Nicolas Battestini

Un article de Wikipédia, l'encyclopédie libre.
Nicolas Battestini
Biographie
Naissance
Décès
Sépulture
Cimetière du Montparnasse à Paris (division 16, allée 2)
Nom de naissance
Nicolas Battestini
Nationalité
Formation
Facultés de droit d'Aix et de Paris
Activités
Autres informations
Conflit
Distinction
Grand officier de l'ordre national de la Légion d'honneur[1]

Nicolas Battestini, né le à Calvi, et mort le à Clichy-la-Garenne, est un magistrat et haut fonctionnaire français.

Après avoir servi en administration centrale, et siégé comme conseiller à la cour d'appel de Paris, il est nommé successivement directeur des affaires criminelles et des grâces, conseiller, président de chambre, puis enfin premier président de la Cour de cassation.

À ce poste sommital de la magistrature, qu'il occupe de 1955 à 1963, il assure la présidence de la commission nationale chargée d'opérer le recensement général des votes et de proclamer le résultat du référendum constitutionnel de 1958[2]. C'est aussi l'un des trois membres de la Commission provisoire constitutionnelle[3] (organe précurseur du Conseil constitutionnel).

Son rôle actif dans le changement de République ou la réforme de la magistrature apparaît d'ailleurs dans les mémoires de Charles de Gaulle[4] et de Michel Debré[5].

Biographie[modifier | modifier le code]

Jeunesse et études[modifier | modifier le code]

Nicolas Battestini naît le à Calvi[6] (Corse). Il est le fils de Vincent François Battestini, greffier au tribunal de Calvi, et de son épouse Nunzia Franceschini.

Licencié en droit, il devient avocat à Bastia en 1913, peu avant sa mobilisation comme canonnier au 2e régiment d'artillerie de montagne[7], avec lequel il rejoint le corps expéditionnaire d'Orient, et combat aux Dardanelles, y étant grièvement blessé le 16 mai 1915[8]. Cette blessure lui vaut d'être réformé, cité à l'ordre de l'Armée, puis médaillé militaire peu après la guerre.

Son retour à la vie civile, dès 1916, coïncide avec sa réorientation professionnelle : désormais attaché au parquet de Bastia (non loin de son père, devenu entre-temps greffier en chef du tribunal de première instance de cette ville), il fréquente en auditeur libre l'École pratique des hautes études[9], et prépare le concours de rédacteur au ministère de la Justice, intégrant ainsi l'administration centrale en 1918[10].

Carrière[modifier | modifier le code]

Ses promotions ou nominations s'enchaînent alors à un rythme soutenu : rédacteur principal (1921)[11], sous-chef de bureau (1925)[12], chef de bureau (1930)[13], sous-directeur des affaires criminelles et des grâces (1931)[14], conseiller à la cour d'appel de Paris (1936)[15], directeur des affaires criminelles et des grâces (1938)[16], conseiller à la Cour de cassation (1940)[17], président de la chambre criminelle de la Cour de cassation[18] ainsi que président de la commission d'instruction près la Haute Cour de justice[19] (1947), et enfin premier président de la Cour de cassation (1955)[20].

À la tête de cette haute juridiction, en dépit des réticences d'une bonne partie de son propre corps, il soutient Michel Debré dans son projet de professionnalisation de la formation des magistrats, aboutissant à l'adoption du texte fondateur de l'ordonnance du 22 décembre 1958 portant loi organique sur le statut de la magistrature et créant le Centre national d'études judiciaires, devenu ensuite l'École nationale de la magistrature[21].

Interlocuteur privilégié d'une quarantaine de ministres de la Justice successifs[22],[23], il fait en outre partie de quatre cabinets ministériels, généralement radicaux, sous la IIIe République, le Gouvernement provisoire de la République française et la IVe République :

  • en 1920-1921, comme chef du secrétariat particulier du ministre de la Marine Adolphe Landry (par ailleurs député de la Corse et maire de Calvi)[24] ;
  • en 1938, en qualité de conseiller technique du Garde des sceaux César Campinchi (lui aussi député de la Corse et gendre de Landry)[25] ;
  • en 1944, dans les mêmes fonctions et d'abord dans la clandestinité, aux côtés de l'avocat et résistant Marcel Willard, secrétaire général à titre provisoire du ministère de la Justice[26] ;
  • puis en 1947-1948, de nouveau en tant que conseiller technique, mais cette fois auprès du ministre André Marie[27].

Marié, sans enfant, il meurt le à Clichy-la-Garenne (Hauts-de-Seine)[28].

Affaire judiciaro-littéraire[modifier | modifier le code]

En 1949, alors qu'il préside la chambre criminelle de la Cour de cassation, son nom reste associé à une affaire aussi peu banale que symbolique : le procès en révision de la condamnation infligée à Charles Baudelaire, en 1857, pour outrage aux bonnes mœurs, après la publication de son recueil Les Fleurs du mal. Introduit par la Société des gens de lettres, ce recours permet de réhabiliter le poète à titre posthume[29],[30].

