Œnanthe fistuleuse

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L'Œnanthe fistuleuse (Oenanthe fistulosa L.) est une espèce de plantes herbacées vivaces ou bisannuelles de la famille des Apiacées, que l'on peut rencontrer dans les prairies longuement inondables et les roselières. Son aire de répartition est eurasiatique. Elle est en régression du fait de la diminution des surfaces en zone humide ou leur dégradation. Comme toutes les espèces du genre, elle est toxique par ingestion.

Description[modifier | modifier le code]

Taille : 0,3 à 1 m.

Plante glabre, d'un vert glauque, émettant des stolons aériens blanchâtres à l'aisselle des feuilles caulinaires inférieures[1].

Tiges et pétioles élargis et fistuleux (creux).

Feuilles à contour général allongé, 1-2-(3) fois divisées, à derniers segments peu nombreux, assez courts et étroits. Feuilles basales rapidement flétries[2].

Ombelles à rayons très peu nombreux (ombelle terminale : 2-4 rayons, les latérales à 3-7), à bractées absentes ou réduites.

Ombellules très denses, à 7-16 bractéoles, à rayons très élargis à maturité et formant alors des boules de fruits continus.

Fleurs blanches ou rosées, les centrales bisexuées et fertiles, les externes mâles et rayonnantes, apparaissant de juin à septembre.

Fruits surmontés des styles dressés, raides et allongés, munis de cavités remplies d'air (adaptation à l'hydrochorie).

Racines munies de tubercules fusiformes, colonisées par des mycorhizes jouant un rôle dans l'absorption des éléments nutritifs et constituant une adaptation aux changements rapides de régime hydrologique[3].

Galerie de photos[modifier | modifier le code]

Aire de répartition[modifier | modifier le code]

Elle a une répartition eurasiatique : Sud-Est de l'Asie, Europe occidentale jusqu'à l'Inde et Afrique du Nord. Elle atteint sa limite nord au sud de la Suède et son extrême limite sud en Tanzanie[3].

En France, on la trouve disséminée un peu partout ainsi qu'en Corse, toujours en dessous de 700 m d'altitude[4].

Elle est très dispersée dans le sud de l'Angleterre et de l'Irlande et se raréfie considérablement en allant vers le nord[3].

Écologie, habitat et phytosociologie[modifier | modifier le code]

Écologie[modifier | modifier le code]

Plante hygrophile préférant les substrats fins riches en argile, moyennement riches en azote et en humus. Ses préférences quant au pH du sol sont controversées[2].

C'est une espèce héliophile à faible pouvoir de compétition.

Elle ne supporte pas la salinité.

Type biologique de Raunkier : chaméphyte / géophyte bulbeux[4].

Habitat[modifier | modifier le code]

On la rencontre dans différents biotopes très humides : prairies mouillées, en général non tourbeuses[2], mares, fossés, bordures d'étangs et roselières.

Phytosociologie[modifier | modifier le code]

Cette espèce est caractéristique des prairies longuement inondables (Eleocharitetalia) et notamment des communautés atlantiques et sub-continentales (Oenanthion fistulosae)[2].

Elle caractérise également les groupements de roselières (Phragmitetea) et plus particulièrement, selon les auteurs, les communautés pionnières des bordures perturbées des eaux calmes (Oenanthion aquaticae)[5] ou les cariçaies (Magnocaricion)[2].

Statuts, menaces et mesures de protection[modifier | modifier le code]

Statuts[modifier | modifier le code]

En Europe[modifier | modifier le code]

Elle est considérée comme étant de Préoccupation mineure (Catégorie UICN : LC) en Europe.

En France et dans les régions françaises[modifier | modifier le code]

liste des régions (2015) Protection régionale statut UICN régional date de révision espèce déterminante pour les ZNIEFF au niveau régional[6]
Alsace - EN[7] 2014
Aquitaine - non publié
Auvergne - EN[8] 2013
Basse-Normandie - LC[9] 2015
Bourgogne - en cours de publication
Bretagne - LC[10] 2015
Centre-Val de Loire - LC[11] 2012 déterminante
Champagne-Ardenne - non publié
Corse - LC[12] 2015
Franche-Comté - NT[13] 2014 déterminante
Haute-Normandie - NT[14] déterminante
Île-de-France - EN[15] 2014 déterminante
Languedoc-Roussillon - non publié
Limousin - CR[16] 2013
Lorraine - en cours de publication
Midi-Pyrénées - EN[17] 2013 déterminante
Nord-Pas-de-Calais - NT[18] 2011 déterminante
Pays de la Loire - LC[19] 2008
Picardie - NT[20] 2012 déterminante
Poitou-Charentes - non publié
Provence-Alpes-Côte d'Azur - VU[21] 2015
Rhône-Alpes protégée[6] EN[22] 2015 déterminante

