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Hôtel Lambert

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La galerie d’Hercule de l’hôtel Lambert.
Gravure de Bernard Picart.
Plan d’ensemble de l'hôtel Lambert par Le Vau (v. 1640)
Élévations et coupe sur les ailes de l’hôtel Lambert (1655-1656), relevées par Blondel ?.

L’hôtel Lambert est un hôtel particulier situé dans l’île Saint-Louis, au no 2 de la rue Saint-Louis-en-l’Île dans le 4e arrondissement de Paris.

Cet hôtel, dont la façade, la rotonde et le jardin sont des plus magnifiques de Paris, a été bâti en 1640 par l’architecte Le Vau, qui encore tout jeune, y montra ses immenses qualités d’architecte.

Les peintres Lebrun et Lesueur travaillèrent cinq ans à décorer l’intérieur. On doit à Lebrun une Galerie d’Hercule qui annonce la galerie des Glaces de Versailles.

Histoire

Cet hôtel avait été construit pour un "trafiquant" notoire, Jean-Baptiste Lambert. À sa mort, quatre ans après, c’est son frère Nicolas Lambert de Thorigny dit Lambert le Riche, président à la Chambre des comptes qui en devint propriétaire. Sa charge qu’il remplit pendant 46 ans lui valut une immense fortune et il possédait plus de 14 maisons dans l’île Saint-Louis. Il fut condamné par une amende d’un million de livres pour sa compromission au moment du procès de Fouquet.

En 1729 la propriété fut acquise par le fermier général Claude Dupin et dix ans après par le marquis du Châtelet dont la femme, Émilie du Châtelet, eut pendant plus de 15 ans une liaison avec Voltaire.

Extrait de "La Vie des Financiers" au XVIIIe siècle par H.Thirion :

« Puis c’est madame du Châtelet qui voulut acheter cette splendide demeure : la maison particulière de Paris la plus ornée de belles curiosités, avec ses plafonds, ses dessus de porte, ses murs décorés par Le Brun et Le Sueur. « Monsieur du Châtelet, écrit la marquise, sera à Paris le 26 ou le 27 (février 1739), il ira pour la maison de Dupin. Je ne sais s’il l’achètera, mais je sais bien que je la désire infiniment. » Monsieur du Châtelet l’acheta pour la revendre peu après à un nouveau financier, Marin de la Haye. Où donc ce dernier venu et dernier occupant avait-il pu réunir les six ou sept cent mille livres qu’une semblable acquisition réclamait, sans compter le grand entretien qu’elle devait lui coûter dès son entrée en possession, sans compter la dépense qu’il faisait à sa résidence de Draveil (luxueuse entre toutes les luxueuses habitations) ? »

L’hôtel passera successivement dans les mains de Salomon, Benjamin et Étienne de La Haye.

En 1781, Achille-René Davène, seigneur de Fontaine, l’achète. Confisqué en 1794, sera rendu en 1802 et revendu, en 1813, à Jean Pierre Bachasson, comte de Montalivet, ministre de l’Intérieur de Napoléon, puis il deviendra la propriété de la richissime famille princière polonaise Czartoryski.

En 1862 l’hôtel est classé monument historique[1].

Dans les années d’après-guerre,il fut habité par le milliardaire chilien Arthuro Lopez-Willshaw, dit "le roi du guano" et son intime Alexis de Redé, ami de Guy et de Marie-Hélène de Rotschild, qui acquirent l'hôtel en 1975 en y maintenant ce fastueux locataire; c'est alors que maintes pièces de la célèbre dynastie de collectionneurs d'art, dont le portrait de leur ancêtre Betty, épouse du baron James, par Ingres (1848) vinrent orner l'hôtel. Les combles furent habités notamment par la comédienne Michèle Morgan

Après la mort de Guy de Rothschild (2007), l'hôtel fut revendu par son fils à un frère de l’émir du Qatar (2007), qui souhaite le moderniser (ascenseurs, climatisation, garage creusé sous le jardin).

Depuis, de nombreuses personnalités[2] se sont opposées à ces transformations qui mettent en danger l'édifice[3]. Trois recours — dont l’un gracieux auprès du ministre de la Culture —, en vue d’obtenir la suspension, l’annulation et le retrait de la décision du 11 juin 2009 autorisant les travaux à l’hôtel Lambert sont portés par l’association Sauvegarde et Mise en valeur du Paris historique, notamment en la personne de Jean-François Cabestan (architecte du patrimoine et maître de conférences à Paris I)[4] amènent le juge des référés à suspendre le permis de construire, le 15 septembre 2009, dans l’attente de jugement au fond[5]. Le 22 janvier 2010, le ministère de la Culture annonce la signature d'un accord amiable entre le propriétaire et l’association Sauvegarde et Mise en valeur du Paris historique, représentée par son président Pierre Housieaux[6].

Le Parti Polonais de l’hôtel Lambert

Polonaise de Chopin : Bal à l’hôtel Lambert
Gouache de Teofil Kwiatkowski.

