Karl Barth

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Karl Barth (Bâle, - Bâle, ) est un théologien et pasteur protestant suisse considéré comme l'une des personnalités majeures de la théologie chrétienne du XXe siècle, toutes confessions confondues. Toute son œuvre est une protestation contre les tentatives humaines (politiques, morales, religieuses et même théologiques) pour instrumentaliser Dieu en l'identifiant à une cause ou à une doctrine. Barth rappelle l'altérité radicale de Dieu : il est donc libre à l'égard de tout ce que l'on peut en dire ou en faire dans les Églises ou les doctrines. Ainsi l'Église chrétienne n'est pas là où nous croyons qu'elle est, mais là où Dieu décide qu'elle est. Il n'y a donc pour Barth d'attitude chrétienne que critique et inconfortable.

Biographie

Fils d'un professeur de théologie, il commence des études de théologie à Berne, avant de les poursuivre à Berlin où il est alors étudiant d'Adolf von Harnack, l'un des chefs de file les plus brillants de l'École historico-critique et de la théologie libérale, puis à Tübingen et finalement à Marbourg, où il suit l'enseignement de Wilhelm Herrmann, auquel il se référera constamment par la suite[1]. De 1909 à 1911, il est pasteur auxiliaire de la paroisse de langue allemande de Genève. Puis il devient pasteur à Safenwil (Argovie). Il adhère au Parti social-démocratique et milite pour des réformes sociales. Cette adhésion lui valut plus tard le surnom de Roter Pfarrer von Safenwil, clin d'œil ironique à son militantisme d'alors. Déçu par le ralliement des théologiens libéraux allemands - ses maîtres - au bellicisme germanique, il remet en cause la théologie qu'on lui a enseignée et qu'il avait adoptée d'enthousiasme (notamment celle de Herrmann) et s'éloigne peu à peu du socialisme chrétien.

Théologie dialectique

En 1919, il publie Der Römerbrief, une exégèse de l'Épître aux Romains, ouvrage qui suscite de nombreuses réactions et dont l'audience est loin de se limiter à l'Église réformée. Il réécrit entièrement son commentaire en 1922, se posant en leader du mouvement de la théologie dialectique ou théologie de la Parole de Dieu. Seul Dieu parle bien de Dieu. Toute théologie authentique est un acte d'audace (Franz Overbeck) qui accepte de laisser advenir la Parole de Dieu comme une brèche dans le discours théologique.

En 1921, il devient professeur de théologie réformée à Göttingen et entreprend une réflexion théologique systématique qui deviendra une référence majeure pour son siècle. Au cours des années 1920, sa théologie et surtout son style connaissent une évolution, liée à un christocentrisme de plus en plus affirmé. À partir de la fin des années 1920, Barth rédige une dogmatique, qui deviendra en 1932 la Kirchliche Dogmatik. Si la théologie reste toujours pour Barth une entreprise risquée et, du point de vue humain, impossible, la révélation de Dieu en Christ garantit sa possibilité – mais seulement du point de vue de Dieu. Il est de la responsabilité du théologien, pour le bien de l'Église, d'oser prendre ce risque.

La Kirchliche Dogmatik

Les volumes de la Dogmatique dans la bibliothèque de Karl Barth à Bâle

En 1932 paraît le premier volume de la Kirchliche Dogmatik (traduite en français sous le titre de « Dogmatique»), une œuvre - inachevée - dont il poursuivra la rédaction jusqu'à la fin de sa vie. Ce travail de réflexion ne le coupe pas de la réalité de son temps. Barth introduit la théologie au cœur de la vie quotidienne.

En 1934, il est le principal auteur de la Déclaration théologique de Barmen, texte fondamental d'opposition chrétienne à l'idéologie nazie. Suspendu à cause de son refus de prêter serment au Führer, puis expulsé d'Allemagne, il devient professeur de théologie systématique à Bâle. Il participe à la première assemblée mondiale du Conseil œcuménique des Églises à Amsterdam, en 1948 : « N'est-il pas dit que nous devons chercher premièrement le Royaume de Dieu et sa justice ? » rappelle-t-il lors de la séance d'ouverture. Pour Barth, la Bible est l'interpellation que Dieu adresse aux hommes.

Après la fin de la Seconde Guerre mondiale, Karl Barth entretient un long débat théologique avec le grand théologien catholique suisse Hans Urs von Balthasar. L'un et l'autre étaient profondément marqués par la musique. Bien plus tard, Balthasar publiera une immense somme de théologie dogmatique où la musique joue un rôle important (La Dramatique divine et son « résumé », La vérité est symphonique) et Karl Barth un petit livre sur Mozart. À la fin de sa vie, il participe à la lutte contre la prolifération des armements atomiques. Il resta toujours proche de la gauche socialiste allemande et suisse, et même fut critiqué pour sa position, jugée accommodante, vis-à-vis du stalinisme.

Postérité

L'écritoire de Karl Barth

Karl Barth a certainement été le théologien protestant le plus prolixe de son temps, et l'un des plus influents avec Rudolf Bultmann et Paul Tillich. Avec Jürgen Moltmann, il exerça une influence « souterraine » sur toute la théologie de la libération, influençant notamment le Brésilien Rubem Alves[2].

Néanmoins le retentissement de son œuvre fut très nuancé dès les années 1960, sauf peut-être et paradoxalement dans la théologie catholique. Du côté protestant, les évangéliques et les Églises historiques acquises aux théologies politiques (il est vrai partiellement issues de Barth) ou néo-libérales lui accordèrent une attention moindre.[réf. nécessaire]

Il en va ainsi probablement parce que Barth a amené la théologie au summum de ses possibilités pour immédiatement la récuser dans son intention de « parler sur Dieu » donc de l'expliquer. Le théologien est alors saisi face à l'œuvre de Barth d'un malaise profond car il s'y voit remis en cause dans sa légitimité au moment où il accomplit sa mission avec le plus haut sens de son devoir.

Publications

  • L'Épître aux Romains, ISBN 2-8309-0240-8
  • avec Henri Cadier et Paul Borchsenius, La Chrétienté au creuset de l'épreuve, Genève, Labor et Fides, 1951, 830 p.
  • Dogmatique, 26 fascicules + index, Genève, Labor et Fides, 1953-1974
  • Christ et Adam, Genève, Labor et Fides, 1960, 80 p.
  • Aux captifs la liberté, Genève, Labor et Fides, 1964, 64 p.
  • Ce qui demeure, Genève, Labor et Fides, 1970, 106 p.

Notes et références

  1. Musée virtuel du protestantisme français, Karl Barth (1886-1968), biographie détaillée, en ligne
  2. André Corten, Le pentecôtisme au Brésil. Émotion du pauvre et romantisme théologique, Paris, Karthala, 1995, p. 21-22. Cité in Olivier Compagnon (2008), Olivier Compagnon, « Le 68 des catholiques latino-américains dans une perspective transatlantique », Nuevo Mundo Mundos Nuevos, Materiales de seminarios, 2008, Mis en ligne le 17 décembre 2008.

Bibliographie

Articles connexes

Liens externes