Charlayne Hunter-Gault

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Alberta Charlayne Hunter-Gault ou Charlayne Hunter-Gault, née le à Due West en Caroline du Sud, est une militante des droits civiques et journaliste américaine. Elle est la première femme afro-américaine à fréquenter l'Université de Géorgie.

Biographie[modifier | modifier le code]

Jeunesse[modifier | modifier le code]

Alberta Charlayne Hunter naît le à Due West en Caroline du Sud aux États-Unis[1]. Elle est la fille du colonel Charles Shepherd Henry Hunter, Jr., aumônier de l'armée américaine[2], et de son épouse, Althea Ruth Brown[3].

Elle s'intéresse au journalisme dès l'âge de 12 ans après avoir lu le comic strip Brenda Starr, Reporter[4].

En 1955, un an après l'arrêt de la Cour suprême Brown contre Board of Education qui déclare la ségrégation inconstitutionnelle dans les écoles publiques américaines, Charlayne Hunter est la seule élève noire de son école en Alaska, où son père est en poste. Ses parents divorcent après avoir passé l'année en Alaska. Elle déménage à Atlanta avec sa mère, ses deux frères et sa grand-mère maternelle[5].

A Atlanta, elle fréquente la Henry McNeal Turner High School (en). Encouragée par sa professeure d'anglais, elle devient rédactrice en chef du journal du lycée, The Green Light, [4]. Elle est également rédactrice adjointe de l'annuaire de l'année[4].

À l'âge de 16 ans, Hunter et deux amis se convertissent au catholicisme, après avoir été élevés dans la foi de l'Église épiscopale méthodiste africaine, ce qu'elle qualifiera comme son « first serious act of defiance » (premier acte de défiance)[4].

Université de Géorgie[modifier | modifier le code]

En 1958, les membres de l'Atlanta Committee for Cooperative Action (ACCA) recherchent les meilleurs lycéens afro-américains sur le point de sortir des lycées d'Atlanta. Ils souhaitent relancer l’intégration des universités blanches en Géorgie par des étudiants afro-américains. Ils recherchent les meilleurs pour que les universités n’aient aucune raison de les rejeter à l'exception de leur couleur de peau. Charlayne Hunter et Hamilton Holmes (en) sont les deux étudiants sélectionnés par le comité pour intégrer l'Université d'État de Géorgie à Atlanta. Cependant, Hunter et Holmes préfèrent postuler à l'Université de Géorgie[6].

Hunter et Holmes sont initialement rejetés par l'université au motif qu'il n'y a plus de place dans les dortoirs pour les nouveaux étudiants de première année[5]. Cet automne là, Charlayne Hunter s'inscrit à l'Université d'État de Wayne dans le Michigan grâce à une aide du programme de scolarité de Géorgie, au motif qu'aucune université noire dans l'État n'offrait un programme de journalisme[4].

Bien qu'ils remplissent les conditions requises pour être admis à l'Université de Géorgie, Hunter et Holmes sont refusés chaque trimestre en raison du manque de place dans les dortoirs, mais des étudiants blancs transférés dans des situations similaires à la leurs sont admis[5]. Le , ils déposent plaintes contre Walter Danner[7], directeur des admissions de l'université[8]. Cela conduit au procès Holmes v. Danner, dans lequel Walter Danner, était le défendeur[9]. Après avoir gagné le procès, le 9 janvier 1961, Holmes et Hunter deviennent les deux premiers étudiants afro-américains à s'inscrire à l'Université de Géorgie[4]. Le 11 juin, des étudiants protestent contre leurs admissions en jetant des bouteilles et des briques sur les bâtiments de l'université et se rassemblent devant le dortoir de Charlayne Hunter avec une banderole Nigger, Go Home (« Négresse, Rentre chez toi »)[10]. Le doyen aux affaires étudiantes, Joseph Williams saisit cette occasion pour les exclure de l'université sous le prétexte d'assurer la sécurité du personnel et des étudiants[11]. Le 14 juin, la justice fédérale annule la décision de l'université et ordonne la réintégration des deux étudiants[10].

