Le Cabinet du docteur Caligari

Un article de Wikipédia, l'encyclopédie libre.
Ceci est une version archivée de cette page, en date du 28 février 2020 à 19:57 et modifiée en dernier par CoffeeEngineer (discuter | contributions). Elle peut contenir des erreurs, des inexactitudes ou des contenus vandalisés non présents dans la version actuelle.
Le Cabinet du docteur Caligari
Description de cette image, également commentée ci-après
Affiche du film
Titre original Das Cabinet des Dr. Caligari
Réalisation Robert Wiene
Scénario Carl Mayer et Hans Janowitz
Acteurs principaux
Sociétés de production Decla-Bioscop
Pays de production Drapeau de l'Allemagne Allemagne
Genre Film fantastique
Durée 71 minutes
Sortie 1920

Pour plus de détails, voir Fiche technique et Distribution.

Le Cabinet du docteur Caligari (Das Cabinet des Dr. Caligari) est un film expressionniste et muet allemand de Robert Wiene sorti en salles en 1920.

Devenu l'acte de la naissance du genre horrifique, le film introduit une iconographie, des thèmes, des personnages et des expressions qui seront importants pour des films comme Dracula, réalisé par Tod Browning, et Frankenstein (tous les deux sortis en 1931) ou La Fiancée de Frankenstein, de James Whale en 1935.

Synopsis

Dans une fête foraine, vers 1830, le docteur Caligari exhibe Cesare, un somnambule. Celui-ci prédit à un étudiant, Alan, qu'il ne vivra pas jusqu'à l'aube. Il est en effet assassiné dans son lit. Son ami Francis soupçonne Caligari. La jeune fille que convoitaient Alan et Francis est enlevée par Cesare. Poursuivi, le somnambule s'écroule après avoir abandonné son fardeau. Francis poursuit Caligari qui se réfugie dans un asile de fous, dont Caligari s'avère être le directeur, et Francis un des patients, ainsi que la jeune fille convoitée…

Acte 1

Prologue : Deux personnages discutent sur un banc dans un parc. Le plus jeune, Francis, raconte le drame qu'il vient de vivre…

Une fête foraine s'installe dans la petite ville d'Holstenwall. Le Dr Caligari, de passage dans celle-ci, obtient, après quelques difficultés, l'autorisation du désagréable Secrétaire de Mairie d'installer un stand afin d'y présenter un somnambule.

Acte 2

La nuit suivante, le Secrétaire de Mairie est assassiné. Le lendemain, Francis et son ami Alan vont à la fête foraine. Ils assistent au spectacle du Dr Caligari, qui présente Cesare le somnambule. Celui-ci prédit à Alan qu'il mourra avant l'aube. De retour de la fête foraine, en marchant dans les rues désertes, Francis et Alan rencontrent Jane, qu'ils aiment tous deux secrètement. Alan est assassiné chez lui dans la nuit.

Acte 3

Alors que Francis soupçonne le Dr Caligari et Cesare d'être les auteurs du crime, une femme manque d'être assassinée la nuit suivante et l'homme à l'intention meurtrière, un vagabond, est arrêté pendant qu'il tentait de fuir.

Acte 4

Intriguée par les soupçons de Francis, Jane rend visite au Dr Caligari et à Cesare dans leur stand de la fête foraine. Elle s'enfuit précipitamment, terrifiée par les deux hommes. Interrogé par la police, le vagabond reconnaît son intention de tuer la femme, mais en aucun cas les meurtres du Secrétaire de Mairie ni d'Alan.

Peu après, Cesare tente d'assassiner Jane alors qu'elle dort chez elle, mais échoue. Puis il essaye de l'enlever, mais, pris en chasse par les villageois, l'abandonne. Caligari s'enfuit lui aussi, poursuivi par Francis. Il se réfugie dans un asile psychiatrique, dont il s'avère être le Directeur !

Acte 5

L'étau se resserre autour de Caligari, des documents trouvés dans son bureau attestent qu'il a manipulé Cesare le somnambule pour le conduire à commettre des meurtres sous son contrôle. Il voulait prendre la place du vrai Caligari, un autre mystique qui lui aussi manipulait un somnambule, cela afin de découvrir le secret de son contrôle.

Acte 6

Démasqué, Caligari achève de sombrer dans la folie, il est interné avec une camisole de force dans son propre asile psychiatrique.

Épilogue : Fin du flashback et renversement de situation.

Francis achève le récit de son aventure. Il quitte le parc pour pénétrer dans la salle principale de l'asile psychiatrique, qui est remplie de malades mentaux. Il y croise Cesare, et Jane qui tient des propos incohérents… Derrière lui, un homme descend les escaliers. Il s'agit du directeur de l'asile, qui a les traits de Caligari. Francis l'aperçoit et, pris de démence, tente de l'empoigner. Mais il est immédiatement maîtrisé par des infirmiers et conduit dans une cellule d'isolement. Le directeur l'examine et s'exclame : « J'ai enfin compris sa démence, il me prend pour le mystique Caligari ! Je connais maintenant le moyen de le guérir ! ».

