Sœur Pauline

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Sœur Pauline
Nom de naissance Anne-Marie Guiomar
Alias
le bon ange
Naissance
Plouëc, Drapeau de la France France
Décès (à 96 ans)
Guilvinec, Drapeau de la France France
Nationalité Française
Profession
Formation
Distinctions

Sœur Pauline, née Anne-Marie Guiomar le à Plouëc (Côtes-du-Nord) et morte le à Guilvinec (Finistère), est une religieuse et enseignante française.

À son entrée dans la congrégation des Filles du Saint-Esprit, elle prend le nom de Sœur Pauline. Elle est connue dans le pays bigouden pour avoir popularisé la pratique de la dentelle dite "picot" au début du XXe siècle dans les ports de pêche du littoral bigouden, afin de faire face à la grave crise de la sardine que traversaient ces endroits.

Biographie[modifier | modifier le code]

Jeunesse[modifier | modifier le code]

Lucien Simon : Sœurs du Saint-Esprit (partie d'un tableau Bigoudens en prière dans l'église Saint-Tugdual de Combrit, Abri du marin de Sainte-Marine

Anne-Marie Guiomar est née le dans le village de Plouëc, dans les Côtes-du-Nord, dans une famille de 17 enfants. Elle décide de se consacrer à la vie religieuse en intégrant la congrégation des Filles du Saint-Esprit, à Saint-Brieuc. Elle prononce donc le vœu de vivre au sein du peuple, pour le service de Dieu, des pauvres, des malades et des enfants, dans les campagnes. Elle passe et obtient avec succès le brevet élémentaire à Rennes en 1897, fait rare à l'époque.

Arrivée à Guilvinec et développement d'un artisanat local[modifier | modifier le code]

La congrégation des Filles du Saint-Esprit est appelée à Guilvinec par le recteur de la récente paroisse, l'abbé Jean-Baptiste Coataudon, ainsi que par le préfet du Finistère Victor Proudhon dès 1894 pour soigner les malades du choléra, épidémie faisant 32 morts cette même année. Sœur Pauline y arrive le , et y fonde une école religieuse de filles, Sainte-Anne, du nom de la toute jeune église paroissiale, et que l'on appelle alors fréquemment un asile, ancien nom donné aux écoles maternelles. À la première rentrée de , l'école primaire accueille 130 élèves, et l'école maternelle, 150[1].

La loi sur les congrégations religieuses du contraint Sœur Pauline à l'exil en Belgique pour quelques mois[2], mais elle revient vite à Guilvinec et y reste pour faire face à la grave crise de la sardine que connait le port en 1902-1903.

« Conséquence de cette crise : vers 1903, Sœur Pauline introduisit le point d'Irlande au Guilvinec. Toutes les familles se mirent à faire du picot, même les enfants, pour gagner un peu d'argent. Des mètres de dentelle collectés par des ateliers furent vendus à des magasins parisiens. Un artisanat bigouden était né. »

— Pierre-Jean Berrou[3]

Aux dires d'Annick Fleitour, Sœur Pauline est aidée en cela par Mesdames Delécluze, d'Audierne, et Chauvel, de Quimper, épouse du futur maire de Combrit Fernand Chauvel. C'est cette dernière qui ouvre un magasin rue de Vaugirard à Paris[4].

En parallèle, une autre religieuse, sœur Suzanne Vidélo, dirige un autre atelier de broderie à l'Île Tudy, entre 1905 et 1966[5]. « Des deux ateliers bigoudens, lequel ouvrit le premier ? Guilvinec ? l'île Tudy ? L'examen des archives ne permet pas de trancher[6]. » [n 1]

La loi sur les congrégations du gouvernement Emile Combes[modifier | modifier le code]

Cette crise économique se double des tensions non éteintes liées à l'application par le gouvernement d'Émile Combes de la loi sur les congrégations.

« Au mois de juillet 1902, la communauté du Guilvinec vécut dans l'angoisse de l'arrivée des autorités. Des parents d'élèves assuraient la garde, prêts à rameuter la population. Le 8 août, deux commissaires accompagnés de gendarmes et de la troupe se présentèrent tôt le matin devant l'école. La cloche battit aussitôt le rappel. Des femmes sans coiffe, les cheveux en désordre, accoururent de partout, conspuèrent les commissaires et crièrent "Vive les sœurs ! ". Après l'inventaire des meubles, les scellés furent apposés sur la porte d'entrée mais arrachés par des "inconnus". Les sœurs acceptèrent de céder à la force, quittèrent l'école et se réfugièrent dans des familles où elles continuèrent d'enseigner à une poignée d'enfants. »

— Pierre-Jean Berrou

Son enseignement[modifier | modifier le code]

Ecole Sainte-Anne de Guilvinec, construite au début du XXe siècle

Conformément aux vœux de sa congrégation, l'enseignement fait partie des missions de Sœur Pauline, tâche à laquelle elle s'attache avec force humilité et dévouement, à l'école maternelle Saint-Anne, construite dans la première décennie du XXe siècle.

