Northrop M2-F3

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Northrop M2-F3
Vue de l'avion.
Le M2-F3, sur le lac asséché de Rodgers Dry Lake.

Constructeur Northrop Corporation
Rôle Démonstrateur technologique à fuselage porteur
Statut Programme terminé
Premier vol
Date de retrait
Nombre construits 1
Dérivé de Northrop M2-F2
Équipage
1 pilote
Motorisation
Moteur Reaction Motors XLR11
Nombre 1
Type Moteur-fusée à ergols liquides
Poussée unitaire 36 kN
Dimensions
vue en plan de l’avion
Envergure 2,94 m
Longueur 6,75 m
Hauteur 2,89 m
Surface alaire 14,9 m2
Masses
À vide 2 300 kg
Maximale 3 600 kg
Performances
Vitesse maximale 1 712 km/h (Mach 1,398)
Plafond 21 793 m
Rayon d'action 72 km
Charge alaire 242 kg/m2
Rapport poussée/poids 1,3 : 1

Le Northrop M2-F3 était un concept américain d'avion lourd à corps portant conçu au centre de recherches en vol de la NASA (Flight Research Center, plus tard renommé Dryden Flight Research Center) à Edwards (Californie) (en), afin d'étudier et valider une technique permettant de ramener en sécurité un véhicule à faible finesse (lift-to-drag ratio) conçu pour effectuer une rentrée atmosphérique depuis l'espace.

Conçu par la NASA et utilisé de à , il était l'un des cinq concepts d'avions étudié pendant le programme, et l'ultime évolution du M2-F2, qui a été reconstruit et lourdement modifié après son violent crash de [1]. Comme pour le M2-F2, « M » signifiait « Manned » (avec un pilote à bord), et « F » signifiait « Flight » (appareil prévu pour le vol). Son concept initial fut étudié par les ingénieurs au Centre de recherche Langley de la NASA, à Hampton, en Virginie, bien que sa reconstruction ait été effectuée par la Northrop Corporation.

Conception et développement[modifier | modifier le code]

Le programme des « lifting bodies » de la NASA commença dès le début des années 1960 avec le prototype léger M2-F1 en contreplaqué, et se poursuivit avec son évolution « lourde » M2-F2, tout en aluminium. Ce dernier appareil subit un crash violent à l'atterrissage en , qui le détruisit presque complètement et faillit tuer son pilote, Bruce Peterson[2],[3].

Après son crash de 1967, il ne restait quasiment rien d'intact sur le M2-F2. Sa dérive gauche avait été arrachée, son train d'atterrissage aussi, la verrière avait été écrasée, la totalité de son revêtement était cabossée et la structure interne avait été assez lourdement touchée[3],[4]. Le M2-F2 avait toutefois permis de collecter de nombreux résultats, et il permit de se lancer dans la fabrication de nouveaux concepts. Ainsi, alors que tout espoir semblait perdu de le revoir un jour voler, il fut entièrement désossé et reconstruit par les équipes de Northrop, en collaboration avec les ingénieurs de l’Ames Research Center, après trois ans de travail laborieux[1], et reçut le nom de M2-F3[5].

Lors des vols du M2-F2, les pilotes et les ingénieurs avaient noté la grande instabilité latérale de l'appareil, et lors de sa reconstruction il fut équipé d'une dérive verticale supplémentaire entre les deux dérives latérales, et ces dernières furent un peu reculées. L'appareil fut également équipé d'un système de contrôle par réaction, orientant l'appareil sur son axe de roulis grâce à l'éjection de gaz par de petites tuyères, comme sur le X-15[5]. Il fut également doté d'un système d'augmentation d'amplitude des commandes de vol et d'un mini-manche latéral, un dispositif qui est depuis très utilisé sur les avions modernes[1]. Lors d'essais effectués en soufflerie, l'appareil s'avéra nettement plus stable que son prédécesseur, bien qu'étant toujours assez éprouvant à piloter. La présence de la troisième dérive verticale supprimait les risques d'apparition du phénomène oscillatoire désigné « oscillation induite par le pilote (en) », qui avait affecté le M2-F2 pendant ses premiers vols. Les différentes transformations subies pour donner naissance au M2-F3 coûtèrent la somme de 700 000 dollars[5].

Comme le M2-F2, le nouvel appareil était équipé d'un moteur-fusée à ergols liquides XLR11, de Reaction Motors, doté de quatre chambres de combustion et produisant une poussée de 36 kN.

Histoire opérationnelle[modifier | modifier le code]

Le M2-F3, exposé au National Air and Space Museum, à Washington, aux États-Unis.

Le M2-F3 effectua son premier vol le , avec le pilote de la NASA William « Bill » Dana aux commandes. Le nouvel avion démontra une bien meilleure stabilité latérale et une meilleure réponse aux commandes que l'ancien modèle, et seulement trois vols planés furent nécessaires avant le premier vol propulsé, le . Le 100e vol de l'ensemble des corps portants « lourds » du programme fut effectué le , Bill Dana atteignant à cette occasion une altitude de 20 200 m et une vitesse de Mach 1,370. Au cours de ses 27 missions, le M2-F3 atteignit une vitesse maximale de Mach 1,6. L'altitude la plus élevée fut atteinte le , jour de son dernier vol, avec une altitude de 20 790 m. Le pilote aux commandes était alors John Manke.

