Andrea Long Chu

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Andrea Long Chu
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Andrea Long Chu (chinois simplifié : 朱华敏, pinyin : Zhūhuámǐn) est une écrivaine et critique américaine, née en 1992 à Chapel Hill, en Caroline du Nord.

Chu écrit pour des journaux telles que le magazine littéraire N+1 (en) et le New York Times, ainsi que pour diverses revues universitaires, notamment Transgender Studies Quarterly[1]. Femme transgenre, elle marque les esprits lors de la publication en 2018 de son essai On Liking Women. Elle publie son premier livre, intitulé Females, en 2019, chez l'éditeur Verso Books. À sa sortie, cet ouvrage est finaliste pour le Lambda Literary Award, qui récompense les livres ayant un lien avec la communauté LGBT. En 2021, elle rejoint l'équipe du magazine New York en tant que critique littéraire. Andrea Chu se voit décerner en 2023 le prix Pulitzer de la critique (en).

Biographie[modifier | modifier le code]

Enfance et études[modifier | modifier le code]

Andrea Long Chu est née en 1992 à Chapel Hill, en Caroline du Nord, de parents encore étudiants au moment de sa naissance[2]. Son père a des origines chinoises[3].

Quelques années plus tard, Chu et sa famille déménagent à Asheville. Même si elle a décrit Asheville comme un « endroit très hippie », Chu déclare avoir « été élevée dans une certaine chrétienté »[2]. Elle fréquente une petite école confessionnelle et sa famille appartient à une église presbytérienne conservatrice. Chu décrit son enfance comme « saturée » de christianisme[2].

Chu est titulaire d'un diplôme de premier cycle universitaire en littérature de l'Université Duke, où elle signe en 2013 ses premières tribunes dans les médias étudiants de sa faculté sous le nom d'Andy Chu[4].

Andrea Chu a par ailleurs obtenu une maîtrise en littérature comparée à l'Université de New York[5],[6].

Carrière professionnelle[modifier | modifier le code]

Andrea Chu commence sa carrière professionnelle en écrivant des articles pour The New Yorker, Bookforum (en), N+1 (en) et dans d'autres revues[7]. En 2018, elle s'exprime sur sa transition de genre dans le New York Times, en écrivant un article d'opinion intitulé Mon nouveau vagin ne me rendra pas heureuse et se fait remarquer dans N+1 avec l'essai On liking Women[8].

Elle publie son premier livre, Females[9] en 2019 chez Verso Books. Le livre est sélectionné comme finaliste pour le Lambda Literary Award, dans la catégorie livres de non-fiction transgenre[10],[11]. Cet ouvrage a été traduit en français en 2021 et publié par les éditions Premier Degré.

Photographie en noir et blanc d'une femme caucasienne assise, cheveux bruns coiffés en mise en pli, entre 30 et 40 ans
Ada Louise Huxtable, première femme à avoir travaillé comme critique à temps plein pour un journal américain, gagne le 1er prix Pulitzer de la critique en 1970[12].

Depuis 2021, Chu est critique littéraire pour le bimensuel culturel New York[13]. Elle y rédige des critiques de livres, dont ceux de Maggie Nelson[14], Octavia Butler[15], Hanya Yanagihara[16] et Ottessa Moshfegh[17]. En 2021, elle publie un profil complet sur l'écrivain et mannequin Emily Ratajkowski pour le magazine New York, et entretient depuis une amitié avec cette actrice[11].

Après ses consoeurs Ada Louise Huxtable (1970), Emily Genauer (1974)[18] ou plus récemment, l'activiste féministe Salamishah Tillet (en) (2022)[19], elle remporte, en 2023, le prix Pulitzer pour ses critiques littéraires, ce qui fait d'elle la onzième lauréate parmi les 54 récipiendaires de ce prix[20] [note 1]. Andréa Long Chu devance ainsi, en 2023, la critique gastronomique afro-américaine Lindsay C. Green et Jason Farago, journaliste au New-York Times et ancien contributeur sur Artforum, qui s'est fait remarquer pour son travail sur la place de l'art dans la guerre d'Ukraine, tous deux nommés dans la même catégorie[13],[20].