Aux dires de Georges Tanneau, un de ses élèves, Sœur Pauline avait « le don de rendre vivantes les leçons de catéchisme en refaisant l'histoire sainte à la mode bigoudène[6]. »

Tombe de Soeur Pauline près du monument aux morts, cimetière de Guilvinec

« Le petit Jésus était parti à Léchiagat en sandales... Saint Pierre disait : on est allé au large des Etocs[n 2] mais on n'a rien pêché... »

— Sœur Pauline

La reconnaissance[modifier | modifier le code]

En 1956, l'ancien ministre de la Santé publique et de la Population du gouvernement Pierre Mendès France et maire de Quimper, André Monteil, lui remet les insignes de chevalier dans l'Ordre de la Santé publique, en présence de Jean Lautrédou, maire de Pont-l'Abbé, à la suite du décret du .

En 1964, à 85 ans, elle enseigne toujours en maternelle, à sa quatrième génération d'élèves.

Retraite[modifier | modifier le code]

De 1968 à 1971, elle est en retraite à Auray, dans la maison des filles du Saint-Esprit de Ker-Anna. Elle décide en 1971 de revenir à Guilvinec pour y finir sa vie, et décède le de cette même année, dans sa quatre-vingt-dix-septième année. Elle est inhumée au cimetière de Guilvinec, face au mur des Péris en mer[6].

Distinctions et hommages[modifier | modifier le code]

Plaque de la rue sœur Pauline Guilvinec
  • Chevalier dans Ordre de la Santé publique, en 1956 (France)
  • Une rue de la ville de Guilvinec porte son nom[n 3], à proximité de l'école Sainte-Anne dans laquelle elle œuvra longtemps.

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Jean-Louis Grognet, Sœur Pauline sauve Le Guilvinec, éditions Lulu, 2012, 88 p.
  • Collectif, De la crise de la sardine à l'âge d'or de la dentelle, collection Mémoires, éditions Ouest-France, 2003, p. 111.
  • Françoise Boiteux-Colin, Françoise Le Bris-Aubé, Michel Thersiquel, le Monde des Bigoudènes, éditions Le Télégramme, 1999, p. 25 26.
  • Pierre-Jean Berrou, BM n° 14, 120 ans d’Histoire du Guilvinec, 1999.
  • Roland Chatain, La pêche bigoudène, histoire et évolution, collection Mémoires, éditions Roland Chatain, 1994, p. 103 et 104.
  • Corentin Daniel, Michel Le Roy, Bigoudenned, un siècle de bigoudènes, éditions Centre des loisirs et de la culture, Guilvinec, 1990, p. 12.
  • Collectif, Centenaire de la paroisse du Guilvinec, éditions imprimerie du Marin, 1982, 64 p.
  • Jakez Cornou, Pierre-Roland Giot, Origine et histoire des Bigoudens, Guilvinec, Éditions Le Signor, 1977, p. 377.

Notes[modifier | modifier le code]

  1. L'ouvrage Bigoudenned, un siècle de bigoudènes, de Corentin Daniel et Michel Le Roy, présente en page 12 une photographie ainsi légendée : « Fillettes faisant du picot, artisanat introduit au Pays Bigouden par Sœur Pauline, vers 1905. »
  2. Rochers au large de Kérity, qui peuvent se découvrir à marée basse et lieu de pêche à pied connu des autochtones.
  3. « Quelques années après son décès, la municipalité du Guilvinec a voulu rebatiser (sic) la rue Jeanne d'Arc (anciennement rue de l'Asile) et la nommer rue Sœur Pauline, car c'est dans cette rue que trouve (sic) l'école Sainte-Anne où s'était installé en 1903 le premier ouvroir, dirigé par cette religieuse pour l'apprentissage du picot. Les riverains de la rue Jeanne d'Arc ont alors fait une pétition qui a abouti au refus du changement de nom de cette rue. » Georges Tanneau, sur le site bigouden.tv[1]

Références[modifier | modifier le code]

  1. Robert Baud, Les cent ans d'un établissement scolaire bigouden l'école Saint-Gabriel-Notre-Dame des Carmes, 1894-1994, Édition : Pont-L'Abbé : Saint-Gabriel-Notre-Dame des Carmes , 1995, p. 250.
  2. site officiel des Filles du Saint-Esprit[2]
  3. 120 d'histoire du Guilvinec, 1999, p. 12.
  4. Histoire du pays Bigouden avec Serge Duigou, Jean-Michel Le Boulanger, Annick Fleitour, Éditions Palantines, 2002, p. 147.
  5. site de la mairie[3]
  6. a b et c Françoise Boiteux-Colin, Françoise Le Bris-Aubé, Michel Thersiquel, le Monde des Bigoudènes, éditions Le Télégramme, 1999, p. 25.

Liens externes[modifier | modifier le code]