"Grâce au conseil de Eugène Delacroix, le prince Adam Czartoryski a pu acquérir l'un des plus beaux hôtels particuliers de la capitale, l'hôtel Lambert (...) un grand nombre d'objets déplacés de Prelowy y ont été rassemblés peu à peu, et l'hôtel est devenu le siège de la collection jusqu'en 1876".

James Stourton, "Petis musées, grandes collections" (Scala, 2003, p. 168 à 173).

Le richissime prince Adam Jerzy Czartoryski, fils du prince Adam Casimir Czartoryski, chef d'une des premières familles polonaises, dut quitter la Pologne après l’insurrection de novembre 1830 au tout début de la Grande Émigration polonaise ; il mourut à Montfermeil en 1861, à l’âge de 90 ans.

Une des occupantes de l'hôtel fut Marguerite d'Orléans, fille aînée du duc de Nemours, par son mariage (15 janvier 1872) avec le prince Wladyslawv (Ladislas) Czaroryski, veuf et propriétaire, entres autres immenses biens, du palais familial de Cracovie, devenu un des plus riches musées européens.

Le prince Adam donna à l’hôtel Lambert des fêtes somptueuses et l’hôtel devint un foyer culturel polonais où l’on y rencontrait George Sand et Frédéric Chopin, Delacroix, Zygmunt Krasiński, Alphonse de Lamartine, Honoré de Balzac Hector Berlioz, Franz Liszt, et le poète Adam Mickiewicz.

C’est pour le grand bal annuel que Chopin composa nombre de ses polonaises et lors de celui du Carnaval de 1846 - où se pressèrent 3500 personnes, dit-elle - que George Sand amena sa fille Solange Dudevant et sa petite cousine et protégée Augustine Brault, qui furent "fort jolies et très remarquées", entre autres peut-être par son futur gendre, le sculpteur Clesinger.

Patriote polonais, le prince Czartoryski participa activement à maintenir vivante la « question polonaise » dans les chancelleries européennes. Le « Parti de l’Hôtel Lambert » rassembla ainsi la fraction libéral-aristocratique de l’émigration polonaise. Czartoryski créa de nombreuses institutions, telles que la Librairie Polonaise, la Société Historique de Pologne, un institut pour les jeunes filles polonaise et une école pour les jeunes gens polonais.

C'est ainsi que l’hôtel Lambert devint le plus grand centre politique, culturel et social polonais hors de Pologne.

La Bibliothèque polonaise existe encore au no 6 du quai d’Orléans, dans l’île Saint-Louis.

Description

Le bâtiment se compose d'un rez-de-chaussée consacré aux communs, et de deux étages d'habitation, le tout autour d'une cour. Le premier étage comporte une suite de réceptions et le second les appartements[7].

La Galerie d'Hercule a un plafond peint par Charles Le Brun, vers 1650. Les bas-reliefs sont de Gérard Van Opstal.

Hôtel Le Vau

Les deux hôtels et le quai d’Anjou vus depuis la Seine, première moitié du XXe siècle, photographie de Pierre Dubard (?)
En 2010

Au no 3 du quai d’Anjou se situe l’hôtel du XVIIe siècle construit par Le Vau pour lui-même car il avait épousé la fille d’un notaire propriétaire du terrain voisin à celui de l’hôtel Lambert. Sa façade est la continuation de celle de l’hôtel. Ses quatre premiers enfants naquirent ici, sa mère y mourut. Il habita cet hôtel de 1642 à 1650, alors qu’il travaillait à l’hôtel Lambert.

Une fois disparu en 1670 sa maison devint la propriété de la famille de La Haye déjà propriétaire de l’hôtel Lambert et qui réunit les deux bâtiments.

Notes et références

  1. Notice no PA00086295, sur la plateforme ouverte du patrimoine, base Mérimée, ministère français de la Culture.
  2. Liste des personnalités parmi les 7450 signataires de la pétition, site de l’association Sauvegarde et Mise en valeur du Paris historique
  3. (en) Steven Erlanger et Maïa de la Baume, « A Palace Overhaul, Treading on French Heritage », dans The New York Times, 7 octobre 2009.
  4. Jean-François Cabestan, art. « L’affaire Lambert » paru dans AMC Moniteur en février 2009, ici reproduit.
  5. L’ordonnance de référé est rendue par le tribunal administratif le 15 septembre 2009. Cf. l’extrait de l'ordonnance du tribunal administratif de Paris, sur le site Paris historique.
  6. « Hôtel Lambert : enfin un accord », sur lemoniteur.fr, (consulté le ) : « Un protocole d'accord pour la restauration de l'Hôtel Lambert à Paris a été signé vendredi 22 janvier entre son propriétaire, un prince du Qatar, et l'association Paris historique, a annoncé le ministère de la Culture dans un communiqué. ».
  7. Cojannot A, L'hôtel lambert : un chef-d'œuvre de Louis le Vau, Dossier de l'art no 189, octobre 2011, p. 16-17

Liens externes

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