Tardigrada

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Les tardigrades ou oursons d'eau (Tardigrada) forment un embranchement d'animaux invertébrés.

Ils ont été décrits en premier par Johann August Ephraim Goeze en 1773[1], le nom tardigrade qui signifie « marcheur lent » est donné par Lazzaro Spallanzani en 1777[2].

Plus de 1 000 espèces sont connues à ce jour.

Description

Deux individus de l'espèce Hypsibius dujardini vus au microscope électronique

Les tardigrades ont un corps segmenté en quatre, protégé par une cuticule, et sont dotés de huit petites pattes terminées chacune par des griffes.

Les tardigrades vivent un peu partout sur la planète mais se trouvent en plus grand nombre dans les zones où on trouve de la mousse (comme les forêts et la toundra) car elle constitue, avec le lichen, leur aliment de prédilection. On en retrouve du haut de l'Himalaya (à plus de 6 000 m d'altitude) jusque dans les eaux profondes (par 4 000 m de fond) et des régions polaires à l'équateur. Ils sont présents dans le sable, les mousses des toitures humides, sur des sédiments salins ou d'eau douce, où ils peuvent être très nombreux (jusqu'à 25 000 par litre).

  • Taille : les plus grands (adultes) peuvent atteindre une longueur de 1,5 mm, le plus petit en dessous de 0,1 mm. Les larves fraîchement pondues peuvent mesurer moins de 0,05 mm. Les femelles peuvent pondre de une à trente larves à la fois.
  • Durée de vie : elle est de quelques mois seulement. Cependant les tardigrades sont capables d'entrer en cryptobiose, ce qui leur permet de survivre très longtemps.

Physiologie

Un tardigrade vu au microscope.
Tardigrade de la famille des Echiniscidae.

Les tardigrades figurent parmi les animaux les plus résistants, capables de résister à des contraintes extrêmes qui tueraient presque n'importe quelle autre forme de vie. Cela est notamment dû à leur possibilité d'entrer en cryptobiose : les tardigrades ont en effet la faculté d'entrer dans un état proche de la non-vie, durant lequel l'activité vitale devient presque indécelable en s'abaissant à 0,01 % de la normale. Le record en laboratoire est actuellement de 8 ans passés dans un état de cryptobiose, après lesquels les tardigrades sont revenus à la vie[3]. Pour entrer en cryptobiose, ils rétractent leurs huit pattes et déshydratent presque complètement leur organisme (perte de plus de 99 % de leur eau), remplaçant l'eau à l'intérieur de leurs cellules par un sucre non réducteur, le tréhalose, qu'ils synthétisent. Ce sucre se comporte comme une sorte d'antigel et préserve les structures cellulaires. Pour compléter la protection, ils s'entourent d'une petite boule de cire microscopique appelée tonnelet[4]. Lors du retour à des conditions dites « normales », l'« ourson d'eau » redevient actif en une durée qui va de quelques minutes à quelques heures.

  • Vide : il peut survivre dans le vide spatial[5].
  • Radiations : les tardigrades ont une très forte résistance aux radiations (rayons X ou ultraviolets[6]) ― plus de 1 100 fois ce que l'homme peut endurer.
  • Produits toxiques : selon des résultats de laboratoire qui restent à confirmer, les tardigrades présenteraient également une exceptionnelle résistance à de nombreux produits toxiques, grâce à une réponse immunitaire appelée « chimiobiose »[7],[8].
  • Déshydratation : les tardigrades ont une extrême tolérance à la dessiccation[6], ce qui leur permet de coloniser les déserts les plus secs : ils peuvent faire varier la proportion d'eau dans leur corps de plus de 80 % à moins de 3 %. En cas d'absence totale et prolongée d'eau, ils peuvent survivre plus de 10 ans en cryptobiose sans la moindre trace d'eau, et reprendre leur activité quand ils sont réhydratés.
  • Pression : les mécanismes de protection des tardigrades leur permettent de survivre dans des conditions extrêmes comme le vide presque absolu, mais aussi sous de très hautes pressions, jusqu'à 1 200 atmosphères. En 2007, des tardigrades ont été exposés au vide intersidéral en même temps qu'aux radiations solaires directes par la mission FOTON-M3, en orbite autour de la Terre[6], et plusieurs ont survécu.
  • Température : les tardigrades figurent parmi les rares animaux non homéothermes à pouvoir poursuivre leur activité par des températures très en dessous de zéro, notamment sur (et parfois dans) les glaces de l'Himalaya et du Groenland. Ils peuvent même survivre plusieurs jours à des températures proches du zéro absolu, à - 272,8 °C ( -459°F, 0,35 K). Leur résistance est également exceptionnelle dans de hautes chaleurs : ils peuvent survivre plusieurs minutes à 150 °C (302 °F)[6].
  • Salinité : ils résistent à des salinités extrêmes soit en formant un tonnelet imperméable aux sels, soit par osmobiose.

Classification

Hypsibius dujardini et Caenorhabditis elegans

Selon Degma, Bertolani et Guidetti, 2013[9],[10],[11] :

Annexes

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Articles connexes

Références taxinomiques

Liens externes

Bibliographie

  • Yves Séméria, Tardigrades continentaux : Oligohydrobiontes et Hétérohydrobiontes, Paris, Fédération française des sociétés de sciences naturelles, , 293 p. (ISBN 2-903052-24-7)

Notes et références

  1. Goeze, 1773 : Uber der Kleinen Wasserbär. Abhandlungen aus der Insectologie, Ubers. Usw, 2. Beobachtg, p. 367-375
  2. Spallanzani, 1777 : Opuscules de physique, animale et végétale. Augmentés de ses Expériences sur la digestion de l'homme & des animaux, traduits de l'italien par Jean Senebier... On y a joint plusieurs lettres relatives à ces Opuscules écrites à M. l'abbé Spallanzani par M. Charles Bonnet & par d'autres naturalistes célèbres. 2 vol. 352 p. & 730 p.
  3. Sømme & Meier, 1995 : Cold tolerance in Tardigrada from Dronning Maud Land, Antarctica. Polar Biology, vol. 15, no 3, p. 221-224.
  4. Forme ressemblant à un petit tonneau.
  5. (en) « Tardigrades survive exposure to space in low Earth orbit », Current Biology, vol. 18, no 17,‎ , R729-R731 (PMID 18786368, DOI 10.1016/j.cub.2008.06.048, lire en ligne, consulté le )
  6. a b c et d Jean-Luc Goudet, « Le mystère des tardigrades, ces animaux qui résistent au vide spatial » sur Futura-sciences.com, 9 septembre 2008.
  7. (it) T. Franceschi, « Anabiosi nei tardigradi », Bolletino dei Musei e degli Istituti Biologici dell'Università di Genova, vol. 22,‎ , p. 47–49.
  8. (en) K. Ingemar Jönsson et Roberto Bertolani, « Facts and fiction about long-term survival in tardigrades », Journal of Zoology, vol. 255,‎ , p. 121–123 (DOI 10.1017/S0952836901001169).
  9. Degma, Bertolani & Guidetti, 2013 : Actual checklist of Tardigrada species (2009-2013, Ver. 23, 15-07-2013) (texte intégral)
  10. Guidetti, & Bertolani, 2005 : Tardigrade taxonomy: an updated check list of the taxa and a list of characters for their identification. Zootaxa, no 845, p. 1–46.
  11. *Degma, & Guidetti, 2007 : Notes to the current checklist of Tardigrada. Zootaxa, no 1579, p. 41–53