Pont de San Juanico

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Pont de San Juanico
Vue aérienne du pont.
Vue aérienne du pont.
Géographie
Pays Drapeau des Philippines Philippines
Province Leyte
Province Samar
Coordonnées géographiques 11° 18′ 10″ N, 124° 58′ 19″ E
Fonction
Franchit Détroit de San Juanico
Fonction Trafic automobile, cycliste et piétonnier
Caractéristiques techniques
Longueur 2 160 m
Matériau(x) Acier et béton
Construction
Construction 1969 à 1973
Inauguration
Concepteur Construction and Development Corporation of the Philippines

Carte

Le pont de San Juanico (Tulay ng San Juanico en tagalog, Tulay han San Juanico en waray) enjambe le détroit de San Juanico pour relier les îles de Samar et Leyte aux Philippines. Il fait partie de l'autoroute transphilippine.

Dans sa partie la plus longue, le pont prend la forme d'un viaduc constitué de poutres d'acier reposant sur des piliers en béton armé, et sa travée principale en treillis a une forme d'arche. Construit sous le régime autoritaire du président Ferdinand Marcos grâce à des prêts de l'Aide publique au développement japonaise, il a une longueur totale de 2,16 kilomètres, ce qui en fait le deuxième plus long pont enjambant une étendue d'eau de mer aux Philippines après le pont Cebu-Cordova.

Il s'agissait de l'un des grands projets de Marcos financés par des prêts étrangers pendant la période précédant l'élection présidentielle de 1969. Achevé quatre ans plus tard, il a été inauguré le à l'occasion de l'anniversaire d'Imelda Marcos. Dès son achèvement, les économistes et les ingénieurs des travaux publics ont dénoncé le projet comme inutile, car son trafic quotidien moyen était trop faible pour justifier le coût de sa construction. Après la fin du régime de Marcos, l'activité économique à Samar et Leyte s'est finalement suffisamment développée pour justifier l'utilité du pont, et il est devenu une attraction touristique emblématique.

Histoire[modifier | modifier le code]

Développement[modifier | modifier le code]

Le pont, tout comme le Centre culturel des Philippines, faisait partie d'un vaste ensemble de grandes infrastructures lancées par Ferdinand Marcos pendant la campagne électorale pour les présidentielles de 1969[1]. Ces projets financés par des prêts étrangers devaient être pour lui des vitrines afin de vanter les « réussites » de son administration[1].

Cependant, à l'époque où le projet a été conçu, il n'y avait pas encore beaucoup de trafic entre les îles de Leyte et de Samar, dont l'économie était relativement peu développée. Par conséquent, il n'y avait pas de réel besoin d'un projet aussi coûteux, auquel il fallait rajouter les intérêt du prêt[2].

Le projet trouve son origine dans un premier prêt de 25 millions de dollars de la Japan bank for international cooperation destiné à l'achat d'équipements pour le développement d'autoroutes. L'administration de Marcos a étendu cet accord pour inclure la construction du pont de San Juanico, ainsi que l'achat de rouliers[3]. Le coût de la construction du pont s'élevait à 22 millions de dollars américains (environ 154 millions de pesos dans les années 1970)[4], financés par des prêts d'aide publique au développement de l'Agence japonaise de coopération technique à l'étranger (OTCA), prédécesseur de l'actuelle Agence japonaise de coopération internationale (JICA)[2],[3]. Il s'agissait de la première aide publique au développement accordée par le Japon aux Philippines par l'intermédiaire de la JICA[5].

Par l'intermédiaire du ministère des transports, le gouvernement philippin a confié la construction du pont à la Construction and Development Corporation of the Philippines (CDCP, aujourd'hui la Philippine National Construction Corporation)[6], une société fondée par Rodolfo Cuenca, proche collaborateur de Marcos [7],[8].

Construction[modifier | modifier le code]

Partie principale du pont en 2022.

La construction du pont a commencé pendant la campagne présidentielle de 1969. Il a finalement été achevé quatre ans plus tard, en 1973, et a été inauguré le 2 juillet, à l'occasion de l'anniversaire d'Imelda Marcos[9].

La conception du pont reflétait l'esthétique d'autres projets d'infrastructure associés aux Marcos[7], décrit par l'historien de l'architecture Gerard Lico comme « une obsession et une compulsion à construire des édifices comme marque de la grandeur »[10].