Dans les autres pays d'Europe[modifier | modifier le code]

Menaces[modifier | modifier le code]

Elle est en régression, parfois rapide, dans de nombreuses régions françaises[2]. Il en va de même en Angleterre où les populations ont nettement régressé depuis 1950[3].

Les principales menaces sont l'assèchement ou la dégradation des zones humides, l'utilisation d'herbicides, l'eutrophisation de ses biotopes, le ressemis des vieilles prairies ou leur mise en culture.

Elle craint aussi l'arrêt du pâturage ou de la fauche qui induisent une plus forte compétition herbacée.

Mesures de protection[modifier | modifier le code]

Elle est favorisée par le maintien d'un pâturage extensif ou d'une fauche mécanique, notamment en bordure de fossés.

Il importe aussi de maintenir la connectivité des annexes des milieux aquatiques.

Propriétés et usages[modifier | modifier le code]

A l'instar de sa redoutable cousine : l'Œnanthe safranée (Oenanthe crocata), toute la plante est toxique par ingestion, mais plus particulièrement la racine. Elle renferme de très nombreuses substances dont une série de dérivés polyacétyléniques dont l'œnanthotoxine et la dihydro-œnanthotoxine qui agissent comme neurotoxiques en bloquant les récepteurs GABA. L'œnanthotoxine est un isomère de la cicutoxine contenue dans la ciguë aquatique (Cicuta virosa)[23].

Les symptômes d'empoisonnement à l'œnanthotoxine sont : salivation, vertiges, brûlures de la bouche, vomissements, convulsions et arrêt respiratoire[24]. On ne relate cependant pas de cas d'empoisonnement spontané dû à l'œnanthe fistuleuse chez l'homme ou l'animal. Cela pourrait s'expliquer par le fait qu'elle contient une forte concentration en falcarindol, un composé amer et moins de toxine que l'œnanthe safranée[23].

Elle fut par le passé utilisée pour lutter contre les rats, les souris et les taupes[2].

Références[modifier | modifier le code]