Vie privée[modifier | modifier le code]

Dans une interview pour le New York City Trans Oral History Project, Chu a déclaré entretenir une relation avec une « merveilleuse femme cis » qui lui a été d'un grand secours lors de la préparation de sa chirurgie de réassignation sexuelle[21]. En parlant de cette relation, elle a déclaré : « [l]'hétérosexualité est tellement mieux quand il n'y a pas d'hommes dans l'équation »[21].

Réception de ses publications[modifier | modifier le code]

Son essai On Liking Women (2018)[modifier | modifier le code]

En 2018, Chu a publié « On Liking Women » dans le magazine N+1, un essai dans lequel elle examine sa propre transition de genre, parle de sa fascination pour le SCUM Manifesto de Valerie Solanas et confronte son ressenti sur sa transition de genre avec les affirmations de la pensée féministe. Dans son essai, Chu écrit : « La vérité est que je n'ai jamais été capable de faire la différence entre aimer les femmes et vouloir être comme elles »[22].

L'écrivain Sandy Stone fait l'éloge de cet essai et déclare que ce texte a lancé « la deuxième vague » d'études trans[23].

La professeure de littérature anglaise Mareile Pfannebecker décrit dans la Long Read Review de la London School of Economics « l'audace admirable » d'Andrea Chu, soulignant avec quelle efficacité elle « fait valoir que l'expérience de genre des femmes trans comme elle ne repose pas sur l'identité mais sur le désir »[24].

Dans la London Review of Books, la philosophe du féminisme Amia Srinivasan dit de cet essai : « comme Chu le sait bien, [ce texte] menace de renforcer l'argument avancé par les féministes anti-trans : selon lequel les femmes trans assimilent et confondent le fait d'être une femme avec les atours de la féminité traditionnelle et renforcent ainsi le pouvoir du patriarcat »[25].

L'écrivain et chercheur communiste Noah Zazanis, écrivant pour le magazine en ligne The New Inquiry (en), exprime lui-aussi des réserves sur On Liking Women. Il suggère que cet essai aurait de mauvaises conséquences pour les hommes trans : « les liens que Chu établit entre la transition trans-féminine et le lesbianisme politique sont parallèles à un récit fréquemment utilisé pour condamner le désir des hommes trans de transitionner ». Et il demande : « Que devons-nous penser de la décision de devenir un homme ? »[26]

Son livre Femelles (2021 pour l'édition en français)[modifier | modifier le code]

Andrea Long Chu s'est fait connaître en France en 2021, au moment de la traduction de son livre Females. Il a été perçu par certains critiques comme une analyse détaillée des approches freudiennes permettant de « déconstruire une théorie très binaire et datée » et de démonter l'argumentation féministe radicale[27]. Pour Diacritik, le caractère polémique du livre d'Andrea Chu va « énerver tout le monde, non seulement la ribambelle habituelle des réac’, mais aussi des gen·te·s très bien », en défendant une « femellité universelle »[28]. Idem pour Victoria Smith, the The Critic, qui souligne que les stéréotypes de genre sont parfois tout à fait admis mais pas acceptés de la même manière pour tout le monde[29].

Lors de la parution du livre en version anglaise, en 2019, La poétesse et essayiste Kay Gabriel (en) a comparé les propos de Chu à ceux de Jacques Lacan et écrit dans son commentaire de l'ouvrage que « Chu revendique ce qu'elle appelle une condition ontologique ou existentielle. Selon elle, le fait d'être une femme est une position d'assujeti. » Elle conclut qu'Andrea Chu donne l'impression de souscrire « aux thèses douteuses du féminisme dit radical » des théoriciennes anti-trans Janice Raymond et l'avocate Catharine MacKinnon, tout en déclarant que ce qu'elle a écrit est indéfendable et qu'il ne faut pas la prendre pas au sérieux[30]. Cet essai d'Andrea Long Chu est également étudié par des universitaires non anglo-saxons. Ainsi, le croate Andrija Koštal soutient que cet essai d'Andrea Chu explique non seulement « le rôle joué par le désir [..] dans le processus de transition de genre, mais aussi dans la formation du genre en tant que tel »[31]. Selon lui, en l'adossant à la théorie du désir formulée de Jacques Lacan, il nous offre un exemple du rôle joué par le désir « dans divers phénomènes de l'expérience humaine, dans lesquels nous ne le chercherions peut-être pas autrement »[32].

