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Marcien Towa est un philosophe camerounais né à Endama au Cameroun le 05 janvier 1931 et décédé à Yaoundé le 02 juillet 2014. En 1971, il s'est rendu célèbre en publiant deux essais critiques, l'un sur Senghor, Léopold Sédar Senghor: Négritude ou Servitude?[1] et l'autre sur ce qu'il a appelé l' "ethno-philosophie", Essai sur la problématique philosophique dans l'Afrique actuelle[2]. Il a enseigné à l’École Normale Supérieure (ENS) de Yaoundé de 1962 à 2006. En 1966, il est nommé Directeur des Etudes de l'ENS, puis, en 1968, Directeur-adjoint de la même institution. Son Doctorat d'Etat Identité et Transcendancea été publié en 2011. Marcien Towa a en outre été Recteur de l'Université de Yaoundé II Soa (du 29 janvier 1993 au 21 octobre 1993) et Maire d'Elig-Mfomo (1996-2002). Il reste une référence incontounable de la philosophie (surtout africaine) de ce siècle, et un penseur qui a influencé plus d'une génération de philosophes.

Marcien Towa
une illustration sous licence libre serait bienvenue
Marcien Towa en 1979
Naissance
Décès
Nationalité
Camerounaise
École/tradition
Principaux intérêts
Idées remarquables
critique de l'ethno-philosophie, définition de la philosophie, iconoclasme révolutionnaire, rétro-jection, essentialisme culturel, critique de la négritude senghorienne, tradition/traditionalisme, identité/transcendance
Œuvres principales
Léopold Sédar Senghor : Négritude ou Servitude ? (1971)
Essai sur la problématique philosophique dans l’Afrique actuelle (1971)
L’idée d’une philosophie négro-africaine (1979)
Identité et Transcendance (2011).
Influencé par
A influencé
Jean-Godefroy Bidima, Achille Mbembe, Charles Romain Mbélé, ainsi que la quasi-totalité de la philosophie africaine contemporaine depuis 1971
Célèbre pour
avoir critiqué Senghor et l'ethnophilosophie
Citation
"Déterrer une philosophie, ce n'est pas encore philosopher"
Adjectifs dérivés
towaïen, towaïenne


Biographie (Vie, Etudes et Carrière professionnelle)[modifier | modifier le code]

Marcien Towa est né 05 janvier 1931[3] à Endama, petit village non loin d’Obala, à 60 km de la Capitale du Cameroun, Yaoundé, de Koa Ngono Ondobo et de Fouda Nga Eloundou. De 1941 à 1946, il fréquente l’École publique d’Endama ainsi que le pré-séminaire d’Efok. À partir de 1947 jusqu’à 1955, année où il obtient son baccalauréat, il fréquentera tour à tour le pré-séminaire de Mva’a, le petit séminaire d’Akono et le Grand séminaire d’Otélé. Il quitte ensuite le Cameroun pour commencer en février 1957 ses études supérieures en quatrième année à l’École Normale d’Instituteurs de Caen au milieu du deuxième trimestre. Il sera néanmoins reçu au CFEN (Certificat de Fin d’Études Normales) en mai de la même année. Mais dès avril, il s’était inscrit à la Faculté des Lettres et Sciences Humaines de l’Université de Caen avec une autorisation spéciale du Ministre de l’Éducation Nationale (en raison du retard). Ce retard ne l’empêchera pas d’obtenir sa Licence de Philosophie en juin 1959. Le 02 juin de l’année suivante, il obtient un DES (Diplôme d’Études Supérieures) avec un mémoire sur Hegel et Bergson. Le 20 octobre de cette même année il obtient son Certificat de Biologie à Paris, mais avant, le 22 juillet 1961, il se marie à Eutropie Magloire Foe Amougou, union dont sont issus 8 enfants, 24 petits-fils et deux arrière-petits-fils au moment de son décès. Entre 1961 et 1962, il effectue un stage pédagogique et enseigne dans plusieurs lycées parisiens (Louis-le-Grand, Molière, notamment), puis dès le 09 septembre 1962, le retour au Cameroun où il est nommé Professeur de pédagogie, d’histoire de la pédagogie et de philosophie à l’ENS (École Normale Supérieure) de Yaoundé. Pendant cette même année, il enseigna à l’EMIA (École Militaire Inter Armes) de Yaoundé. Puis, ce fût, du 03 novembre 1963 à 1965, une bourse de l’UNESCO qui le mène à Paris, Londres, Birmingham, Moscou, Bakou et Leningrad. C’est pendant cette période qu’il obtient en juin 1964, son Certificat d’Études Supérieures de Pédagogie à la Sorbonne, puis effectue, en 1965, des études de psychologie et de pédagogie à l’Institut Rousseau de Genève.
Dès janvier 1966, Marcien Towa est de retour au Cameroun et reprend ses enseignements à l’ENS. Ceux-ci comprennent désormais la pédagogie générale, l’histoire de la pédagogie, la philosophie et la littérature négro-africaine. Entre 1966 et 1968, il fut nommé tour à tour Directeur des Études puis Directeur-adjoint de l’ENS de Yaoundé avant de rejoindre d’Octobre 1968 à 1970, le Département de Philosophie de l’Université Fédérale de Yaoundé en qualité de Chargé d’enseignement, département dont il sera le Chef pendant onze ans, de 1970 à 1981, période à laquelle il est aussi Professeur invité à l’Université de Scherbooke, Québec au Canada (1978-1979). Entretemps, le 04 février 1969, il soutient sa Thèse de Doctorat de 3è cycle en Philosophie à la Sorbonne sous la direction de Lucien Goldmann sous le titre « Qu’est-ce que la Négritude ? ». Cette Thèse obtiendra la mention Bien. En juillet 1977, Marcien Towa soutient, sous la direction de Paul Ricœur (Lucien Goldmann ayant malheureusement disparu), une Thèse de Doctorat d’État en Philosophie, « Identité et Transcendance »[4]. Entre 1981 et 1991, Marcien Towa sera Chef du Département de Pensée Africaine au CREA (Centre de Recherche des Études Anthropologiques) de l’ISH (Institut des Sciences Humaines) à la DGRST (Délégation Générale de la Recherche Scientifique et Technique)de Yaoundé. Cette intense activité philosophique va connaître une courte pause. En effet, du 29 janvier 1993 au 21 octobre de la même année, Marcien Towa sera nommé Recteur de la toute nouvelle Université de Yaoundé II Soa . Après cette parenthèse, Marcien Towa retourne au Département de Philosophie de la Faculté des Arts, Lettres et Sciences Humaines de la nouvelle Université de Yaoundé I (anciennement Université du Cameroun), où il restera jusqu’en 1999, année de son départ effectif à la retraite (il a alors 68 ans). Toutefois, l’École Normale Supérieure de Yaoundé requiert encore ses services. Il accepte, et y devient donc de 1999 à 2006, Enseignant Vacataire. En 1996, ayant obtenu par son âge (65 ans) le droit de se retirer de la vie universitaire, ses connaissances lui proposent de se présenter à la mairie d’Elig-Mfomo. Le coup d’essai est un coup de maître. Marcien Towa sera donc le premier Maire de la Commune Rurale d’Elig-Mfomo dans le Département de la Lékié, Région du Centre, de 1996 jusqu’à 2002. Marcien Towa s’est éteint le 02 juillet 2014 à Yaoundé des suites de maladie.

