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Beat Generation

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La Beat Generation est un mouvement littéraire et artistique né dans les années 1950, aux États-Unis.

Le terme de « Beat Generation » fut employé pour la première fois en 1948 par Jack Kerouac pour décrire son cercle d'amis au romancier John Clellon Holmes (qui publiera plus tard le premier roman sur la Beat Generation, intitulé Go). John Clellon Holmes définit le mouvement dans un article faisant office de manifeste esthétique, publié dans le New York Times en novembre 1952 : « This is the Beat Generation »[1].

Howl d'Allen Ginsberg (1956), Le Festin nu de William S. Burroughs (1959) et Sur la route de Jack Kerouac (1957) sont les œuvres les plus marquantes de la littérature beatnik[2]. L'homosexualité affichée de certains membres de ce mouvement artistique fit scandale dans l'Amérique puritaine[3],[4]. Howl et Naked Lunch furent l'objet de procès en obscénité qui marquèrent la libération du monde de l'édition aux États-Unis avant de devenir des références pour le mouvement gay et la libération sexuelle de la génération suivante[3],[4].

William Burroughs, Allen Ginsberg et Jack Kerouac sont les précurseurs de la libération sexuelle et du mode de vie de la jeunesse des années 1960, celle de la Beat Generation, « qui a ébranlé la société américaine dans ses certitudes. Elle a directement inspiré aussi bien les mouvements de mai 1968 que l’opposition à la guerre du Vietnam, ou les hippies de Berkeley et Woodstock. Pourtant la Beat Generation a aussi contribué à enrichir le mythe américain. Sur la route, le roman le plus connu de Kerouac, est une ode aux grands espaces, à l’épopée vers l’ouest, à la découverte de mondes nouveaux. »[5]. Alliant créativité débordante et fascination pour les milieux underground des villes des côtes Est et Ouest des États-Unis et tout l'art qui s'y crée (littérature, jazz, etc.), la Beat Generation témoigne également d'un attachement profond aux grands espaces, à la nature et aux spiritualités chamaniques dans lesquelles l'homme est partie intégrante du Cosmos.

Origines du terme beat

L'adjectif « beat » (proposé par Herbert Huncke) avait initialement le sens de « fatigué » ou « cassé », venant de l'argot américain, mais Kerouac y ajouta la connotation paradoxale de upbeat et beatific ; il se moquera souvent de l'appellation donnée au mouvement (il dit ainsi « I'm a Catholic, not a beatnik »).

Le sens premier fait donc référence à une génération perdue, fin de siècle même, beat signifiant pour John Clellon Holmes : « être à la rue, battu, écrasé, au bout du rouleau » ; il dit ainsi : The origins of the word « beat » are obscure, but the meaning is only too clear to most Americans. More than mere weariness, it implies the feeling of having been used, of being raw. It involves a sort of nakedness of mind, and, ultimately, of soul ; a feeling of being reduced to the bedrock of consciousness. In short, it means being undramatically pushed up against the wall of oneself.

Jack Kerouac s'explique lui même sur le terme et le présente comme tiré d'une expression employée par les noirs américains, dans le sud des États-Unis, faisant référence à la pauvreté, à l'écrasement[6]. Pour Kerouac, d'origine franco-canadienne, la sonorité du mot est aussi à rapprocher du terme français « béat » : « It's a be-at, le beat à garder, le beat du cœur », puis il ajoute : « C'est un être à, le tempo à garder, le battement du cœur », le rapprochant d'une expression utilisée par le jazzman Charlie Parker[7],[8]. Il fait aussi le lien au rythme en général : celui de la batterie, des pagayeurs dans leurs canoës, etc.

Un cercle d'amis

Les membres originels de la Beat generation se rencontrèrent à New York : Jack Kerouac, Allen Ginsberg, William Burroughs (dans les années 1940), rejoints plus tard par Gregory Corso (en 1950). C'est à l'université de Columbia que Ginsberg et Kerouac se rencontrèrent, alors tous deux étudiants. Au cours des années 1950, le groupe s'était étendu à des figures de la scène de San Francisco : Kenneth Rexroth, Gary Snyder, Lawrence Ferlinghetti, Michael McClure, Philip Whalen et Lew Welch.

