Théorème d'inversion de Lagrange

Un article de Wikipédia, l'encyclopédie libre.

En mathématiques, le théorème d'inversion de Lagrange fournit le développement en série de certaines fonctions définies implicitement ; la formule d'inversion de Lagrange, connue aussi sous le nom de formule de Lagrange-Bürmann, en est un cas particulier donnant le développement en série de Taylor de la bijection réciproque d'une fonction analytique.

Formule générale[modifier | modifier le code]

Si z est une fonction de x, de y et d'une fonction f indéfiniment dérivable, telle que

alors pour toute fonction g indéfiniment dérivable, on a

pour y petit, si la série converge (voir plus loin pour la version formelle de cette identité).

Si g est la fonction identité on obtient alors

Cas particuliers[modifier | modifier le code]

Cas de la bijection réciproque[modifier | modifier le code]

Si on prend x = 0 et f(z) = zh(z)h est une fonction analytique telle que h(0) = 0 et h'(0) ≠ 0, on obtient la relation y = h(z) et la formule d'inversion de Lagrange permet d'obtenir la série de Taylor de la fonction h−1, à savoir :

les dérivées étant calculées en x = 0.

Plus précisément, soit f une fonction (de variable complexe) analytique au point a telle que f '(a) ≠ 0. On peut alors résoudre l'équation en w, f(w) = z pour z appartenant à un voisinage de f(a), obtenant w = g(z), où g est analytique au point b = f(a). On dit que g est obtenu par inversion de série.

Le développement en série de g est donné par[1]

Cette formule est en fait valable pour des séries formelles, et peut se généraliser de diverses façons : pour des fonctions de plusieurs variables, pour le cas où f '(a) = 0 (l'inverse g étant alors une fonction multivaluée), et pour des extensions à des algèbres d'opérateurs, comme pour l'exponentielle ou le logarithme de matrices.

Ce théorème fut démontré par Lagrange[2] et généralisé par Hans Heinrich Bürmann (en)[3],[4],[5] à la fin du XVIIIe siècle. On peut l'obtenir à l'aide de la théorie (plus tardive) de l'intégrale de contour, mais c'est en réalité un résultat purement formel, dont on peut donner une preuve directe[6].

Formule de Lagrange-Bürmann[modifier | modifier le code]

Un cas particulier du théorème, utilisé en combinatoire analytique, correspond à f(w) = w/ϕ(w) et ϕ(0) ≠ 0. Prenant a = 0 et b = f(0) = 0, on obtient

ce qui peut aussi s'écrire

[wr] désigne le coefficient de wr dans l'expression qui le suit.

Une généralisation utile de cette formule est connue comme la formule de Lagrange–Bürmann :

,

H peut être une série formelle ou une fonction analytique arbitraire, par exemple H(w) = wk.

Applications[modifier | modifier le code]

Fonction W de Lambert[modifier | modifier le code]

La fonction W de Lambert est la fonction W(z) définie par l'équation implicite

Le théorème de Lagrange permet de calculer la série de Taylor de W(z) près de z = 0. Prenant f(w) = w ew et a = b = 0, on remarque que

ce qui donne

Le rayon de convergence de cette série est e–1 (ce qui correspond à la branche principale de la fonction de Lambert).

On peut obtenir une série ayant un plus grand rayon de convergence par la même méthode : la fonction f(z) = W(ez) – 1 vérifie l'équation

Développant z + ln (1 + z) en série et inversant celle-ci, on obtient pour f(z + 1) = W(ez + 1) – 1 :

W(x) peut s'en déduire en substituant ln x – 1 à z dans cette série. Par exemple, prenant z = –1, on trouve W(1) = 0,567143 à 10-6 près.

Combinatoire analytique[modifier | modifier le code]

Soit Bn le nombre d'arbres binaires (non étiquetés) ayant n nœuds.

Retirer la racine d'un arbre le décompose en deux arbres plus petits ; on en déduit que la fonction génératrice vérifie l'équation fonctionnelle :

Posant C(z) = B(z) – 1, cette équation se réécrit :

On peut donc appliquer le théorème avec ϕ(w) = (w + 1)2 :

On en déduit que Bn est le n-ème nombre de Catalan.

Notes et références[modifier | modifier le code]

Notes[modifier | modifier le code]

(en) Cet article est partiellement ou en totalité issu de l’article de Wikipédia en anglais intitulé « Lagrange inversion theorem » (voir la liste des auteurs).

Références[modifier | modifier le code]

  1. (en) Milton Abramowitz et Irene Stegun, Handbook of Mathematical Functions with Formulas, Graphs, and Mathematical Tables [détail de l’édition] (lire en ligne), chap. 3.6.6. : « Lagrange's Expansion », p. 14
  2. Joseph-Louis Lagrange, « Nouvelle méthode pour résoudre les équations littérales par le moyen des séries », Mémoires de l'Académie Royale des Sciences et Belles-Lettres de Berlin, vol. 24,‎ , p. 251–326 (lire en ligne) (soumis en 1768)
  3. Hans Heinrich Bürmann, « Essai de calcul fonctionnaire aux constantes ad-libitum », Institut National de France,‎ soumis en 1796. Pour un résumé de cet article, cf. (de) Bürmann, « Versuch einer vereinfachten Analysis; ein Auszug eines Auszuges », dans C. F. Hindenburg, Archiv der reinen und angewandten Mathematik, vol. 2, Leipzig, Schäferischen Buchhandlung, (lire en ligne), p. 495-499
  4. Hans Heinrich Bürmann, Formules du développement, de retour et d'intégration, soumis à l'Institut National de France. Le manuscrit de Bürmann est conservé dans les archives de l'École nationale des ponts et chaussées à Paris
  5. Lagrange et Legendre, « Rapport sur deux mémoires d'analyse du professeur Burmann », Mémoires de l'Institut National des Sciences et Arts: Sciences Mathématiques et Physiques, vol. 2,‎ , p. 13-17 (lire en ligne)
  6. Voir l'article anglais sur les séries formelles

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Article connexe[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]