Dame de Brassempouy

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Dame de Brassempouy
Dame de Brassempouy ou Dame à la capuche.
Dame de Brassempouy ou Dame à la capuche.
Type Statuette
Dimensions hauteur : 3,65 cm
largeur : 1,9 cm
profondeur : 2,2 cm
Matériau Ivoire
Fonction ?
Période Paléolithique supérieur
Culture Gravettien (vers 25 000 AP)
Date de découverte 1894
Lieu de découverte Grotte du Pape à Brassempouy (Landes)
Coordonnées 43° 37′ 43″ nord, 0° 42′ 37″ ouest
Conservation Musée d'Archéologie nationale à Saint-Germain-en-Laye, dans la salle Piette
Fiche descriptive M.A.N. no 47 019
Géolocalisation sur la carte : Landes
(Voir situation sur carte : Landes)
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Géolocalisation sur la carte : France
(Voir situation sur carte : France)
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La Dame de Brassempouy, appelée aussi Dame à la Capuche, est une figurine en ivoire représentant une tête humaine, datée du Paléolithique supérieur (Gravettien, 29 à 22 000 ans AP).

Découverte en en France, dans les Landes à Brassempouy par le préhistorien Édouard Piette, cette représentation iconique (de) de la Préhistoire constitue l'une des plus anciennes représentations réalistes d'un visage humain, et sans doute même la plus ancienne connue.

Découverte[modifier | modifier le code]

La commune de Brassempouy est un petit village du département des Landes, sur le territoire duquel se trouvent deux gisements parmi les plus anciennement explorés en France, distants d'une centaine de mètres, la « galerie des Hyènes » et la « grotte du Pape ».

Statuettes féminines de Brassempouy (salle Piette au musée d'Archéologie nationale de Saint-Germain-en-Laye).

Cette dernière est explorée dès par Pierre-Eudoxe Dubalen puis par Joseph de Laporterie et Édouard Piette à partir de . La date des premières fouilles explique le peu d'attention porté initialement à la stratigraphie du site. Néanmoins, Édouard Piette décrit des niveaux attribués au Solutréen supérieur et moyen puis, à la base, une couche pour laquelle il proposa le qualificatif d'« éburnéen » en raison de l'abondance des fragments d'ivoire[1]. C'est dans ces niveaux, aujourd'hui rattachés au Gravettien, qu'il recueille plusieurs fragments de statuettes féminines ou des figurines comme la « Dame à la Capuche » dès . Il en fait don au musée des Antiquités nationales de Saint-Germain-en-Laye en .

Édouard Piette rapproche ces statuettes des représentations animales du Magdalénien des Pyrénées ou des figures de l'Égypte antique (notamment la perruque). Frappé de cet aspect égyptien, il demande l'opinion de Gaston Maspero qui élude la question. Saisi également par la beauté de la Dame de Brassempouy, il se demande aussi s'il ne s'agit pas d'un faux mais se convainc rapidement de son authenticité, si bien qu'il publie les découvertes de ces Vénus dans différentes revues dès [2]. Piette inaugure la tradition des naturalistes, ethnographes et préhistoriens du XIXe siècle consistant, avec leur lecture évolutionniste et racialiste, à qualifier les figures féminines du paléolithique de vénus stéatopyges, en référence à Saartjie Baartman, la prétendue « Vénus hottentote »[3].

Description[modifier | modifier le code]

La Dame de Brassempouy a été taillée dans de l'ivoire de mammouth. Elle est haute de 3,65 cm, longue de 2,2 cm et large de 1,9 cm. « Contrairement aux autres représentations féminines sculptées du Gravettien connues sous l'appellation impropre de « vénus », qui ont souvent une tête très schématique, la dame de Brassempouy, qui avait peut-être des fonctions religieuses et symboliques analogues, se distingue par son visage exceptionnellement défini, grâce à la maîtrise par le sculpteur de différentes techniques (incision, perforation, raclage, polissage) »[4]. Bien que les yeux soient à peine visibles (yeux enfoncés en amande à la pupille finement gravée, en particulier celle de droite, et qui semblent dérober le regard) et la bouche absente, le large visage de forme subtriangulaire, aux traits fins bien dessinés, le front bien net, les pommettes hautes, les arcades sourcilières bien marquées se raccordant à un nez fin et rectiligne, le menton menu mais saillant surmontant un cou gracile, le quadrillage de la parure de tête, témoignent de la virtuosité des artistes du Paléolithique supérieur[5].

Une fissure verticale sur le côté droit du visage est liée à la structure du morceau d'ivoire utilisé. Sur la tête, un quadrillage formé d'incisions perpendiculaires a été interprété comme une perruque, une capuche, une résille ou plus simplement une figuration de la chevelure (tressée). Son visage porte des stries ou scarifications évoquant des tatouages ou un maquillage[6]. Elle est appelée « dame », cependant, rien ne prouve que ce ne puisse pas être la représentation d'un visage d'homme[réf. nécessaire].

