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Il s'agit de la population de [[micro-organisme]]s vivant en accord avec son hôte<ref>[http://www.jouy.inra.fr/apprendre_et_travailler/la_science_et_vous/microbiote_prebiotiques_et_probiotiques/le_microbiote Document Inra] (Microbiote, Prébiotiques et probiotiques)</ref> Le [[génome]] du microbiote se dénomme [[Métagénome]].
Il s'agit de la population de [[micro-organisme]]s vivant en accord avec son hôte<ref>[http://www.jouy.inra.fr/apprendre_et_travailler/la_science_et_vous/microbiote_prebiotiques_et_probiotiques/le_microbiote Document Inra] (Microbiote, Prébiotiques et probiotiques)</ref> Le [[génome]] du microbiote se dénomme [[Métagénome]].
Un [[animal]] ou un [[végétal]] dont le microbiote est connu est dit ''[[gnotobiotique]]'' ( ''gnotos'', {{Citation|connu}}, ''biota'', {{Citation|biote}}). La science qui les étudie est la [[gnobiologie]]<ref>[http://www.gnotobiotics.org/history.html Page sur la gnobiologie] (en anglais)</ref>.
Un [[animal]] ou un [[végétal]] dont le microbiote est connu est dit ''[[gnotobiotique]]'' ( ''gnotos'', {{Citation|connu}}, ''biota'', {{Citation|biote}}). La science qui les étudie est la [[gnobiologie]]<ref>{{en}}[http://www.gnotobiotics.org/history.html Page sur la gnobiologie] (en anglais)</ref>.


Les techniques de biologie moderne utilisent l'approche [[métagénomique]] pour étudier les micro-organismes composant le microbiote dans un environnement donné.
Les techniques de biologie moderne utilisent l'approche [[métagénomique]] pour étudier les micro-organismes composant le microbiote dans un environnement donné.
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=== Aspects quantitatifs ===
=== Aspects quantitatifs ===
L'intestin d'un humain adulte abrite environ {{unité|1|kg}} de bactéries actives sur une surface développée d'environ {{unité|400|m}}{{2}} (villosités et micro-villosités) <ref name="INRA1">[http://www.jouy.inra.fr/ile_de_france/la_science_et_vous/microbiote_prebiotiques_et_probiotiques/le_microbiote Le microbiote, quelle importance pour la santé humaine] (Page du site internet de l'Inra, consultée 2009/06/02)</ref>.
L'intestin d'un humain adulte abrite environ {{unité|1|kg}} de bactéries actives sur une surface développée d'environ {{unité|400|m}}{{2}} (villosités et micro-villosités) <ref name="INRA1">[http://www.jouy.inra.fr/ile_de_france/la_science_et_vous/microbiote_prebiotiques_et_probiotiques/le_microbiote Le microbiote, quelle importance pour la santé humaine] (Page du site internet de l'Inra, consultée le 2 juin 2009)</ref>.
Ce microbiote est constitué d'un nombre de micro-organismes de 10 à 100 fois plus élevé que le nombre de cellules de tout le corps<ref name="INRA1"/>.
Ce microbiote est constitué d'un nombre de micro-organismes de 10 à 100 fois plus élevé que le nombre de cellules de tout le corps<ref name="INRA1"/>.
90 % de la population totale d'un intestin est constituée d'environ {{formatnum:1000}} espèces de bactéries mais plusieurs milliers d’espèces bactériennes différentes coexistent dans un tube digestif normal<ref name="INRA1"/>.
90 % de la population totale d'un intestin est constituée d'environ {{formatnum:1000}} espèces de bactéries mais plusieurs milliers d’espèces bactériennes différentes coexistent dans un tube digestif normal<ref name="INRA1"/>.
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=== Composition ===
=== Composition ===
Le microbiote intestinal humain <ref>collège de France, [http://www.college-de-france.fr/default/EN/all/mic_mal/Cours_du_28_janvier_2010_Fonct.htm Cours du 28 janv 2010]</ref> est à ce jour constitué de plus de 500 [[espèces]] différentes connues. Chaque personne possède son propre microbiote, mais les chercheurs, dont de l'INRA, ont mis en évidence l'existence d'un petit nombre d'espèces partagé par tous qui constituerait le noyau phylogénétique du microbiote intestinal humain<ref>Tap J, et al, [http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/19601958 ''Towards the human intestinal microbiota phylogenetic core'']</ref>. La [[diversité]] d’espèces du microbiote [[intestin]]al dominant est spécifique à chaque individu et le nombre d’espèces communes à plusieurs individus est très restreint (ou nul).
Le microbiote intestinal humain<ref>Collège de France, [http://www.college-de-france.fr/default/EN/all/mic_mal/Cours_du_28_janvier_2010_Fonct.htm Cours du 28 janv 2010]</ref> est à ce jour constitué de plus de 500 [[espèces]] différentes connues. Chaque personne possède son propre microbiote, mais les chercheurs, dont de l'INRA, ont mis en évidence l'existence d'un petit nombre d'espèces partagé par tous qui constituerait le noyau phylogénétique du microbiote intestinal humain<ref> {{en}} Tap J {{et al.}} « Towards the human intestinal microbiota phylogenetic core » PMID 19601958</ref>. La [[diversité]] d’espèces du microbiote [[intestin]]al dominant est spécifique à chaque individu et le nombre d’espèces communes à plusieurs individus est très restreint (ou nul).


Chez l'adulte, le microbiote apparaît très stable au cours du temps (pour un individu donné et sur une période de deux mois à deux ans)<ref>http://www.college-de-france.fr/default/EN/all/mic_mal/Cours_du_16_decembre_2010_La_b.htm
Chez l'adulte, le microbiote apparaît très stable au cours du temps (pour un individu donné et sur une période de deux mois à deux ans)<ref>http://www.college-de-france.fr/default/EN/all/mic_mal/Cours_du_16_decembre_2010_La_b.htm
</ref>.
</ref>.