Philosophie[modifier | modifier le code]

La philosophie comme « pensée de l'Absolu »[modifier | modifier le code]

La philosophie de Marcien Towa a pour cadre général la libération de l’homme. Il s’agit précisément de le soustraire à l’autorité despotique des systèmes (idéologiques ou politiques) qui entravent sa liberté. La philosophie de Marcien Towa apparaît donc sous ses traits fondamentaux comme une ode à la liberté en tant qu’elle est définie à la fois de manière formelle et de manière pratique. Dans cette exaltation de la liberté, la pensée et la raison occupent une place importante, puisqu’elles sont pour le philosophe les marques d’un esprit libre. En effet, la faculté à l’œuvre dans l’activité humaine libre est la raison et sa production est la pensée. C’est pourquoi la philosophie ne peut jamais faire que l’apologie de la liberté, c’est-à-dire de la raison et de la pensée. Or la pensée se dit essentiellement de manière critique, en tant qu’elle encourage l’usage de la raison dont le fonctionnement est avant tout négatif. C’est le sens « restrictif » que Marcien Towa assigne au verbe « penser ». Il explique qu’il faut entendre par penser, « peser », « discuter les représentations, les croyances, les opinions », « les confronter », « examiner le pour et le contre de chacune », « les trier » et « ne retenir comme vraies que celles qui résistent à cette épreuve de critique et de tri »[5]. Par cette vision « restrictive » du terme « penser », Towa se situe dans le courant philosophique ouvert par Descartes, et insiste sur l’aspect critique de la philosophie. C’est ainsi qu’il propose de définir cette activité comme la « pensée de l’Absolu »[6]. Le terme Absolu renvoie ici à tout ce qui se pose ou se présente à l’homme comme obstacle à son épanouissement, c’est-à-dire justement à la pensée. L’Absolu, c’est ce qui ne veut pas être pensé, ce qui résiste à ce mouvement, mais que doit nécessairement penser la philosophie. Chez Towa, l’Absolu se dit de deux manières et chacune de ces manières implique une expression positive et négative. Il y a d’abord l’Absolu idéologique qui se dit négativement en tant que mythe (dont le plus élaboré est Dieu), et se dit positivement en tant que valeurs. Théoriquement, la philosophie doit donc penser la divinité et penser les valeurs qui apparaissent comme les fils conducteurs de la vie humaine. La philosophie, par essence refuse l’autorité de Dieu, c’est à dire en général, toute idée de « sacré pour autant qu’il veut s’imposer à l’homme du dehors »[7].Autrement dit, la seule autorité, l’autorité suprême que reconnaît la philosophie, c’est-à-dire la pensée en tant qu’elle se déploie concrètement, est la raison elle-même : c’est pourquoi « la philosophie est essentiellement sacrilège »[8]. Dans cette optique essentiellement critique, la philosophie détruit une possibilité des valeurs : Dieu, et s’expose au danger de la négation complète de ces dernières. Ici, Towa prend ses distances avec une bonne partie de la philosophie et affirme que la désacralisation de Dieu n’entraine pas une destruction des valeurs. Au contraire, éliminer Dieu, c’est laisser plus de place à l’homme pour réfléchir sur lui-même ainsi que sur le sens à donner à sa vie. Les normes ne doivent donc plus être imposées du dehors, mais du dedans, par la raison dans un dialogue critique avec elle-même.
Vient ensuite l’Absolu pratique que Towa identifie comme étant la tradition. En effet, la tradition utilise le même « camouflage » que Dieu en se faisant passer pour ce qui est sacré. Towa applique donc à la tradition la même critique précédente, tout en faisant remarquer qu’il faut comprendre la tradition de deux manières. D’abord de manière négative pour la critiquer, mais aussi et surtout de manière positive, pour la continuer. C’est le sens de la distinction towaïenne entre « tradition » et « traditionalisme ». En effet, « Le traditionalisme est immobilisation de la tradition par sacralisation ou par naturalisation »[9] ; elle « enferme et limite »[10], tandis que la tradition véritable est en tant que « praxis créatrice »[11], le moment où nos ancêtres – c’est à dire ceux dont nous tenons la tradition sous forme de système de valeurs, de coutumes, de mœurs, etc. – durent être des créateurs. Pour Towa en effet, « Les artisans de la tradition étaient eux-mêmes des créateurs »[12], et nous leur rendons hommage, non en reproduisant fidèlement ce qu’ils nous ont laissé, mais en honorant leur mémoire, c’est-à-dire en nous positionnant nous-mêmes comme ce qu’ils furent : des créateurs. Sur le plan pratique, la philosophie est l’objectivation de cette double visée iconoclaste et révolutionnaire.

Influences philosophiques[modifier | modifier le code]

Towa et Hegel[modifier | modifier le code]

Un des grands apports philosophique de Towa réside dans sa définition de la philosophie, et cette dernière doit beaucoup aux élaborations hégéliennes. Cela est d’abord visible dans l’Essai sur la problématique philosophique dans l’Afrique actuelle, dont le quatrième chapitre expose « Le concept européen de philosophie ». Dans les « diverses opinions concernant la nature de la philosophie »[13], Towa choisit Hegel, en avançant l’argument de son « prestige »[14]. Par ce terme, Towa renvoie à la profondeur de son jugement qui englobe si ce n’est dépasse une bonne partie de ceux qu’il précède et dont il procède. Dans ses Leçons sur l’histoire de la philosophie[15], texte fondamental dont s’inspire Towa pour son analyse, Hegel a défini la philosophie comme la « pensée de la pensée, le général ayant pour contenu le général »[16]. Autrement dit, pour Hegel, la philosophie est absolue et elle acquiert ce caractère en soumettant l’Absolu à la réflexion. C’est pourquoi « la philosophie entre en conflit avec la religion »[17], car cette dernière préserve encore certains endroits de la critique corrosive de la pensée. Mais c’est aussi pourquoi la philosophie doit être en connexion avec la science, ou mieux, c’est pourquoi la philosophie est la seule vraie science, c’est-à-dire le seul vrai exposé général du général. Towa retient donc de Hegel deux choses principales : d’abord le fait que la philosophie est un exposé général ayant pour contenu le général, et ensuite le fait que la philosophie a une « nature essentiellement humaniste »[18]. La première proposition n’implique pas un mépris du particulier, mais invite à se représenter ce dernier comme une expression de la généralité. Cette idée est très importante pour Marcien Towa, car elle est un de ses principaux arguments contre l’ethnophilosophie. La seconde proposition sert de fondement à la propre approche que Towa a de la philosophie. C’est aussi elle qui lui permet de prendre ses distances de Hegel.

Towa et Nkrumah[modifier | modifier le code]

Marcien Towa retient surtout deux leçons de Kwame Nkrumah. La première, générale, résiste dans le contenu de la philosophie. Selon le premier président du Ghana, la philosophie est indissociable de l’idéologie. Ces deux disciplines apparaîtraient comme les deux faces d’une même pièce. C’est dans Le consciencisme[19] qu’il développe cette idée. La démonstration de Nkrumah repose sur un raisonnement dont le déploiement est ternaire. Il montre d’abord que la philosophie ne peut jamais surgir que d’un milieu social précis. Dans cette existence, toute philosophie, soit donne son approbation au milieu social dont elle émerge, soit récuse le fonctionnement de ce milieu. Dans le premier cas, elle est réactionnaire et dans le second révolutionnaire. Nkrumah peut donc conclure que « sous son aspect social, la philosophie met en avant une idéologie »[20]. À la différence de Karl Marx et Friedrich Engels, Nkrumah ne donne pas à ce terme une connotation polémique. Chez lui, le contenu du terme idéologie est « neutre ». Il renvoie simplement à l’ensemble doctrinal que composent une théorie politique, une théorie sociale et une théorie morale contenues dans toute expression concrète et abstraite de la vie d’un peuple, et qui se manifeste depuis sa structure de classes jusqu’à sa religion, en passant par son histoire, sa littérature et son art<ref>Ibid., p. 93-94.</ref>. Cette leçon sera pour Marcien Towa une véritable conviction et c’est suivant cette affirmation du caractère indissoluble du lien qui unit la philosophie (et par là de toute activité humaine générale engageant la pensée) à l’idéologie. L’affirmation de ce lien a exposé Towa à la critique selon laquelle il serait davantage idéologue que philosophe.

Towa et Marx[modifier | modifier le code]

Le rapport de Towa a Karl Marx est secondaire comparé aux rapports à Hegel et à Nkrumah. La raison est d’abord que Towa ne renvoie quasiment jamais à Karl Marx. Dans l’Essai sur la problématique philosophique dans l’Afrique actuelle par exemple, Karl Marx n’intervient qu’une fois, à la page 52 quand il s’agit pour l’auteur d’expliquer la nature du rapport des peuples en transposant l’analyse marxienne de la lutte des classes. On constat similaire peut être fait lorsqu’on parcourt L’idée d’une philosophie négro-africaine. Marx n’y apparait que dans le cadre du Débat qui suit l’exposé du livre et pas dans le corps du texte. Quant à sa thèse de Doctorat de 3è Cycle[21] où le nom de Marx apparait quatre fois, on peut dire que ces apparitions ne sont guère que de simples allusions, car les idées de Marx ne sont jamais discutées. C’est dans Identité et Transcendance[22] qu’il consacre une analyse aux idées de Marx et Engels. À partir de la page 302 jusqu’à la page 312, Towa offre un commentaire de la notion d’idéologie telle qu’employée dans L’idéologie allemande, c’est d’ailleurs le seul texte de Marx auquel réfère Towa. L’insuffisance manifeste des sources marxiennes de Towa qui contraste avec le vocabulaire qui y est afférent rend compte du fait que Towa a davantage suivi « Le vaste mouvement marxiste »[23] plutôt que s’être attaché à une étude rigoureuse de cet auteur. Le « marxisme » de Marcien Towa est donc de « seconde main », principalement reçu de Nkrumah, qui lui-même s'inspire assez librement de Lénine. D’ailleurs, s’exprimant sur la tradition de pensée dont il est issu, Towa ne mentionne pas le nom de Marx. Il écrit : « Mes racines philosophiques ou spirituelles se trouvent dans la pensée d'Aimé Césaire, de Franz Fanon, Kwame Nkrumah et, dans une certaine mesure,chez Cheikh Anta Diop...»[24].