Fiche technique

Musique

En 1994 a été produite par la ZDF, en collaboration avec Arte, une version restaurée par le service fédéral des archives cinématographiques allemand (Filmarchiv des Bundesarchivs), mais avec une trame sonore nouvelle composée par Rainer Viertblöck pour guitare électrique, saxophone alto, piano, basse électrique, batterie, percussions et synthétiseur. Cette trame sonore, très moderne et expressionniste (mélange de musique électronique et de free jazz, sans mélodie), a été saluée par d'aucuns comme un excellent moyen de raviver un film de l'époque muette pour les spectateurs contemporains « dont les perceptions sont généralement brouillées par des yeux moins patients[1] » que ceux du public d'antan.

Distribution

Analyse

Lobby card (en) représentant le docteur examinant Cesare, le somnambule

Mis à part le préambule, la scène dans le parc, et l'épilogue, le film décrit en fait le délire d'un fou, en l'occurrence Francis. Ce film donnait à voir une histoire de fou racontée par un fou, ce qui était déjà révolutionnaire à une époque où le récit à la première personne n'existait pas encore. Les décors faits de fausses perspectives, tout en oblique, d'angles aigus, de proportions tronquées, l'écriture des cartons intertitres, la colorisation de la pellicule différente selon les scènes, et bien sûr le jeu expressionniste des acteurs, sont autant d'éléments qui contribuent à accentuer cette impression d'irréalité. Ce décor correspond donc bien au mouvement de l'expressionnisme allemand, caractérisé par le chaos, les formes violemment torturées. Le cabinet du docteur Caligari peut témoigner de cette influence picturale. Les décors du cabinet du Docteur Caligari sont des tableaux peints, Walter Reimann, Hermann Warm et Walter Röhrig  en sont les décorateurs attitrés. Les décors sont caractérisés par des ombres très fortes, des lignes franches, des figures géométriques presque exagérées. C’est un réel retour à une perspective frontale des décors, qui va être préféré au réalisme. D'ailleurs Warm insiste sur ce caractère fantastique et irréel en disant que « les images du film devaient être éloignées de la réalité et revêtir un style graphique fantastique [2]». C’est finalement le décor qui va déterminer le cheminement des acteurs, comme prisonnier d’un espace irréel.

L'éclairage joue également un rôle important en jouant sur l'affrontement de l'ombre et de la lumière et en soulignant ainsi les contrastes « Les films doivent être des gravures rendues vivantes », affirmait Hermann Warm, l'un des trois décorateurs du film.

Fritz Lang, qui avait été pressenti pour mettre en scène le film, mais qui avait refusé car il tournait au même moment Les Araignées, disait à propos de Caligari : « Erich Pommer m'avait désigné à l'origine comme metteur en scène pour ce film. À ce moment il était question de tourner Caligari, disons en style expressionniste. Je crois que ma seule contribution à ce film fut de dire : Mes enfants, vous ne pouvez pas le faire comme ça, vous allez trop loin. L'expressionnisme au point que vous le voulez, ce n'est pas possible. Ça effraiera trop le public. C'est alors que j'ai proposé l'action à tiroirs. On a accepté cela et on a fait se dérouler le début dans un asile d'aliénés. Si j'avais mis le film en scène, j'aurais simplement traité le prologue et l'épilogue de manière tout à fait réaliste, pour exprimer qu'il s'agit là de la réalité, alors que la partie centrale décrit un rêve, la vision d'un fou. D'ailleurs, c'est un thème qui m'a toujours beaucoup intéressé et qu'on retrouve aussi dans Mabuse ».

Adaptations et remakes

Références culturelles

Bibliographie

  • Siegfried Kracauer (trad. Claude B. Levenson), De Caligari à Hitler : une histoire psychologique du cinéma allemand, Lausanne, L'Âge d'Homme,
  • Repérages : autour du 'Cabinet du docteur Caligari' : (catalogue de l'exposition, Crac, scène nationale, Valence) du 21 au .
  • (en) Walter Schatzberg, Beyond Caligari : The Films of Robert Wiene, New York, Berghan Books,
  • Cahiers du Cinéma (Les), no 404,
  • Positif, no 359,

Notes et références

  1. David Keyes, “The Cabinet of Dr. Caligari” Revisited, 16 oct. 2016.
  2. Frank Kessler, « Existe-t-il une esthétique du cinéma expressionniste ? », dans Le cinéma expressionniste, Presses universitaires de Rennes (ISBN 9782753507630, lire en ligne), p. 59–74

Voir aussi

Articles connexes

Sur les autres projets Wikimedia :

Liens externes