Plaine de Pierrelaye-Bessancourt

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Vue aérienne de Bessancourt.

La plaine de Pierrelaye-Bessancourt est une plaine agricole de maraichage de 2 000 hectares située dans le département du Val-d'Oise, au Nord-ouest de Paris. Elle représente depuis le début du XXIe siècle un des problèmes sanitaires de l'Île-de-France en raison de sa contamination en éléments et traces métalliques, et a ainsi été intégrée au projet du Grand Paris dans l'optique de créer une zone forestière d'ici 2020.

Histoire de la plaine[modifier | modifier le code]

Cette zone a, durant plus d'un siècle, servi de zone d’épandage pour les eaux usées brutes de la ville de Paris, avant la construction des premières stations d'épuration, et plus particulièrement dans ce cas la station d'épuration Seine AvalAchères) mise en service en 1940. Le but de ces épandages était double, il s'agissait dans un premier temps d'épurer les eaux urbaine tout en apportant des fertilisants à la plaine maraichère, et plus tard de se débarrasser des grands volumes d'eaux que la station d'Achères ne pouvait traiter[1],[2].

Le 28 juillet 1999 une importante contamination de la plaine a amené le ministère de l'emploi et de la solidarité, le ministère de l'agriculture et de la pêche et le ministère de l'aménagement du territoire et de l'environnement à publier un arrêté suspendant la mise sur le marché de culture légumières et de plantes aromatiques[3]. À la suite de cela les terrains agricoles ont été dévolus à différentes autres productions agricoles à destination non alimentaire[4].

Le Siecuep, Syndicat intercommunal pour l'étude d'une charte d'urbanisme et d'environnement sur la plaine, réunit depuis 1999 Bessancourt, Frépillon, Herblay, Méry-sur-Oise, Pierrelaye, Saint-Ouen-l'Aumône, six villes bientôt rejointes par Taverny.

Géographie[modifier | modifier le code]

Cette immense plaine s'inscrit dans un enchaînement de territoires urbanisés et détonne dans le paysage par l'interruption de cette urbanisation. Elle occupe une portion des plateaux entourés par la Seine et l'Oise et bordés au nord-est par la butte de Montmorency.

La plaine est traversée par deux ruisseaux affluents de l'Oise : le Ru du Liesse et le ru du fond des Aulnes au nord-ouest[réf. nécessaire].

Enfin la plaine se découpe en deux terrasses successives de part et d'autre d'un bois. L'une autour de la ville Pierrelaye atteint 60m d'altitude, la seconde borde la commune de Bessancourt à une altitude de 75 m environ[5].

D'un point de vue administratif, la plaine s'étend sur sept communes : Bessancourt, Frépillon, Herblay, Méry-sur-Oise, Pierrelaye, Saint-Ouen-l'Aumône et Taverny[6].

Problématiques de la Plaine de Pierrelaye[modifier | modifier le code]

Contamination[modifier | modifier le code]

La zone d'épandage de Pierrelaye-Bessancourt a servi pendant plus d'un siècle de zone de réception des eaux usées brutes de la ville de Paris, sur plus de 1200 hectares[7]. Une étude de 2001 estime que les sols épandus auraient pu accumuler 8.1 kg.ha-1 de cadmium et 1621 kg.ha-1 de zinc.

En 2000, les produits maraîchers sont interdits à l'alimentation humaine[8]. Cependant, une vingtaine d'agriculteurs cultive toujours, sur 600 ha, du colza, du blé et du maïs, destinés à l'alimentation animale[9].

Études[modifier | modifier le code]

Des études de la plaine de Pierrelaye et de sa contamination sont menées depuis les années 2000 en collaboration entre l'INRA de Versailles, l'Université Pierre et Marie Curie, l'institut Mines Paris-Tech, ainsi que l'INRA d'Orléans et le CEA.

En 2004 le bilan de l'étude EPANDAGRI menée par l'INRA de Versailles-Grignon concluait à une forte accumulation en matière organiques et en micro polluants métalliques (plomb, zinc, cuivre et cadmium principalement) ainsi que le caractère hydromorphique des sols. Une autre conclusion de cette étude mettait en avant le stockage des contaminants en profondeur dans les sols de la plaine[4].

En 2010, une étude menée sur 8 ans par Mines Paris-Tech porte sur l'évaluation du risque de mobilité des métaux, passant par une compréhension du fonctionnement des sols de la plaine. Cette étude a révélé qu'un arrêt de l'irrigation de la plaine aurait pour conséquence une déstabilisation des phases porteuses des métaux dans les sols ce qui conduirait à une libération des métaux. Cette étude met également en avant la présence d'antibiotique dans les sols de la plaine, pour finir sur une mise en garde concernant la remobilisation des éléments contaminants à plus ou moins longue échéance, notamment pouvant atteindre les eaux de surface ou souterraines.

