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Biographie[modifier | modifier le code]

Un praticien précoce des arts du spectacle[modifier | modifier le code]

Les bombardements de Nantes du 16 et 23 septembre 1943 par les troupes alliées sont les premiers "souvenirs grinçants" de Jacques Demy. Il suppose que ses existences rêvées et sa volonté créatrice sont apparues dès lors de cette "grande catastrophe"[1]. En raison des risques liés à ces bombardements, il est réfugié de septembre 1943 à août 1944 chez un sabotier de la Pierre Percée à La Chapelle-Basse-Mer, près de Nantes. Marqué par cette violence et ce nouveau milieu, il réalise un premier dessin animé en 1944 sur une attaque aérienne contre le pont de Mauves. Vers la fin de 1944, de retour à Nantes, Demy achète sa première caméra au Passage Pommeraye, qu'il échangera contre une plus perfectionnée à la fin de 1946. Il réalise d'abord quelques films avec acteurs, ainsi que ce qui pourrait s'apparenter à des documentaires, notamment Le Sabot en 1947, suite de son séjour à La Chapelle-Basse-Mer, première ébauche du Sabotier du Val de Loire (1955). Mais surtout, de 1946 à 1948, il se consacre à l'animation de personnages miniatures, réalisant des films de quelques minutes, La Ballerine (1944) puis Attaque nocturne (1947). C'est à cette période qu'il rencontre pour la première fois le cinéaste Christian-Jaque, de passage à Nantes, qui l'encourage et pousse son père à accepter la vocation du jeune Demy.

Études secondaires et Beaux-Arts de Nantes[modifier | modifier le code]

Il fait des études de type primaire supérieur jusqu'à l'âge de 14 ans et entre le 1er octobre 1945 à l'école Leloup-Bouhier (aujourd'hui lycée Leloup-Bouhier) à Nantes. Lui-même, qui envisageait déjà de devenir artiste, aurait préféré faire des études longues au lycée Clemenceau, mais il s'est heurté au refus de son père, pour de longues études classiques. Malgré cela, il réussit bien dans toutes les matières, alors qu'il ne s'intéresse véritablement qu'aux Lettres et au Dessin. Il semble avoir obtenu le Brevet d'études industrielles et un CAP de mécanicien garagiste.

Encouragé par sa mère qui a elle-même fait de la peinture étant jeune[2], Jacques Demy utilise sur son temps libre (le jeudi, le dimanche matin, certains soirs), pour suivre des cours à l'école des Beaux-Arts de Nantes dispensés par Guy Baty[2]. Il y rencontre des personnalités qui participeront à la suite de sa carrière. Bernard Evein de Saint-Nazaire opérera la plupart des décors colorés de la filmographie de Demy et Jacqueline Moreau d'Ancenis s'occupera des costumes. À un moindre degré, il rencontre également André Guérin et Jean Porcher, celui-ci viendra en aide à Jacques Demy lorsqu'il reprend la peinture à la fin de sa vie.

Durant cette période, comme le montre bien le film Jacquot de Nantes, la création artistique s'est révélée être une véritable vocation pour Jacques Demy. Arrivé au terme de ses études secondaires, son père ne s'y oppose plus.

Les années 1960[modifier | modifier le code]

Les années 60 sont pour Jacques Demy une période très concluante vis à vis de sa production cinématographique et de sa renommée en tant qu'artiste. En effet, en 1960, il parvint à faire produire et à réaliser son ébauche de film Un Billet pour Johannesburg, désormais Lola. Son intégration au mouvement de la Nouvelle Vague est officialisée suite à la réalisation des Sept Péchés capitaux (1961). Il collabore avec Jeanne Moreau en 1963 pour La Baie des Anges, puis avec Catherine Deneuve, en 1964 pour Les Parapluies de Cherbourg qui lui vaut une Palme d'Or à Cannes, et en 1967 avec Les Demoiselles de Rochefort. Appelé par les productions américaines, il réalise Model Shop (1969) avant de revenir en France pour tourner Peau d'Âne en 1970.

