Caftan marocain

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« La marocaine au perroquet », tableau de Frantz Charlet (1862-1928)

Le caftan marocain (en arabe : القفطان المغربي (al-qaftan al-maghribi), en berbère : ⵇⴰⴼⵜⴰⵏ) est une tenue traditionnelle marocaine. Sous la forme d'une longue tunique, et en général à manches longues, portée avec une ceinture (mdama) qui se déploie sous énormément de styles et de couleurs. Le caftan marocain résulte des savoir-faire des artisans et couturiers (maalem) du pays sous l'influence des cultures arabe, berbère, andalouse et juive. Il a été introduit au Maroc durant l'ère Ottoman par l'intermédiaire de la régence d'Alger .

C'est la tenue d’apparat par excellence des femmes marocaines lors des cérémonies (mariages, baptêmes, fêtes religieuses). Les stylistes ont démocratisé le caftan traditionnel en l’adaptant aux particularités de notre civilisation du XXIe siècle. Le caftan marocain a gagné en popularité après avoir été introduit par de grandes lignes de vêtements, et stylistes, à travers des défilés de mode prestigieux tel que l'Oriental Fashion Show[1] durant les Fashions week partout dans le monde. Ainsi que le travail de promotion de magazines marocains comme Femmes du Maroc.

De nos jours le caftan marocain est très apprécié en dehors des frontières du pays.

Étymologie

Le mot caftan vient du turc qaftān « robe d'honneur » qui serait un emprunt au perse haftān « sorte de vêtement miliaire » d'après la description de Antoine Gueuffroy dans Description de la cour du Grand Turc[2].

Histoire

Lalla Messaouda, figure politique de la dynastie Saadienne, qui vécu au xvie siècle

texte à cacherAu Maroc, le caftan est très ancien et profondément ancré dans les habitudes vestimentaires du pays. En effet il est apparu au XIIIe siècle à l’époque de la dynastie mérinide[3],[4], où il était porté par la royauté marocaine[5][réf. à confirmer]. Son nom et ses racines lointaine se trouveraient dans l’héritage persan introduit au Maroc et en Andalousie par les conquérants musulmans[réf. nécessaire]. Mais son évolution et la féminisation de cet habit au Maroc en ont fait un vêtement très différent des caftans perse et ottoman.[réf. nécessaire]

Le caftan est à la base porté par de hauts fonctionnaires et des lettrés. C'est un héritage de l'Orient, une longue robe de drap, sans col et à manches larges[6]. Bien que le Maroc n'ait jamais été une province ottomane, on retrouve une influence turque dans certains vêtement masculin, dont le caftan, introduit par la corporation des barcassiers de Salé, probablement influencé par les corsaires de Tunis[7]. À l'origine le Maroc connait deux types de caftan : un de Fès en brocart tissé sur un métier à tisser à la tire et celui de Tétouan dont les motifs ont subi une influence turco-persane[8].

Cependant, selon Naima El Khatib Boujibar, une archéologue et historienne de l'art marocaine, il est plus probable que le caftan soit arrivé au Maroc à travers l'Empire ottoman, en passant par l'Algérie. Cela aurait été grâce au sultan saadien Abd al-Malik, qui avait vécu à Alger et Istanbul. Durant toute sa période de règne au Maroc, Abd al-Malik avait officiellement reconnu la suzeraineté ottomane. Il s'habillait à la mode ottomane, parlait turc, réorganisait son armée et son administration en imitant les pratiques ottomanes, et attribuait des titres turcs ottomans à ses fonctionnaires[9]. La seconde moitié du XVIe siècle fut une période marquée par l'influence ottomane au Maroc, durant laquelle Ahmad al-Mansur, grandement influencé par la culture ottomane, adopta des costumes et des coutumes turques. Il introduisit les modes vestimentaires ottomanes, son armée adopta des costumes et des titres turcs, et les ambassadeurs notèrent même l'utilisation de poteries turques et de tapis turcs dans le palais Badi[10],[11],[12].

