l'ordre[21].
  8. Gérard Joseph Raymond (1963-1978), est élu puis démissionne[22].
  9. Marc Vaillant[réf. souhaitée] (1978-1992).
  10. Thomas Gilbert Secuianu (14 juin 1992[23]- 2015[24]).
  11. Jean-Charles Leroy : prieur actuel (depuis 2015)

Le père Alphonse Pugnière avait été élu comme troisième abbé le 29 octobre 1898, mais il avait refusé son élection[25].

Architecture

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Intérieur de l'église abbatiale.
  • L'église Saint-Michel, romane, date du XIIe siècle ; très restaurée au XIXe siècle, elle est agrandie d'une travée à l'ouest.
  • La basilique de l'Immaculée-Conception de style néogothique, est consacrée en 1866. L'intérieur de la grande nef est entièrement recouvert de peintures murales à l'huile d'Antoine Sublet sur le modèle de la Sainte-Chapelle à Paris. La structure romane de la chapelle du XIIe siècle, Notre-Dame-du-Bon-Remède, est cachée sous une décoration baroque de boiseries et de tableaux du XVIIe siècle.
  • Le cloître, de pur style roman date du XIIe siècle, est remanié au XVIIe siècle.

L'abbaye est classée au titre des monuments historiques une première fois par un arrêté du portant sur le cloître et la chapelle ; elle est ensuite inscrite par un arrêté du portant sur les façades et toitures des bâtiments, les murs de clôture, les tourelles, la citerne, la chapelle Saint-Michel, les salles situées autour du cloître (salle capitulaire, parloir, réfectoire, sacristie) et l'église abbatiale[26].

Enfin, la totalité de l'église abbatiale est classée par un arrêté du [27].

Notes et références

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  1. a b c d e f et g Panneaux de médiation sur site
  2. Abbaye de Frigolet, « Abbaye », sur frigolet.com (consulté le )
  3. François Nougier, Histoire chronologique de l’Église, évesques, et archevesques d’Avignon, Avignon, Impr. George Bramereau, , p. 97
  4. Augustin Canron, Essai historique sur l’abbaye de l’Immaculée-Conception-Sᵗ-Michel (primitive observance de Prémontré) entre Avignon et Tarascon, Avignon, Impr. Seguin aîné, (lire en ligne), p. 180-183
  5. Jean Boisson, Abbaye de Saint-Michel de Frigolet, Cholet, Impr. Farré et fils, , p. 47
  6. Alphonse Daudet, Port-Tarascon : Dernières aventures de l'illustre Tartarin, Paris, Flammarion, , 343 p. (lire en ligne), chap. 1, p. 15-30
  7. « Les expulsions en province - Tarascon », Le Soleil,‎ (lire en ligne).
  8. a b c et d Jean Sévillia, Quand les catholiques étaient hors la loi, Place des éditeurs, , 167 p. (ISBN 978-2-262-03875-5, lire en ligne), « Quand le sabre s'attaquait au goupillon ».
  9. « Départements, Algérie et colonies », Le Soleil,‎ (lire en ligne).
  10. a b c d et e « Les expulsions en province », Le Monde illustré,‎ (lire en ligne).
  11. (la) Jean-Paul II, Lettres apostoliques : Sacra illa, Rome, (lire en ligne)
  12. Nathalie Deumier, Virginie Danger et Alison Gerard, « Incendie de la Montagnette : le retour des chanoines dans l'Abbaye de Frigolet », sur france3-regions.francetvinfo.fr, (consulté le )
  13. a et b Caroline Celle, « L'abbaye de Frigolet, miraculée dans l'incendie de la Montagnette, près de Tarascon », sur lavie.fr, (consulté le )
  14. Augustin (1829-1888) Auteur du texte Canron, Essai historique sur l'abbaye de l'Immaculée-Conception-St-Michel (primitive observance de Prémontré) entre Avignon et Tarascon (3e édition revue et considérablement augmentée) / par Augustin Canron, (lire en ligne)
  15. a et b André Léon PIMS - University of Toronto et Pl F. (Placide Fernand) Lefèvre, Écrivains, artistes et savants de l'ordre de Prémontré, Bruxelles, Société belge de librairie, (lire en ligne)
  16. (la) Norbert Backmund (trad. du latin), « Frigolet », dans Monasticon Praemonstratense : Id est Historia Circariarum atque Canoniarum Candidi et Canonici Ordinis Praemonstratensis, vol. 3, t. 1, Straubing, C. Attenkofer, (lire en ligne).
  17. a b et c Bernard Ardura, Prémontrés: histoire et spiritualité, Saint-Étienne, Publications de l'Université, , p. 388
  18. a et b « Dom Adrien Borrelly ancien abbé de Frigolet », La Croix, no 14 975,‎ 20-21 décembre 1931, p. 2 (lire en ligne)
  19. « Rme P. Léon (Léon Perrier) (1881-1948) », sur www.chapitre-frejus-toulon.fr (consulté le )
  20. « La renaissance de l'Abbaye de Leffe », sur www.abbaye-de-leffe.be (consulté le )
  21. Bernard Ardura, « Regard d’un « général conciliaire », Le prémontré Norbert Calmels, sur la vie religieuse au Concile », dans Le Concile Vatican II et le monde des religieux : (Europe occidentale et Amérique du Nord, 1950-1980), LARHRA, coll. « Chrétiens et Sociétés. Documents et Mémoires », , 36–49 p. (ISBN 979-10-365-4299-2, lire en ligne)
  22. Ordre de Prémontré, « Order of Prémontré Necrologium », sur premontre.info, (consulté le ).
  23. Bénédiction abbatiale du père Thomas Gilbert Secuianu, abbé se Saint-Michel de Frigolet : Le dimanche de la Trinité 14 juin 1992 par Monseigneur Bernard Panafieu, archevêque d'Aix-en-Provence, Averbode, Altiora, , 22 p..
  24. Ville de Tarascon, « Le Père Edmond Boulbon honoré », Le journal de Tarascon, no 11,‎ , p. 19 (ISSN 1638-962X, lire en ligne, consulté le ).
  25. Bernard Ardura, Prémontrés: histoire et spiritualité, Saint-Étienne, Publications de l'Université, 1995, p. 392.
  26. Notice no PA00081284, sur la plateforme ouverte du patrimoine, base Mérimée, ministère français de la Culture.
  27. Ministère de la Culture, Liste des immeubles protégés au titre des monuments historiques en 2015, Journal officiel de la République française du 22 avril 2016.

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Bibliographie

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Articles connexes

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Liens externes

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