Charlayne Hunter est diplômée d'un Bachelor of Arts en journalisme en 1963[2].

Carrière[modifier | modifier le code]

Après ses études, elle rejoint le magazine The New Yorker où elle la première rédactrice afro-américaine[12]. Elle trouve le travail agréable au New Yorker, mais le manque de discipline lui pèse et elle postule à la Russell Sage Fellowship[13], une bourse d'étude dédié au journalisme.

Portrait photo en noir et blanc de Charlayne Hunter-Gault en 1975. Elle a une coupe dite afor et porte un pull.
Charlayne Hunter-Gault en 1975

En 1967, Hunter rejoint également l'équipe d'investigation de WRC-TV, à Washington, DC. Elle y anime les informations locales du soir[14]. En 1968, Hunter-Gault rejoint le New York Times en tant que journaliste spécialisée dans la couverture de la communauté noire, elle ouvre et dirige le premier bureau du journal à Harlem[15],[12]. Elle fera évoluer la politique éditorial du New York Times pour mettre fin à l'utilisation du mot « negroes » au profit de « black »[16],[17]. Elle rejoint le MacNeil/Lehrer Report en 1978 en tant que correspondante, elle en devient correspondante nationale en 1983. Elle quitte le programme en juin 1997. Elle travaille ensuite à Johannesburg, en Afrique du Sud, en tant que correspondante en chef de la National Public Radio en Afrique jusqu'en 1999. Elle rejoint CNN en tant que chef du bureau et correspondant à Johannesburg, poste qu'elle occupera jusqu'en 2005[18],[19].

Au cours de sa période The NewsHour, Hunter-Gault remporte des prix : deux Emmy Awards et un Peabody Award pour l'excellence en journalisme audiovisuel pour son travail sur Apartheid's People, une série NewsHour sur l'Afrique du Sud[20]. Elle a également reçu le prix du journaliste de l'année 1986 de la National Association of Black Journalists, un prix Candace pour le journalisme de la National Coalition of 100 Black Women en 1988[21] et le prix Sidney Hillman 1991. Un bâtiment de l'Université de Géorgie porte son nom et celui de Hamilton Holmes depuis 2001. Elle est membre du conseil des jurés des Peabody Awards depuis 2009[22] , siège au conseil d'administration de la Fondation Carter[23] et du Comité pour la protection des journalistes[24].

Charlayne Hunter-Gault est l'autrice de In My Place (1992), une autobiographie sur les évènements et son expérience à l'Université de Géorgie[25],[26].

Vie privée[modifier | modifier le code]

Peu de temps avant d'obtenir son diplôme de l'Université de Géorgie, Charlayne Hunter épouse un camarade de classe, Walter Stovall, un écrivain fils d'un fabricant d'aliments pour poulets[27],[28]. Le couple se marie une première fois en mars 1963 en Géorgie, puis se marie à nouveau à Détroit dans le Michigan, le 8 juin 1963. Ils pensent que, puisqu'il est blanc et elle noire, la première cérémonie pourrait être considérée comme invalide et criminelle, sur la base des lois sur les mariages interraciaux dans l'état dans lequel ils avaient été mariés[29]. Une fois le mariage révélé, le gouverneur de Géorgie, Carl Sanders, l'a qualifié de « a shame and a disgrace », tandis que le procureur général de Géorgie fait des déclarations publiques sur la poursuite du couple en vertu de la loi géorgienne sur les mariages de couple métis[27],[28],[30]. Les médias ont cité les parents des mariés comme étant contre ce mariage[27].