Après la construction[modifier | modifier le code]

Selon l'ancien directeur adjoint de l'Autorité nationale pour l'économie et le développement, Ruperto Alonzo, le projet était initialement un éléphant blanc, c'est-à-dire un bien inutilement coûteux, car son trafic quotidien moyen était trop faible pour justifier le coût de sa construction[2].

Après la fin du régime de Marcos, l'activité économique à Samar et Leyte s'est finalement sufisamment développée pour justifier l'utilité du pont, et il est devenu une attraction touristique emblématique[7].

Le pont a été légèrement endommagé par le typhon Haiyan, connu localement sous le nom de supertyphon Yolanda, en novembre 2013[11] , mais il a été rapidement réparé et rouvert dans le mois[12].

Le pont en 2022 avec ses illuminations.

La gouverneure de Samar, Sharee Ann Tan, a proposé en 2018 un projet d'installation de lumières LED sur le pont, avec des effets d'éclairage programmés pour certaines occasions, afin de stimuler le tourisme entre les îles de Leyte et de Samar. Le projet de 80 millions de pesos a été approuvé par l'Autorité des infrastructures et zones d'activités touristiques en janvier 2018[13]. Après des retards[13], [14],[15], le début a commencé le 26 juillet 2019 et l'inauguration de l'éclairage a eu lieu le 20 octobre 2022 [16].

Caractéristiques[modifier | modifier le code]

Partie à virages.

Le pont de San Juanico relie les îles de Leyte et de Samar, de la ville de Tacloban à la ville de Santa Rita. Il traverse le détroit de San Juanico[4]. Il s'agit du deuxième plus long pont enjambant une étendue d'eau de mer aux Philippines après le pont Cebu-Cordova[17], avec une longueur totale de 2,16 km[18]. Il comporte 43 travées en acier, la travée principale mesurant 192 m[6].

Les butées du pont sont reforcées par des barres en acier en forme de H, tandis que les piles cylindriques en béton Prepakt sont cises sur la roche[6].

Le pont fait partie de l'autoroute transphilippine (communément appelée autoroute Maharlika), un réseau de routes, de ponts et de voies maritimes qui relient les îles de Luçon, Samar, Leyte et Mindanao. L'autoroute a été ébauchée en 1965 et construite sous l'administration de Marcos pour servir de colonne vertébrale aux transports dans le pays [19].

Importance énonomique[modifier | modifier le code]

En 2018, le pont de San Juanico est considéré par le gouvernement comme l'une des principales destinations touristiques de Tacloban[20]. Le pont joue également un rôle important pour le tourisme et l'économie des îles de Samar et de Leyte en les reliant[9].

Accidents[modifier | modifier le code]

Le 22 septembre 2002, une barge a percuté une des piles en béton du pont, nécessitant des répérations de 25 millions de pesos. Puis, en octobre, une partie du pont a glissé d'au moins 10 centimètres après qu'un support métallique de sa fondation en béton a cédé, ce qui a été attribué par l'ingénieur Jimmy Chan à la fatigue des matériaux[21].

Dans la culture populaire[modifier | modifier le code]

L'acteur et cascadeur philippin Dante Varona a sauté du pont San Juanico sans harnais dans le film Hari ng Stunt (1981)[22]. La nouvelle The Bridge d'Yvette Tan est basée sur l'une des légendes urbaines entourant le pont de San Juanico[23].

Un certain nombre de légendes urbaines sont associées à la construction du pont. La plus populaire concerne une femme qui supervise le projet et qui, suivant les conseils d'une diseuse de bonne aventure, ordonne aux ouvriers de mélanger du sang d'enfant aux fondations du pont. Une fée des rivières maudit la femme et lui fait pousser des écailles nauséabondes sur les jambes[24],[25].

Pendant la loi martiale sous le régime autoritaire de Ferdinand Marcos, le personnel militaire pratiquait une méthode de torture particulière appelée « le pont de San Juanico »[26] : une personne est battue alors que sa tête et ses pieds sont allongés sur des lits séparés et que son corps est suspendu comme pour former un pont[27],[28].