En 2018, une étude portant sur le cadmium, le cuivre, le plomb et le zinc conclut que « La présence de plomb dans les sols superficiels a été mise en évidence et ce à des teneurs supérieures aux valeurs repères », exposant à des risques de saturnisme. Cependant, aucun cas n'a encore été signalé, et le taux de plombémie n'est pas plus élevée qu'ailleurs[10].

Problèmes sociaux[modifier | modifier le code]

Les plus gros problèmes liés à la plaine n'étant ni habitable, ni exploitable, sont les dépôts sauvages ainsi que la présence de gens du voyage dans des conditions d'insalubrité et occupant les lieux illégalement, ce qui est à l'origine de nombreuses tensions locales[11].

Risques pour les gens du voyage[modifier | modifier le code]

Malgré les interdictions en cours liées à la contamination de la plaine, une population de gens du voyage est présente sur le territoire depuis plus d'un siècle, cependant illégalement installée, pour un nombre estimé entre 1300 et 1600 caravanes actuellement stationnées en permanence [12].

Réhabilitation de la plaine : projet du Grand Paris[modifier | modifier le code]

À la suite de ces études et du projet du Grand Paris, un projet d’aménagement de la plaine a vu le jour géré par le SMAPP (syndicat mixte de la plaine de Pierrelaye-Bessancourt). Ce projet consiste à l'implantation d'une forêt.

Ainsi, le 23 mars 2017, le contrat d'intérêt national (CIN) des Franges de la plaine de Pierrelaye a été signé[13] avec pour objectifs de créer un espace naturel grâce à l'implantation d'une forêt mais aussi des projets d'aménagement via l’accueil d'habitations en lisière de forêt au nombre de 8000 à 10 000 logements entre 2015 et 2030.

Un million d'arbres devraient être plantés sur une surface de 1350 hectares répartis sur les sept communes allant de Méry-sur-Oise à Herblay ainsi que Saint-Ouen-l'Aumône. Ceci sera mis en place en utilisant les 370 ha de forêt déjà existants sur la plaine et la plantation de 600 ha de forêt, sur une dizaine d'années. Ce projet comprend aussi 90 km de chemins, de clairières, d'aires de stationnement pour cet espace de loisir[14]. La concrétisation du projet passant par une phase d'enquête publique de trois mois démarrée en janvier 2018. Ce projet prévoit l'implantation d'un million d'arbre pour 2020 et la maturité de la forêt d'ici 2050 sur 1300 hectares situés sur la plaine pour un coût estimé à 85 M€.

Comme les aiguilles des conifères risquent d'acidifier les sols, seuls des feuillus seront plantés. Parmi les essences plantées, on trouve le tilleul, le chêne, le marronnier, le charme, le merisier ou le hêtre[6],[15]. 29 ou 30 espèces d'arbres différentes doivent être plantées[16], en plus de 18 espèces d'arbustes. L'ONF souhaite une forêt diversifiée « adaptée à son environnement local » et « résistante dans un contexte de changement climatique », qui prenne en compte la composition des sols et les interactions entre essences[17].

Cependant, la plaine et ses 2 000 hectares compte 6 000 parcelles appartenant à 55 % à 4 000 propriétaires privés[9]. Certaines parcelles aux propriétaires non identifiés entraine un long et fastidieux travail de recherche des propriétaires ou de leurs descendant afin de procéder soit à une vente à l'amiable soit à une expropriation. Les propriétaires des parcelles seront indemnisés à la suite de la déclaration d'utilité publique (DUP). L'enquête d'utilité publique a lieu entre le et le [6]. Le commissaire rend un avis favorable sans aucune réserve au début de novembre, dernière étape avant la DUP. Celle-ci doit être ensuite signée par le préfet du Val-d'Oise[18]. Le premier arbre est planté symboliquement le [15]. À la suite de la sécheresse de l'été 2020, les deux tiers des arbres ont survécu[19].

Les propriétaires, menacés d'expropriation à la suite de l'arrêté préfectoral de déclaration d'utilité publique, ont choisi de faire dons de leurs terres aux personnes de la communauté du voyage y logeant, qui en deviennent ainsi propriétaires légaux et construisent des habitations en dur, interdites suivant le code de l'urbanisme. Un amendement proposé par Alain Richard a été voté permettant à la Safer d’empêcher ces donations[14],[11].

Quant aux agriculteurs encore présents sur la plaine, cultivant des céréales pour l'alimentation animale, ils ne bénéficient plus depuis 2017 de la fourniture en eau du Siaap, ni des aides financières de la région[20].

Le projet ne prévoit pas la dépollution les métaux lourds resteront donc présents, mais du chaulage tous les dix ans, afin de diminuer l'acidité des sols[8].