Le système de contrôle par réaction (en anglais : reaction control thruster, RCT), similaire à celui installé sur les véhicules placés en orbite, permit d'obtenir des données sur l'efficacité d'un tel système pour le contrôle de l'appareil. Vers la fin du programme, le M2-F3 fut également équipé du système de commandes augmentées et son mini-manche latéral. Ce système est désormais très employé dans les aéronefs modernes de tous types.

À la fin du programme, la NASA donna le prototype à la Smithsonian Institution en . Il est actuellement suspendu à l'intérieur du National Air and Space Museum, à côté du X-15 no 1, qui était jadis son partenaire de hangar à Dryden de 1965 à 1969[6].

Pilotes du M2-F3[6]

Après son violent crash de à bord du M2-F2, Bruce Peterson ne retourna jamais aux commandes d'un prototype, et il ne pilota donc jamais le M2-F3. On ne le revit que quelques années plus tard à bord d'avions plus conventionnels, tels les F-8 Crusader et F-111 Aardvark[4].

Les vols du M2-F3[modifier | modifier le code]

Il n'y eut qu'un seul exemplaire du M2-F3, reconstruit à partir du M2-F2 et portant le même numéro de série « NASA 803 ». Il effectua 27 vols, dont trois en plané et les autres avec la propulsion activée[7].

Numéro du vol Date Pilote Vitesse maximale Nombre de Mach Altitude Durée du vol Commentaires
01 Dana 755 km/h Mach 0,688 13 716 m h 3 min 38 s 1er vol
Vol plané non propulsé
02 Dana 708 km/h Mach 0,660 13 716 m h 3 min 48 s Vol plané non propulsé
03 Dana 690 km/h Mach 0,630 13 716 m h 3 min 56 s Vol plané non propulsé
04 Dana 859 km/h Mach 0,809 15 819 m h 6 min 17 s Premier vol propulsé
05 Gentry 755 km/h Mach 0,707 13 716 m h 4 min 1 s -
06 Dana 821 km/h Mach 0,773 13 716 m h 5 min 48 s Seulement deux chambres allumées sur les quatre que comporte le moteur
07 Dana 988 km/h Mach 0,930 18 440 m h 5 min 53 s -
08 Dana 1 035 km/h Mach 0,974 18 897 m h 6 min 55 s -
09 Dana 1 164 km/h Mach 1,095 20 513 m h 6 min 30 s 1er vol supersonique
10 Dana 772 km/h Mach 0,728 12 801 m h 3 min 30 s Incendie moteur
11 Dana 784 km/h Mach 0,739 13 716 m h 3 min 35 s -
12 Dana 1 357 km/h Mach 1,274 21 579 m h 6 min 31 s -
13 Dana 861 km/h Mach 0,811 14 264 m h 7 min 31 s Seulement deux chambres allumées
14 Dana 1 049 km/h Mach 0,989 18 562 m h 7 min 0 s -
15 Gentry 1 168 km/h Mach 1,101 20 482 m h 6 min 15 s -
16 Dana 1 344 km/h Mach 1,266 20 330 m h 6 min 16 s -
17 Dana 935 km/h Mach 0,880 14 020 m h 6 min 27 s Léger incendie moteur
18 Dana 1 424 km/h Mach 1,340 20 330 m h 6 min 7 s -
19 Dana 1 450 km/h Mach 1,370 20 208 m h 6 min 16 s 100e vol du programme des corps portants de la NASA
20 Manke 961 km/h Mach 0,905 14 536 m h 5 min 59 s -
21 Manke 1 292 km/h Mach 1,213 21 732 m h 6 min 18 s -
22 Powell 961 km/h Mach 0,906 14 264 m h 6 min 4 s -
23 Manke 1 524 km/h Mach 1,435 20 330 m h 6 min 17 s Atterrissage prévu sur le lit du lac asséché de Rosamond
24 Powell 1 432 km/h Mach 1,348 20 269 m h 5 min 57 s -
25 Powell 1 265 km/h Mach 1,191 20 817 m h 5 min 32 s Atterrissage prévu sur le lit du lac asséché de Rosamond
26 Dana 1 712 km/h Mach 1,613 20 330 m h 6 min 23 s Vol le plus rapide
27 Manke 1 378 km/h Mach 1,294 21 793 m h 6 min 30 s Plus haute altitude atteinte
Dernier vol du M2-F3

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. a b et c (en) « Past Projects - Lifting Bodies M2-F3 », NASA Glenn Research Center, (consulté le )
  2. (en) Dale Reed et Lister 1997, p. 20
  3. a et b (en) « 1967 M2-F2 Crash at Edwards », sur Check-Six.com, (consulté le )
  4. a et b Didier Vasselle, « La saga des lifting bodies - Un premier vol mitigé », sur xplanes.free.fr, (consulté le )
  5. a b et c Didier Vasselle, « La saga des lifting bodies - Le M2F3, le X-24 et le mur du son », sur xplanes.free.fr, (consulté le )
  6. a et b (en) « M2-F3 Aircraft Photo Gallery Contact Sheet », NASA, (consulté le )
  7. (en) Dale Reed et Lister 1997, p. 18

Voir aussi[modifier | modifier le code]

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Articles connexes[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]