Vertumne
Vertumne | |
Dieu de la mythologie romaine | |
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![]() Vertumne ou Rodolphe II en Vertumne (1590) par Giuseppe Arcimboldo. | |
Caractéristiques | |
Fonction principale | Dieu des jardins et des vergers |
Métamorphose(s) | Laboureur, moissonneur, vigneron, vieille femme |
Lieu d'origine | Rome antique |
Période d'origine | Antiquité |
Parèdre | Pomone |
Culte | |
Temple(s) | Temple à Rome |
Date de célébration | 13 août (Vertumnalia) |
Mentionné dans | Métamorphoses d'Ovide; Vicus tuscus de Propertius |
Symboles | |
Attribut(s) | couronne d'herbes diverses, fruits, corne d'abondance |
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Vertumne, dont le nom signifie « tourner, changer », est le dieu des jardins et des vergers dans la mythologie romaine. D'origine étrusque, peuple parmi lequel il était connu sous le nom de Voltumna, son culte fut adopté par les romains qui lui construisirent un temple à Rome, près du marché aux légumes et aux fruits dont il était le dieu tutélaire. Il est principalement connu pour son amour pour la nymphe Pomone et la cour qu'il lui fit, déguisé, pour en faire son épouse.
Le festival consacré à Vertumne s'appelait Vertumnalia et avait eu lieu le 13 août[1].
Origine[modifier | modifier le code]
Vertumne était sans doute un roi d'Étrurie qui, du fait des soins qu'il avait pris des fruits et de la culture des jardins, obtint, après sa mort, les honneurs de la divinité. Ce qu'il y a de certain, c'est que son culte passa de chez les Étrusques à Rome où on le considérait comme le dieu des jardins et des vergers. Ses attributions différaient de celles de Priape : il veillait surtout à la fécondité de la terre, à la germination des plantes, à leur floraison et à la maturation des fruits.
Mythe[modifier | modifier le code]


Vertumne avait le privilège de pouvoir changer de forme à son gré à l'instar de Protée, et il eut recours à cet artifice pour se faire aimer de la nymphe Pomone qu'il choisit pour épouse.
En effet, dans l’histoire des deux divinités Vertumne et Pomone telle que contée par Ovide (livre XIV des Métamorphoses), Pomone est poursuivie par de nombreux dieux de Rome en raison de sa grande beauté. Elle leur reste indifférente, préférant ignorer l'amour de ces dieux pour ne se consacrer qu'à son jardin. Cependant, l'un de ces dieux, Vertumne, fou amoureux d'elle, n'abandonne pas facilement. Utilisant ses pouvoirs, il adopte ainsi de nombreux déguisements pour obtenir la main de Pomone. Il vient chez elle d'abord comme vendangeur, puis comme gardien d'une vigne, pêcheur et soldat, vantant chaque fois les mérites du dieu Vertumne. Elle continue cependant à le mépriser et à l'ignorer. Dans une dernière tentative, il vient à elle sous l'apparence d'une vieille femme, décrivant les vertus du mariage et les dangers qui existent à rejeter l'amour. À la fin de son récit, Vertumne décide d'apparaître comme lui-même, et à sa vue, Pomone tombe amoureuse.
Temple[modifier | modifier le code]
Vertumne avait un temple à Rome, près du marché aux légumes et aux fruits dont il était le dieu tutélaire. Il était représenté sous la figure d'un jeune homme avec une couronne d'herbes de différentes espèces, tenant de la main gauche des fruits, et de la droite une corne d'abondance.
Propertius fait référence à cette statue en bronze de Vortumne[2] faite par le légendaire Mamurius Veturius, qui a également été crédité des douze boucliers rituels (anciles) des prêtres de Mars, les Saliens. La statue de bronze remplaçait une ancienne statue d'érable (xoanon) censée avoir été apportée à Rome à l'époque de Romulus[3]. La statue de Vortumne (signum Vortumni) se tenait dans un simple sanctuaire situé au Vicus Tuscus près du Forum Romanum[4], et était décorée selon les saisons changeantes. Dans son poème sur le dieu, Propertius fait parler la statue de Vortumne à la première personne comme à un passant[5].
La base de la statue fut découverte en 1549, peut-être encore in situ, mais a depuis été perdue. Une inscription[6] commémorait une restauration de la statue sous Dioclétien et Maximien au début du IVe siècle[7].
Langage populaire[modifier | modifier le code]
Les Latins avaient un proverbe suivant lequel les gens inconstants et capricieux étaient nés iratis Vertumnis[8], faisant ainsi allusion à son apparence constamment changeante.
Vertumne dans l'art[modifier | modifier le code]
Vertumne, en particulier le thème de Vertumne et Pomone, eut beaucoup de succès, tant durant l'antiquité que plus tard, à l'époque classique, séduisant les sculpteurs et peintres européens du XVIe au XVIIIe siècle et leur fournissant un sous-texte érotique dans un scénario où la beauté féminine juvénile formait un contraste avec l'apparence de la vieille femme. En racontant l'histoire des Métamorphoses, Ovide avait observé que le genre de baisers donnés par Vertumne n'avait jamais été donné par une vieille femme[9] : « Le sourire de Circé cache une intention méchante, et les baisers chauds de Vertumne conviennent mal au déguisement d'une vieille femme »[10].
