Alain Estève

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Alain Estève
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Alain Estève en 1971.
Fiche d'identité
Nom complet Alphonse Alain Georges Estève
Naissance
Castelnaudary, Aude (France)
Décès (à 77 ans)
Béziers, Hérault (France)
Taille 2,02 m (6 8)
Surnom La Bête de Béziers, Le Grand, La tour Eiffel, Le Dindon, La Grande.
Poste Deuxième ligne
Troisième ligne centre
Troisième ligne aile
Carrière en junior
PériodeÉquipe 
1963-1965 Castelnaudary
Carrière en senior
PériodeÉquipeM (Pts)a
1965-1967
1967-1982
RC Narbonne
AS Béziers
Carrière en équipe nationale
PériodeÉquipeM (Pts)b
1971-1975 France 20 (0)

a Compétitions nationales et continentales officielles uniquement.
b Matchs officiels uniquement.

Alain Estève, né le à Castelnaudary (Aude) et mort le à Béziers (Hérault), est un joueur international français de rugby à XV qui jouait principalement au poste de deuxième ligne.

Il commence sa carrière au RC Narbonne en 1965, puis rejoint l'AS Béziers deux ans plus tard en 1967, avec qui il remporte huit fois le Championnat de France et trois fois le Challenge Yves du Manoir, avant de terminer sa carrière en 1982. En parallèle, il est international français de 1971 à 1975, obtenant vingt sélections.

Biographie[modifier | modifier le code]

Jeunesse et formation[modifier | modifier le code]

Alain Estève naît le à Castelnaudary, dans l'Aude, dans une famille très pauvre d'ouvriers agricoles[1]. Il est le deuxième d'une fratrie de six. À l'âge de 9 ans, il est placé en maison de correction et en sort à 17 ans. Puis, il commence le rugby à XV en junior, dans le club de sa ville natale[2]. Il dira plus tard que cela lui a « sauvé la vie »[3].

Fils d'ouvriers agricoles de Pexiora tout proche, Alain Estève devient ouvrier maçon, puis chauffeur municipal dans sa jeunesse. Un temps, il envisage de gérer un élevage de chevaux[réf. nécessaire].

Carrière en club[modifier | modifier le code]

Débuts à Narbonne (1965-1970)[modifier | modifier le code]

Alors qu'il joue à Castelnaudary, Alain Estève est repéré par hasard dans un train par Walter Spanghero[3], notamment grâce à sa carrure (2,02 m pour environ 120 kg), qui le fait rejoindre le RC Narbonne. Le , il fait ses débuts au plus haut niveau à l'occasion d'un match de Challenge Yves du Manoir contre Brive. Une semaine plus tard, il joue pour la première fois dans le Championnat de France contre le Paris UC. Quelques semaines plus tard, il affronte Toulon, où il impressionne notamment l'international français André Herrero[4].

Après des débuts prometteurs, il entre en conflit avec les frères Spanghero et est mis de côté par ses entraîneurs et son président Bernard Pech de la Clause qui préfèrent faire jouer Laurent, Jean-Marie et Claude Spanghero au poste de deuxième ligne[4].

Face à cette situation il rejoint l'AS Béziers en 1967[4]. Juste avant son arrivée, il est sacré champion de France militaire[3]. Sous les ordres de Raoul Barrière, il devient l'un des hommes de base de l'AS Béziers qui domine le rugby français des années 1970 et pouvait jouer en deuxième et troisième ligne[3],[4].

Domination du rugby français avec Béziers (1970-1982)[modifier | modifier le code]

Quelques saisons après son arrivée dans l'Hérault, son équipe atteint la finale du Championnat de France en 1971 où elle affronte le RC Toulon, après avoir battu Agen en demi-finale. Durant cette rencontre au Parc Lescure de Bordeaux, Alain Estève est suspecté d'avoir blessé aux côtes au bout de trente-six minutes de jeu, André Herrero, l'un des meilleurs joueurs de l'équipe adverse, dans le but de les affaiblir. Les supporters toulonnais scandent alors « Estève assassin! » mais le coupable n'est jusqu'alors pas démasqué, faisant ainsi de ce match l'un des plus mémorables du championnat de France[4],[5]. Finalement, après prolongation Béziers l'emporte, marquant les débuts du « Grand Béziers ». Estève remporte quant à lui son premier bouclier de Brennus et le premier titre de sa carrière[5],[6].

L'année suivante, en 1972, dans une saison sans défaite[7], les Biterrois sont de retour en finale du championnat et font cette fois face à Brive. Estève et Béziers s'imposent 9 à 0 et sont champions de France pour la seconde année consécutive[8],[9]. Cette même année l'AS Béziers remporte le Challenge Yves du Manoir pour la deuxième fois de son histoire en battant l'AS Montferrand 37 à 6 avec un essai d'Estève à la quatrième minute de jeu[10],[11].