Qualifier ce petit cercle d'aspirants écrivains, artistes, arnaqueurs et toxicomanes en tout genre de « Génération » fut une façon de revendiquer leur importance, leur représentativité, et surtout le début d'un nouveau mouvement (sur les traces de la Génération perdue). C'était le genre de bravade qui aurait pu n’être qu'illusions de grandeur, mais l'histoire montre que la Beat generation se permit d'être un véritable mouvement littéraire, social et culturel. Le nom précéda l'essence, renforçant la cristallisation des idées autour du concept.

Les membres de la Beat generation furent des nouveaux bohémiens qui s'engagèrent dans une créativité vigoureuse et libertaire. Les écrivains Beat produisirent un corpus d'œuvres dominées par la spontanéité, un quasi-automatisme dans l'écriture, pour provoquer une prosodie libre et rythmée.

Autour de ce noyau dur d'artistes gravitèrent des personnalités au parcours moins connu mais à l'apport tout aussi important : Lucien Carr (qui présenta Burroughs à Kerouac et Ginsberg) ; Herbert Huncke (un truand toxicomane qui rencontra Burroughs en 1946 et qui ira en prison pour le meurtre d'un professeur de gymnastique, entraînant Kerouac dans son sillage) ; Hal Chase (un anthropologue de Denver qui présenta Neal Cassady au groupe en 1947). Cassady devint très proche de Kerouac et fut immortalisé dans le roman Sur la route sous les traits du personnage Dean Moriarty, un voyou avide de vie et d'expériences.

Les femmes prirent aussi une place d'importance dans le cercle Beat : Joan Vollmer, Edie Parker. Leur appartement de l'Upper West Side de Manhattan devint rapidement le lieu de rencontres privilégiées des Beats, Joan Vollmer étant elle-même une participante active des discussions enflammées qui s'y déroulaient.

Œuvres représentatives

Les œuvres majeures de ces auteurs fondateurs sont le roman Sur la route de Jack Kerouac, le poème Howl d'Allen Ginsberg et le roman Le Festin nu de William Burroughs. En 1950, Corso rencontre Ginsberg, qui fut très impressionné par la poésie qu'il avait écrite alors qu'il était emprisonné pour vol. Les années 1950 furent marquées par des influences réciproques entre écrivains new-yorkais et de San Francisco (Ginsberg, Corso, Cassady et Kerouac s'y installèrent même pour un temps). Ferlinghetti (qui dirigea la maison d'édition City Lights Press) prit une plus grande importance, ainsi que Rexroth (un poète issu du modernisme, plus âgé que les Beats, et qui exerça sur eux une profonde influence) dont l'appartement devint un point de rencontre obligé des discussions littéraires. Rexroth organisa la lecture de Six Gallery, où le poème Howl apparut pour la première fois.

À la parution de Sur la route en 1957 (l'ébauche en a été faite en 1951), les excellentes critiques (notamment de la rubrique littéraire du New York Times) en firent un best-seller instantané. Cet événement entraîna la vague d'intérêt pour le mouvement Beat qui mit en lumière tous ses membres.

La beat generation et le jazz

C'est Cassady qui fit entrer le jazz dans la scène Beat, avec son parlé relâché et spontané qui serait plus tard associé aux beatniks. Cassady n'était pas écrivain lorsqu'il intégra le groupe, mais impressionna fortement de son style relâché et spontané que Kerouac citera plus tard comme influence majeure qui le mena à formaliser sa prose libre, qu'il utilisa dans Sur la route (les autres influences majeures étant les solos jazz improvisés et le rock pré-hippie de The Temptations).

Les beatniks

Le mot beatnik apparaît pour la première fois le sous la plume de Herb Caen dans le journal San Francisco Chronicle. Le mot beat désignait depuis le XIXe siècle un vagabond du rail voyageant clandestinement à bord des wagons de marchandises. Peu à peu ce mot a pris le sens que lui ont donné les jazzmen noirs : beat en vint à signifier une manière de traverser la vie. Être beat devint « être foutu, à bout de souffle, exténué ». Le « beat » (« pulsation ») est aussi le « rythme » en musique (jazz).