Décorations[modifier | modifier le code]

Références[modifier | modifier le code]

  1. Photographie officielle de la remise de ses insignes de grand officier par le Président de la République René Coty, le 27 mars 1957.
  2. « La commission nationale de recensement des votes est constituée », Le Monde.fr,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  3. Proclamation des résultats du scrutin du 21 décembre 1958 pour l'élection du Président de la République, JORF n° 7 du 9 janvier 1959, p. 673 – cf. signataires.
  4. Charles de Gaulle, Mémoires d'espoir, tome 1 : le Renouveau, 1958-1962, Paris, Plon, 1970 (ISBN 1135672423).
  5. Michel Debré, Trois Républiques pour une France, tome 2 : Agir, 1946-1958, Paris, Albin Michel, 1984 (ISBN 2226033424).
  6. Registre des actes de naissances de la commune de Calvi de 1890 à 1895, coté 12 NUM 819 aux Archives de Corse (cf. p. 114 à gauche ; cliquer deux fois de suite sur le lien pour le réactiver).
  7. Paul Castaing, Historique des corps de troupe. 2e régiment d'artillerie de montagne, Nice, Imprimerie idéale, s.d. (années 1920).
  8. Fiche matriculaire extraite du registre de la classe 1913 du bureau de recrutement d'Ajaccio, coté 9 NUM 54/2109 aux Archives de Corse (cliquer deux fois de suite sur le lien pour le réactiver).
  9. Liste alphabétique des élèves et auditeurs réguliers de l'EPHE pendant l'année scolaire 1917-1918.
  10. Arrêté du , JORF n° 4 du 5 janvier 1918, p. 217, 3e colonne, 2e paragraphe.
  11. Arrêté du , JORF n° 298 du 4 novembre 1921, p. 12334, 1re colonne, 12e nom.
  12. Arrêté du 10 octobre 1925, JORF n° 241 du 14 octobre 1925, p. 9870, 2e colonne, dernier nom.
  13. Arrêté du 23 mai 1930, JORF n° 124 du 24 mai 1930, p. 5738, 3e colonne.
  14. Arrêté du 21 février 1931, JORF n° 48 du 26 février 1931, p. 2307, 3e colonne, 1er paragraphe.
  15. Décret du 26 septembre 1936, JORF n° 227 du 27 septembre 1936, p. 10214, 1re colonne, 4e paragraphe en partant du bas.
  16. Décret du 3 février 1938, JORF n° 29 du 4 février 1938, p. 1421, 3e colonne.
  17. Décret du 13 novembre 1940, JORF n° 305 du 26 novembre 1940, p. 5830, 2e colonne.
  18. Décret du 11 avril 1947, JORF n° 94 du 19 avril 1947, p. 3702, 2e colonne.
  19. Décret du 11 août 1947, JORF n° 192 du 15 août 1947, p. 8029, 1re colonne.
  20. Décret du 3 août 1955, JORF n° 183 du 4 août 1955, p. 7788, 1re colonne.
  21. Anne Boigeol, « Formation des magistrats : de l'apprentissage sur le tas à l'école professionnelle », Actes de la recherche en sciences sociales,‎ mars 1989, vol. 76/77 (lire en ligne, consulté le ).
  22. Alain Bancaud, « Une "constance mobile" : la haute magistrature », Actes de la recherche en sciences sociales,‎ mars 1989, vol. 76/77 (lire en ligne, consulté le ).
  23. Alain Bancaud, La haute magistrature judiciaire entre politique et sacerdoce ou le culte des vertus moyennes, Paris, LGDJ, coll. « Droit et Société », 1993 (ISBN 9782275005348).
  24. Décision du 21 janvier 1920, JORF n° 21 du 22 janvier 1920, p. 1150, 2e colonne.
  25. Arrêté du 28 janvier 1938, JORF n° 24 du 29 janvier 1938, p. 1243, 1re colonne.
  26. Liora Israël, Robes noires, années sombres : la Résistance dans les milieux judiciaires, Fayard, 2005 (ISBN 2213622884).
  27. Arrêté du 24 novembre 1947, JORF n° 277 du 25 novembre 1947, p. 11653, 2e colonne.
  28. Maurice Aydalot, « Nécrologie : Nicolas Battestini », Revue de science criminelle et de droit pénal comparé,‎ janvier-mars 1983 (pp. 151-152) (lire en ligne, consulté le ).
  29. Arrêt du 31 mai 1949 (Cass. crim.) réhabilitant Charles Baudelaire.
  30. Yvan Leclerc, Crimes écrits. La littérature en procès au XIXe siècle, Paris, Plon, 1991 (ISBN 2259019838).
  31. Décret du 23 février 1957, JORF n° 50 du 28 février 1957, p. 2277, 2e colonne.
  32. Décret du 2 août 1949, JORF n° 192 du 14 août 1949, p. 8046, 2e colonne.
  33. Décret du 2 janvier 1939, JORF n° 5 du 6 janvier 1939, p. 363, 2e colonne, 4e nom en partant du bas.
  34. Décret du 31 décembre 1930, JORF n° 1 du , p. 4, 1re colonne, 9e nom.
  35. Décret du 22 décembre 1925, JORF n° 302 du 25 décembre 1925, p. 12369, 3e colonne, 15e nom.
  36. Décret du 24 mai 1972, JORF n° 122 du 26 mai 1972, p. 5291, 1re colonne.
  37. Ordre du 13 décembre 1916, JORF n° 97 du 8 avril 1917, p. 2774, 3e colonne, dernier paragraphe (nota bene : la date de la blessure est erronée).
  38. Régularisation de décrets du 2e semestre 1928, JORF n° 35 du 10 février 1929, p. 1744, 3e colonne, 6e nom.
  39. Arrêté du 16 mars 1961, Bullletin officiel des décorations, médailles et récompenses no 13 du 18 avril 1961, p. 448, 1re colonne.

Liens externes[modifier | modifier le code]