Cinq groupes (ou [[phyla]]s) de bactéries dominent le microbiote humain<ref name=Nature2Tremaroli2012/> ;
Cinq groupes (ou [[phyla]]s) de bactéries dominent le microbiote humain<ref name=Nature2Tremaroli2012/> :
# les '''''[[Firmicutes]]''''' (on y trouve notamment les genres : ''[[Ruminococcus]], [[Clostridium]], [[Lactobacillus]]'' (dont plusieurs souches utilisées comme probiotiques), et des ''[[Eubacterium]], [[Faecalibacterium]] et [[Roseburia]]'' (productrices de [[butyrate]]<ref name=Nature2Tremaroli2012/>) ;
# les '''''[[Firmicutes]]''''' (on y trouve notamment les genres : ''[[Ruminococcus]], [[Clostridium]], [[Lactobacillus]]'' (dont plusieurs souches utilisées comme probiotiques), et des ''[[Eubacterium]], [[Faecalibacterium]] et [[Roseburia]]'' (productrices de [[butyrate]]<ref name=Nature2Tremaroli2012/>) ;
# les '''''[[Bacteroidetes]]''''' (dans ce groupe, les ''Bacteroides, Prevotella ''et'' Xylanibacter'' dégradent une grande variété de complexes de [[glycane]]s<ref name=Nature2Tremaroli2012/>) ;
# les '''''[[Bacteroidetes]]''''' (dans ce groupe, les ''Bacteroides, Prevotella ''et'' Xylanibacter'' dégradent une grande variété de complexes de [[glycane]]s<ref name=Nature2Tremaroli2012/>) ;
# les ''[[Actinobacteria]]''''' (Ce groupe inclue les genres ''[[Collinsella]] ''et'' [[Bifidobacterium]]'' (dont souches de probiotiques connus<ref name=Nature2Tremaroli2012/>) ;
# les '''''[[Actinobacteria]]''''' (Ce groupe inclue les genres ''[[Collinsella]] ''et'' [[Bifidobacterium]]'' (dont souches de probiotiques connus<ref name=Nature2Tremaroli2012/>) ;
# les '''''[[Proteobacteria]]''''' (dont communément des ''[[Escherichia]]'' (de la famille des ''[[Enterobacteriaceae]]'' et des bactéries du groupe '''''[[Desulfovibrio]]''''' (bactéries sulfato-réductrices<ref name=Nature2Tremaroli2012/>) ;
# les '''''[[Proteobacteria]]''''' (dont communément des ''[[Escherichia]]'' (de la famille des ''[[Enterobacteriaceae]]'' et des bactéries du groupe '''''[[Desulfovibrio]]''''' (bactéries sulfato-réductrices<ref name=Nature2Tremaroli2012/>) ;
# les '''''[[Verrucomicrobia]]''''' (Ce groupe a été récemment découvert, il inclue les ''[[Akkermansia]]'' qui semblent spécialisées dans la dégradation des [[mucus]]<ref name=Nature2Tremaroli2012/>).
# les '''''[[Verrucomicrobia]]''''' (Ce groupe a été récemment découvert, il inclue les ''[[Akkermansia]]'' qui semblent spécialisées dans la dégradation des [[mucus]]<ref name=Nature2Tremaroli2012/>).
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En Europe, le microbiote diffère selon les régions chez les enfants, mais est plus uniforme chez les adultes<ref name="INRA1"/>. Et après 70 ans, de nouvelles espèces apparaissent dans le microbiote, peut être en raison d'une diminution de l'immunité face aux infections<ref name="INRA1"/>.
En Europe, le microbiote diffère selon les régions chez les enfants, mais est plus uniforme chez les adultes<ref name="INRA1"/>. Et après 70 ans, de nouvelles espèces apparaissent dans le microbiote, peut être en raison d'une diminution de l'immunité face aux infections<ref name="INRA1"/>.


En 2008, le séquençage du génome du microbiote a été entamé via le Projet « Métagénome »<ref>[http://fr.wikipedia.org/wiki/Projet_de_s%C3%A9quen%C3%A7age_de_g%C3%A9nome#Microbiome_et_M.C3.A9tag.C3.A9nome Voir Microbiote et métagènome] (dans Wikipédia)</ref>, suivi en France par l'INRA <ref name="INRA1"/>.
En 2008, le séquençage du génome du microbiote a été entamé via le Projet « [[Projet_de_s%C3%A9quen%C3%A7age_de_g%C3%A9nome#Microbiome_et_M.C3.A9tag.C3.A9nome|Métagénome]] » suivi en France par l'INRA<ref name="INRA1"/>.


=== Étude du microbiote ===
=== Étude du microbiote ===
Un des moyens d'en étudier les propriétés et fonction et interactions avec la physiologie et le métabolisme de l'hôte est de coloniser de manière contrôler le tube digestif de rats ou souris [[axénique]]s (c'est à dire nés et élevés sans exposition à des microbes vivants). Ces animaux sont ''colonisés'' par une flore microbienne sélectionnées d'une ou plusieurs espèces, ou de communautés entières provenant de murins normaux ou malades ou d'humains. Les chercheurs peuvent alors examiner la transmissibilité de [[phénotype]]s suupposés physiologiques et/ou pathologiques, et tester le rôle du microbiote pour un ou plusieurs phénotype(s) particulier(s). On a ainsi récemment montré que le microbiote intestinal contrôle ou régule chez les souris ainsi testées la masse osseuse<ref>Sjogren, K. et al. The gut microbiota regulates bone mass in mice. J. Bone Miner. Res. 27, 1357–1367 (2012)</ref>, le stockage des graisses corporelles<ref>Bäckhed, F. et al. ''The gut microbiota as an environmental factor that regulates fat storage''. Proc. Natl Acad. Sci. USA 101, 15718–15723 (2004). </ref>, l'[[angiogenèse]] intestinale<ref>Reinhardt, C. et al. ''Tissue factor and PAR1 promote microbiota-induced intestinal vascular remodelling''. Nature 483, 627–631 (2012).</ref> <ref>Stappenbeck, T. S., Hooper, L. V. & Gordon, J. I. ''Developmental regulation of intestinal angiogenesis by indigenous microbes via Paneth cells''. Proc. Natl Acad. Sci. USA 99, 15451–15455 (2002).</ref> et le bon développement de la [[réponse immunitaire]]<ref>Gaboriau-Routhiau, V. et al. ''The key role of segmented filamentous bacteria in the coordinated maturation of gut helper T cell responses''. Immunity 31, 677–689 (2009)</ref>.
Un des moyens d'en étudier les propriétés et fonction et interactions avec la physiologie et le métabolisme de l'hôte est de coloniser de manière contrôler le tube digestif de rats ou souris [[axénique]]s (c'est à dire nés et élevés sans exposition à des microbes vivants). Ces animaux sont ''colonisés'' par une flore microbienne sélectionnées d'une ou plusieurs espèces, ou de communautés entières provenant de murins normaux ou malades ou d'humains. Les chercheurs peuvent alors examiner la transmissibilité de [[phénotype]]s suupposés physiologiques et/ou pathologiques, et tester le rôle du microbiote pour un ou plusieurs phénotype(s) particulier(s). On a ainsi récemment montré que le microbiote intestinal contrôle ou régule chez les souris ainsi testées la masse osseuse<ref> {{en}} Sjogren, K {{et al.}} « The gut microbiota regulates bone mass in mice » ''J Bone Miner Res.'' 27, 1357–1367 (2012)</ref>, le stockage des graisses corporelles<ref> {{en}} Bäckhed F {{et al.}} « The gut microbiota as an environmental factor that regulates fat storage » ''Proc Natl Acad Sci'' USA 101, 15718–15723 (2004).</ref>, l'[[angiogenèse]] intestinale<ref> {{en}} Reinhardt C {{et al}} « Tissue factor and PAR1 promote microbiota-induced intestinal vascular remodelling » ''Nature'' 483, 627–631 (2012).</ref>{{,}}<ref> {{en}} Stappenbeck, T. S., Hooper, L. V. & Gordon, J. I. « Developmental regulation of intestinal angiogenesis by indigenous microbes via Paneth cells » ''Proc Natl Acad Sci.'' USA 2002;99:15451–15455.</ref> et le bon développement de la [[réponse immunitaire]]<ref> {{en}} Gaboriau-Routhiau V {{et al.}} « The key role of segmented filamentous bacteria in the coordinated maturation of gut helper T cell responses » ''Immunity'' 2009;31:677–689.</ref>.
<br />On a aussi montré chez les souris axéniques que la flore intestinale semble jouer un rôle majeur dans le métabolisme énergétique avec des liens possibles avec au moins une partie des formes d'[[obésité]].
<br />On a aussi montré chez les souris axéniques que la flore intestinale semble jouer un rôle majeur dans le métabolisme énergétique avec des liens possibles avec au moins une partie des formes d'[[obésité]].