L’esthétique de Marcien Towa[modifier | modifier le code]

L’art comme idéologie[modifier | modifier le code]

On retient généralement de Towa qu’il a critiqué Senghor de manière violente. Son Léopold Sédar Senghor : Négritude ou Servitude ? est avec Négritude et Négrologues[25] de Stanilas Adotevi un des livres à avoir contribué à enterrer la problématique de la Négritude. Mais ce qu’on oublie fréquemment de mentionner, c’est qu’en réalité, Marcien Towa ne critique qu’un seul aspect de la Négritude, celui que promeut Senghor : le « senghorisme »[26]. L’autre aspect dont le principal promoteur est Césaire (et avec lui Damas) ne subit pas les foudres du philosophe d’Endama. C’est dans cette rencontre avec l’art par le biais de la poésie, qu’il faut découvrir ce qui doit à juste titre s’appeler l’esthétique de Marcien Towa. Ce terme esthétique doit être réduit à sa signification hégélienne : philosophie de l’art[27]. Cet énoncé peut encore être simplifié chez Towa dont l’esthétique n’est pas une philosophie de l’art en général, mais d’un art en particulier (la poésie) et d’une expression particulière de cette poésie : la Négritude.
L’esthétique de Marcien Towa est donc principalement une philosophie de la Négritude. Elle repose sur un axiome simple hérité de Hegel et Nkrumah, et exposé dès le Doctorat de 3è Cycle en 1969. Cet axiome stipule que l’art est consubstantiellement lié à la société, et qu’en tant que tel il participe nécessaire de l’idéologie. La première proposition de l’axiome est hégélienne, la seconde est nkrumahienne. Hegel a expliqué que l’art est la première expression spirituelle par laquelle un peuple arrive à la conscience de soi-même. L’art est ainsi le premier niveau de la dernière étape de la philosophie de l’Esprit du Maître d’Iéna, avant la religion et la philosophie. Si tel est donc le cas, étudier l’art d’un peuple permettrait de le comprendre, c’est-à-dire dans le langage hégélien, de connaitre à quel niveau de connaissance de lui-même, c’est-à-dire de conscience de l’Esprit, il est parvenu. Si Towa est d’accord avec cette idée hégélienne, il rejette pourtant son contenu idéaliste, et la situation contenue de manière objective dans l’art, n’est pas seulement une situation abstraite de l’esprit ; c’est surtout une situation concrète de la conscience. Et dans cette concrétion, l’art rencontre inévitablement l’idéologie. La Négritude apparait comme une expression parfaite de cette dualité de l’art. D’un côté, elle rend effectivement compte d’un certain état d’avancement de la conscience Nègre, mais surtout, de l’autre, elle traduit la situation concrète de cette conscience en lutte pour se libérer du joug de l’impérialisme et du colonialisme. Dès son origine, la Négritude confirme donc l’affirmation de Nkrumah selon laquelle « l’art [est] l’un des instruments subtils de l’idéologie »[28]. L’introduction de Poésie de la Négritude expose cet accent nkrumahiste de la pensée towaïenne. Dès la première ligne de la thèse, Towa qualifie la Négritude de « courant idéologique »[29] sans occulter le fait que « la notion de négritude est essentiellement liée à un courant littéraire, plus précisément à une poésie »[30], qui est elle-même issu d’un « milieu social et historique »[31] bien précis. Ce n’est que la conjonction de tous ces facteurs qui permettent d’établir la « signification » de l’œuvre d’art en général. La première partie de cette thèse a pour fonction principale de « préciser, au préalable, nos vues sur l’art et sur la poésie »[32]. Ces vues résident essentiellement dans le rejet de l’idée d’un art pour l’art qui s’appuie sur une relecture de deux propositions de la définition kantienne de la beauté : suivant la qualité et suivant la finalité.
Suivant la qualité, Kant a écrit que le beau est la qualité esthétique d’un l’objet qui procure une satisfaction désintéressée[33]. En ce qui concerne la finalité, Kant a écrit que « La beauté est la forme de la finalité d’un objet, en tant qu’elle est perçue dans cet objet sans représentation d’une fin »[34]. Or, en analysant la justification du « sens commun » que donne Kant, justification qui pose l’existence d’une « communauté morale » qui garantit à la fois la subjectivité et l’universalité du jugement du goût, Towa peut soutenir que chez Kant, l’art n’est pas si désintéressé qu’il n’y parait. En réalité, il est hautement préoccupé par la praxis et la morale. Ainsi, « Le beau est proprement le symbole de la moralité, et c’est seulement de ce point de vue qu’il prétend à l’universel »[35]. Towa peut donc réfuter l’affirmation de Pauvert qui ouvre le premier chapitre de sa thèse et qui stipule, sous le couvert de la théorie de Kant, qu’on ne peut valablement parler d’art nègre. Le point de vue de Towa est tout autre. Il estime, retenant l’essentiel de la signification spirituelle de l’art de Hegel, mais rejetant « le mythe de l’“Esprit du monde” »[36] au profit du matérialisme historique, c’est-à-dire de l’idée que l’agent de l’art est l’homme engagé dans l’Histoire, que « L’art est une forme d’objectivation de soi de l’homme concret »[37]. Mais cette objectivation, bien que réelle (en tant qu’elle concerne l’homme concret), se fait sous le mode de l’imagination, car l’art est le moment où l’homme se regarde engagé dans la vie. Par cette distance entre le donné brut (engagé réel de l’homme dans la vie) et le donné artistique (la représentation imaginaire de cet engagement réel), « L’art appartient à la conscience médiate, réfléchie que l’homme prend de lui-même, et comme tel, diffère qualitativement de tout ce qui est immédiat, non-réfléchi »[38]. Par cette médiation qu’il réalise entre l’homme et le monde extérieur, l’art appartient à une « sphère plus haute (psychologiquement) »[39] que la vie réelle : cette sphère, c’est l’idéologie, par laquelle, « l’art, dans la mesure où il donne au groupe une plus grande connaissance de soi, joue un rôle important dans la vie concrète de ce groupe. Il transforme et élève la conscience des hommes. Les hommes transformés intérieurement par l’art, transforment à leur tour le monde concret selon leur conscience enrichie »[40].

Négritude et révolution[modifier | modifier le code]