Lola (tourné en 1960)

En 1959, Jacques Demy réussit à intéresser Georges de Beauregard, le producteur d'À bout de Souffle (1960) pour son scénario de long métrage Un billet pour Johannesbourg, futur Lola. L'idée originelle de Jacques Demy était de réaliser une comédie musicale en couleur à Nantes, mais le budget obtenu est plus restreint (38 millions de francs 1959) et Demy est obligé de revoir son projet initial à la baisse. Ainsi, il doit se contenter du noir et blanc, réduire les chorégraphies, les décors, et renoncer à Jean-Louis Trintignant, qu'il souhaitait diriger dans le rôle central de Roland Cassard. De fait, il engage Marc Michel, trois jours seulement avant la date du tournage. Lola est également marqué par sa première collaboration avec Michel Legrand pour la musique.

Les Sept Péchés capitaux (sketch La Luxure) (1961)

Après la sortie de Lola, Jacques Demy est invité à participer au film à sketches Les Sept Péchés capitaux dans lequel il tourne le sketch La Luxure. Film collaboratif, Jacques Demy s'inscrit désormais aux côtés de réalisateurs et scénaristes de renom comme Eugène Ionesco, Roger Peyrfitte ou Jean-Luc Godard.

La Baie des Anges (1963)

Au cours d'une excursion dans un casino à Cannes lors du festival[3], Jacques Demy entrevoit la possibilité d'un film sur le jeu, film qui va être rapidement mis en route et réalisé, notamment grâce à l'appui de Jeanne Moreau, sous le titre de La Baie des Anges.

Les Parapluies de Cherbourg (1964)

C'est durant la réalisation de La Luxure (1961) que Jacques Demy met au point le scénario des Parapluies de Cherbourg et travaille déjà sur la musique de ce film avec Michel Legrand. Avec ce projet, il parvint à intéresser la productrice Mag Bodard, qui s'implique réellement dans le projet et réussit, non sans difficulté, à rassembler les financements nécessaires.

Le budget finalement réuni est de 1 300 000 francs, avec une participation de la 20th Century Fox. Le film, tourné dans des conditions satisfaisantes, obtient immédiatement un succès public et critique. Il gagne le prix Louis-Delluc dès janvier 1964, puis la Palme d'or à Cannes. En France le public plébiscite le film avec 1,3 million de spectateurs, notamment puisqu'il s'agit du premier film à mentionner la Guerre d'Algérie, sujet encore très tabou. Le succès du film en France comme à l’étranger (notamment au Japon) donne à Jacques Demy et aux autres protagonistes : Mag Bodard, Michel Legrand et Catherine Deneuve, une notoriété internationale.

Les Parapluies de Cherbourg sont nominés pour les Oscars en 1965, permettant à Jacques Demy d'aller aux États-Unis et d'y rencontrer Gerald Ayres, producteur de Columbia Pictures, qui lui propose de l'aider dans ses futurs projets cinématographiques.

Les Parapluies de Cherbourg est relié à Lola par le personnage de Roland Cassard, qui évoque son ancien amour pour Lola sur une vue du Passage Pommeraye désert, mais aussi par celui de Cécile Desnoyers, venue de Nantes à Cherbourg, à laquelle Geneviève fait allusion.

Les Demoiselles de Rochefort (1967)

Malgré le succès des Parapluies de Cherbourg, le financement des Demoiselles de Rochefort a été relativement complexe parce que le budget nécessaire est colossal pour l'époque. Une coproduction franco-britannique est d'abord envisagée, mais elle n'aboutit pas. Mag Bodard parvient cependant à obtenir la participation de Warner-7 Arts, qui permet de doubler le budget (atteignant 6 000 000 de francs 1966) et d'amener dans la distribution les acteurs américains Gene Kelly et George Chakiris.

Après Les Demoiselles de Rochefort, Jacques Demy part aux États-Unis, où il est déjà allé deux fois : en 1965, pour la nomination des Parapluies aux Oscars, et en 1966, lors de l'engagement de Gene Kelly pour Les Demoiselles. À la fin du tournage de ce dernier film, il est invité par le festival du film de San Francisco. Il va rester plus de deux ans aux États-Unis.

Model Shop (1969)

Gerald Ayres lui donne la possibilité de tourner un film pour Columbia. Très rapidement Jacques Demy élabore son sujet, autour de sa propre fascination pour Los Angeles et le pays en général. Columbia accepte le sujet sous réserve d'une limite budgétaire (1 000 000 $) que le film sera loin d'atteindre (700 000 $). Model Shop reprend le personnage de Lola, mais un certain nombre de difficultés qui apparaissent détourneront par la suite Jacques Demy d'essayer d'établir des liens aussi forts entre ses films. Model Shop n'est pas dans la tonalité des films précédents : Demy examine un bout des États-Unis avec une attention quasi documentaire. Il veut représenter Los Angeles à travers sa vision européenne. Harrison Ford avait été pressenti de façon très sérieuse pour ce film, mais c'est finalement Gary Lockwood (Frank Poole dans 2001, l'Odyssée de l'espace) qui prend le rôle.