Les essais d'Andrea long Chu ont également attiré l'attention du magazine juif conservateur en ligne Tablet[33]. Son chroniqueur Blake Smith[note 2] retrace une biographie de Chu depuis ses débuts dans les médias étudiants, dont une de ses premières tribunes de 2013 intitulée I am a Racist et divers avis postés sur la blog de l'université de Duke. L'ensemble de ses publications étant signées Andy Chu, Blake Smith conclut que Chu se détestait en homme et avait pour but de « tuer Andy ». Il fait un parallèle avec Valérie Solanas qui a tenté, en 1968, d'assassiner Andy Warhol[34].

Peinture, clair-obscur. Jeune homme vêtu à la mode romaine couché sur le dos et levant les bras vers le ciel. En arrière-plan, des pattes de cheval laissent supposer qu'il vient de faire une chute de cheval.
La Conversion de Paul sur la route de Damas (détail) peinte par Le Caravage (1571–1610)

Blake Smith pense, par ailleurs, que son sentiment de culpabilité vis-à-vis de l'acte sexuel lui vient du milieu religieux puritain dont elle est issue et serait à l'origine de son désir de féminité[35]. Il compare la transition d'Andrea Long Chu, inspirée par la pornographie, à la conversion de Paul de Tarse, inspirée par le Christ, tous deux aspirant à devenir « une nouvelle personne »[35]. De la même façon, il parle de l'« auto-orientalisation » d'Andrea long Chu dans ses essais ultérieurs dont China Brain (2021) et The Mixed Asian Metaphor (2022) où cette autrice qui est « aux trois-quarts blanche met en scène son ascendance asiatique [...] motivée par [l']envie [...] de faire partie d'un groupe. »[35]

Son travail comme critique littéraire[modifier | modifier le code]

Andrea Chu est récompensée, en 2023, d'un prix Pulitzer de la critique pour « des critiques de livres qui scrutent les auteurs ainsi que leurs œuvres, en utilisant de multiples lentilles culturelles pour explorer certains des sujets les plus délicats de la société »[36]. Robert Peter Clark, enseignant à l'institut de journalisme Poynter, qualifie ce prix du plus scandaleux des prix Pulitzer de la critique. Il ajoute que « Son long examen proctologique de l'œuvre de Moshfegh [...] fait passer des œuvres interdites comme Lolita pour un pique-nique d'école du dimanche »[37].

David Haskell, le rédacteur en chef du magazine New York, pour lequel Andrea Chu travaille au moment de la remise de ce prix, note également la profondeur de ses critiques sur lesquelles « on continue de cogiter plusieurs heures après en avoir achevé la lecture »[20].

Publications[modifier | modifier le code]

Traductions en français[modifier | modifier le code]

Livres[modifier | modifier le code]

Articles[modifier | modifier le code]

Critiques littéraires (sélection)[modifier | modifier le code]

Critiques de 2022 - prix Pulitzer[modifier | modifier le code]

Autres critiques d'auteurs notoires[modifier | modifier le code]

Critiques de films et séries (sélection)[modifier | modifier le code]

Autres articles (sélection)[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

Document utilisé pour la rédaction de l’article : document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.

  • (en) Blake Smith, « The Long Goodbye », Tablet Magazine,‎ (lire en ligne). Ouvrage utilisé pour la rédaction de l'article
  • (en) Tom O'Shea, « Sexual desire and structural injustice », Journal of Social Philosophy, vol. 52, no 4,‎ , p. 587–600 (DOI 10.1111/josp.12385, lire en ligne, consulté le )
  • (en) Andrija Koštal, « Andrea Long Chu and the Trouble with Desire », Identities: Journal for Politics, Gender and Culture, vol. 17, nos 2-3,‎ , p. 70–74 (ISSN 1857-8616, DOI 10.51151/identities.v17i2-3.452, lire en ligne, consulté le ). Ouvrage utilisé pour la rédaction de l'article
  • (en) Matthew J. Donovan, « Andrea Long Chu's Micropolitical Challenge For Contemporary Feminism », N+1, no 34,‎ (lire en ligne, consulté le )

Notes et références[modifier | modifier le code]