Le microbiote se montre même capable de réguler l'expression de certains gènes de l'hôte, ce qui pourrait évoquer des relations symbiotiques avancées <ref>Larsson, E. et al. ''Analysis of gut microbial regulation of host gene expression along the length of the gut and regulation of gut microbial ecology through MyD88''. Gut 61, 1124–1131 (2011)</ref>.
Le microbiote se montre même capable de réguler l'expression de certains gènes de l'hôte, ce qui pourrait évoquer des relations symbiotiques avancées<ref> {{en}} Larsson, E {{et al}} « Analysis of gut microbial regulation of host gene expression along the length of the gut and regulation of gut microbial ecology through MyD88 » ''Gut'' 61, 1124–1131 (2011)</ref>.


=== Fonctions ===
=== Fonctions ===
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# '''Fonction immunitaire''' : sans microbiote le système immunitaire est moins actif (on dit qu'il n'est pas éduqué), mais le microbiote active aussi certaines maladies inflammatoires et allergiques ;
# '''Fonction immunitaire''' : sans microbiote le système immunitaire est moins actif (on dit qu'il n'est pas éduqué), mais le microbiote active aussi certaines maladies inflammatoires et allergiques ;
# '''Fonction de protection''' (par la [[diversité biologique]] des bactéries) ; contre la pullulation d'une seule espèces bactérienne, ou contre la colonisation du tube digestif par d'autres microorganismes qui seraient pathogènes ;
# '''Fonction de protection''' (par la [[diversité biologique]] des bactéries) ; contre la pullulation d'une seule espèces bactérienne, ou contre la colonisation du tube digestif par d'autres microorganismes qui seraient pathogènes ;
# '''Fonction digestive''' : des matériaux alimentaires non-digestibles (par exemple : fibres de [[polysaccharide]]s végétaux) sont dégradés par les microbiote, via la fermentation, et on observe des bioconversions de substances en micro-nutriments assimilables bénéfiques pour la santé<ref>[http://www.pubmedcentral.nih.gov/articlerender.fcgi?tool=pubmed&pubmedid=15505215_ étude] PNAS Proc Natl Acad Sci U S A > v.101(44); Nov 2, 2004, 101(44): 15718–15723.Fredrik Bäckhed et al. « ''The gut microbiota as an environmental factor that regulates fat storage'' »</ref>.
# '''Fonction digestive''' : des matériaux alimentaires non-digestibles (par exemple : fibres de [[polysaccharide]]s végétaux) sont dégradés par les microbiote, via la fermentation, et on observe des bioconversions de substances en micro-nutriments assimilables bénéfiques pour la santé<ref> {{en}} Fredrik Bäckhed {{et al.}} « The gut microbiota as an environmental factor that regulates fat storage » ''Proc Natl Acad Sci.'' USA Nov 2, 2004;101(44):15718–15723. PMID 15505215</ref>.


=== Acquisition et évolution du microbiote ===
=== Acquisition et évolution du microbiote ===
L'enfant naît sans microbiote.
L'enfant naît sans microbiote.
<br />Il l'obtient par ''[[contamination]]'' lors de l'accouchement, puis de son environnement.
<br />Il l'obtient par ''[[contamination]]'' lors de l'accouchement, puis de son environnement.
<br />Au plan quantitatif, le nouveau-né se constitue rapidement un microbiote aussi complexe que celui des adultes<ref name="INRA1"/>. Dans certaines sociétés, le grand-père crache traditionnellement dans la bouche de l'enfant nouveau-né<ref>{{Lien web|url=http://f.aribit.free.fr/notes_de_lecture/breton_bataille___autopsie_du_cadavre.pdf |titre=Breton-Bataille : Autopsie du Cadavre |site=La Boîte Alerte |auteur=Frédéric Aribit |année=2008 |consulté le= 11 juillet 2012 }}</ref>, gestion qui pourrait contribuer à la construction du microbiote de l'enfant, qui obtient aussi de nombreux microbes du contact avec sa mère.
<br />Au plan quantitatif, le nouveau-né se constitue rapidement un microbiote aussi complexe que celui des adultes<ref name="INRA1"/>. Dans certaines sociétés, le grand-père crache traditionnellement dans la bouche de l'enfant nouveau-né<ref>{{Lien web|url=http://f.aribit.free.fr/notes_de_lecture/breton_bataille___autopsie_du_cadavre.pdf |titre=Breton-Bataille : Autopsie du Cadavre |site=La Boîte Alerte |auteur=Frédéric Aribit |année=2008 |consulté le= 11 juillet 2012 |format= pdf}}</ref>, gestion qui pourrait contribuer à la construction du microbiote de l'enfant, qui obtient aussi de nombreux microbes du contact avec sa mère.