L'étude de la fracture de son cou suggère qu'elle ne résulte pas d'une cassure, ce qui laisse penser que cette tête n'a jamais été rattachée à un corps similaire à celui des autres statuettes[7].

Datation[modifier | modifier le code]

Même si sa découverte est intervenue trop tôt pour que son contexte soit étudié avec toute l’attention qu’il méritait, il ne fait guère de doute que la Dame de Brassempouy était associée à une industrie du Paléolithique supérieur, le Gravettien (–29 / −22 000 BP) et sans doute plus précisément le Gravettien moyen à burin de Noailles (–26 / −24 000 BP).

Elle est plus ou moins contemporaine des autres « Vénus » préhistoriques (Lespugue, Dolni Vestonice, Willendorfetc.) mais s'en démarque nettement par le caractère réaliste de la représentation, même si cette dernière ne figure sûrement pas une femme en particulier, mais plutôt une image symbolique de la femme[7].

Postérité[modifier | modifier le code]

Le quadrillage sur la tête et le regard à peine visibles gomment toute expressivité au visage, si bien que cette figurine s'est prêtée aux projections de l'esprit et a donné lieu à une pluralité d'interprétations possibles. Ce visage qui est parmi les premiers messages humains des peuples paléolithiques, est ainsi devenu une représentation iconique de la Préhistoire[7] alors qu'il était à l'époque de son élaboration probablement subversif car il n'a pas été retenu comme un canon de la beauté par les artistes du Gravettien et des époques ultérieures[8].

Exposition[modifier | modifier le code]

Agrandissement réalisé par Roselyne Conil, visible sur le toit de la « Maison de la Dame ».

La Dame de Brassempouy est conservée au musée d'Archéologie nationale, à Saint-Germain-en-Laye (inventaire M.A.N. no 47 019). Elle ne fait pas partie de l’exposition permanente mais est désormais visible[9] dans la salle Piette, ouverte au public en .

À Brassempouy, se trouvent différents objets découverts au cours des fouilles menées sur le site de la grotte du Pape. Ces pièces sont présentées à la Maison de la Dame, un espace muséographique consacré au site archéologique de Brassempouy et à la collection de moulages de statuettes paléolithiques offerte au musée par Henri Delporte. Cette collection regroupe des copies des neuf statuettes de Brassempouy mais aussi de la Vénus de Lespugue, de la Vénus de Willendorf ou encore des figurines de Malt'a, Grimaldi, Dolní Věstonice

Philatélie[modifier | modifier le code]

La Dame de Brassempouy a fait l'objet de l'émission d'un timbre français le , sous le nom La Vénus de Brassempouy. Elle est représentée de profil vers la gauche, en sépia et bistre, sa valeur faciale est de 2 francs[10],[11]. Elle fut reproduite par le dessinateur de timbres Georges Bétemps. Deux cachets premier jour furent émis ce jour-là, l'un à Brassempouy et l'autre à Saint-Germain-en-Laye. Ils sont illustrés du même visuel que le timbre. Ce visuel a été repris le pour le centenaire de l'invention dans un cachet temporaire à Brassempouy.

La République du Mali a émis en un timbre de 15 francs CFA représentant la Dame de Brassempouy de trois quarts[12].

Il existe en outre trois flammes d'oblitération :

  • deux à Amou, chef-lieu de canton de Brassempouy ;
    • une émise en , illustrée de la Dame à la capuche ;
    • une émise en pour le centenaire de l'invention, non illustrée ;
  • une à Liart émise le , illustrée de la Dame à la capuche et de la tête d'Édouard Piette.

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Édouard Piette, L'époque éburnéenne et les races humaines de la période glyptique, Saint-Quentin, Imp. Charles Poette, , 27 p. (lire en ligne).
  2. White 2006.
  3. Claudine Cohen, Femmes de la préhistoire, Belin, , p. 47.
  4. Marc Azéma, Laurent Brasier, Le beau livre de la préhistoire. De Toumaï à Lascaux 4, Dunod, , p. 166.
  5. Delporte 1993, p. 27.
  6. Michèle Bimbenet-Privat, exposition « Le bain et le miroir », Musée national de la Renaissance, château d'Écouen, 2009.
  7. a b et c François Bon, « Pourquoi faire l'histoire de la dame à la capuche ? », sur lhistoire.fr, .
  8. François Bon, « La dame à la capuche, premier visage de la préhistoire », magazine Faire l'histoire, 2022, Arte, 13 min 30 s.
  9. calendrier des visites, sur le site du musée d'Archéologie nationale.
  10. no 1868 du catalogue Yvert et Tellier, tome 1.
  11. Image.
  12. no 642 du catalogue Yvert et Tellier, tome 2, 3e partie.

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

Documents scientifiques

Œuvres artistiques

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]

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