Lieux (Perec)

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Lieux est un projet inachevé de l'écrivain Georges Perec, mené de 1969 à 1975.

Description

L'objectif de ce projet était de décrire chaque année, pendant 12 ans, 12 lieux[1], une fois par observation directe, une autre fois de mémoire.

L' ensemble devait aboutir à 288 textes, selon une grille de construction gouvernée par deux carrés latins fournis par le mathématicien C. P. Ramanujam. Cette ossature permettait de décrire chacun des lieux en des mois différents, et de jamais décrire dans le même mois le même couple de lieux.

La manière d'utiliser ces textes, conservés dans des enveloppes scellées, serait choisie par Perec à la toute fin du projet, en 1981 d'après le planning initial.

Le projet est exposé en détail dans deux lettres de 1969, l'une à Maurice Nadeau[2], l'autre à Ramanujam[3], et plus tard dans l'ouvrage Espèces d'espaces[4].

Perec attendait de ce projet « les traces d'un triple vieillissement : celui des lieux eux-mêmes, celui de mon souvenir, et celui de mon écriture[4]. » Il revendiquait également un aspect autobiographique, les lieux choisis étant ceux où il avait vécu, ou auxquels le rattachaient des souvenirs particuliers[4].

Réalisation

Le projet fut mené du au [5], avec un long arrêt en 1973-1974, pendant le tournage d'Un homme qui dort. Au total furent écrits 133 textes.

Les raisons de l'abandon donnent lieu à diverses interprétations : lassitude[6] ou blocage lié à l'autobiographie[7]. Perec déclare ne pas avoir compris « la nature de cet échec, tout en précisant avoir tourné «  autour de ces textes en cherchant quelque chose qui n’était pas dans le protocole[8]» et avoir ressenti un « sentiment de jubilation et de libération » à l'ouverture des enveloppes[8].

Arrêt et publications partielles

Dès l'arrêt du projet Lieux, Perec commença la rédaction de La vie mode d'emploi. Auparavant, il avait écrit W ou le souvenir d'enfance pour lequel furent ouvertes les enveloppes concernant la rue Vilin. « L'idée de revenir rue Vilin n'avait plus de raison d'être[8]. »

Quelques-uns des textes furent réutilisés, regroupés sous le titre de Tentative de description de quelques lieux parisiens[9] :

Édition

  • Lieux, édition de Jean-Luc Jolly, Seuil, Librairie du XXIe siècle, (ISBN 978-2-02-111409-6).

Bibliographie

  • Cécile de Bary, Le réel contraint, Poétique 2005/4. Lire en ligne.
  • Jacques-Denis Bertharion, Des Lieux aux non-lieux : de la rue Vilin à Ellis Island, Le Cabinet d'amateur, no 5, (ISSN 1165-6557).
  • Philippe Lejeune, La mémoire et l'oblique, Georges Perec autobiographe. Éditions P.O.L. 1991.
  • Régine Robin, Georges Perec. Paris-nostalgie: lieux, non-lieux, et le hors-lieu de l’écriture, dans Portrait(s) de Georges Perec, 2001, p. 180-198.
  • Derek Schilling, Mémoires du quotidien : les lieux de Perec, Villeneuve d’Ascq, Presses Universitaires du Septentrion, 2006.

Liens externes

  • Présentation du projet par Georges Perec, Antenne 2, . Voir en ligne.

Notes et références

  1. Rue de l'Assomption, Passage Choiseul, Place de la Contrescarpe, Franklin-Roosevelt, Rue de la Gaîté, Place d'Italie, Avenue Junot, Place Jussieu, Carrefour Mabillon, Rue Saint-Honoré, Île Saint-Louis, Rue Vilin.
  2. Publiée dans le recueil Je suis né, Seuil, 1990, p. 58-59.
  3. Publiée par Philippe Lejeune dans La Mémoire et l'oblique, P.O.L., 1969, p. 205-207.
  4. a b et c Éditions Galilée, 1985, p. 76-77.
  5. Philippe Lejeune, qui a pu examiner les manuscrits, dresse une chronologie précise dans La Mémoire et l'oblique, P.O.L., 1991, p. 198-200.
  6. « L'Avenue Junot m'emmerde. » Cité par Lejeune, La Mémoire et l'oblique, p. 171.
  7. «  « Ces textes conçus pour une future publication, permettant de constituer un fonds de souvenirs solides pour le Georges Perec de 1981, ne peuvent que renvoyer au noyau de l’indicible, la disparition des parents qu’aucune forme d’écriture ne pourra jamais compenser, à une origine de la parole qu’il est impossible de saisir par la médiation des signes. […] La question de la mémoire reste sans réponse. […] Les lieux improbables de la mémoire ne donnent à lire que des traces illisibles, signes vacants que rien ne saurait expliquer, trous noirs à jamais insondables. » Jacques-Denis Bertharion, Des Lieux aux non-lieux : de la rue Vilin à Ellis Island, Le Cabinet d'amateur, no 5, , p. 56-57.
  8. a b et c Interview par Gérard Macé, INA/André Dimanche (1997), CD3. 10'41.
  9. Tentative de description d'un programme de travail pour les années à venir, , publié dans les Cahiers Georges Perec, no 1, P.O.L., 1985, annexe no 5 (non paginée)
  10. Sur la rue de la Gaîté.