La composition de l'alimentation de l'enfant et de l'adolescent influe fortement sur celle du microbiote. Ainsi, le microbiote fécal d'enfants africains ruraux ayant une alimentation plus riche en fibres et produits végétaux présente moins de Firmicutes et un taux plus élevé de ''Bacteroidetes'' (''Prevotella'' et ''Xylanibacter'' surtout<ref name=AfriqueItalie2010/>) alors que les enfants italiens ayant une alimentation plus sucrée et carnée avaient un microbiote plus riche en ''Enterobacteriaceae (Shigella'' et ''Escherichia'' surtout<ref name=AfriqueItalie2010>De Filippo, C. et al. ''Impact of diet in shaping gut microbiota revealed by a comparative study in children from Europe and rural Africa''. Proc. Natl Acad. Sci. USA 107, 14691–14696 (2010). </ref>). Le microbiote semble dans les deux cas s'être adapté à l'alimentation de l'hôte à leur profit mutuel pour maximiser l'extraction d'énergie (à partir d'une alimentation riche en fibres chez les enfants africains).
La composition de l'alimentation de l'enfant et de l'adolescent influe fortement sur celle du microbiote. Ainsi, le microbiote fécal d'enfants africains ruraux ayant une alimentation plus riche en fibres et produits végétaux présente moins de Firmicutes et un taux plus élevé de ''{{Lang|la|Bacteroidetes}}'' (''Prevotella'' et ''Xylanibacter'' surtout<ref name=AfriqueItalie2010/>) alors que les enfants italiens ayant une alimentation plus sucrée et carnée avaient un microbiote plus riche en ''{{Lang|la|Enterobacteriaceae}} (Shigella'' et ''Escherichia'' surtout<ref name=AfriqueItalie2010> {{en}} De Filippo, C {{et al.}} « Impact of diet in shaping gut microbiota revealed by a comparative study in children from Europe and rural Africa » ''Proc Natl Acad Sci.'' USA 2010;107:14691–14696.</ref>). Le microbiote semble dans les deux cas s'être adapté à l'alimentation de l'hôte à leur profit mutuel pour maximiser l'extraction d'énergie (à partir d'une alimentation riche en fibres chez les enfants africains).


Une hypothèse récente et encore discutée est qu'il existerait trois grands entérotypes non-influencés par le sexe, l'âge ou la nationalité<ref name=Enterotypes2011/>, chacun dominé par un genre différent - ''Bacteroides, Prevotella ''ou'' Ruminococcus''<ref name=Enterotypes2011>Arumugam, M. et al. ''Enterotypes of the human gut microbiome''. Nature 473, 174–180 (2011). </ref>. Les entérotypes dominés par les ''Bacteroides'' sont associés à une alimentation riche en graisses animales et/ou en protéines. Ceux dominés par les '' Prevotella'' correspondant aux régimes riches en [[hydrates de carbone]]<ref name=RegimeAliment2011>Wu, G. D. et al. ''Linking long-term dietary patterns with gut microbial enterotypes.'' Science 334, 105–108 (2011)</ref>. L'enterotype ''Ruminococcus'' semble quant à lui moins distinct, et plutôt partiellement fusionné avec l'enterotype ''Bacteroides''<ref name=Enterotypes2011/>. Un changement expérimental de régime alimentaire durant 10 jours ne suffit pas à modifier l'enterotype d'un individual<ref name=Enterotypes2011/>, mais une modulation des taux de glucides dans l'alimentation est suivi de changements rapides chez les bactéries du [[colon]]. Un apport en inuline ou en prébiotique modifie aussi la flore bactérienne (au profit de ''[[Faecalibacterium prausnitzii]]'' et ''Bifidobacterium'' sp. chez l'homme<ref>Ramirez-Farias, C. et al. Effect of inulin on the human gut microbiota: stimulation of Bifidobacterium adolescentis and Faecalibacterium prausnitzii. Br. J. Nutr. 101, 541–550 (2009). </ref>, en diminuant le risque d'obésité diabétique chez la souris<ref>Cani, P. D. et al. ''Selective increases of bifidobacteria in gut microflora improve high-fat-diet-induced diabetes in mice through a mechanism associated with endotoxaemia''. Diabetologia 50, 2374–2383 (2007).</ref>). La réponse du microbiote au changement d'alimentation (suite à l'adjonction d'amidon résistant par exemple) varie selon les individus.
Une hypothèse récente et encore discutée est qu'il existerait trois grands entérotypes non-influencés par le sexe, l'âge ou la nationalité<ref name=Enterotypes2011/>, chacun dominé par un genre différent - ''{{Lang|la|Bacteroides, Prevotella}} ''ou'' Ruminococcus''<ref name=Enterotypes2011> {{en}} Arumugam M {{et al.}} « Enterotypes of the human gut microbiome »'' Nature'' 2011;473:174–180.</ref>. Les entérotypes dominés par les ''{{Lang|la|Bacteroides}}'' sont associés à une alimentation riche en graisses animales et/ou en protéines. Ceux dominés par les ''Prevotella'' correspondant aux régimes riches en [[hydrates de carbone]]<ref name=RegimeAliment2011> {{en}} Wu G D {{et al.}} « Linking long-term dietary patterns with gut microbial enterotypes » ''Science'' 2011;334:105–108.</ref>. L'enterotype ''Ruminococcus'' semble quant à lui moins distinct, et plutôt partiellement fusionné avec l'enterotype ''{{Lang|la|Bacteroides}}''<ref name=Enterotypes2011/>. Un changement expérimental de régime alimentaire durant 10 jours ne suffit pas à modifier l'enterotype d'un individual<ref name=Enterotypes2011/>, mais une modulation des taux de glucides dans l'alimentation est suivi de changements rapides chez les bactéries du [[colon]]. Un apport en inuline ou en prébiotique modifie aussi la flore bactérienne (au profit de ''{{Lang|la|[[Faecalibacterium prausnitzii]]}}'' et ''Bifidobacterium'' sp. chez l'homme<ref> {{en}} Ramirez-Farias C {{et al.}} « Effect of inulin on the human gut microbiota: stimulation of Bifidobacterium adolescentis and Faecalibacterium prausnitzii » ''Br J Nutr.'' 2009;101:541–550.</ref>, en diminuant le risque d'obésité diabétique chez la souris<ref> {{en}} Cani P D {{et al.}} « Selective increases of bifidobacteria in gut microflora improve high-fat-diet-induced diabetes in mice through a mechanism associated with endotoxaemia » ''Diabetologia'' 2007;50:2374–2383.</ref>). La réponse du microbiote au changement d'alimentation (suite à l'adjonction d'amidon résistant par exemple) varie selon les individus.


