Tractrice

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Tractrice pour x et y positifs ; T parcourt (Ox).

En mathématiques, une tractrice est une courbe plane parcourue par un point M lié à un point T par les conditions suivantes :

  • le point T parcourt une droite ;
  • la distance MT est constante ;
  • la droite (MT) est tangente à la tractrice.

Elle est connue aussi sous le nom de courbe équitangentielle[1].

L'histoire de la tractrice remonte au XVIIe siècle. Claude Perrault, rencontrant Leibniz vers les années 1670, lui aurait parlé d'un problème qu'il aurait posé déjà à de nombreux mathématiciens sans en obtenir de réponse satisfaisante. Posant sa montre à gousset sur la table, il la tire par la chaînette en déplaçant l'extrémité de cette chaînette le long du bord rectiligne de la table ; il demande alors quelle est la trajectoire suivie par la montre. Nous sommes alors au tout début du calcul infinitésimal et des équations différentielles. Leibniz propose une mise en équation mais la résolution proprement dite demande l'outil des fonctions logarithmes ou des fonctions hyperboliques.

Elle a été aussi étudiée par Isaac Newton en 1676, Huygens en 1692 et Leibniz en 1693.

De nombreux mathématiciens, appartenant au « mouvement tractionnel », s'intéressent alors à cette courbe et proposent des instruments spécifiques, les « intégraphes », qui permettent la construction d'une tractrice, ou de courbes plus complexes, à partir d'un mécanisme de traction. Une tractrice est également utilisée pour calculer l'aire d'un domaine au moyen du planimètre de Prytz.

On peut citer, en particulier, les instruments de Leibniz et de Huygens en 1693, de Jakob Bernoulli en 1696, de John Perks en 1706, de Giovanni Poleni en 1728 (premier instrument réellement opérationnel[2]), de Giambattista Suardi (en) en 1752[3].

On peut imaginer une construction de la tractrice à l'aide d'une adaptation de la méthode d'Euler (Leonhard Euler a entretenu une correspondance soutenue, en particulier avec Giovanni Poleni, entre 1735 et 1739)[4].

Propriétés[modifier | modifier le code]

Construction graphique[modifier | modifier le code]

Pour construire une approximation d'une tractrice entre les points M1 et M2 associés aux points T1 et T2, on divise le segment [T1T2] en n intervalles [titi+1] qui permettent de construire n + 1 points m0, … , mn de la tractrice (m0 = M1 et mn = M2) de proche en proche. Si r est la distance M1T1, on trace le segment [miti+1] et l'on place le point mi+1 sur ce segment et à une distance r de ti+1.

Résolution mathématique[modifier | modifier le code]

Tractrice, position de M et T.

En considérant la tractrice comme une courbe paramétrée, autrement dit si x(t), y(t) sont les coordonnées cartésiennes de M dans un repère orthonormé, cherchons deux fonctions x et y vérifiant x(0) = 0, y(0) = a et vérifiant les conditions requises.

Dans le dessin ci-contre, elles se traduisent par

  • pour
  • (h, –y) est proportionnel à (x', y') car (MT) est tangente à la courbe.

Le problème revient donc à résoudre la relation différentielle :

,

dans laquelle il s'agit de choisir judicieusement les fonctions paramétrées.

y en fonction de x[modifier | modifier le code]

En prenant comme paramètre, on obtient l'équation

,

soit encore

.

C'est une équation différentielle autonome. Cela était prévisible puisque la propriété géométrique étudiée est invariante par translation parallèle à l'axe des x : si le graphe de a la propriété requise, il doit en être de même du graphe de , quel que soit le réel .

Pour une telle équation, sur tout intervalle où ne s'annule pas, on peut expliciter les fonctions réciproques des solutions au moyen d'intégrales. Ici, pour les conditions initiales requises,

.

Cette intégrale peut se calculer par divers changements de variable. Si l'on se limite aux conditions et positifs ou nuls, avec comme conditions initiales et , on trouve ainsi[5], entre autres[1] :

  • en utilisant des fonctions trigonométriques circulaires :
    avec (la géométrie du problème imposant la condition ) et
    .
    Puis, en remplaçant par  :
     ;
  • en utilisant des fonctions hyperboliques tanh et cosh :
    et
    .

La relation entre ces deux points de vue est donnée par la fonction de Gudermann.

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. a et b « Tractrice », sur mathcurve.com.
  2. Waltier Masse, « Les instruments mécaniques d’intégration : Intégraphe de Giovanni Poleni (1729) », sur slideplayer.fr, .
  3. Waltier Masse, « Les instruments mécaniques d’intégration : Intégraphe de Giambattista Suardi (1752) », sur slideplayer.fr, .
  4. Dominique Tournès, « La Construction tractionnelle des équations différentielles dans la première moitié du XVIIIe siècle » [PDF], sur semioweb.msh-paris.fr, .
  5. Voir par exemple le lien ci-dessous vers Wikiversité.

Voir aussi[modifier | modifier le code]

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Article connexe[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]