Le premier chapitre de Poésie de la négritude expose la vision towaïenne de l’art. De cette dernière, on peut retenir essentiellement que l’art est une historiographie à la fois réelle et imaginaire. Et c’est précisément en rapport avec ce deuxième aspect que l’art devient vraiment art, c’est-à-dire fondamentalement révolutionnaire. Car en effet, si l’art peut occuper les deux positions idéologiques que sont la réaction et le progrès, c’est seulement en rapport avec cette seconde orientation qu’il libère tout son potentiel qui est celui d’influencer l’action. Or un art réactionnaire n’influence pas l’action, il la légitime et engage la société dans un statu quo qui la mènera bientôt à la mort. À contrario, un art révolutionnaire sert le progrès, c’est-à-dire l’avancement toujours croissant de l’homme sur le chemin de l’humanité entendue au sein towaïen comme expression de la liberté. Ce contenu révolutionnaire, l’art le doit à l’imagination qui lui sert de moyen d’expression. En tant que réalisant la médiation entre l’homme et lui-même, c’est-à-dire entre la vie réelle et la vie réelle représentée par l’art, l’imagination participe d’une négation du simple principe de réalité. En effet, en sublimant la réalité, c’est-à-dire en la subordonnant à la puissance de la faculté d’imaginer, l’homme nie le donné déjà-là et se représente un être-autrement de ce dernier. La sublimation de la réalité est donc une négation de cette dernière. Cet acte révolutionnaire par lequel l’art substitue à la réalité quotidienne sa propre réalité est parfaitement perceptible dans le gestus originel et fondamental de la Négritude.
La deuxième partie de cette thèse interroge avec justesse la « Genèse socio-historique de la Négritude », autrement dit, les conditions concrètes dans lesquelles, ou précisément contre lesquelles, s’est élaboré le concept de Négritude. Cette situation, Towa la condense dans une expression forte : « L’enfer de l’oppression »[41]. À cet enfer, Césaire oppose une révolte, mais une révolte consciente du fait qu’elle doit se situer à un niveau supérieur de celui de la chose qu’elle refoule : elle doit se situer au niveau des mots, au niveau de l’art. Towa rappelle à juste titre « L’expérience parisienne des étudiants Noirs »[42] qui procura à Césaire la fabuleuse idée de transformer l’injure en compliment : le fameux mot « Nègre ! ». Ici aussi, c’est par l’art que s’opère la sublimation d’un monde à dépasser pour un autre à incarner et à défendre. Ce n’est pas un hasard si Towa fait remarquer que c’est d’abord « Dans le domaine de l’art et de la littérature [que] des talents et même des génies négro-africains ne sont imposés »[43]. La raison est que le mouvement de protestation des Noirs fût d’abord un mouvement artistique avant d’être un mouvement intellectuel. C’est pourquoi Marcien Towa ne critique jamais la Négritude du point de vue de ses fondements, mais toujours et seulement du point de vue d’une expression particulière de ces fondements.
En effet, dès 1969, Marcien Towa soutient que « la négritude qui est une poésie de combat n’est pas une anomalie »[44]. Elle est au contraire, le premier essai par lequel la conscience Nègre se dressait contre l’oppression. C’est pourquoi Towa estime que la Négritude est essentiellement révolutionnaire[45], négation de ce monde et instauration (artistique d’abord et socio-politique ensuite) d’un monde nouveau. Mais ce caractère révolutionnaire s’estompe selon Towa une fois que le monde nouveau représenté jadis seulement en idée devient une potentialité concrète. Ici, l’imagination (l’art) doit laisser la place à la politique. Towa expose donc, à travers l’exemple de la Négritude, une conception essentiellement négative de l’imagination en tant que prélude théorique à la révolution, mais qui doit s’effacer une fois que cette révolution est capable d’être envisagée de manière réelle. C’est pourquoi, à un certain niveau de développement de la conscience Nègre, la Négritude devient superflue, car tandis que l’artiste veut « édifier toute une civilisation, faire surgir tout un monde en se payant de mots »[46], l’homme engagé dans le combat politique réel, comprend qu’ « il faut payer de son être même »[47]. C’est à ce niveau que se situe le dépassement de l’art par la politique, car si la première de ces disciplines de l’esprit prépare l’action de la seconde en lui fournissant un cadre imaginaire dans lequel elle anticipe la négation du monde tel qu’il apparaît, seule la politique, c’est-à-dire la mise en œuvre concrète de cette promesse permet d’insuffler de la vie à ce contenu idéologique de l’art.

La philosophie critique de Marcien Towa[modifier | modifier le code]

La triple critique de Senghor[modifier | modifier le code]

La critique esthétique[modifier | modifier le code]

Une dimension fondamentale de la pensée de Marcien Towa est la critique. C’est d’ailleurs dans ce domaine qu’il se rendît célèbre en critiquant le Président Sénégalais Léopold Sédar Senghor qu’il accuse d’avoir travesti la dimension révolutionnaire du mouvement de Négritude jusqu’à faire coïncider ce dernier avec le colonialisme. La critique esthétique rejoint par ce biais la critique politique. Sur le plan esthétique, Senghor rompt avec l’inspiration révolutionnaire originelle de l’art, et produit un art aliéné plutôt qu’un art qui exalte la liberté. Chez lui, l’imagination est mise au service de la réalité plutôt qu’utilisée comme ferment négatif de l’action (politique). Il s’agit principalement de neutraliser les velléités du Nègre, de l’adoucir, c’est-à-dire de lui faire accepter la réalité telle qu’elle est. Towa écrit que « La poésie de Senghor, sensuelle, élégiaque, nostalgique, crée une atmosphère tranquillisante et mystique fort différente de celle de la poésie d’un Damas ou d’un Césaire. Le monde n’y est pas intolérable »[48]. Senghor n’utilise donc pas l’imagination à l’œuvre en art tel que déterminé par Towa, mais pour masquer la vérité de la cruauté du monde, pour inviter à l’accepter. En effet, la poésie de Senghor, « ne rompt pas avec le monde, mais l’aménage et compose avec lui. Son problème n’est pas de le révolutionner, mais l’amender »[49]. Le résultat est une poésie pauvre, fausse, parce qu’elle produit une conscience inconséquente de la réalité. Et comme cette poésie concerne en premier lieu le Nègre, dont la situation est d’abord et avant tout socio-politique, c’est-à-dire idéologique, une telle poésie se pose donc aussi comme conscience fausse de la réalité socio-politique de cette catégorie sociale. Par cette connivence avec la réalité, « l’ordre établi »[50], la poésie de Senghor produit une double caricature idéologique. D’abord une caricature du monde et ensuite et surtout, une caricature du Nègre. La caricature du monde est un maquillage esthétique de sa violence profonde, sublimation d’un autre genre, dont les fruits politiques ne sont pas l’expression de la liberté, mais le pardon et l’oubli. La caricature du Nègre est encore plus grave et c’est dans la critique de cette figure que réside l’essentiel des récriminations politiques de Towa contre Senghor.

La critique politique[modifier | modifier le code]

Tel qu’il se dégage de sa poésie, « Le nouveau visage du bon nègre »[51] est un visage docile qui traduit les deux grands traits caractéristiques de « l’âme noire » : l’incapacité technique et l’émotivité. En raison de ces deux caractéristiques, les Nègres, dans le concert de l’histoire, « tiendront la batterie, tandis que l’Europe dirigerait l’orchestre »[52]. Pour compenser ces « lacunes » naturelles du Nègre, Senghor appelle au « métissage ». À partir de l’étude du poème « Épitre à la princesse »[53], Towa établit que le mariage du poète et de la princesse est le symbole esthétique du mariage politique de l’Afrique et de l’Europe, tout en faisant souligner que « Dans ce mariage l’Europe représente la puissance, la raison, tandis que l’Afrique, c’est l’émotion, l’instinct, la sensualité étrangère à la raison »[54]. Plus précisément, « L’Europe c’est le mâle et l’Afrique l’élément féminin »[55]. Towa conclut donc qu’il y a chez Senghor une théorisation de l’infériorité du Nègre et une ontologisation de la servitude de ce dernier : c’est le « fatalisme de la servitude du nègre » qu’expose le dernier chapitre de Léopold Sédar Senghor : Négritude ou Servitude ? C’est dans cette double orientation politique de légitimation de l’oppression et de délégitimation de la révolution qu’il faut comprendre, selon Towa, la poésie de Senghor qui apparait à ses yeux comme « l’idéologie quasiment officielle du néo-colonialisme, le ciment de la prison où le néo-colonialisme entend nous enfermer, et que nous avons donc à briser »[56]. Cette prison est celle de l’idéologie contenue dans une phrase célèbre de Senghor : « L’émotion est nègre comme la raison est hellène »[57].

La critique idéologique[modifier | modifier le code]

Du point de vue idéologique, Towa fait remarquer que la poésie de Senghor dégage une vision intolérable du Nègre qui réside dans une confusion entre le biologique et le culturel. Towa parle de la « biologisation du culturel »[58], c’est-à-dire du racisme. Towa écrit en effet que « Selon Senghor, le nègre est émotif et mystique au même titre qu’il a la peau noire et les cheveux crépus »[59]. C’est dire que « l’âme noire » est considérée par lui « comme pratiquement intemporelle »[60]. La conséquence idéologico-politique est que le nègre est une donnée ne varietur, qu’il est tel que nous le voyons, qu’il a toujours été ainsi et qu’il se sera toujours. Or une telle définition de l’homme coïncide étrangement avec ce que nous savons de l’animal, qui est directement ce qu’il doit être et ne peut être rien d’autre que ce qu’il est. Towa conclut de ces affirmations que « Nous avons affaire à une théorie rigoureusement raciste »[61], car elle refuse l’humanité à l’homme en l’enfermant dans la culture hypostasiée en tant que forme biologique prédéterminant l’être et le comportement de l’individu.

Dans Identité et transcendance, Marcien Towa continue et amplifie cette critique. Il range Senghor dans ce qu’il appelle « Les doctrines de l’identité ». Ce dernier terme est à comprendre comme une donnée dont l’individu serait prisonnier : une sorte d’essence. Towa écrit que pour Senghor « “l’ensemble des valeurs” qui constituent la négritude est ontologiquement inséparable du Nègre. Ce dernier en saurait les dépasser, pas plus que le zèbre ne peut dépasser ses zébrures. La culture noire ne fait qu’un avec la race noire, elle est en quelque sorte inscrite dans sa structure génétique »[62]. Il s’ensuit donc que « Le Nègre est fixé, enfermé dans sa négritude »[63]. Insistant de nouveau sur le fait que Senghor réduit et enferme l’homme Noir dans l’émotion en lui refusant ontologiquement la possibilité de se départir de cette condition d’existence fondamentale sans recourir à aucun argument ni scientifique ni philosophique, Marcien Towa estime que « le senghorisme se dénonce comme un dogmatisme émotif »[64] à distinguer de la véritable « négritude, c’est-à-dire refus de l’assimilationnisme culturel »[65], d’où un choix à opérer : « le senghorisme sans combat ou le combat sans senghorisme »[66].

