Elfriede Hirschfeld

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Elfriede Hirschfeld
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Elfriede Hirschfeld, née en 1873 à Francfort-sur-le-Main en Allemagne, est une patiente de Sigmund Freud, traitée de 1908 à 1914.

Historique[modifier | modifier le code]

Entre 1908 et 1914, elle fut la patiente de Freud, qui ne nomme pas ce « cas » dans ses écrits, où cette histoire de patiente revient pourtant dans d'assez nombreuses « occurrences », que ce soit dans plusieurs articles ou dans les correspondances[1].

Contrairement aux présentations monographiques écrites par Sigmund Freud, comme le petit Hans, L'homme aux loups, le Président Schreber, Dora ou L’homme aux rats[2], ou encore comme pour les cas qui figurent dans les Études sur l'hystérie[3], celui d’Elfriede Hirschfeld, n’a donc pas bénéficié d’une étude détaillée reconnue de la part de Freud, le cas n'étant pas nommé.

Ce n’est qu’en 1994 que des recherches, menées dans le département des Archives Freud à la Bibliothèque de Washington, révèlent le nom de cette patiente à présent identifiée grâce aux travaux d'Ernst Falzeder qui voit en elle et chez Freud « une patiente de synthèse »[1],[4].

C’est pourtant durant une période qui va de la fin [5] jusqu’au mois de , soit six ans, que Freud recevra cette personne en entretien, et qui sera à l’origine de son hypothèse d’un stade dit sadique-anal. Hypothèse qu’il n’abandonnera jamais, mais que par ailleurs, Jacques Lacan, dans son enseignement qui se fit sous le sceau du retour à Freud délaissera.

Elfriede Hirschfeld sombre dans un délire d’indignité lorsque son mari lui apprend qu’ils ne pourront pas avoir d’enfants, à la suite d'un problème d’azoospermie qui a été détecté. S’ensuivront une dizaine années passées dans divers établissements psychiatriques jusqu’au moment où elle entend parler de la psychanalyse et de son inventeur Freud[6]. Ce dernier choisira de mener et de rendre compte de cette cure sous l'angle de la névrose obsessionnelle, à laquelle il va faire correspondre un stade sadique-anal, produit à partir de la régression depuis l'acquisition du stade génital[7].

À l'issue de six années de traitement, la guérison ne sera cependant pas au rendez-vous. Ce ne sera pas non plus le cas lorsque, orientée vers la clinique psychiatrique de Bellevue en Suisse, dirigée alors par Ludwig Binswanger, la patiente y séjournera à quatre reprises[8], avant de se retirer dans un hôtel à Montreux assistée de son infirmière où elle décédera en 1938[9].

Dans tous les patients que Freud a reçus et dont soit il n’a fait aucune mention dans ses textes, ou bien dont il a mentionné les cures sans les nommer, Elfriede Hirschfeld constitue un cas à part. D’abord parce qu’il fait partie des sept interventions de Freud lors des congrès internationaux. En effet le texte princeps du cas de Mme H, « La disposition à la névrose obsessionnelle » a été primordialement celui d’une conférence : Zum problem der Neurosenwahl[10]donnée au congrès de Munich en 1913. Il s’inscrit dans la série des sept seuls exposés – dont trois cas cliniques - prononcés par Freud, aux congrès internationaux de psychanalyse : à Salzbourg (1909), Remarques sur un cas de névrose obsessionnelle ; Nuremberg (1910), Perspectives d’avenir de la thérapeutique analytique ; Weimar (1911), Le cas du président Schreber ; Munich (1913), Le problème du choix dans la névrose ; Budapest (1918), Les voies nouvelles de la thérapeutique analytique ; La Haye (1920), Supplément à la théorie des rêves ; Berlin (1922), Quelques remarques sur l’inconscient. Ensuite parce que quantité de marqueurs de ce cas jalonnent son enseignement de 1909 à 1932. Des textes entiers lui sont consacrés : « La disposition à la névrose obsessionnelle »[11], « Sur les transpositions des pulsions et particulièrement dans l’érotisme anal » [12], Un rêve utilisé comme preuve[13], ou des fragments importants : « Deux mensonges d’enfants »[14], « Psychanalyse et télépathie »[15],[16], « Quelques additifs à l’interprétation des rêves »[17] « Le rêve et l’occultisme »[18]. Dans Totem et tabou où deux passages lui sont consacrés, Freud glisse une allusion à son nom (Hirschfeld signifie champ aux cerfs) en parlant d’une Mme Cerf et d’une rue aux cerfs [19].