Sorti à New-York, Model Shop est un échec immédiat. Aux États-Unis, le film sort en double bill, dans des drive-in, ce qui participe à sa mauvaise réception. En France, le film n'est pas doublé, il reste donc limité au circuit Art et essai. Malgré tout, ayant été peu coûteux, le film couvre ses dépenses grâce à la télévision et cet échec n'est pas porté au débit de Jacques Demy qui reçoit la proposition de tourner Walking in the Spring Rain, avec Ingrid Bergman et Anthony Quinn. Mais il préfère rentrer en France pour son projet personnel de Peau d'âne, Mag Bodard lui ayant annoncé que le budget en était prêt.

Les années 1970.[modifier | modifier le code]

Pour Jacques Demy, les années 70 est la période qui verra naître une multitude de projets, mais également de l'avortement de la plupart d'entre eux.

Dès le début de 1973, le scénario d'Une chambre en ville est au point, la production se fait avec Gaumont (Daniel Toscan du Plantier) et Planfilm et la musique est composée en 1974 par Michel Colombier. En 1975, alors que la production pour Une chambre en ville commence à être compromise, Jacques Demy élabore un scénario pour Yves Montand : Dancing (futur Trois places pour le 26) puis en 1976, celui de Constance, quelquefois (futur Kobi), deux projets qui n'aboutissent pas dans l'immédiat. En 1976, alors que la réalisation semble très proche, surviennent des problèmes liés au refus de Catherine Deneuve pour l'utilisation du play-back, entrainant le désistement de Gérard Depardieu. Dans la même année, suite à la mise en scène du Rossignol de Stravinsky en 1972, Jacques Demy reçoit de Rolf Liebermann de l'Opéra de Paris la proposition de mettre en scène l'opéra de Jean-Philippe Rameau Platée, mais il décline, ne voyant pas ce qu'il pourrait apporter à cette œuvre. Le dernier projet avorté de cette décennie est celui d'un film en URSS, dans le cadre des coproductions internationales qui ont abouti par exemple au film d'Akira Kurosawa Dersou Ouzala. Le scénario d'Anouchka, écrit par Jacques Demy en 1975 est fondé sur le tournage d'un film musical d'après le roman de Tolstoï Anna Karénine. Le projet, très avancé, est abandonné en 1978.

Peau d'âne (1970)

Jacques Demy et Michel Legrand ont élaboré le scénario, les dialogues et les musiques de Peau d'Âne, lors de leur séjour américain. La production associe Mag Bodard et la Paramount (et sa filiale française Marianne Films). Mais le tournage va être plus difficile que prévu, malgré l'enthousiasme de l'équipe, en raison de l'insuffisance du budget de départ (4 000 000 de francs) obligeant à une très forte limitation du décor et de la figuration. Bernard Evein ayant évalué le coût du décor à 700 000 francs, au lieu de 350 000 envisagés par la production, abandonne le projet. Jacques Demy et Catherine Deneuve mettent leur salaire en participation. Malgré tout, le budget sera dépassé et atteindra les 4 800 000 de francs.

Les mouvements pop art et peace and love que Demy découvre aux États-Unis, l'influencent puisque, suite au retrait de Bernard Evein, Jacques Demy engage l'artiste britannique Jim Leon pour qu'il donne cette atmosphère pop aux décors.

Le Joueur de flûte ou The Pied Piper (1972)

Ce film, tourné d'après une ancienne légende allemande, évoque, en reprenant les codes esthétiques et narratifs du conte, les rapports sociaux d'un XIVème siècle où l'innocence de la jeunesse s'opposent à la corruption, la guerre, le racisme et l'intolérance.

L'Événement le plus important depuis que l'homme a marché sur la Lune (1973)

Ce film est né suite à une conversation qu'il avait entretenue avec Agnès Varda alors que celle-ci était enceinte. Demy se riait de voir Agnès Varda s'émerveiller devait cet heureux évènement[4] et décide de réaliser un film où un homme tombe enceinte. Jacques Demy se sert de ce film pour traiter plus en profondeur les personnages féminins tout en offrant aux hommes un attribut de la féminité.