Charlayne Hunter-Gault et Ronald Gault en 2015

Des années plus tard, après le divorce du couple, Charlayne Hunter-Gault a prononcé un discours à l'université dans lequel elle a fait l'éloge de Walter Stovall, qui, a-t-elle déclaré,« unhesitatingly jumped into my boat with me. He gave up going to movies because he knew I couldn't get a seat in the segregated theaters. He gave up going to the Varsity because he knew they would not serve me... We married, despite the uproar we knew it would cause, because we loved each other. » (« Il est monté à bord avec moi sans hésitation. Il a renoncé à aller au cinéma parce qu'il savait que je ne pouvais pas avoir avoir un siège dans les cinémas à l'époque de la ségrégation. Il a renoncé à aller au Varsity parce qu'il savait qu'ils ne me serviraient pas... Nous nous sommes mariés, malgré le tumulte que nous savions que cela provoquerait, parce que nous nous aimions. » en anglais)[29]. Peu de temps après leur mariage, Stovall aurait déclaré : « We are two young people who found ourselves in love and did what we feel is required of people when they are in love and want to spend the rest of their lives together. We got married. » (« Nous sommes deux jeunes qui sont tombés amoureux et qui ont fait ce que nous estimons être exigé des gens lorsqu'ils sont amoureux et veulent passer le reste de leur vie ensemble. Nous nous sommes mariés. » en anglais).

Le couple a eu une fille, Suesan Stovall, chanteuse, née en décembre 1963.

Après son divorce avec Walter Stovall, Charlayne Hunter épouse Ronald T. Gault en 1971[31], un homme d'affaires noir qui était alors responsable de programme pour la Fondation Ford. Plus tard, il est devenu banquier d’investissement et consultant. Ils ont un fils, Chuma Gault, acteur, né en 1972[31]. Le couple a vécu à Johannesburg, en Afrique du Sud, où ils produisaient également du vin pour une marque appelée Passages[31],[32],[33]. De retour aux États-Unis, le couple réside dans le Massachusetts[34].

En 2015, elle est invitée ainsi que d'autres militante des droits civiques à la Maison-Blanche par Michelle Obama dans le cadre d'une discussion pour célébrer le Mois de l'histoire des Noirs et les femmes du Mouvement américain des droits civiques[35].

Œuvres[modifier | modifier le code]

Essais[modifier | modifier le code]

Distinctions[modifier | modifier le code]

Références[modifier | modifier le code]