=== Histoire du concept ===
=== Histoire du concept ===
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On sait notamment maintenant que :
On sait notamment maintenant que :
* Pour la [[maladie de Crohn]], le microbiote intestinal des patients atteints montre une modification du rapport Firmicutes/Bacteroidetes, avec un rapport qui s’échelonne de 1/1 à 3/1 au lieu de 10/1 chez le sujet sain. On constate un déficit marqué du groupe Firmicutes, à la fois en nombre d’espèces et en proportion<ref name="Lien1">[http://www.ifn.asso.fr/presse/petit-dej-ifn-04-09-microbiote-doc-%5Bmode-compatibilite%5D.pdf ''En quoi l'Equilibre de notre flore intestinale influe sur notre santé, page 6/10'']</ref> ;
* Pour la [[maladie de Crohn]], le microbiote intestinal des patients atteints montre une modification du rapport Firmicutes/Bacteroidetes, avec un rapport qui s’échelonne de 1/1 à 3/1 au lieu de 10/1 chez le sujet sain. On constate un déficit marqué du groupe Firmicutes, à la fois en nombre d’espèces et en proportion<ref name="Lien1">[http://www.ifn.asso.fr/presse/petit-dej-ifn-04-09-microbiote-doc-%5Bmode-compatibilite%5D.pdf ''En quoi l'Equilibre de notre flore intestinale influe sur notre santé, page 6/10'']</ref> ;
* Pour le [[syndrome métabolique]] une {{laquelle|modification de la composition apparait}}<ref>[http://www.farm.ucl.ac.be/Full-texts-FARM/Cani-2009-1.pdf ''The Role of the Gut Microbiota in Energy Metabolism and Metabolic Syndrom'']</ref> ;
* Pour le [[syndrome métabolique]] une {{laquelle|modification de la composition apparait}}<ref>{{en}}[http://www.farm.ucl.ac.be/Full-texts-FARM/Cani-2009-1.pdf ''The Role of the Gut Microbiota in Energy Metabolism and Metabolic Syndrom'']{{pdf}}</ref> ;
* Pour le syndrome du [[côlon irritable]] une diminution des symptômes est constatée lors de l'administration de probiotiques ou d'un placebo<ref>http://www.em-consulte.com/article/150709/resultatrecherche/49</ref>. Une altération de la microflore est retrouvée chez les patients. Leur biofilm est moins diversifié que celui des sujets sains avec une prédominance de clotridies et d'eubactéries<ref>[http://www.em-consulte.com/showarticlefile/206079/main.pdf T. Piche '''Anomalie pariétale et de la flore au cours du syndrome de l'intestin irritable.''' page6] </ref> ;
* Pour le syndrome du [[côlon irritable]] une diminution des symptômes est constatée lors de l'administration de probiotiques ou d'un placebo<ref>http://www.em-consulte.com/article/150709/resultatrecherche/49</ref>. Une altération de la microflore est retrouvée chez les patients. Leur biofilm est moins diversifié que celui des sujets sains avec une prédominance de clotridies et d'eubactéries<ref>[http://www.em-consulte.com/showarticlefile/206079/main.pdf T. Piche « Anomalie pariétale et de la flore au cours du syndrome de l'intestin irritable » page6] {{pdf}}</ref> ;
* Un individu [[Obésité|obèse]] aurait un déséquilibre de son microbiote avec un ratio Firmicutes/Bacteroidetes de l’ordre de 100/1 (associé à un fort déficit en Bacteroidetes). La perte de poids semble liée à l’augmentation de la proportion de Bacteroidetes avec un changement du ratio qui évolue vers 10/1<ref name="Lien1"/> ;
* Un individu [[Obésité|obèse]] aurait un déséquilibre de son microbiote avec un ratio Firmicutes/Bacteroidetes de l’ordre de 100/1 (associé à un fort déficit en Bacteroidetes). La perte de poids semble liée à l’augmentation de la proportion de Bacteroidetes avec un changement du ratio qui évolue vers 10/1<ref name="Lien1"/> ;
* La durée d'une [[diarrhée]] infectieuse aiguë<ref>Allen SJ, Martinez EG, Gregorio GV, Dans LF, [http://onlinelibrary.wiley.com/o/cochrane/clsysrev/articles/CD003048/frame.html ''Probiotics for treating acute infectious diarrhoea''], Cochrane Database of Systematic Reviews 2010, Issue 11. Art. No.: CD003048. DOI: 10.1002/14651858.CD003048.pub3</ref> ou d'une diarrhée persistante chez l'enfant<ref>Bernaola Aponte G, Bada Mancilla CA, Carreazo Pariasca NY, Rojas Galarza RA, [http://onlinelibrary.wiley.com/o/cochrane/clsysrev/articles/CD007401/frame.html ''Probiotics for treating persistent diarrhoea in children''], Cochrane Database of Systematic Reviews, 2010, Issue 11. Art. No.: CD007401. DOI: 10.1002/14651858.CD007401.pub2</ref> est diminuée par absorption de [[probiotiques]] ;
* La durée d'une [[diarrhée]] infectieuse aiguë<ref> {{en}} Allen SJ, Martinez EG, Gregorio GV, Dans LF, [http://onlinelibrary.wiley.com/o/cochrane/clsysrev/articles/CD003048/frame.html « Probiotics for treating acute infectious diarrhoea »] ''Cochrane Database of Systematic Reviews'' 2010, Issue 11. Art. No.: CD003048. {{DOI|10.1002/14651858.CD003048.pub3}}</ref> ou d'une diarrhée persistante chez l'enfant<ref> {{en}} Bernaola Aponte G, Bada Mancilla CA, Carreazo Pariasca NY, Rojas Galarza RA, [http://onlinelibrary.wiley.com/o/cochrane/clsysrev/articles/CD007401/frame.html « Probiotics for treating persistent diarrhoea in children »] ''Cochrane Database of Systematic Reviews'' 2010, Issue 11. Art. No.: CD007401. {{DOI|10.1002/14651858.CD007401.pub2}}</ref> est diminuée par absorption de [[probiotiques]] ;
* Pathologies intestinales d'origine infectieuse ou inflammatoire: [[gastro-entérite]], [[ulcère gastro-duodénal]]<ref>[http://www.springerlink.com/content/4864576wg376515x/ ''Probiotiques et maladies inflammatoires cryptogénétiques de l’intestin'']</ref> <ref> [http://www.scd.uhp-nancy.fr/docnum/SCDPHA_T_2010_COLARELLI_MAILYS.pdf ''Thèse 2010, Pages 136-150''] </ref> <ref>[http://www.ajcn.org/content/73/6/1152S.full.pdf ''Probiotics: future directions'']</ref> sont étroitement liées à un déséquilibre du microbiote.
* Pathologies intestinales d'origine infectieuse ou inflammatoire: [[gastro-entérite]], [[ulcère gastro-duodénal]]<ref>[http://www.springerlink.com/content/4864576wg376515x/ ''Probiotiques et maladies inflammatoires cryptogénétiques de l’intestin'']</ref>{{,}}<ref>[http://www.scd.uhp-nancy.fr/docnum/SCDPHA_T_2010_COLARELLI_MAILYS.pdf ''Thèse 2010, Pages 136-150''] {{pdf}}</ref>{{,}}<ref>[http://www.ajcn.org/content/73/6/1152S.full.pdf ''Probiotics: future directions''] {{pdf}}</ref> sont étroitement liées à un déséquilibre du microbiote.


Mieux comprendre le fonctionnement des interactions entre le microbiote et son hôte devrait donc permettre d'améliorer les traitements de maladies métaboliques ([[probiotique]]s, [[prébiotique]]s, greffe de microbiote, etc.). L'exploration du [[Métagenome]] (association du [[génome humain]] de l'hôte et de celui, bien plus riche du génome du mircobiote, ou [[microbiome]]) pourrait y contribuer<ref name=Nature2Tremaroli2012/>.
Mieux comprendre le fonctionnement des interactions entre le microbiote et son hôte devrait donc permettre d'améliorer les traitements de maladies métaboliques ([[probiotique]]s, [[prébiotique]]s, greffe de microbiote{{etc}}). L'exploration du [[Métagenome]] (association du [[génome humain]] de l'hôte et de celui, bien plus riche du génome du microbiote, ou [[microbiome]]) pourrait y contribuer<ref name=Nature2Tremaroli2012/>.