Des espaces de stationnement, ainsi que 90 km de chemins dans la forêt sont prévus, afin de permettre aux résidents des zones urbanisées alentour de profiter de l'aménagement[17].

Ce projet comprend aussi des solutions de relogement des gens du voyage installés sur la zone.[évasif]

Financement du projet[modifier | modifier le code]

Le projet, de plus de 80 millions d'euros ne sera pas financé par l'État, mais en partie par la ville de Paris.

Une partie du financement provient du fait que les gérants de la plaine devraient accepter sur les terrains les remblais issus de la construction du futur métro du Grand Paris[21].

Références[modifier | modifier le code]

  1. (en) Lamy. I, Van Oort. F, Dère. C et Baize. D, « Use of major and trace element correlations to assess metal migration in sandy luvisol irrigated with wastewater. », European Journal of Soil Science,‎ , p. 10 (lire en ligne)
  2. Baize. D, « Un facteur majeur de la pédogenèse après décarbonatation dans le cas de formations superficielles calcaires redistribuées au quaternaire : La nature des résidus non carbonatés », Étude et gestion des sols,‎ , p. 173-192 (20 pages) (lire en ligne)
  3. Arrêté du 28 juillet 1999 portant suspension de la mise sur le marché de cultures légumières et de plantes aromatiques. JORF n°174 du 30 juillet 1999; page 11402.
  4. a et b Thiry. M., Van Oort. F., Lamy.I., Thiesson.J., Tabbagh. A., Tamtam. F. 2010. Étude d'évaluation du risque de la mobilité des métaux dans l'agrosystème contaminé de Pierrelaye-Bessancourt: prospection du site, fonctionnement des sols et tests de lixiviation.hal-00647539 https://hal-mines-paristech.archives-ouvertes.fr/hal-00647539
  5. « PLAINES DE PIERRELAYE-BESSANCOURT Unité entre cultures, infrastructures et un fort développement urbain », sur s-pass.org (consulté le ).
  6. a b et c Florence Renard-Gourdon, « Le projet de forêt sur la plaine de Pierrelaye se concrétise », sur lesechos.fr, (consulté le ).
  7. Garance Feitama, « Une forêt d’un million d’arbres va être créée dans le Val-d’Oise », Le Monde,‎ (lire en ligne)
  8. a et b Isabelle Hennebelle, « Une nouvelle forêt aux portes de Paris », sur lexpress.fr, (consulté le ).
  9. a et b Daniel Chollet, « Pierrelaye-Bessancourt : une forêt va pousser sur la plaine polluée », sur actu.fr, (consulté le ).
  10. Laurence Allezy et Corentin Lesueur, « Pierrelaye-Bessancourt : la pollution au plomb de la plaine atteint des niveaux «inacceptables» », sur leparisien.fr, (consulté le ).
  11. a et b Chollet Daniel, « Roms, gens du voyage, dépôts sauvages : la plaine de Pierrelaye-Bessancourt, ce territoire devenu «incontrôlable» », La gazette du Val d'Oise,‎ (lire en ligne)
  12. Le Parisien, « La drôle de donation de terrains compromet l'avenir de la plaine de Pierrelaye », Le Parisien,‎ (lire en ligne)
  13. « CIN aux franges de Pierrelaye », sur val-doise.gouv.fr, (consulté le ).
  14. a et b Alexandre Boucher, « Le projet de forêt sur la plaine de Pierrelaye-Bessancourt commence à éclore », Le Parisien,‎ (lire en ligne)
  15. a et b Nicolas Feldmann et Rémi Duchemin, « "On va capter du CO2 et ça va créer de la biodiversité" : naissance d’une nouvelle forêt dans le Val d’Oise », sur europe1.fr, (consulté le ).
  16. Christophe Lefevre, « Forêt de Pierrelaye - Bessancourt : les premiers arbres sont plantés », sur leparisien.fr, (consulté le ).
  17. a et b Emeline Férard, « Une nouvelle forêt de 1350 hectares va bientôt voir le jour dans le Val-d'Oise », sur geo.fr, (consulté le ).
  18. Daniel Chollet, « Val-d’Oise. Forêt de Pierrelaye-Bessancourt sur la plaine, cette fois c’est bien parti ! », sur actu.fr, (consulté le ).
  19. Daniel Chollet, « Val-d'Oise. 67 % des plants de la future forêt de Pierrelaye-Bessancourt ont finalement survécu », La gazette du Val d'Oise, (consulté le ).
  20. smap-foret. 2018. Projet d'aménagement forestier de la plaine de Pierrelaye-Bessancourt. Dossier de concertation. http://smapp-foret.fr/wp-content/uploads/2017/12/Dossier-Concertation-SMAPP_NEORAMA_HD_BAT.pdf
  21. Daniel Chollet, « Le projet de la plaine de Pierrelaye fait débat entre les élus », le régional l'Echo,‎ (lire en ligne)