  1. (en) « Charlayne Hunter-Gault », sur The Historymakers - THE DIGITAL REPOSITORY FOR THE BLACK EXPERIENCE (consulté le )
  2. a et b (en-US) Joelle Jackson, « Charlayne Hunter-Gault (1942- ) • », (consulté le )
  3. « Hunter, Althea Ruth, 1918-2004 - Civil Rights Digital Library » (consulté le )
  4. a b c d e et f Synnott, « The African-American Women Most Influential in Desegregating Higher Education », The Journal of Blacks in Higher Education, no 59,‎ , p. 44–52 (ISSN 1077-3711, JSTOR 25073895)
  5. a b et c (en) Robert A. Pratt, We Shall Not Be Moved: The Desegregation of the University of Georgia, University of Georgia Press, (ISBN 978-0-8203-2632-0, lire en ligne)
  6. Bettye Collier-Thomas, Sisters in the Struggle : African American Women in the Civil Rights-Black Power Movement, NYU Press,
  7. (en) « Complaint from Hamilton E. Holmes and Charlayne A. Hunter vs. Walter Danner, Registrar of the University of Georgia », sur National Archives Catalog (consulté le )
  8. (en) « Walter Danner papers » (consulté le )
  9. (en) « Holmes v. Danner, 191 F. Supp. 394 (M.D. Ga. 1961) », Justia Law (consulté le )
  10. a et b « Life on Campus · Making Space: Fighting for Inclusion, Building Community at UGA · UGA Special Collections Library Online Exhibitions » (consulté le )
  11. (en) « Letter, from J.A. Williams, dean of students, to Hamilton Holmes, suspending Holmes from the University of Georgia, 1961 January 12 » (consulté le )
  12. a et b (en) « Lessons From a Half-Century of Reporting on Race in America », (consulté le )
  13. « Charlayne Hunter-Gault - Session 1 » (consulté le )
  14. (en-US) « Charlayne Hunter-Gault » (consulté le )
  15. a et b (en-US) « Inducted November 5, 2015 - Charlayne Hunter-Gault » [PDF], atlanta press club (consulté le )
  16. (en) « PBS Journalist Charlayne Hunter-Gault On The Cultural Shifts Spotlighted In 'Summer Of Soul' », (consulté le )
  17. (en) « Charlayne Hunter-Gault | Civil Rights Activist, Author, Educator | Britannica », (consulté le )
  18. Brian, « Charlayne Hunter-Gault Leaves CNN [[:Modèle:Pipe]] TVNewser », Mediabistro.com, (consulté le )
  19. « LA CREATION D'UNE VERITABLE CHAINE DE TELEVISION DES NATIONS UNIES EST SUGGEREE LORS DE L'OUVERTURE DU FORUM MONDIAL DE LA TELEVISION | Couverture des réunions & communiqués de presse » (consulté le )
  20. 58th Annual Peabody Awards, May 1999.
  21. « CANDACE AWARD RECIPIENTS 1982-1990, Page 2 » [archive du ], National Coalition of 100 Black Women
  22. « George Foster Peabody Awards Board Members » [archive du ], The Peabody Awards (consulté le )
  23. (en) « Charlayne Hunter-Gault to receive International Festival of Arts & Ideas' Visionary Leadership Award », New Haven Register,‎ (lire en ligne)
  24. (en) « Africa Update: Taylor Extradition, Ethiopian Journalists », (consulté le )
  25. (en) « In my place / Charlayne Hunter-Gault - Catalogue | National Library of Australia » (consulté le )
  26. (en-US) « Charlayne Hunter-Gault Reads From ‘In My Place’ » (consulté le )
  27. a b et c John H. Britton, "Charlayne's Secret Marriage to White Man", Jet, September 19, 1963. pp. 18–25.
  28. a et b Randall Kennedy, Interracial Intimacies (Random House, 2003), p. 100.
  29. a et b « The Image - TIME », (consulté le )
  30. Art Sears Jr., "Lawyer Asks to Defend Hunter's Mixed Race Marriage in Georgia Court", Jet, September 19, 1963, pp. 26 and 27
  31. a b et c « Charlayne Hunter-Gault : People.com », (consulté le )
  32. (en-US) Carrie Seidman et Herald-Tribune, « Passages from Africa » (consulté le )
  33. « Charlayne Hunter-Gault - News Anchor, Activist, Civil Rights Activist, Radio Personality, Journalist » [archive du ] (consulté le )
  34. (en) « Ronald T. Gault » (consulté le )
  35. (en) « Honoring the Women of the Civil Rights Movement, Both Past and Present », (consulté le )
  36. (en-US) « Special Honors Past Winners – NABJ » (consulté le )
  37. (en-US) « Hall of Fame – NABJ » (consulté le )
  38. (en) « CANDACE AWARD RECIPIENTS 1982-1990 », (consulté le )
  39. (en-US) « Apartheid’s People » (consulté le )
  40. (en) « The Hillman Prize Previous Honorees » (consulté le )
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  42. (en) « APSA Awards Presented at the 2014 Annual Meeting », PS: Political Science & Politics, vol. 47, no 4,‎ , p. 924–931 (ISSN 1049-0965 et 1537-5935, DOI 10.1017/S1049096514001462, lire en ligne, consulté le )
  43. (en-US) T. N. J. Staff, « Charlayne Hunter-Gault to Receive 2014 Freedom Award », (consulté le )
  44. (en) « Charlayne Hunter-Gault » (consulté le )
  45. « 2020 Ivan Allen Jr. Prize Honors Hamilton Holmes, Charlayne Hunter-Gault | News Center » (consulté le )
  46. (en) « Charlayne A. Hunter-Gault | American Academy of Arts and Sciences », (consulté le )

Liens externes[modifier | modifier le code]