== Notes et références ==
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=== Bibliographie ===
=== Bibliographie ===


* {{en}} Craig L. Maynard, Charles O. Elson, Robin D. Hatton et Casey T. Weaver, « Reciprocal interactions of the intestinal microbiota and immune system », ''Nature'', vol. 489, pp. 231-241, 2012. {{PMID|22972296}}
* {{en}} Craig L. Maynard, Charles O. Elson, Robin D. Hatton et Casey T. Weaver, « Reciprocal interactions of the intestinal microbiota and immune system », ''Nature'' 2012, vol. 489, pp. 231-241. {{PMID|22972296}}
* {{en}} Valentina Tremaroli et Fredrik Bäckhed, « Functional interactions between the gut microbiota and host metabolism », ''Nature'', vol. 489, pp. 242-249, 2012. {{PMID|22972297}}
* {{en}} Valentina Tremaroli et Fredrik Bäckhed, « Functional interactions between the gut microbiota and host metabolism », ''Nature'' 2012, vol. 489, pp. 242-249. {{PMID|22972297}}


=== Articles connexes ===
=== Articles connexes ===
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* [[Microbiome]]
* [[Microbiome]]
* [[Métagénomique]]
* [[Métagénomique]]

Version du 27 octobre 2012 à 13:03

Escherichia coli, l'une des espèces bactérienne néanmoins sous dominante du microbiote intestinal

Le microbiote est l'ensemble des micro-organismes (bactéries, levures, champignons, virus) dans une environnement spécifique (appelé microbiome). Par exemple, le microbiote intestinal, anciennement appelé flore intestinale, constitue l'ensemble des microorganismes vivant dans l'intestin (environ 100 000 milliards, soit au moins deux fois plus que le nombre moyen de cellules de l'organisme[1]) . Au même titre que le microbiote intestinal (et plus généralement du microbiote de l'organisme humain), il existe également un microbiote du sol et de l’océan.

C'est sur les villosités intestinales (ici vues en coupe) que se développe une partie du microbiote du tube digestif, permettant la bonne finalisation du processus de digestion
Candida albicans est l'un des nombreux champignons qui peut naturellement se développer dans l'intestin, contribuant à la digestion, mais pathogène s'il se surdéveloppe ou colonise d'autres organes
L'allaitement contribue à assurer un microbiote intestinal équilibré à l'enfant
Toute croissance anormale de cet organisme (Clostridium difficile) est nuisible, voire fatale pour l'hôte

Il s'agit de la population de micro-organismes vivant en accord avec son hôte[2] Le génome du microbiote se dénomme Métagénome. Un animal ou un végétal dont le microbiote est connu est dit gnotobiotique ( gnotos, « connu », biota, « biote »). La science qui les étudie est la gnobiologie[3].

Les techniques de biologie moderne utilisent l'approche métagénomique pour étudier les micro-organismes composant le microbiote dans un environnement donné.

Microbiote intestinal

Aspects quantitatifs

L'intestin d'un humain adulte abrite environ 1 kg de bactéries actives sur une surface développée d'environ 400 m2 (villosités et micro-villosités) [4]. Ce microbiote est constitué d'un nombre de micro-organismes de 10 à 100 fois plus élevé que le nombre de cellules de tout le corps[4]. 90 % de la population totale d'un intestin est constituée d'environ 1 000 espèces de bactéries mais plusieurs milliers d’espèces bactériennes différentes coexistent dans un tube digestif normal[4]. La flore bactérienne est renouvelée en permanence, compensant une perte d'environ cent milliards de bactéries par gramme de selles[4].

Composition

Le microbiote intestinal humain[5] est à ce jour constitué de plus de 500 espèces différentes connues. Chaque personne possède son propre microbiote, mais les chercheurs, dont de l'INRA, ont mis en évidence l'existence d'un petit nombre d'espèces partagé par tous qui constituerait le noyau phylogénétique du microbiote intestinal humain[6]. La diversité d’espèces du microbiote intestinal dominant est spécifique à chaque individu et le nombre d’espèces communes à plusieurs individus est très restreint (ou nul).

Chez l'adulte, le microbiote apparaît très stable au cours du temps (pour un individu donné et sur une période de deux mois à deux ans)[7].

Cinq groupes (ou phylas) de bactéries dominent le microbiote humain[8] :

  1. les Firmicutes (on y trouve notamment les genres : Ruminococcus, Clostridium, Lactobacillus (dont plusieurs souches utilisées comme probiotiques), et des Eubacterium, Faecalibacterium et Roseburia (productrices de butyrate[8]) ;
  2. les Bacteroidetes (dans ce groupe, les Bacteroides, Prevotella et Xylanibacter dégradent une grande variété de complexes de glycanes[8]) ;
  3. les Actinobacteria (Ce groupe inclue les genres Collinsella et Bifidobacterium (dont souches de probiotiques connus[8]) ;
  4. les Proteobacteria (dont communément des Escherichia (de la famille des Enterobacteriaceae et des bactéries du groupe Desulfovibrio (bactéries sulfato-réductrices[8]) ;
  5. les Verrucomicrobia (Ce groupe a été récemment découvert, il inclue les Akkermansia qui semblent spécialisées dans la dégradation des mucus[8]).

S'y ajoute des Archaea (de la famille des Euryarchaeota qui contient des souches de Methanobrevibacter impliquées dans la méthanogenèse intestinale[8]).

D'autres groupes bactériens sont présents, mais en moins représentés (en nombre de bactéries), répartis entre cyanobacteriae, fusobacteriae, Lentisphaerae, Spirochaetes et TM7[8].

Il semble cependant impossible de définir un microbiote intestinal propre à l’espèce humaine par le profil d’espèces dominantes. En Europe, le microbiote diffère selon les régions chez les enfants, mais est plus uniforme chez les adultes[4]. Et après 70 ans, de nouvelles espèces apparaissent dans le microbiote, peut être en raison d'une diminution de l'immunité face aux infections[4].

En 2008, le séquençage du génome du microbiote a été entamé via le Projet « Métagénome » suivi en France par l'INRA[4].