Lady Oscar (1978)

En 1978, c'est du Japon qu'il va obtenir la possibilité de réaliser un nouveau film sur Lady Oscar. Dans la filmographie de Jacques Demy, la présence de ce film japonais, qui n'a pour ainsi dire pas été exploité en France (et en Europe en général), mais qui a été un succès au Japon et en Asie, repose sur le souvenir que le Japon a gardé des Parapluies de Cherbourg. Le sujet est issu de La Rose de Versailles, un manga historique japonais sur la Révolution française. Le film est tourné en France, avec une distribution anglaise, où apparaissent quelques acteurs français dont Georges et Lambert Wilson.

Les années 1980[modifier | modifier le code]

Durant cette période, Jacques Demy tourne quelques films publicitaires, notamment en 1981, des spots de promotion de la lecture et, en 1986, une commande du Ministère des Affaires étrangères sur les succès de la recherche française (spots dans lesquels apparaît Mathieu Demy). Durant les années 1983-84, Jacques Demy assiste Paul Grimault pour la réalisation de la Table tournante, un film de rétrospective des dessins animés de court métrage qu'a produit Paul Grimault au cours de sa carrière.

La seconde moitié des années 1980 est marquée par le début de la maladie de Jacques Demy. Le tournage de Trois places pour le 26 est marqué par deux hospitalisations de Jacques Demy, celles-ci vont devenir de plus en plus fréquentes. Il reprend le scénario de Kobi, un travail de préparation est lancé, finalement abandonné compte tenu de l'état de santé du cinéaste. Même si il ne stoppe pas nettement son activité cinématographique, cette période lui offre l'opportunité de vivre reclus et de renouer avec la peinture et la photographie. Il se consacre également à la rédaction de ses souvenirs d'enfance, qu'il communique au fur et à mesure à son épouse Agnès Varda. En mars 1990, celle-ci décide d'en faire un film, tourné dès le printemps et l'été de 1990 ; après une interruption due à la mort de Jacques Demy, le 27 octobre 1990 à Paris, le film, intitulé Jacquot de Nantes, est achevé début 1991.

La Naissance du jour (1980)

En 1979, Jacques Demy reçoit la proposition de tourner pour la chaîne de télévision FR3 une adaptation du livre de Colette. Il refuse d'abord, mais devant l'insistance de notamment la fille de Colette, il finit par accepter.

Une chambre en ville (1982)

La situation d'Une chambre en ville se résout en quelque sorte à la suite de la victoire de François Mitterrand en 1981. Grâce à Dominique Sanda, une des actrices de La Naissance du jour, il est mis en contact avec Christine Gouze-Rénal, qui accepte le projet, en partie, dit-elle, dans l'euphorie de l'après-mai 1981.

Le film renoue avec les plus anciens : entièrement chanté comme Les Parapluies de Cherbourg, situé à Nantes, comme Lola (un des personnages de Lola est d'ailleurs évoqué dans le film, par le biais d'une note de réparation de téléviseur). Il présente également plusieurs traits originaux : l'intervention explicite du conflit social, puisque l'action se déroule en 1955 pendant les grèves de la construction navale de Nantes et Saint-Nazaire ; l'explicitation de la relation sexuelle ; la radicalisation de la passion amoureuse, qui débouche sur la mort. Cette fois-ci, c'est Michel Colombier qui compose la bande originale du film, Michel Legrand à qui Demy a demandé d'écrire la partition ayant refusé, car il n'appréciait pas la dimension sociale qu'avait le film[5]. Gérard Depardieu et Catherine Deneuve sont pressentis pour incarner les rôles-titres. Cependant, Deneuve, ne voulant pas être doublée pour le chant, refuse le rôle, entraînant le désistement de Depardieu par la même occasion.

À sa sortie, Une chambre en ville n’est pas un succès commercial. Cet échec est aggravé par « l'affaire Une chambre en ville » : un certain nombre de critiques de cinéma attribuent, dans la presse, cet insuccès de Jacques Demy à la sortie simultanée de L'As des as, de Gérard Oury et s'attirent une réplique de l'acteur principal de L'As des as, Jean-Paul Belmondo. Jacques Demy, qui n'est pour rien dans cette affaire, exprime simplement ses remerciements aux critiques qui l’ont soutenu.