  1. Konrad Lauber, Gerhart Wagner et Andreas Gygax (trad. de l'allemand), Flora helvetica. Flore illustrée de Suisse., Berne, Haupt, , 4e éd., 1656 + 290 (ISBN 978-3-258-07701-7)
  2. a b c d e f et g Jean-Pierre Reduron, Ombellifères de France, t. 4 (Bulletin n° spécial 29), Jarnac, Société Botanique du Centre-Ouest, , p. 1822
  3. a b c et d (en) Peter Stroh, Oenanthe fistulosa L. Tubular Water Dropwort. Species Account., Botanical Society of Britain and Ireland,
  4. a et b Jean-Marc Tison et Bruno De Foucault (coords), Flora Gallica. Flore de France., Mèze, Biotope, , 1196 p. (ISBN 978-2-36662-012-2), p. 356
  5. Conservatoire botanique national de Franche-Comté, « Synopsis des groupements végétaux de Franche-Comté » [PDF], Les Nouvelles Archives de la Flore jurassienne et du nord-est de la France (n° spécial 1), sur www.conservatoire-botanique-fc.org, Besançon, Société botanique de Franche-Comté, Conservatoire botanique national de Franche-Comté, (consulté le )
  6. a et b « Oenanthe fistulosa-Œnanthe fistuleuse-Protection », sur inpn.mnhn.fr (consulté le )
  7. Julien Vangendt et al., Liste rouge régionale de la flore vasculaire d'Alsace., Conservatoire botanique d'Alsace . Société botanique d'Alsace, (lire en ligne)
  8. Liste rouge de la flore vasculaire d'Auvergne., Conservatoire botanique national du Massif-Central, (lire en ligne)
  9. Bousquet T., Magnanon S., Brindejonc O. et al., Conservatoire botanique national de Brest, Liste rouge de la flore vasculaire de Basse-Normandie, DREAL Basse-Normandie/Région Basse-Normandie/Feader Basse-Normandie, , 43 p. (lire en ligne)
  10. Quéré E., Magnanon S., Brindejonc O. et al., Liste rouge de la flore vasculaire de Bretagne : Evaluation des menaces selon la méthodologie et la démarche de l’UICN., Brest, DREAL Bretagne / Conseil régional de Bretagne / FEDER Bretagne.Conservatoire botanique national de Brest, , 44 p. (lire en ligne)
  11. Conservatoire botanique national du Bassin Parisien, Liste rouge des plantes vasculaires de la région Centre, DREAL Centre-Val de Loire, , 15 p. (lire en ligne)
  12. A. Delage et al., Liste rouge régionale de la flore vasculaire de la Corse., Corte, Conservatoire botanique national de Corse, Office de l'environnement de la Corse, , 72 p. (lire en ligne)
  13. Yorick Ferrez (coordinateur) et al., Conservatoire botanique national de Franche-Comté, « Liste rouge régionale de la flore vasculaire de Franche-Comté. », sur www.conservatoire-botanique-fc.org (consulté le )
  14. Buchet J., Housset P., Toussaint B. (coordinateur) et al., Inventaire de la flore vasculaire de Haute-Normandie (Ptéridophytes et Spermatophytes) : raretés, protections, menaces et statuts., Centre régional de phytosociologie agréé. Conservatoire botanique national de Bailleul, avec la collaboration du Collectif botanique de Haute-Normandie., , 79 p. (lire en ligne)
  15. Sophie Auvert, Sébastien Filoche et al., Mise à jour de la liste rouge de la flore vasculaire de l'île-de-France., Conservatoire botanique national du Bassin Parisien, (lire en ligne)
  16. Liste rouge régionale de la flore vasculaire du Limousin, Conservatoire botanique national du Massif-Central, (lire en ligne)
  17. Christophe Bergès, Lionel Gire, Gilles Corriol et al., Liste rouge régionale de la flore vasculaire en Midi-Pyrénées, Conservatoire botanique national Midi - Pyrénées, (lire en ligne)
  18. Toussaint B. (coordinateur) et al., Inventaire de la flore vasculaire du Nord-Pas de Calais (Ptéridophytes et Spermatophytes) : raretés, protections, menaces et statuts., Centre régional de phytosociologie agréé Conservatoire botanique national de Bailleul, avec la collaboration du Collectif botanique du Nord-Pas de Calais, , Version n°4b éd., 62 p. (lire en ligne)
  19. P. Lacroix et al., Liste rouge régionale des plantes vasculaires rares et/ou menacées en Pays de la Loire., Conservatoire national botanique de Brest, (lire en ligne)
  20. Hauguel J.-C., Toussaint B. (coordinateur) et al., Inventaire de la flore vasculaire de la Picardie (Ptéridophytes et Spermatophytes) : raretés, protections, menaces et statuts., Amiens, Centre régional de phytosociologie agréé Conservatoire botanique national de Bailleul, Société Linnéenne Nord-Picardie, , 132 p. (lire en ligne)
  21. Virgile Noble, Jérémie Van Es, Henri Michaud, Luc Garraud (coordinateur) et al., Liste rouge de la flore vasculaire Provence-Alpes-Côte d’Azur, DREAL & Région PACA, , 14 p. (lire en ligne)
  22. N. Guillerme, O. Kristo, B. Lienard et al., Liste rouge de la flore vasculaire de Rhône-Alpes., Conservatoires botaniques nationaux alpin et du Massif Central, (lire en ligne)
  23. a et b (en) Giovanni Appendino, Federica Pollastro, Luisella Verotta et Mauro Ballero, « Polyacetylenes from Sardinian Oenanthe fistulosa: A Molecular Clue to risus sardonicus », Journal of Natural Products, vol. 72,‎ , p. 962–965 (ISSN 0163-3864, PMID 19245244, PMCID 2685611, DOI 10.1021/np8007717, lire en ligne, consulté le )
  24. Paloma Filiat, Les plantes de la famille des apiacées dans les troubles digestifs (Thèse de doctorat d'Etat. Faculté de pharmacie. Université J. Fourier.), Grenoble, (lire en ligne)

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Références taxonomiques et synonymie[modifier | modifier le code]

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