Références[modifier | modifier le code]

(en) Cet article est partiellement ou en totalité issu de l’article de Wikipédia en anglais intitulé « San Juanico Bridge » (voir la liste des auteurs).
  1. a et b Ricardo Manapat, Some are smarter than others: the history of Marcos' crony capitalism, Aletheia Publ, (ISBN 978-971-91287-0-0)
  2. a b et c « 7 in 10 ODA projects fail to deliver touted benefits « Philippine Center for Investigative Journalism », sur web.archive.org, (consulté le )
  3. a et b « [ASEAN Dialogues] Former Philippines Premier Virata Looks Back on Decades of Working with Japan | News | News & Features | JICA », sur web.archive.org, (consulté le )
  4. a et b (en) Ninfa Iluminada B. Quirante, « San Juanico Bridge, a symbol of love », sur pia.gov.ph, Agence philippine de l'information, mars (consulté le )
  5. (en) « 60 Years of japan-Philippines Cooperation », sur jica.go.jp/, Agence japonaise de coopération internationale (consulté le )
  6. a b et c « PNCC Projects: San Juanico Bridge », sur www.pncc.ph (consulté le )
  7. a b et c (en) « Edifice Complex: Building on the Backs of the Filipino People », Martial Law Museum (consulté le )
  8. (en) « It Takes a Village to Loot a Nation: Cronyism and Corruption », Martial Law Museum (consulté le )
  9. a et b « San Juanico, Eastern Visayas’ iconic bridge, to be lit up by end of 2018 | Philippine Information Agency », sur web.archive.org, (consulté le )
  10. « Book Review: Edifice Complex: Power, Myth, and the Marcos State Architecture by Gerard Lico : Philippine Art, Culture and Antiquities », sur artesdelasfilipinas.com (consulté le )
  11. (en) Alex Fensome, « Filipinos' nervous wait as toll soars », sur Stuff, (consulté le )
  12. (en-US) « San Juanico Bridge: Bridging the gap », sur Daily Tribune, (consulté le )
  13. a et b (en) Sarwell Meniano, « Detailed technical review delays San Juanico Bridge lighting project », sur pia.gov.ph, éditeur=Agence philippine de l'information, (consulté le )
  14. (en) Roel Amazona, « San Juanico Bridge lighting project completion moved to December », sur pia.gov.ph, éditeur=Agence philippine de l'information, (consulté le )
  15. (en) Sarwell Meniano, « San Juanico Bridge rehab delays lighting project », sur pia.gov.ph, éditeur=Agence philippine de l'information, (consulté le )
  16. (en-US) Ronald Reyes, « San Juanico gets glow up with lights, sound project », sur Manila Standard, (consulté le )
  17. « Go Across the San Juanico Bridge », sur Vigattin Tourism (ARTICLES) - Philippines (consulté le )
  18. (en-US) Arch Gloryrose Dy-Metilla, « San Juanico Bridge History of the Philippines' Most Iconic Structures », sur Filipina Architect, (consulté le )
  19. (en-US) Michael Bueza, « AH26: What does this road sign mean? », sur RAPPLER, (consulté le )
  20. (en) « Tacloban: A Fast Rising Highly Urbanized City », Regional Division VIII of the national Statistical Coordination Board (NSCB), (consulté le )
  21. (en) Miriam Garcia Desacada et Jose Aravilla, « Metal support in San Juanico’s pier gives way », sur The Philippine Star (consulté le )
  22. (en-US) Web Master, « They are not stuntmen like Dante Varona », sur Leyte Samar Daily News, (consulté le )
  23. « The Spy in the Sandwich » (consulté le )
  24. « Urban Legend: The Bloody Secret of the Longest Bridge in the Philippines Choose Philippines. Find. Discover. Share. », sur web.archive.org, (consulté le )
  25. (en) Clarisse Yvette Vurgino, « The tale of the ‘padugo’ », sur The Manila Times, (consulté le )
  26. (en-US) Jeri Laber, « Philippines Torture », The New York Times,‎ (ISSN 0362-4331, lire en ligne, consulté le )
  27. (en) Kate Pedroso, « ‘San Juanico Bridge,’ other tortures detailed », sur Philippine Daily Inquirer, (consulté le )
  28. (en-US) Don Kevin Hapal, « Worse than death: Torture methods during martial law », sur Rappler, (consulté le )

Voir aussi[modifier | modifier le code]