Parking (1985)

Un scénario écrit dans les années 1970 d'après le mythe d'Orphée trouve un producteur à cette époque, mais avec la condition de pouvoir présenter le film au festival de Cannes suivant, soit quelques mois après seulement (il n'est, finalement, pas terminé à temps). Le résultat est une précipitation qui, ajoutée à une certaine insuffisance budgétaire, fait que le film est largement raté, notamment du point de vue de Jacques Demy lui-même qui l'exclut de sa filmographie. Demy déplore que l'acteur principal Francis Huster ait obtenu du producteur de pouvoir interpréter lui-même les chansons du film, avec un résultat que le réalisateur juge catastrophique. Sur le plan commercial, c'est un échec.

Trois places pour le 26 (1988)

En 1986, Jacques Demy propose à Yves Montand son scénario Kobi, que Montand refuse, mais il intéresse Claude Berri (on est peu de temps après la sortie de Jean de Florette) à un autre projet de Demy, qui va être retravaillé pour se fonder pour une part importante sur la biographie authentique de Montand. Claude Berri accorde à Jacques Demy des conditions de préparation et tournage tout à fait satisfaisantes. Ce film sera malgré tout, un semi-échec sur le plan commercial.

La Table tournante, collaboration avec Paul Grimault (1988)

Dans ce film, il s'agit de présenter les courts-métrages (ou des extraits) de Paul Grimault en les liant par une trame scénaristique dans laquelle le réalisateur dialogue avec le petit Clown danseur du Roi et l'Oiseau. Au cours de cette présentation intervient aussi Anouk Aimée, la voix de la bergère dans La Bergère et le Ramoneur en 1949.

Vie personnelle.[modifier | modifier le code]

Jacques Demy et Agnès Varda se rencontrent au festival du court métrage de Tours en 1958, et se marient en 1962. Jacques Demy adopte la fille d'Agnès Varda, Rosalie Varda, fille biologique d'Antoine Bourseiller, qui deviendra costumière. Leur fils, Mathieu Demy, naît en 1972 et deviendra comédien.

Le couple possède une demeure à Paris, rue Daguerre, et une propriété (un ancien moulin) sur l'île de Noirmoutier en Vendée. C'est ici qu'ont été tournés les plans de Jacques Demy sur une plage dans Jacquot de Nantes.

Pendant ses études, il n'avait pas appris de langue étrangère. Il a appris l'anglais durant les années 1960, en suivant des cours et des stages, ainsi qu'en séjournant aux États-Unis. À l'époque du projet Anouchka, qui a duré plusieurs années, il a aussi appris le russe.

Au début des années 1970, il a passé (à l'exemple de Michel Legrand) un brevet de pilotage d'avion de tourisme.

Jacques Demy meurt en 1990, officiellement d'un cancer. Il est enterré au cimetière du Montparnasse (9e division). Ce n'est qu'en 2008, lors de la promotion de son documentaire autobiographique Les Plages d'Agnès, qu'Agnès Varda révèle que la véritable cause de la mort de Demy était le sida. Maladie honteuse dans les années 90, Jacques Demy n'avait pas souhaité dévoiler la véritable cause de son décès, révélant ainsi une certaine forme de bisexualité.

Le cinéma de Jacques Demy.[modifier | modifier le code]

Entre imaginaire et réalité.[modifier | modifier le code]

Les contes, les légendes, voire le féerique, sont très présents dans ses films : Peau d'âne d'après Charles Perrault, Le Joueur de flûte dans la légende du joueur de flûte de Hamelin, Parking d'après le mythe d'Orphée ; dans Les Demoiselles de Rochefort, il y insère les problèmes de la vie quotidienne pour obtenir des films mêlant le rêve, suggéré par la musique, les chorégraphies et les décors, avec la réalité.

Cette frontière entre réalité et féérie se retrouve également dans la localisation de ses films. Enfant du bord de mer, Jacques Demy place l'action de nombre de ceux-ci dans une cité portuaire. Des lieux-frontières entre la terre et la mer, l'enracinement et l'évasion, la réalité et le rêve. Ces espaces de rencontre s'étendent sur différents horizons : Lola et Une chambre en ville à Nantes ; Les Parapluies de Cherbourg ; Les Demoiselles de Rochefort ; La Baie des Anges à Nice ; Trois places pour le 26 à Marseille.