Étude du microbiote

Un des moyens d'en étudier les propriétés et fonction et interactions avec la physiologie et le métabolisme de l'hôte est de coloniser de manière contrôler le tube digestif de rats ou souris axéniques (c'est à dire nés et élevés sans exposition à des microbes vivants). Ces animaux sont colonisés par une flore microbienne sélectionnées d'une ou plusieurs espèces, ou de communautés entières provenant de murins normaux ou malades ou d'humains. Les chercheurs peuvent alors examiner la transmissibilité de phénotypes suupposés physiologiques et/ou pathologiques, et tester le rôle du microbiote pour un ou plusieurs phénotype(s) particulier(s). On a ainsi récemment montré que le microbiote intestinal contrôle ou régule chez les souris ainsi testées la masse osseuse[9], le stockage des graisses corporelles[10], l'angiogenèse intestinale[11],[12] et le bon développement de la réponse immunitaire[13].
On a aussi montré chez les souris axéniques que la flore intestinale semble jouer un rôle majeur dans le métabolisme énergétique avec des liens possibles avec au moins une partie des formes d'obésité.

Le microbiote se montre même capable de réguler l'expression de certains gènes de l'hôte, ce qui pourrait évoquer des relations symbiotiques avancées[14].

Fonctions

Certains auteurs suggèrent de considérer le microbiote en tant qu’entité ou qu’organe métabolique associé à l’organisme de leur porteur ; un organe composé d’un nombre d’organismes pouvant atteindre 1013 individus, dominés par des bactéries anaérobies, et pouvant inclure 500 à environ 1 000 espèces dont le génome collectif est estimé contenir 100 fois plus de gènes que le génome humain.

Cet organe symbiote joue un rôle différent chez le bébé et l'adulte (il faut après la naissance deux mois environ pour que le microbiote soit mature). Il a quatre « fonctions » reconnues :

  1. Fonction physiologique : l'épaisseur et le renouvellement de la muqueuse de l'intestin, la taille des villosités et de la bordure en brosse, l'angiogénèse (développement du réseau sanguin) sont co-régulées par le microbiote ;
  2. Fonction immunitaire : sans microbiote le système immunitaire est moins actif (on dit qu'il n'est pas éduqué), mais le microbiote active aussi certaines maladies inflammatoires et allergiques ;
  3. Fonction de protection (par la diversité biologique des bactéries) ; contre la pullulation d'une seule espèces bactérienne, ou contre la colonisation du tube digestif par d'autres microorganismes qui seraient pathogènes ;
  4. Fonction digestive : des matériaux alimentaires non-digestibles (par exemple : fibres de polysaccharides végétaux) sont dégradés par les microbiote, via la fermentation, et on observe des bioconversions de substances en micro-nutriments assimilables bénéfiques pour la santé[15].

Acquisition et évolution du microbiote

L'enfant naît sans microbiote.
Il l'obtient par contamination lors de l'accouchement, puis de son environnement.
Au plan quantitatif, le nouveau-né se constitue rapidement un microbiote aussi complexe que celui des adultes[4]. Dans certaines sociétés, le grand-père crache traditionnellement dans la bouche de l'enfant nouveau-né[16], gestion qui pourrait contribuer à la construction du microbiote de l'enfant, qui obtient aussi de nombreux microbes du contact avec sa mère.

La composition de l'alimentation de l'enfant et de l'adolescent influe fortement sur celle du microbiote. Ainsi, le microbiote fécal d'enfants africains ruraux ayant une alimentation plus riche en fibres et produits végétaux présente moins de Firmicutes et un taux plus élevé de Bacteroidetes (Prevotella et Xylanibacter surtout[17]) alors que les enfants italiens ayant une alimentation plus sucrée et carnée avaient un microbiote plus riche en Enterobacteriaceae (Shigella et Escherichia surtout[17]). Le microbiote semble dans les deux cas s'être adapté à l'alimentation de l'hôte à leur profit mutuel pour maximiser l'extraction d'énergie (à partir d'une alimentation riche en fibres chez les enfants africains).

Une hypothèse récente et encore discutée est qu'il existerait trois grands entérotypes non-influencés par le sexe, l'âge ou la nationalité[18], chacun dominé par un genre différent - Bacteroides, Prevotella ou Ruminococcus[18]. Les entérotypes dominés par les Bacteroides sont associés à une alimentation riche en graisses animales et/ou en protéines. Ceux dominés par les Prevotella correspondant aux régimes riches en hydrates de carbone[19]. L'enterotype Ruminococcus semble quant à lui moins distinct, et plutôt partiellement fusionné avec l'enterotype Bacteroides[18]. Un changement expérimental de régime alimentaire durant 10 jours ne suffit pas à modifier l'enterotype d'un individual[18], mais une modulation des taux de glucides dans l'alimentation est suivi de changements rapides chez les bactéries du colon. Un apport en inuline ou en prébiotique modifie aussi la flore bactérienne (au profit de Faecalibacterium prausnitzii et Bifidobacterium sp. chez l'homme[20], en diminuant le risque d'obésité diabétique chez la souris[21]). La réponse du microbiote au changement d'alimentation (suite à l'adjonction d'amidon résistant par exemple) varie selon les individus.

Histoire du concept

Après une période hygiéniste ayant mis en avant les aspects dangereux de certains microbes, des approches plus holistiques, notamment développées par l'écologie scientifique ont attiré l'attention des chercheurs sur les symbioses et l'importance de la microflore interne du tube digestif.
Le microbiote a ensuite aussi fait l'objet de plus d'attention à l'extérieur du corps, avec le biofilm de la microflore humaine externe qui constitue l'écosystème normal de la peau, et partiellement du vagin. Il reste pourtant très peu étudié et donc mal connu, et ne fait pas encore l'objet de savoirs partagés de la population occidentale.

Chez l'animal

Les ruminants hébergent une quantité très importante d'espèces symbiotes. La capacité à digérer la cellulose, par exemple chez les ruminants est due à ces hôtes.

Hygiène

Avec l'usage dans l'alimentation de « probiotiques » et ou « prébiotiques », l'idée est de favoriser de bons microbes dans le tube digestif. Si l'hygiène est une nécessité, ne pas respecter ses « bons » hôtes est un danger qui permet l'expression de bien des risques.

Santé et pathologies du microbiote

Il y a, depuis le début des années 2000, un consensus médical sur l'importance du microbiote pour la santé[8]. Les données acquises chez l'animal de laboratoire et chez l'humain laissent penser qu'un microbiote intestinal normal améliore le métabolisme de son hôte en accroissant le rendement énergétique et la qualité de la digestion[8]. Le microbiote intervient aussi en modifiant certains composés dérivés de l'hôte et certaines voies métaboliques, et en améliorant l'immunité[8].

Un déséquilibre du microbiote intestinal peut induire ou permettre le développement de pathologies telles que l'obésité, les maladies cardiovasculaires et certaines syndromes métaboliques (diabète de type 2 notamment), notamment via la production d'inflammasomes[8].
Cependant, la grande complexité de cette communauté microbienne, virale et fongique fait que les liens de cause à effet soit encore mal compris.