Durant la saison 1972-1973, Béziers est éliminé en demi-finale du championnat par l'US Dax[12] et perd la finale du Challenge Yves du Manoir face à Narbonne[13], puis retrouve la finale un an plus tard en 1974 et affronte de nouveau le RC Narbonne. Face à son ancien club au Parc des Princes, Alain Estève est titulaire en troisième ligne avec Olivier Saïsset et Yvan Buonomo. Dans un match serré, les Narbonnais prennent l'avantage grâce à un essai de François Sangalli. Ce dernier finit sonné dans l'en-but après sa réalisation à la suite d'un coup de poing d'Estève tentant de l'arrêter. Puis, en fin de rencontre, les Héraultais repassent devant grâce à un drop d'Henri Cabrol qui offre la victoire et le titre aux siens, privant Walter Spanghero d'un titre de champion de France qu'il n'obtiendra jamais[14],[15].

En 1978, il s'embrouille violemment avec son entraîneur Raoul Barrière et ce dernier demande une suspension de quinze jours à l'encontre d'Estève. Cependant, cette demande est refusé par les dirigeants biterrois qui organisent un vote parmi les joueurs, ces derniers décident de soutenir leur coéquipier plutôt que leur entraîneur. À la suite de cet événement Barrière quitte le club[4].

Carrière internationale[modifier | modifier le code]

Alain Estève est sélectionné à 20 reprises en équipe de France de 1971 à 1975 et reste rapide et adroit malgré une taille plus qu'imposante pour l'époque : 2,02 m pour un poids entre 115 et 124 kg. Il est le premier international français à dépasser les deux mètres[1].

Il connaît sa première cape avec le XV de France le lors d'un match amical face à l'Afrique du Sud[3]. Il est titularisé en deuxième ligne aux côtés de Claude Spanghero, mais les Français sont battus 22-9[16].

L'année suivante, il est dans un premier temps sélectionné avec les Bleus pour le Tournoi des Cinq Nations 1972, durant lequel il joue trois matchs[17]. Il prend ensuite part à la tournée en Australie, puis joue deux rencontres en fin d'année[18].

En 1973, il joue trois matchs du Tournoi des Cinq Nations, remporté à égalité avec les autres participants[18]. En effet, toutes les équipes terminent la compétition avec quatre points; il s'agit d'un événement unique dans l'histoire du tournoi[19]. Il fait également partie de l'équipe de France qui bat la Nouvelle-Zélande cette même année. Les All Blacks viennent conclure leur tournée de trois mois et demi, durant laquelle ils sont invaincus après avoir battu l'Australie, le pays de Galles, l'Écosse notamment. Les Français arrivent avec une équipe affaiblie sans véritable sauteur en touche, Benoît Dauga, Alain Plantefol et Claude Spanghero étant absents. Alain Estève ayant pour rare point faible la touche doit alors prendre ce rôle et faire face à un spécialiste dans le domaine : Peter Whiting. Finalement, il tient très bien son rôle de sauteur et les Français maîtrisent les Néo-Zélandais, s'imposant 13 à 6 et mettant fin à leur invincibilité[20],[21].

Assez mal vu par le président de la Fédération française de rugby, Albert Ferrasse, il est de fait peu sélectionné en équipe nationale[22].

Après carrière[modifier | modifier le code]

En 2004, il est condamné par la justice française pour proxénétisme aggravé : il exploitait dans ses établissements de nuit les services de jeunes femmes d'Europe de l'Est qu'il avait fait venir de Roumanie, Bulgarie et ex-Yougoslavie[23].

Atteint en 2020 d'un double cancer, il meurt le à l'hôpital de Béziers d'une infection pulmonaire[3],[24],[25].

Hommages[modifier | modifier le code]

Il existe un complexe sportif Alain-Estève, 85 chemin vert du Blénois, à Meung-sur-Loire.

Alain Estève est classé, selon un article du quotidien britannique The Times publié en 2006, deuxième des dix joueurs français de rugby « les plus effrayants »[26],[Note 1].

C'est un ami de Bobby Windsor, talonneur de l'équipe du pays de Galles, qui l'a surnommé « La Bête de Béziers ». Il disait à sa femme « Regarde mon visage, mon amour, parce qu’il ne ressemblera pas à ça quand je reviendrai ! »[27],[Note 2]. Venant souvent à son contact proche lors des mêlées, Windsor l'entendait murmurer « Bob-bee, Bob-bee » et son gros poing partait alors en direction de sa mâchoire. Répliquant du tac-au-tac, il le plaquait du mieux qu'il le pouvait, parfois dans la boue, et Estève se relevait ensuite en lui adressant simplement un clin d'œil[26].

Selon Richard Astre, Alain Estève était le meilleur avant du monde des années 1970[28].