Opéra, musique[modifier | modifier le code]
Le mythe de Pomone et Vertumne est à l'origine de Pomone (1671), pastorale de Robert Cambert sur des paroles de Pierre Perrin. Il s'agit du premier opéra en langue française, c'est-à-dire une pièce de théâtre entièrement en musique : le texte est entièrement chanté, il n'y a pas un mot parlé.
Il existe également une cantate (ajoutée à Les amours de Protée, opéra-ballet) titrée Pomone, de Charles-Hubert Gervais, datant de 1720 et évoquant ici aussi les amours des deux dieux.
Littérature[modifier | modifier le code]
Le nobel de littérature Joseph Brodsky (1940-1996) écrivit un poème sur Vertumne.
Tapisseries[modifier | modifier le code]
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Vertumne colporteur Bruxelles, XVIIe siècle.
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Vertumne transformé en faucheur XVIIe siècle.
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Vertumne et Pomone Carton de tapisserie par François Boucher.
Dans la peinture[modifier | modifier le code]
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Vertumne et Pomone (1682–1683) par Luca Giordano.
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Vertumne et Pomone par Francesco Melzi, début XVIe siècle Gemäldegalerie (Berlin).
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Vertumne et Pomone par Pierre Paul Rubens, 1617-1619 Collection privée, Madrid.
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Vertumne et Pomone par Antoine van Dyck, 1625 Musei di Strada Nuova, Gênes.
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Vertumne et Pomone par Jean Ranc, 1710-1722, musée Fabre.
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Vertumne et Pomone par Clément Belle, 1772, Petit Trianon.
Dans la sculpture[modifier | modifier le code]
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Vertumne (1684-1689) par Étienne Le Hongre, Versailles.
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Vertumne, par François Barois, Musée du Louvre.
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Vertumne et Pomone (1717) par Francesco Penso, dans une allée du jardin d'été, à Saint Petersbourg.
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Vertumne, au Palais Branicki, en Pologne.
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Vertumne et Pomone (1760) de style rococo par Jean-Baptiste Lemoyne.
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Vertumne et Pomone (1905) par Camille Claudel, Roubaix.
Interprétations modernes[modifier | modifier le code]
David Littlefield trouve dans l'épisode un mouvement qui s'éloigne des mythes de rapt et viol pour partir vers le désir mutuel, avec comme toile de fond un payasage latin ordonné et « civilisé »[11].
À l'inverse, Roxanne Gentilcore lit plutôt dans sa diction et ses stratégies narratives des images de tromperie, de menace voilée et de séduction, dans lesquelles Pomone, la hamadryade apprivoisé incarnant désormais le verger, n'a pas de voix[12].
Notes et références[modifier | modifier le code]
- Ovide, Fastes.
- Propertius, Elegy 4.2.41-46
- Daniel P. Harmon, "Religion in the Latin Elegists", Aufstieg und Niedergang der römischen Welt 2.16.3 (1986), pp. 1960–61; W.A. Camps, Propertius: Elegies Book IV (Cambridge University Press, 1968), p. 77.
- Michael C. J. Putnam, "The Shrine of Vortumnus" American Journal of Archaeology vol 71, 2, pp 177-179 (April 1967).
- E. C. Marquis (1974) "Vertumnus in Propertius 4, 2". Hermes, vol 102, no 3, pp 491-500.
- CIL VI.1.804: VORTUMNUS TEMPORIBUS DIOCLETIANI ET MAXIMIANI
- R. Lanciani (1903) Storia degli scavi di Roma vol. II, p. 204f.
- https://1001mythes.net/mythe/sens-de-vertumne-ou-vertumnus.html
- Qualia numquam vera dedisset anus
- Donald Lateiner (1996) "Nonverbal Behaviors in Ovid's Poetry, Primarily Metamorphoses 14", The Classical Journal, vol 91 no 3, pp 225-253 (Février–Mars 1996).
- David Littlefield (1965) "Pomona and Vertumnus: a fruition of history in Ovid's Metamorphoses" Arion vol 4, p 470.
- Roxanne Gentilcore (1995) "The Landscape of Desire: The Tale of Pomona and Vertumnus in Ovid's 'Metamorphoses'", Phoenix 49.2 (Summer 1995:110-120).
Voir aussi[modifier | modifier le code]
- Le célèbre portrait de Rodolphe II en Vertumne par Giuseppe Arcimboldo.
- Le portrait d'Anne Varice de Vallières ou Vertumne et Pomone par Hyacinthe Rigaud
- Vertumne et Pomone
Bibliographie[modifier | modifier le code]
- Pierre Commelin, Mythologie grecque et romaine [détail des éditions] [lire en ligne].