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. a et b Nicolas Gougoulis, « Hirschfeld, Elfriede » (article), dans Dictionnaire international de la psychanalyse, Alain de Mijolla (dir), 2 vol, , Hachette, Éd. revue et augmentée, 2005, p. 779-780.
  2. S. Freud, Cinq psychanalyses, Paris, Puf, 1984
  3. S. Freud, J. S. Breuer, Études sur l’hystérie, Paris, Puf, 2002
  4. E. Falzeder, Psychoanalytic Quaterly No 63, 1994, etMa grande patiente, mon fléau principal. Un cas de Freud inconnu jusqu'à présent et ses répercussions, Revue française de psychanalyse No 4, 1997. Lire en ligne [1].
  5. Sigmund Freud–C. G. Jung, Correspondance 1906-1914, Paris, Gallimard, 1992, lettre du 8 novembre 1908 de Freud à Jung. « Mme C- est effectivement arrivée chez moi il y a quinze jours, c’est un cas terriblement sérieux d’obsession, qui ne peut changer que très lentement. Le motif de sa préférence pour la personne est que Thomsen lui a justement déconseillé que ce soit moi »
  6. Par le Dr Muthmann . Le Dr Muthmann est inscrit présent comme hôte à la séance de la Société Psychanalytique de Vienne du 10 février 1909 et voir lettre du Dr Muthmann à Binswanger (Nassau) du 3 mai 1905 [2]
  7. « Une organisation prégénitale dans laquelle le sadisme et l’érotisme anal jouent le rôle conducteur », S. Freud, Trois essais sur la sexualité, Paris, Folio essais, p. 96; Sur les transpositions de pulsions plus particulièrement dans l’érotisme anal, (1916), Névrose, psychose et perversion, Paris, Puf, 1981 ; Métapsychologie, Paris, Gallimard, 1986; L’organisation sadique-anale, Introduction à la psychanalyse, Paris, Payot, 1967, p. 323 ; Inhibition, symptôme, angoisse, Paris, Puf, 1981, p. 34
  8. 1916 1er séjour, second séjour 1923, troisième séjour, 1924, quatrième séjour et dernier séjour. Cf. R. Fiori, H. Eelfriede, La femme aux épingles, Rencontre avec un cas de Freud, De la névrose obsessionnelle à la mélancolie, 2015 et R. Fiori, « La sixième analyse de Freud », La Cause freudienne No 69, Paris, septembre 2008
  9. Lettre du 24 avril 1938 de Lina Block à Ludwig Binswanger , Archives Binswanger à l'Université de Tübingen en Allemagne, et traduction par Johanna Martin, René Fiori
  10. Programme, Private psychoanalytische Vereinigung in München, 7 et 8 septembre 1913, Annexe 3, in R. Fiori, op. cit.
  11. S. Freud, La disposition à la névrose obsessionnelle, Névrose, psychose et perversion, Paris, Puf, 1981
  12. S. Freud, La vie sexuelle, Puf, Paris, 1982
  13. Névrose, psychose et perversion, Paris, Puf, 1981
  14. S. Freud, Névrose, psychose et perversion, Paris, Puf, 1981
  15. S. Freud, Résultats, Idées, Problèmes, Paris, Gallimard, Tome 2, 1985.
  16. Ce sont les recherches, dont on peut lire le résultat dans le livre de Mme Ilse Grubrich-Simitis, Freud : retour aux manuscrits, Paris, Puf, 1997 qui permettent de relier les deux textes à cette patiente : « Psychanalyse et télépathie » et « Deux mensonges d’enfant ».
  17. S. Freud, RIP II, Paris, Puf, 1985
  18. S. Freud, Nouvelles conférences de Psychanalyse, Paris, Gallimard, 1984
  19. S. Freud, Totem et Tabou, Paris, Payot, 1986, p. 112

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

Articles connexes[modifier | modifier le code]