Statistiques en équipe nationale[modifier | modifier le code]

Alain Estève compte vingt capes en équipe de France et n'a pas marqué de points. Il a pris part à quatre éditions du Tournoi des Cinq Nations en 1972, 1973, 1974 et 1975[29].

Détails des matchs d'Alain Estève en équipe de France
Année Compétition Matchs Points Essais
1971 Test matchs 1 - -
1972 Cinq Nations 3 - -
Test matchs 3 - -
1973 Cinq Nations 3 - -
Test matchs 1 - -
1974 Cinq Nations 4 - -
Test matchs 3 - -
1975 Cinq Nations 2 - -
Total 20 0 0

Palmarès[modifier | modifier le code]

En club[modifier | modifier le code]

En sélection nationale[modifier | modifier le code]

Notes et références[modifier | modifier le code]

Notes[modifier | modifier le code]

Références[modifier | modifier le code]

  1. a et b Elisabeth Badinier, « L'ancien international et "géant" du rugby biterrois Alain Estève est mort - France Bleu », sur francebleu.fr, (consulté le )
  2. Jean-Luc Gonzalez, « Portait. Mort d'Alain Estève, le dragon du grand Béziers », sur rugbyrama.fr, (consulté le )
  3. a b c d e et f « Ancien deuxième-ligne du quinze de France, Alain Estève est mort », sur L'Équipe, (consulté le )
  4. a b c d e et f Jérôme Prévôt, « Alain Estève, La vie hors norme d'un joueur extraordinaire » Accès payant, sur rugbyrama.fr, (consulté le )
  5. a et b Jean-Luc Gonzalez, « La vérité sur l'affaire Herrero (1/6) : un homme à abattre » Accès libre, sur rugbyrama.fr, (consulté le )
  6. Maxime Rouquié, « Le Grand Béziers remporte le championnat de France en 1971 », sur Le Rugbynistère, (consulté le )
  7. Jérôme Prévôt, « Béziers ou la grande histoire d'une armada invincible » Accès libre, sur rugbyrama.fr, (consulté le )
  8. Richard Escot, « Un jour - une finale : 1972, Béziers décroche un titre charnière », sur L'Équipe, (consulté le )
  9. Jean Lacouture, « Béziers vainqueur de Brive, en finale du championnat de France », lemonde.fr,‎ (lire en ligne Accès payant, consulté le )
  10. « Finales Challenge Yves du Manoir 1972 : AS Béziers - AS Montferrand », sur finalesrugby.fr, (consulté le )
  11. Jean Lacouture, « La finale du Challenge Yves-du-Manoir », lemonde.fr,‎ (lire en ligne Accès payant, consulté le )
  12. Jean Lacouture, « Tarbes et Dax en finale du championnat DAX BAT BÉZIERS 23-3 : Les vainqueurs ont été les plus fous », lemonde.fr,‎ (lire en ligne, consulté le )
  13. Jérôme Prévot, « Carnet noir - Symbole du grand Béziers, international français, Alain Estève nous a quittés », sur rugbyrama.fr, (consulté le )
  14. Clément Mazella, « C'était le 12 mai 1974. Béziers battait Narbonne en finale sur un drop à l'ultime minute », sur actu.fr, (consulté le )
  15. « Béziers 16-14 Narbonne », sur finalesrugby.fr, (consulté le )
  16. « Feuille de match : Afrique du Sud - France 1971 », sur ffr.fr,
  17. « L'équipe de France de Rugby au Tournoi des Cinq Nations 1972 », sur equipe-france.fr (consulté le )
  18. a et b « Carnet noir : Alain Estève nous a quittés », sur ffr.fr, (consulté le )
  19. « 1973 : égalité parfaite au Tournoi des V nations », sur memosport.fr, (consulté le )
  20. « Feuille de match : France - Nouvelle-Zélande 1973 », sur ffr.fr,
  21. Jean-Pierre Oyarsabal, « Les héros du 10 février 73 », sur ladepeche.fr, (consulté le )
  22. « Cette légende du XV de France condamnée pour proxénétisme aggravé », sur www.sports.fr, (consulté le )
  23. Claude Massonnet, « L'ancienne star du rugby écrouée », Le Parisien,‎ (lire en ligne)
  24. Relevé des fichiers de l'Insee
  25. « Avis de décès d'Alain Estève », sur Maison funéraire Le Pech Bleu, (consulté le )
  26. a et b (en) Stephen Jones, « The top 10 frightening Frenchmen », The Times, .
  27. 10 of the biggest brutes of French rugby
  28. Richard Escot, « Richard Astre : «Je n'ai plus touché terre» », sur L'Équipe, (consulté le )
  29. « ESTEVE Alain - XV de France Masculin », sur ffr.fr (consulté le )

Liens externes[modifier | modifier le code]