La critique de l’ethno-philosophie[modifier | modifier le code]

Spécificité towaïenne du concept d’ethno-philosophie[modifier | modifier le code]

Marcien Towa a très tôt pris position contre la tentative d’exhumer une philosophie africaine au contenu suspect. Cette entreprise, il l’a nommée « ethno-philosophie »[67]. Mais il faut distinguer la critique qu’en fait Marcien Towa de celles de Césaire[68], d’Éboussi Boulaga[69] et de Paulin Houtondji[70] notamment. Césaire, Eboussi Boulaga et Paulin Hountondji ont pour référent essentiel un missionnaire belge du nom de Placide Tempels, qui a publié en 1945 un livre intitulé La philosophie bantoue[71], et dans une moindre mesure pour Éboussi Boulaga (1977) et Houtondji, Alexis Kagame[72]. En outre, même si les critiques de l’ethnophilosophie sont surtout politiques et résident principalement dans l’idée que la « philosophie bantoue » de Tempels est un passéisme qui invite l’Afrique à un statu quo et qui fonde ontologiquement la supériorité de l’Occidental sur l’Africain, Towa (et Éboussi Boulaga, mais différemment) insiste davantage sur l’aspect méthodique. Towa discute de l’ethnophilosophie à travers la réception africaine de Tempels, notamment chez Alassane Ndaw[73] et Basile-Juléat Fouda[74]. Towa entend surtout « appeler l’attention non sur le contenu détaillé de ces deux derniers travaux, mais sur le problème qu’ils posent et la méthode suivie pour le résoudre »[75]. C’est donc à raison qu’Hountondji fait remarquer que la critique towaïenne de l’ethnophilosophie concerne « seulement (…) la méthode des philosophes de la négritude »[76]. Davantage, à la différence d’Hountondji, Towa ne distingue pas d’un côté « l’ethnophilosophie africaine » et de l’autre « l’ethnophilosophie occidentale »[77].

À propos de la méthode ethno-philosohique[modifier | modifier le code]

Le principal reproche que Marcien Towa adresse à la méthode que suivent Alassane Ndaw et Basile-Juléat Fouda – dans le sillage méthodologique de Tempels et Kagame et le sillage idéologique de la négritude – est qu’elle réalise un mélange hétérogène entre ethnologie et philosophie en trahissant à la fois l’une et l’autre des deux disciplines. C’est en cela que Towa juge que la méthode de ces deux philosophes est « ethno-philosophique ». De l’ethnologie, elle retient l’attitude qui consiste à décrire l’univers culturel dont il s’agit de faire l’analyse. Puis, « Au lieu d’adopter à leur endroit l’attitude de détachement scientifique, les auteurs en quête d’une philosophie africaine spécifique leur confèrent une valeur normative relativement à la vérité ou à l’action »[78]. Ainsi, le travail de ces philosophes est essentiellement ethnologique, tandis que le contenu philosophique de ces derniers n’est rien d’autre qu’une prétention qui repose sur une erreur grave : « l’élargissement du sens du mot philosophie »[79] « jusqu’à coïncider avec celui de culture »[80], « au sens sociologique du terme »[81], c’est-à-dire en tant qu'ensemble de manifestations théoriques et pratiques de la vie d’un groupe. Parmi ces manifestations qui servent de matériau à la réflexion des ethnophilosophes, il y a le mythe, la religion et l’art. Or, selon Towa, bien que la philosophie soit une expression culturelle, toutes les expressions culturelles ne sont pas de la philosophie, d’où l’insistance répétée sur la saisie du sens du mot « philosophie » à la fois dans l’Essai sur la problématique philosophique dans l’Afrique actuelle, mais aussi et surtout dans L’idée d’une philosophie négro-africaine. En clair, l’ethnophilosophie pèche par deux défauts. Un défaut de neutralité d’abord (en ce qui concerne l’exposé des productions culturelles africaines) : c’est le défaut ethnologique, et un défaut de critique ensuite (en ce qui concerne l’examen desdites productions) : c’est le défaut philosophique. À côté de ce défaut, il y a un autre que Towa nomme rétro-jection qui consiste à injecter dans l’univers traditionnel (en l’occurrence africain) nos propres idées et valeurs. Il en résulte une altération considérable de la réalité traditionnelle qui ne permet pas une analyse objective de cette dernière. Concrètement, en projetant dans le monde traditionnel ses propres vues, l’ethnophilosophe ne peut qu’y trouver ce qu’il y a lui-même placé et qui n’y existe pas forcément. Le résultat est évidemment, du point de vue de Marcien Towa, irrecevable vu qu’il est dans l’incapacité « d’enrichir notre connaissance de nous-mêmes par l’apport de documents neufs solidement établis »[82].

Nkrumah et la paternité du mot "ethno-philosophie"[modifier | modifier le code]

Alors qu’il rédige l’Essai sur la problématique philosophique dans l’Afrique actuelle au début de l’année 1970[83], Towa croit qu’il forge le concept d’ethno-philosophie. En fait, comme le démontrera plus tard Hountondji, et contrairement aux affirmations de Bidja Ava[84], le premier à avoir utilisé le terme « ethno-philosophie » est Kwame Nkrumah qui s’était inscrit en Doctorat à l’Université de Pennsylvanie avec une thèse dont le sous-titre mentionnait explicitement l’expression « ethno-plilosophy »[85]. La première trace de cette « rectification » de l’histoire par laquelle ni Hountondji, ni Towa ne doivent se voir attribuer la paternité du concept d’ethnophilosophie apparait en 1983 au Colloque de Philosophie de l’École Normale Supérieure organisée par Ébénézer Njoh-Mouelle. À la suite de cette clarification, Towa répond ce qui suit : « Je voudrais d’abord remercier Hountondji pour la clarification qu’il a faite concernant la manie de coller le préfixe “ethno” à tout ce qui est africain et primitif ». C’est en ce sens par exemple qu’Éboussi Boulaga parle de « La fin de l’ethnologie »[86]. Il faut toutefois préciser que tel qu’il est employé aujourd’hui, le terme ethnophilosophie tient essentiellement de la signification que lui ont donnée Towa et Hountondji.

Réception critique de l’œuvre de Marcien Towa[modifier | modifier le code]

Le reproche d’hégélianisme[modifier | modifier le code]

On a effet beaucoup reproché à Towa sa proximité avec Hegel. Qu’il s’agisse de Basile Fouda et Sindjoun-Pokam[87], ou de Yai[88], ou bien plus récemment de Nsame Mbongo[89]. Il est vrai que Hegel occupe une place particulière dans la philosophie de Marcien Towa, notamment dans l’Essai sur la problématique philosophique dans l’Afrique actuelle, où il est le principal philosophe (occidental) à être discuté. Mais dans le même livre, Towa prend déjà ses distances de Hegel et distingue chez ce dernier le moment proprement philosophique de la pensée du philosophe d’Iéna du moment essentiellement idéologique. Le moment proprement philosophique de la pensée de Hegel réside dans sa définition de la philosophie qui est d’un intérêt certain pour la réflexion, tandis que son moment idéologique concerne les conséquences qu’il en tire afin d’établir une histoire de la philosophie qui est au final une philosophie de l’histoire dont le but ultime est de fonder philosophiquement, c’est-à-dire de légitimer par la pensée « la hiérarchisation des civilisations et des sociétés »[90]. Une telle distance est déjà perceptible dans l’Essai quand Marcien Towa écrit par exemple à la fin du premier chapitre que : « …la philosophie hégélienne apparaît par un côté (celui que nous venons de présenter) comme une véritable idéologie de l’impérialisme occidental (…) Il convient cependant de distinguer deux points dans la position hégélienne : la détermination du concept de philosophie et le refus de la philosophie aux peuples non européens. Sur le premier point (…) Hegel est éminemment qualifié pour définir la nature et les exigences de sa philosophie. En revanche, (…) le second point doit (…) demeurer ouvert »[91]. Par cette limite qu’il se donne, Marcien Towa préserve ce qui lui semble une caractéristique essentielle de la philosophie, la promotion de l’humanité, et se refuse de professer une philosophie qui arrive, par un de ses côtés, à trahir cette orientation. Mais selon Rachel Bidja, la lecture que Towa et bon nombre d’Africains ont de Hegel, est une lecture idéologique. Ce mot signifie chez elle un « discours d’occultation »[92], « mystificateur de la réalité »[93]. Au lieu d’étudier le contenu réel de la philosophie de Hegel, les Africains (dont Towa lui-même) s’en tiennent aux critiques les plus grossières. Bidima, s’exprimant sur la même question écrit qu’ « En Afrique le rapport à Hegel est assez polémique »[94] puisqu’il s’est construit essentiellement autour de la « problématique coloniale qui consistait à exhiber une culture africaine glorieuse face à ses négateurs »[95]. Il est toutefois difficile de ranger Marcien Towa dans ce groupe de zélateurs voués coute que coute à la « cause africaine », et c’est ce qui rendrait d’ailleurs son rapport à Hegel plus problématique. En réalité, comme on peut le constater dans l’Essai sur la problématique philosophique dans l’Afrique actuelle, Marcien Towa ne suit Hegel qu’en tant que ce dernier propose une pensée humaniste. Hors de ces cadres, il le rejette. Et comme l’humanisme de la pratique philosophique n’est pas seulement un humanisme des idées, mais aussi et surtout un humanisme concret qui se réalise de manière particulière dans l’homme en situation, l’humanisme towaïen est une prise de position contre tout ce qui empêche l’homme de se dresser de toute sa stature ainsi qu’une critique féroce que cette humanité qui bafoue l’humanité de l’autre.