(en) Cet article est partiellement ou en totalité issu de l’article de Wikipédia en anglais intitulé « Andrea Long Chu » (voir la liste des auteurs).
Notes
  1. Le prix Pulitzer de la critique (en) est décerné chaque année de puis 1970. En 1992, toutefois, il n'y a pas eu de lauréat ou de lauréate.
  2. Selon le site web du magazine en ligne UnHerd, Black Smith est rédacteur pour les sites Web Tablett et UnHerd. Ce dernier a été fondé par l'activiste conservateur britannique Tim Mongomerie.
Références
  1. (en-US) « Andrea Long Chu Joins New York Magazine as Book Critic », New York Press Room, (consulté le )
  2. a b et c O'Brien 2018, p. 3.
  3. (en-US) Shapiro, « Andrea Long Chu Wants More », Vulture, (consulté le )
  4. (en-US) « I am a racist », sur The Chronicle (consulté le )
  5. O'Brien 2018, p. 8.
  6. « Chu, Andrea Long », as.nyu.edu (consulté le )
  7. (en) The Pulitzer Prizes, « Andrea Long Chu of New York magazine », www.pulitzer.org (consulté le )
  8. (en-US) « On Liking Women », sur n+1, (consulté le )
  9. (en-US) Condé Nast, « Andrea Long Chu on Her Juicily Transgressive Book, 'Females' », sur Vogue, (consulté le )
  10. (en) Marissa Lorusso, « In 'Females,' The State Is Less A Biological Condition Than An Existential One »,
  11. a et b (en-US) Andrea Long Chu, « The Emily Ratajkowski You’ll Never See », The New York Times,‎ (ISSN 0362-4331, lire en ligne, consulté le )
  12. « Le Courrier de l'Architecte | Ada Louise Huxtable, celle qui fit de l'architecture un sujet quotidien », sur archive.wikiwix.com (consulté le )
  13. a et b (en-US) « Andrea Long Chu, New York Magazine’s Book Critic, Wins Pulitzer Prize », sur New York Press Room, (consulté le )
  14. (en-US) Chu, « You’ve Heard This One Before » [archive du ], Vulture, (consulté le )
  15. (en-US) Andrea Long Chu, « Misreading Octavia Butler », sur Vulture, (consulté le )
  16. (en-US) Chu, « Hanya’s Boys » [archive du ], Vulture, (consulté le )
  17. (en-US) Andrea Long Chu, « Ottessa Moshfegh Is Praying for Us », sur Vulture, (consulté le )
  18. (en-US) L. A. Times Archives, « Emily Genauer, 91; Art Critic Awarded Pulitzer Prize in 1974 », sur Los Angeles Times, (consulté le )
  19. (en-US) « 2022 Pulitzer Prize Remarks: Criticism », sur The New York Times Company, (consulté le )
  20. a b et c (en-US) « Andrea Long Chu Wins Pulitzer Prize for Criticism - Arts Supplier », (consulté le )
  21. a et b O'Brien 2018, p. 25.
  22. Chu 2018.
  23. Blanchard 2018.
  24. Pfannebecker 2018.
  25. (en) Amia Srinivasan, « Does anyone have the right to sex? », London Review of Books, vol. 40, no 06,‎ (ISSN 0260-9592, lire en ligne, consulté le )
  26. (en-US) Zazanis, « On Hating Men (And Becoming One Anyway) », The New Inquiry, (consulté le )
  27. Marthe Chalard-Malgorn, « « Femelles » - Au-delà de l’XY - Maze.fr », sur Maze, (consulté le )
  28. Pierre Niedergang, « Andrea Long Chu : Être femelle et devenir trans (Femelles) », sur DIACRITIK, (consulté le )
  29. (en-GB) « Here come the new gender stereotypes, same as the old gender stereotypes | Victoria Smith », sur The Critic Magazine, (consulté le )
  30. (en) Kay Gabriel, « Los Angeles Review of Books », sur Los Angeles Review of Books, (consulté le )
  31. Koštal 2020, p. 74.
  32. Koštal 2020, p. p.74.
  33. (en) David Carr, « A New Online Magazine About Jewish News and Culture », sur Media Decoder Blog, (consulté le )
  34. (en-US) Blake Smith, « The Long Goodbye : How Andrea Long Chu became a latter-day Saul of Tarsus in her journey from guilty white man to taboo-breaking Asian woman » Accès libre, sur Tablet, (consulté le )
  35. a b et c Smith 2023.
  36. « Here are the winners of the 2023 Pulitzer Prizes », NPR,
  37. (en-US) Roy Peter Clark, « The most outrageous Pulitzer lead of all time », sur Poynter, (consulté le )

Liens externes[modifier | modifier le code]