On sait notamment maintenant que :

  • Pour la maladie de Crohn, le microbiote intestinal des patients atteints montre une modification du rapport Firmicutes/Bacteroidetes, avec un rapport qui s’échelonne de 1/1 à 3/1 au lieu de 10/1 chez le sujet sain. On constate un déficit marqué du groupe Firmicutes, à la fois en nombre d’espèces et en proportion[22] ;
  • Pour le syndrome métabolique une modification de la composition apparait[Laquelle ?][23] ;
  • Pour le syndrome du côlon irritable une diminution des symptômes est constatée lors de l'administration de probiotiques ou d'un placebo[24]. Une altération de la microflore est retrouvée chez les patients. Leur biofilm est moins diversifié que celui des sujets sains avec une prédominance de clotridies et d'eubactéries[25] ;
  • Un individu obèse aurait un déséquilibre de son microbiote avec un ratio Firmicutes/Bacteroidetes de l’ordre de 100/1 (associé à un fort déficit en Bacteroidetes). La perte de poids semble liée à l’augmentation de la proportion de Bacteroidetes avec un changement du ratio qui évolue vers 10/1[22] ;
  • La durée d'une diarrhée infectieuse aiguë[26] ou d'une diarrhée persistante chez l'enfant[27] est diminuée par absorption de probiotiques ;
  • Pathologies intestinales d'origine infectieuse ou inflammatoire: gastro-entérite, ulcère gastro-duodénal[28],[29],[30] sont étroitement liées à un déséquilibre du microbiote.

Mieux comprendre le fonctionnement des interactions entre le microbiote et son hôte devrait donc permettre d'améliorer les traitements de maladies métaboliques (probiotiques, prébiotiques, greffe de microbiote, etc.). L'exploration du Métagenome (association du génome humain de l'hôte et de celui, bien plus riche du génome du microbiote, ou microbiome) pourrait y contribuer[8].

Notes et références

  1. « Atelier institut pasteur de Lille »
  2. Document Inra (Microbiote, Prébiotiques et probiotiques)
  3. (en)Page sur la gnobiologie (en anglais)
  4. a b c d e f g et h Le microbiote, quelle importance pour la santé humaine (Page du site internet de l'Inra, consultée le 2 juin 2009)
  5. Collège de France, Cours du 28 janv 2010
  6. (en) Tap J et al. « Towards the human intestinal microbiota phylogenetic core » PMID 19601958
  7. http://www.college-de-france.fr/default/EN/all/mic_mal/Cours_du_16_decembre_2010_La_b.htm
  8. a b c d e f g h i j k l et m (en) Valentina Tremaroli et Fredrik Bäckhed, « Functional interactions between the gut microbiota and host metabolism », Nature, vol. 489, pp. 242-249, 2012. PMID 22972297
  9. (en) Sjogren, K et al. « The gut microbiota regulates bone mass in mice » J Bone Miner Res. 27, 1357–1367 (2012)
  10. (en) Bäckhed F et al. « The gut microbiota as an environmental factor that regulates fat storage » Proc Natl Acad Sci USA 101, 15718–15723 (2004).
  11. (en) Reinhardt C et al. « Tissue factor and PAR1 promote microbiota-induced intestinal vascular remodelling » Nature 483, 627–631 (2012).
  12. (en) Stappenbeck, T. S., Hooper, L. V. & Gordon, J. I. « Developmental regulation of intestinal angiogenesis by indigenous microbes via Paneth cells » Proc Natl Acad Sci. USA 2002;99:15451–15455.
  13. (en) Gaboriau-Routhiau V et al. « The key role of segmented filamentous bacteria in the coordinated maturation of gut helper T cell responses » Immunity 2009;31:677–689.
  14. (en) Larsson, E et al. « Analysis of gut microbial regulation of host gene expression along the length of the gut and regulation of gut microbial ecology through MyD88 » Gut 61, 1124–1131 (2011)
  15. (en) Fredrik Bäckhed et al. « The gut microbiota as an environmental factor that regulates fat storage » Proc Natl Acad Sci. USA Nov 2, 2004;101(44):15718–15723. PMID 15505215
  16. Frédéric Aribit, « Breton-Bataille : Autopsie du Cadavre » [PDF], sur La Boîte Alerte, (consulté le )
  17. a et b (en) De Filippo, C et al. « Impact of diet in shaping gut microbiota revealed by a comparative study in children from Europe and rural Africa » Proc Natl Acad Sci. USA 2010;107:14691–14696.
  18. a b c et d (en) Arumugam M et al. « Enterotypes of the human gut microbiome » Nature 2011;473:174–180.
  19. (en) Wu G D et al. « Linking long-term dietary patterns with gut microbial enterotypes » Science 2011;334:105–108.
  20. (en) Ramirez-Farias C et al. « Effect of inulin on the human gut microbiota: stimulation of Bifidobacterium adolescentis and Faecalibacterium prausnitzii » Br J Nutr. 2009;101:541–550.
  21. (en) Cani P D et al. « Selective increases of bifidobacteria in gut microflora improve high-fat-diet-induced diabetes in mice through a mechanism associated with endotoxaemia » Diabetologia 2007;50:2374–2383.
  22. a et b En quoi l'Equilibre de notre flore intestinale influe sur notre santé, page 6/10
  23. (en)The Role of the Gut Microbiota in Energy Metabolism and Metabolic Syndrom[PDF]
  24. http://www.em-consulte.com/article/150709/resultatrecherche/49
  25. T. Piche « Anomalie pariétale et de la flore au cours du syndrome de l'intestin irritable » page6 [PDF]
  26. (en) Allen SJ, Martinez EG, Gregorio GV, Dans LF, « Probiotics for treating acute infectious diarrhoea » Cochrane Database of Systematic Reviews 2010, Issue 11. Art. No.: CD003048. DOI 10.1002/14651858.CD003048.pub3
  27. (en) Bernaola Aponte G, Bada Mancilla CA, Carreazo Pariasca NY, Rojas Galarza RA, « Probiotics for treating persistent diarrhoea in children » Cochrane Database of Systematic Reviews 2010, Issue 11. Art. No.: CD007401. DOI 10.1002/14651858.CD007401.pub2
  28. Probiotiques et maladies inflammatoires cryptogénétiques de l’intestin
  29. Thèse 2010, Pages 136-150 [PDF]
  30. Probiotics: future directions [PDF]

Voir aussi

Bibliographie

  • (en) Craig L. Maynard, Charles O. Elson, Robin D. Hatton et Casey T. Weaver, « Reciprocal interactions of the intestinal microbiota and immune system », Nature 2012, vol. 489, pp. 231-241. PMID 22972296
  • (en) Valentina Tremaroli et Fredrik Bäckhed, « Functional interactions between the gut microbiota and host metabolism », Nature 2012, vol. 489, pp. 242-249. PMID 22972297

Articles connexes

Liens externes