Le Demy-Monde.[modifier | modifier le code]

Le Demy-Monde désigne l’ensemble de l’univers de Jacques Demy. C’est le monde qu’il a créé et qu’il a inventé de toutes pièces à partir de son histoire et ses goûts personnels. Agnès Varda et lui sont persuadés que l’imagination est prend le dessus sur le réel et que l’amour vient toujours à bout de la difficulté[6]. C’est dans ce monde très similaire au nôtre, que les protagonistes vivent des histoires d’amour intenses, où les murs sont colorés, où les papiers peints sont « éclaboussés d’émotions »[7], et où le chant et l’alexandrin constituent un véritable dialecte. Le Demy-monde est le théâtre où les guignols de Demy se produisent.

« Mon idée est de faire cinquante films qui seront tous liés les uns aux autres, dont les sens s’éclairent mutuellement à travers des personnages communs »[8]. Demy aime l’idée de poursuivre ses personnages d’un film à l’autre. Il rêve ainsi d’une œuvre comme un village, une grande fiction ininterrompue, sans cesse traversée d’influences et de retours. Il réintroduit ses personnages sous de nouveaux jours, inconnus au spectateur. Lola retrouve Michel à la fin de Lola (1961), mais dans Model Shop (1969) elle est célibataire. De la même manière, dans les Demoiselles de Rochefort (1967), l’un des deux forains devait être incarné par Guy, le héros des Parapluies de Cherbourg (1964). Le cinéaste renouvelle l’happy-end traditionnel en faisant croire à la fin de ses films que chacun a trouvé sa chacune. Mais la vie continuant après le film, les personnages évoluent et sont confrontés aux aléas de leur existence. Véritable Comédie Humaine[9] cinématographique, Jacques Demy conçoit son œuvre comme une continuité, une vie, certes inventée, mais parallèle et conçue en simultané à la sienne. Une vie qui ne survit que grâce à la création, à l’écriture de nouveaux scénarios, au tournage de nouveaux films, mais également grâce au dessin, à la peinture et à la photographie.

Roland Cassard par exemple, diamantaire amoureux de Lola épouse Geneviève dans Les Parapluies de Cherbourg, après avoir fait fortune aux États-Unis. De même, la mère et ancienne danseuse qu'il rencontre à Nantes, avant qu'elle ne parte retrouver sa fille à Cherbourg chez son beau-frère coiffeur, est découpée en morceaux dans Les Demoiselles de Rochefort. En examinant ses films, on s'aperçoit qu'aucune rencontre n'est insignifiante.

La peinture et la photographie de Jacques Demy.[modifier | modifier le code]

Même si cet aspect est souvent oublié pour définir le cinéma de Jacques Demy, une attention toute particulière est donnée aux arts plastiques. "La peinture est ma référence d'origine", affirme-t-il dans un entretien avec Laura Conti[10]. Ayant pratiqué la peinture lors des cours qu'il prend le soir à l'École des Beaux-Arts de Nantes, les premiers contacts qu'a eus Jacques Demy avec la création artistique sont avec le dessin (sur papier comme sur pellicule). Il renoue avec la création plastique et découvre la photographie au milieu des années 1980. Même si, a priori, peinture et cinéma semblent n’avoir que très peu d’éléments en commun, Jacques Demy affirme que « la représentation cinématographique est aussi picturale »[11]. L'histoire de l'art semble constituer un outil essentiel pour Jacques Demy, l’utilisant aussi bien pour concevoir ses films, que pour imaginer la composition de certains plans ou pour intégrer des œuvres d'art dans les fictions qu’il met en scène. L’histoire de l’art est omniprésente dans son processus de création, de la genèse de certains projets, jusqu’à la réalisation. Selon lui, la construction d’images au cinéma peut se rapprocher du travail du peintre. Après 1985, Jacques Demy étant un cinéaste se rapprochant de l'activité de peintre, il établit des analogies entre ces deux arts, ceux-ci se nourrissant mutuellement dans son œuvre.