Le terme beatnik, forgé à partir du mot beat et du nom du satellite russe Sputnik, était initialement péjoratif en cherchant à montrer que les beats étaient une communauté de communistes illuminés. Le terme resta et devint l'emblème d'une génération de jeunes gens chevelus et débraillés[9]. Salut, beatnik ! est le titre d'une chanson écrite et interprétée par Léo Ferré en 1967. Les Beatniks est le titre d'une chanson écrite par Patrice Laffont et interprétée par Michel Sardou en 1966. Beatnik est aussi le titre d'une chanson interprétée par le groupe The Buggles, extrait de l'album Adventures in Modern Recording sorti en 1981. On notera également la sortie en 1966 du titre Faux Beatnik interprété par Regis Barly. Et pour finir, Denis Bortek et son groupe Jad Wio écrit et interprète "Le Beatnik de l'espace" en 1992 dans l'album "Fleur de métal".

Les beatniks rejetaient les tabous des squares (les personnes rigides qui ne profitent pas de la vie, les bourgeois). Ils rejetaient la société organisée et corrompue et les valeurs traditionnelles ; ils voulaient vivre simplement, à fond. Ils se révoltaient contre le matérialisme, l'hypocrisie, l'uniformité, la superficialité. Ils voulaient créer une société de sentiments simples, sans préjugés.

Les femmes de la Beat generation

Souvent laissée de côté dans l'histoire des premiers temps de la Beat generation, Joan Vollmer (qui devint plus tard Mme Burroughs) fut sans équivoque présente dès le tout début de l'aventure. Elle est décrite comme une femme intelligente et intéressante, mais qui ne s'impliqua pas dans l'écriture. Par ailleurs, à l'inverse d'un homme comme Cassady, personne ne choisit d'écrire à son sujet. Elle n'est restée dans l'histoire que comme l'épouse que William Burroughs tua par accident d'une balle en pleine tête (en cherchant à rejouer le mythe de Guillaume Tell).

Corso soutint que les femmes furent très présentes dans le cercle, mais qu'il fut très dur pour elles de revendiquer le style de vie bohème des beats : stigmatisées, vues comme folles, certaines furent éjectées du mouvement. Il raconta ainsi l'histoire de la jeune « Hope » qui fut la première mentor de Kerouac et Ginsberg dans leur intérêt pour le bouddhisme, leur faisant lire certains auteurs, dont Li Bai.

Certaines parvinrent tout de même à se faire un nom au sein des Beats : Joyce Johnson, Hettie Jones, Diane DiPrima, Janine Pommy Vega, et Hedwig Gorski[10].

Notes et références

  1. (en) Article « This the Beat Generation » consultable en ligne.
  2. Charters (1992) The Portable Beat Reader
  3. a et b Ann Charters, introduction, Beat Down to Your Soul, Penguin Books (2001), ISBN 0-14-10.0151-8 p. xix
  4. a et b Ted Morgan, Literary Outlaw, Avon, New York, 1988. p 347, Trade Paper edition, ISBN 0-380-70882-5
  5. « La beat generation et son influence sur la société américaine » par Élisabeth Guigou, in La Revue des anciens élèves de l'École nationale d'administration, numéro hors-série, « Politique et littérature », décembre 2003, consultable en ligne.
  6. Kerouac répond en français sur l'origine du terme lors d'une émission de télévision
  7. Alain Dister, La Beat Generation. La révolution hallucinée, Découvertes Gallimard, Paris, 1998, p. 51.
  8. Dans « Sur les origines d’une génération », paru dans Playboy en juin 1959, Kerouac explique qu’il ne faut pas comprendre le mot « beat » dans le sens d' « abattu », mais dans un sens positif, quasi religieux, proche du mot « enthousiasme », étymologiquement « touché par Dieu », c'est-à-dire dans un sens chrétien : « Je suis Beat, c’est-à-dire que je crois en la béatitude et que Dieu a tellement aimé le monde qu’il lui a sacrifié son fils unique. » ».
  9. Voir la définition donnée par le Trésor de la Langue Française.
  10. (en) Article « This the Beat Generation » consultable en ligne [archive]

Annexes

Articles connexes

Personnalités

En France
voir le site (très bien fait) Paris70

Liens externes

Bibliographie


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