« L’extraversion pro-occidentale »[96][modifier | modifier le code]

La trop grande référence conceptuelle à l’Occident[modifier | modifier le code]

Ce reproche concerne avant tout les fondements conceptuels de la pensée de Marcien Towa, et tout particulièrement le référent géo-idéologique à partir duquel il élabore sa définition de la philosophie. Dès l’Essai sur la problématique philosophique dans l’Afrique actuelle, Towa a préconisé de trouver la définition de la philosophie en Europe, ce concept étant une propriété occidentale. Comprendre la philosophie, c’est donc, du point de vue de Marcien Towa, comprendre ce qu’en disent ceux qui ont forgé ce concept. Cette option théorique est maintenue dans l’autre livre qui traite (en partie) de la question de la définition de la philosophie : L’idée d’une philosophie négro-africaine. Le but de Towa est d’arriver à établir un concept sur lequel les différents protagonistes du débat – occidentaux et non-occidentaux – sont d’accord afin d’éviter « l’écueil ethnophilosophique »[97]. Mais selon Olabiyi Babalola Yai, cette trop grande proximité avec l’Occident conduit Towa à mal juger l’histoire. En effet, pour Towa, dans la situation historique de l’Afrique, ce n’est pas seulement l’Occident qui est à blâmer, mais aussi les Africains eux-mêmes. Yai lui répond à cela que « Les propositions de Towa apparaissent en dernière analyse comme le prototype même de l’hymne à l’assimilation auquel aboutit nécessairement le philosophisme-scientisme de toute philosophie spéculative »[98]. Et quand Marcien Towa recommande aux Africains de « se nier…et s’européaniser fondamentalement »[99], l’auteur y voit une marque d’aliénation. Charles Romain Mbélé oppose à cette critique un vigoureux démenti dans son article « Marcien Towa : l’idée de l’Europe et nous »[100]. Selon lui, la critique d’ « aliénation » qu’accompagne les autres critiques « d’occidentalisation » et de « négation des cultures noires »[101] ne sont que les résultats d’une lecture maladroite de la philosophie de Towa. En réalité, il y a, dans cette dernière, une constante qui est « La critique de l’Europe impérialiste »[102]. Invoquant le distinguo qu’opère Towa entre civilisation industrielle et culture occidentale[103], Charles Romain Mbélé montre que la critique d’extraversion pro-occidentale est une erreur de lecture, car ce que vise Towa ce n’est pas la copie servile de l’Occident, mais précisément l’accès à la civilisation industrielle[104]. Cela passe par la maîtrise de la science et de la technologie.

Un concept de « science » problématique[modifier | modifier le code]

La critique de l’utilisation towaïenne du concept de science se déploie en deux temps. D’abord chez Jean-Godefroy Bidima[105] et ensuite chez Nsame Mbongo[106]. Le premier reproche à Towa un manque de critique vis-à-vis de l’analyse de la science (il applique cette même critique en ce qui concerne Hountondji). Il s’agit précisément de dire que le discours towaïen est un discours critique, mais qui, mystérieusement, n’envisage jamais la science d’une manière différente qu’en tant que salvatrice de l’Afrique. En effet, dans l’Essai sur la problématique philosophique dans l’Afrique actuelle ainsi que dans tous ses écrits ultérieurs, Marcien Towa a identifié la science et la technologie comme étant le « secret de la puissance et de [la] domination »[107] de l’Europe sur l'Afrique, d’où la nécessité pour les Africains, de se revêtir de la même étoffe, afin de résister à cette domination. Or selon Bidima, un tel concept de « science pure, innocente, immaculée, triomphante et sécurisante des Nègres »[108] est incompatible avec la dimension critique de la philosophie de Towa qui régresse au XIXe siècle en affichant le « réflexe d’un positivisme »[109] de la même époque. Bidima continue en disant qu’ « On surprend chez eux [Towa et Hountondji] une attitude bizarre se traduisant par la suspension de l’esprit critique. Tout se passe comme si la réflexion qui les anime s’arrêtait au seuil de la science (comme le croyant au bord du sanctuaire) »[110].

Nsame Mbongo reproche surtout à Towa d’avoir fait de la science le monopole de l’Occident, ce qui laisse penser que l’Afrique est une tabula rasa en cette matière et que la « rationalité africaine » ne serait rien d’autre que la résultante d’un contact avec « la » rationalité (occidentale). L’auteur pose ainsi l’existence d’un « essentialisme de Towa »[111] sans tirer la même conséquence que Yai, c’est-à-dire qu’il y a collusion entre Towa et Senghor, et contre Towa, il soutient que « La science, la technique et la philosophie ne sont pas le “secret de l’Europe” que “nous” devons aller chercher. Ce sont des capacités humaines universelles qu’il appartient à chaque civilisation de développer en toute responsabilité, sans qu’elle ait à se poser en plagiaire condamné à prendre modèle chez autrui ou à périr »[112].

Polémique autour de l’existence d’une philosophie négro-africaine[modifier | modifier le code]

Ce n’est pas dans le premier chapitre de l’Essai sur la problématique philosophique dans l’Afrique actuelle qu’il faut chercher l’origine du problème concernant le rapport de Towa à la question de l’existence d’une philosophie négro-africaine, malgré le fait que ce chapitre pose explicitement la question « Existe-t-il une philosophie africaine ? »[113]. Ce chapitre ne contient en effet que l’analyse towaïenne des différentes opinions de penseurs occidentaux contre l’idée d’une philosophie africaine. C’est dans cette optique que sont convoqués Lévy-Bruhl, Émile Bréhier, Heidegger et Hegel notamment, mais aussi Masson-Oursel, comme contrepoids à Bréhier. En clair, Towa resitue l’histoire de la problématique philosophique africaine (des années 1970) qu’il va analyser. Tempels et sa Philosophie bantoue font partie de cette histoire. C’est davantage deux livres qui créent la polémique quant à la position de Towa. Chacun des deux livres est le produit d’un tandem.

Le premier de ces livres, La philosophie camerounaise à l’ère du soupçon : le cas Towa', est l’œuvre de l’association entre Basile-Juléat Fouda et Sindjoun-Pokam. Le second de ces auteurs découvre chez Towa une « contradiction »[114] entre l’Essai sur la problématique philosophique dans l’Afrique actuelle et L’idée d’une philosophie négro-africaine. En effet, huit ans[115] séparent la publication des deux livres et Sindjoun-Pokam estime que pendant cette période, « Towa a fait comme s’il était passé d’un terrain à un autre »[116]. Le premier de ces terrains est celui de Hegel et de la négation de l’existence d’une philosophie africaine ; le second est celui de Cheikh Anta Diop et de la promotion d’une telle philosophie. L’auteur conclut donc à un « opportunisme philosophique »[117] par lequel Towa espère « récupérer l’œuvre de ceux qu’il a baptisés du nom Ethno-Philosophes »[118]. En clair, en 1971 (c’est-à-dire dans l’Essai sur la problématique philosophique dans l’Afrique actuelle) alors que Towa niait l’existence d’une philosophie africaine à la fois traditionnelle et moderne, il affirme et défend une telle thèse en 1979 (dans L’idée d’une philosophie négro-africaine). Un an plus tard, le Précis de philosophie pour l’Afrique[119] d’Azombo-Menda et de Pierre Meyongo devait contribuer à alimenter la polémique.