En 2013, l'exposition Le Monde enchanté de Jacques Demy à la Cinémathèque Française exposait peintures et photographies de Jacques Demy[12]. Visible lors de l'exposition, son premier Autoportrait[12] peint en 1949 représente son visage de trois quarts. Son profil est encerclé de pages de journaux, cachant une partie de son visage et sur lesquels des croquis ont été raturés. Son profil est divisé en deux, comme s’il avait été le sujet d'une brisure ou d'un déchirement. Cette démarcation sépare une partie de son visage en couleur, et l’autre noircie, aux incisions blanches formant les lignes et les reliefs. Ce dédoublement est perçu par Bernard Toublanc-Michel comme annonciateur de la future carrière de Demy[13]. Un premier angle, facilement discernable, est à la fois plaisant, léger et poétique, et un autre est beaucoup plus ombragé et grave, ébranlant la paisibilité de la première impression. Dans tous ces journaux qui l'encerclent, deux grands titres sont entourés en rouge : « La Belle Hélène », muse éternelle des peintres de toutes les époques rappelant la passion qu’éprouve Demy pour l’art et son histoire, et à l’opposé, « La russification s’accélère ». La russification peut faire référence au désir de son père qui prend forme dans un contexte de Guerre Froide, où l’Europe est déchirée entre les États-Unis et l’URSS, celle-ci cherchant à s’industrialiser pour la fierté de l’État, au détriment de l’individu et de sa singularité. Les ratures sur les unes sont des repentis de croquis[14]. Cet autoportrait semble montrer que Jacques Demy traverse en 1939 une période d’intenses doutes en ce qui concerne sa carrière.

Au milieu des années 1980, Jacques Demy renoue avec la peinture. Si les paysages marins sont mis à l'honneur dans la filmographie de Demy, ils ne le sont pas moins dans sa peinture[12]. L’océan inspire ostensiblement son art et incarne un voyage spirituel, une évasion laissant le corps sur place, enraciné avec la réalité. Les panneaux de signalisation occupent une place importante face à ces étendues océaniques. Les pictogrammes routiers occupent une place prépondérante dans ses peintures et photographies. Une série de symboles naît alors dans l’univers de Jacques Demy ; des feux rouges, des sens interdits, des bandes d’arrêts d’urgence, des panneaux-stop ou exit ainsi que des bornes kilométriques. Ces paysages sont interdits au spectateur, il n’a pas le droit de s'y projeter. Son regard ne peut pas aller au-delà de la surface de l’image qui constitue une frontalité. Jacques Demy représente le contraste entre des paysages marins profonds et attractifs se confrontant à une signalisation répulsive. Par cette symbolique, Demy semble détourner l’image d’un pays dont il a rêvé, et qui s’est montré quelque peu désappointant.

Héritage après le 3.5

  1. Institut National de l’Audiovisuel- Ina.fr, « Jacques Demy et Agnès Varda à propos du bonheur », sur Ina.fr (consulté le )
  2. a et b Jean-Pierre Berthomé, Jacques Demy : Les Racines du rêve, Nantes, L'Atalante, , 386 p. (ISBN 978-2-903699-04-8, lire en ligne), p. 37
  3. VARDA Agnès (réalisatrice). L'Univers de Jacques Demy [DVD], Ciné-Tamaris, 1995, 90min.
  4. AlloCine, « Jacques Demy, Agnès Varda Interview 9: L'événement le plus important depuis que l'homme a marché sur la lune » (consulté le )
  5. Paris Match, « Michel Legrand ne fait pas de cadeau », sur parismatch.com (consulté le )
  6. « Jacques Demy (1931-1990) », sur France Culture (consulté le )
  7. « Les parapluies de Cherbourg, tragédie inouïe - Ép. 2/4 - Philosopher avec Jacques Demy », sur France Culture (consulté le )
  8. « Les Cahiers du Cinéma », n°155,‎ , p. 32.
  9. Camille Taboulay, Le cinéma enchanté de Jacques Demy, Paris, Les Cahiers du Cinéma, , 190 p. (ISBN 2-86642-167-1, lire en ligne), p. 69
  10. Camille Taboulay, Le cinéma enchanté de Jacques Demy, Paris, Les Cahiers du Cinéma, , 190 p. (ISBN 2-86642-167-1), p.161
  11. (en) « Jacques Demy », sur Film Comment (consulté le )
  12. a b et c « Le monde enchantéde Jacques Demy :itinérance de l'exposition - La Cinémathèque française », sur www.cinematheque.fr (consulté le )
  13. Citation de Bernard TOUBLANC-MICHEL. Une vie, une œuvre. Jacques Demy (1931-1990). Émission de radio. Diffusée le 18 mai 2019. Archives France Culture.
  14. Remarquez que, dans Les Demoiselles de Rochefort, avant d’entonner sa chanson, Maxence dessine le portrait de l’Idéal Féminin sur un journal. Demy a manifestement fait la même chose.