Les auteurs y écrivent que « Dans son livre Essai sur la problématique philosophique dans l’Afrique actuelle, … Towa, d’une manière assez vive critiquait les ébauches de restitution et de reconstitution des philosophies africaines »[120], c’est ce qui explique que le nom de Towa apparait (en note…annexé à celui d’Hountondji) dans la section qui expose les réponses négatives à la question « Existe-t-il une “philosophie africaine” ? »[121] et aussi dans la section qui expose les réponses positives à cette même question[122], où les auteurs écrivent qu’ils y a chez Towa, « la reconnaissance finale de “…l’existence d’une tradition philosophique profonde remontant à la plus haute antiquité qui soit” »[123].

Towa, « idéologue-philosophe »[124][modifier | modifier le code]

Une première trace de cette critique se trouve à la fin de L’idée d’une philosophie négro-africaine, à l’occasion du débat avec Jean Sablé[125]. Pour ce dernier, L’idée d’une philosophie négro-africaine pose une « question relative au genre littéraire »[126] auquel il appartient. Ce texte lui apparaît en effet « comme un discours idéologique de combat plutôt que comme une réflexion philosophique soucieuse avant tout de vérité »[127].
En 1981, dans un article paru dans la revue Présence Africaine et intitulé « Que peut la philosophie ? »[128], Hountondji s’en prend à la philosophie de Towa qu’il réduit à l’idéologie. En fait, le philosophe béninois applique juste à son homologue camerounais, la critique qu’il avait déployée en 1973 contre l’Osagyefo[129]. Selon Hountondji, en reliant de façon indissoluble la philosophie à l’idéologie, « Nkrumah professe (…) explicitement une conception instrumentale de la philosophie. Celle-ci n’a pour rôle, en somme, que de traduire dans un langage plus raffiné les thèses initiales et irréfléchies de l’idéologie »[130]. Autrement dit, Nkrumah appauvrit la philosophie, et comme Towa se situe dans le sillage du philosophe ghanéen, il prête le flanc à la même critique.
Dans « Idéologies et Utopies »[131], Towa accuse Hountondji de sombrer dans l’ « épistémologisme », c’est-à-dire de croire que la philosophie est une occupation neutre et éthérée qui n’aurait aucune emprise sur la société puisqu’elle ne s’intéressait d’ailleurs pas à cette dernière, mais seulement à la quête de vérité, concept entendu comme n’entretenant aucun rapport avec la réalité concrète, c’est-à-dire déterminée. C’est en substance ce qu’il répond en 1979 à Jean Sablé, mais surtout à Manga Bihina, qui « regrette » le fait qu’il manque « Une distinction, qui, à mon [son] avis, est capitale, entre la philosophie et l’idéologie »[132], c’est-à-dire « entre une recherche libre et désintéressée de la vérité et la représentation d’une réalité supposée vraie »[133]. Il y a, dans cette distinction, selon Manga Bihina, « une différence qui n’est pas simplement de détail »[134], avant de remarquer qu’ « Il faut véritablement être acrobate pour vous [Towa] suivre dans l’identification que vous osez établir entre philosophie et idéologie »[135]. À Manga Bihina, Towa répond que « Selon moi, la philosophie implique l’idéologie ; elle comporte l’idéologie implicitement ou explicitement. Telle est la position de Nkrumah et je suis de cet avis »[136]. La justification qu’il donne suit en grande partie l’argumentaire du Consciencisme. Il explique que « la philosophie est une exigence de compréhension d’une certaine praxis et c’est ce second aspect qui entraine cette parenté entre philosophie et idéologie. La philosophie est essentiellement une relation entre une théorie et les exigences de la vie sociale »[137]. C’est donc dire que « la philosophie n’est pas pure spéculation mais effort de formulation d’un projet de cité viable »[138]. Towa dû encore se défendre sur ce point une dernière fois lors du débat qui suivit l’exposition de L’idée d’une philosophie négro-africaine. Soter Azombo lui reprocha en effet ceci : « Je suis quelque peu inquiet de constater qu’il y a trop d’idéologie dans la position de M. Towa (…) Le discours idéologique ne me paraît pas un bon point de départ »[139]. À cette inquiétude, Towa répondit qu’ « Essayez de trouver un seul grand philosophe qui n’a pas, dans son œuvre philosophique, pris position, explicitement ou implicitement selon les contextes. Je n’en connais guère pour ma part. Ainsi nous demander d’évacuer toute option sociale et politique, au niveau des principes, c’est nous inviter à renoncer à la philosophie pour je ne sais quelle fade occupation innocente et socialement futile »[140].

  1. Yaoundé, CLE, 1971. Abrégé Senghor par la suite.
  2. Yaoundé, CLE, 1971.
  3. Cette date semble ne pas être exacte, mais approximative comme le souligne le programme des obsèques du philosophe.
  4. Paris, L'Harmattan, coll. "Problématiques africaines", 2011.
  5. Towa M., L’idée d’une philosophie négro-africaine (1979), Yaoundé, CLE, 1997, p. 7. Désormais abrégé L'idée.
  6. Idem.
  7. Towa M., Essai sur la problématique philosophique dans l’Afrique actuelle (1971), Yaoundé, CLE, 2008, p. 30. Désormais abrégé Essai.
  8. Idem.
  9. L'idée, p. 69.
  10. Idem.
  11. Ibid., p. 68.
  12. Idem.
  13. Essai, p. 61.
  14. Idem.
  15. Trad. franç. Gibelin J., Gallimard, coll. « Folio Essai », 1954.
  16. Ibid., p. 253.
  17. Ibid., p. 62.
  18. Ibid., p. 66.
  19. Trad. franç. Jospin L., Paris, Payot, 1964 (1964). Le sous-titre (abrégé en 1970, philosophie et idéologie pour la décolonisation et le développement) est déjà fort évocateur : philosophie et idéologie pour la décolonisation et le développement avec une référence particulière à la Révolution africaine.
  20. Ibid., p. 89.
  21. Towa M., Poésie de la négritude. Une approche structuraliste, Scherbooke, Éditions Naaman, 1983. Abrégé Poésie par la suite.
  22. Paris, L'Harmattan, coll. "Problématiques africaines", 2011.
  23. L'idée, p. 92.
  24. Towa M., « La philosophie africaine comme contribution à la dialectique de la libération », in Mbonda E.-M. (ed.), La philosophie africaine, hier et aujourd’hui, Paris, L’Harmattan, coll. « Pensée Africaine », 2013, p. 77.
  25. Paris, UGE, coll. « 10/18 », 1972
  26. Senghor, p. 15.
  27. Cf. Hegel G. W. F., Esthétique (1835), trad. franç. Bénard Ch., revue et complétée par Timmermans B. et Zaccharia P., 2 tomes, Paris, Le Livre de Poche, coll. « Classiques de la philosophie », 1997.
  28. Nkrumah K., op. cit., p. 101.
  29. Poésie, p. 8.
  30. Idem.
  31. Ibid., p. 9.
  32. Ibid., p. 10.
  33. Kant E., Critique de la faculté de juger (1790), in Œuvres philosophiques, vol. II, section V, trad. franç. Ladmiral J.-R., de Launay M. B. et Vaysse J.-M., sous la direction de Alquié F., Gallimard, 1986, p. 967.
  34. Ibid., p. 999. Souligné par Kant.
  35. Poésie, p. 15.
  36. Ibid., p. 16. Les petits guillemets sont de Towa
  37. Idem.
  38. Idem.
  39. Idem.
  40. Ibid., p. 17.
  41. Ibid., p. 32.
  42. Ibid., p. 47-67.
  43. Essai, p. 5.
  44. Poésie, p. 17.
  45. Essai, p. 36.
  46. Ibid., p. 39.
  47. Idem.
  48. Senghor, p. 17.
  49. Idem.
  50. Idem.
  51. Ibid., p. 83.
  52. Ibid., p. 90.
  53. Cf. Senghor L. S., Œuvre poétique (1964), Paris, Éditions du Seuil, 1990, pp. 138-151.
  54. Senghor, p. 99.
  55. Ibid., p. 100.
  56. Essai, p. 47.
  57. Senghor L. S., Liberté I. Négritude et humanisme, Paris, Éditions du Seuil, 1964, p. 23-24.
  58. Senghor, p. 112.
  59. Idem.
  60. Idem.
  61. Ibid., p. 114.
  62. Towa M., Identité et transcendance, op. cit., p. 78.
  63. Idem.
  64. Ibid., p. 101.
  65. Ibid., p. 103.
  66. Ibid., p. 111.
  67. Il est à remarquer que la graphie du mot change de l'Essai à L'idée. Dans le premier livre Towa écrit "ethno-philosophie", tandis que dans le second il rejoint l'orthographe proposée par Hountondji et abandonne le trait d'union.
  68. Césaire A., Discours sur le colonialisme, Paris, Présence Africaine, 1970.
  69. Ebousi Boulaga F., « Le bantou problématique », in Présence Africaine, n° 66, 1968, pp. 4-40 (repris in L’affaire de la philosophie africaine. Au-delà des querelles, Yaoundé, Éditions Terroirs et Karthala, 2013, pp. 15-45.), et La crise du Muntu. Authenticité africaine et philosophie, Paris, Présence Africaine, 1977.
  70. Hountondji P., Sur la « philosophie africaine », op. cit.
  71. Trad franç. Rubbens A., Elizabeth-ville, Éditions Lovania d’abord puis, Paris, Présence Africaine, 1949.
  72. La philosophie bantu-rwandaise de l’être, Bruxelles, 1956, et La philosophie Bantu comparée, Paris, Présence Africaine, 1976.
  73. Towa écrit « N’Daw »… Il s’agit de l’article « Peut-on parler d’une pensée africaine ? », in Présence Africaine, n° 58, pp. 32-46.
  74. Fouda B.-J., La philosophie négro-africaine de l’existence, thèse de Doctorat de 3è cycle, Lille, 1967, publié chez L’Harmattan en 2013 dans la collection « Pensée africaine ».
  75. Essai, p. 25.
  76. Hountondji P., op. cit., p. 243. C’est l’auteur qui souligne.
  77. Ibid., p. 14 sqq.
  78. Essai, p. 31.
  79. Ibid., p. 30.
  80. Ibid., p. 27.
  81. Ibid., p. 26.
  82. Ibid., p. 32-33.
  83. Le texte de l’Essai est daté de mars 1970 (ibid., p. 75)
  84. Qui attribue la paternité de ce terme à Doutreloux (« “Pérégrinations d’une science”. Note sur le 3è Séminaire international africain », in Zaïre, n° 14, 1960). Voir Bidja Ava R., op. cit., p. 290.
  85. Kwame Nkrumah, Mind and Thought in Primitive Society. A Study in Ethno-Philosophy with Special Reference to the Akan Peoples of the Gold Coast, West Africa, dactylog., s.l., s.d., répertorié aux National Archives of Ghana (Accra), sous la référence JOB N° P. 129/63-64. Voir Hountondji P., « Une pensée pré-personnelle. Remarques sur “ethno-philosophie et idéo-logique” de Marc Augé », in L'Homme, 2008/1, n° 185-186, p. 352, note n° 13. Disponible à l’adresse : http://www.cairn.info/revue-l-homme-2008-1-page-343.htm. Voir aussi du même auteur, « “Ethnophilosophie” : Le mot et la chose », in Exchoresis, Revue Africaine de Philosophie, n° 7, Novembre 2008. Url : http://exchoresis.refer.ga/IMG/pdf/P.J._Hountondji.pdf.
  86. Éboussi Boulaga F., La crise du Muntu, op. cit., p. 161 sqq.
  87. Dans leur livre commun, La philosophie camerounaise à l’ère du soupçon : le cas Towa, Yaoundé, Éditions Le Flambeau, 1980, pp. 10, 27.
  88. Yai O. B., « Théorie et pratique en philosophie africaine : misère de la philosophie spéculative (critique de P. Hountondji, M. Towa et autres) », in Présence Africaine, n° 108, 1978
  89. Voir Nsame Mbongo, Contre-histoire de la philosophie, 2 tomes, Paris, L’Harmattan, 2013, coll. « Problématiques africaines », pp. 179 (tome 1), 22, 27 (tome 2). Cette position contraste d’ailleurs avec le jugement plus modéré qu’il expose dans « Le rationalisme critique progressiste : La voie philosophique de Marcien Towa et ses difficultés », in Njoh-Mouelle É. et Kenmogne É. (éd.), Philosophes du Cameroun, Yaoundé, PUY, 2006, quand il fait remarquer « Le faux procès de l’hégélianisme insensé de Towa » (p. 184), en critiquant les maladresses de la lecture de Sindjoun-Pokam.
  90. Essai, p. 19.
  91. Ibid., p. 22.
  92. Bidja Ava R., Hegel et le monde africain, Yaoundé, PUA, 2005, p. 294.
  93. Idem.
  94. Bidima J.-G., La philosophie négro-africaine, Paris, PUF, coll. « Que sais-je ? », 1995, p. 29.
  95. Ibid., p. 31.
  96. Nsame Mbongo, « Le rationalisme critique progressiste : La voie philosophique de Marcien Towa et ses difficultés », in op. cit., p. 191.
  97. L’idée, p. 5.
  98. Yai O. B., art. cit., p. 85. L’auteur en conclut que Towa est de connivence avec Senghor, car tous deux défendent un « essentialisme ».
  99. Essai, p. 45.
  100. In Njoh-Mouelle É. et Kenmogne É. (éd.), Philosophes du Cameroun, Yaoundé, PUY, 2006.
  101. Ibid., p. 149.
  102. Ibid., p. 153.
  103. Towa M., Valeurs culturelles et développement suivi de La preuve par le comportement, Obala, AMA-CENC, 2001, p. 21 sqq.
  104. Un livre posthume de Towa interroge en effet La « dialectique du mégacycle des civilisations industrielles »(à paraître aux Éditions L’Harmattan).
  105. Bidima J.-G., Théorie Critique et modernité négro-africaine. De l’École de Francfort à la “Docta spes” Africana, Paris, Publications de la Sorbonne, 1993 et Bidima J.-G., La philosophie négro-africaine, op. cit.
  106. Nsame Mbongo, art. cit.
  107. Essai, p. 7.
  108. Bidima J.-G, Théorie Critique…,op. cit., p. 254.
  109. Bidima J.-G., La philosophie négro-africaine, op. cit., p. 99.
  110. Idem.
  111. Nsame Mbongo, art. cit., p. 193.
  112. Ibid., p. 196.
  113. Essai, p. 7.
  114. op. cit., p. 25.
  115. Neuf ans si on s’intéresse à la rédaction des textes : mars 1970-juin 1979.
  116. Ibid., p. 24.
  117. Idem.
  118. Idem.
  119. Paris, Éditions Fernand Nathan, 1981.
  120. Ibid., p. 16.
  121. Ibid., p. 6.
  122. Ibid., p. 14.
  123. Idem. L’extrait entre petits guillemets est issu de L’idée, p. 44. Les auteurs commettent une erreur en renvoyant le lecteur à la page 22.
  124. Fouda B.-J. et Sindjoun-Pokam, op. cit., p. 23. L’expression est de Sindjoun-Pokam.
  125. Le texte le présente comme Ancien Aumônier des Étudiants Catholiques de l’Université de Caen, alors Chargé de Cours de Philosophie à l’Université de Yaoundé (L’idée, p. 117).
  126. L’idée, p. 77.
  127. Idem.
  128. In Présence Africaine, n°119, 1981.
  129. Voir « L’idée de philosophie dans “Le Consciencisme” de Nkrumah », in Sur la « philosophie africaine », Paris, Maspéro, 1997, rééd. Yaoundé, CLE, 1980. Ce texte est une conférence donnée au campus de Lubumbashi (Zaïre) le 8 juin 1973 et reprise plusieurs fois dans la même année (op. cit., p. 189, note).
  130. Ibid., p. 202.
  131. In Annales de la Faculté des Lettres et Sciences Humaines, n°8, Yaoundé, 1977, ainsi que, plus tard, dans « La philosophie, entre le mythe et les sciences (La méthode en philosophie) » (in Actes du colloque de philosophie de l’École Normale Supérieure, Yaoundé, 4-8 avril 1983), Towa réitère la même critique. Il accuse Hountondji d’avoir réduit la philosophie à être la « théorie de la théorie », c’est-à-dire « l’épistémologisme » (p. 189), qu’il définit comme « variante tropicale » (idem) du néo-positivisme.
  132. L’idée, p. 108.
  133. Idem.
  134. Ibid., p. 109.
  135. Idem.
  136. Ibid., p. 110.
  137. Ibid., p. 111.
  138. Idem.
  139. Ibid., p. 112.
  140. Ibid., p. 114.