Caftan Ntaa en broderie de fils d'or. Il a été porté à l'origine lors d'un événement MIMOUNA au début du 20e siècle. (Musée Bayt Al Dakira)
Caftan Ntaa de Fès

Le caftan marocain actuel, ample et richement brodé, est le fruit d'une synthèse stylistique opéré dans les années 1960. Le caftan traditionnel s'illustrant par des couches multiples et des brocarts épais, des stylistes marocaines initiées à la mode française, vont le moderniser en réduisant le nombre de couches et l'ampleur des coupes. C'est le cas des stylistes Zina Guessous, Naïna Bennis ou Zhor Sebti qui ont travaillé avec la française Janine Halary. Cependant dans une optique nationaliste, le style se veut fondamentalement marocain avec l'introduction de technique traditionnelles jusque la réserve au linge de maison ou aux vêtement d'hommes comme la broderie (tarz), la dentelle a aiguille (renda).

Même si ces techniques ont des origines étrangères (soit balkaniques, soit ottomanes, soit européennes) et qu'elles sont introduites dans la mode marocaine qu'à la moitié du XXe siècle, elles sont présentées comme des « traditions millénaires »[13].

Selon l'l'Encyclopédie de l'Islam, le caftan a été introduit dans les États barbaresques par les Ottomans et répandu par la mode jusqu'au Maroc[14].

Différents types et styles de caftans marocains

Ancien caftan marocain de Rabat en 1968

Traditionnellement, chaque ville du royaume a son propre style de caftan et sa broderie.

Les coupes variaient aussi entre celle de Fès, long et droit, et celle de Tétouan, court et ample. Mais de nos jours il n'existe plus de frontières entre les différentes " capitales" du caftan au Maroc[15].

Venant de Fès, le Caftane N'taa est un caftan en soie, en velours ou en brocart qui est orné de motifs décoratifs très diversifiés réalisés au fil d'or (tarz ntaa)[16].

Dans les villes du nord du pays, la Keswa Kbira est un caftan porté lors des grandes occasions par les juives marocaines. Cette tenue est marquée par l'influence de l'Espagne de la Renaissance[16]. En effet elle fait son apparition au Maroc avec l'arrivée des juifs morisques expulsés d'Espagne à la fin du XVe siècle. Ce caftan est un ensemble de velours, de soie et d’or qui se compose le plus souvent de trois pièces : une vaste jupe, Zeltita, dont la coupe diffère en fonction des régions, un plastron nommé Ktef et un gilet qu’on appelle aussi corselet ou Gombaz. Les manches, quant à elles, sont en mousseline et ne sont pas rattachées au caftan.

Le plastron est la pièce la plus précieuse du costume et la plus richement brodée de la tenue. C’est une pièce faite de velours, de soie, de cuir ou de coton que l’on brodait au fil d’or et dont les motifs différaient d’une ville à une autre.

À Tétouan, le caftan a de vastes dimensions et des manches larges. En velours, généralement violet ou rouge grenat, il est garni de galons et de soutaches d'or. Ce caftan peut se porter avec une petite ceinture, mdamma, pour laisser voir la décoration du haut du caftan. Mais traditionnellement il sera plutôt porté avec une ceinture haute de Fès, hzam squelli, lamé d'or qui ceint la taille et joue en quelque sorte le rôle d'un corset[17].

Les stylistes marocains ont su s’adapter à l’air du temps, aujourd’hui, le caftan est taillé plus près du corps, de façon à mieux épouser la silhouette, il est devenu un vêtement moderne et élégant, facile à porter, mais paré d’un prestige qui tient de son passé légendaire. Il demeure le vêtement privilégié de la femme marocaine, qu’il s’agisse des jeunes ou des aînées. Le caftan marocain est désormais un savant mélange d’élégance, de raffinement et de confort, mais où le passé n’est pas renié[réf. nécessaire].


Caftan marocain aujourd'hui

Le caftan marocain a aujourd'hui une renommée mondiale. Devenu très tendance ces dernières années, il est vu comme l'alliance réussie entre le traditionnel et la modernité. Les défilés de mode mettant à l'honneur le caftan marocain sont réputés[18].

Le caftan est présent également en Algérie. En raison de la proximité géographique et culturelle des deux peuples, on retrouve une grande proximité dans les traditions locales suivant les différentes régions. La mode n'a pas échappé à cela, notamment dans l'ouest algérien. Des villes comme Tlemcen pratiquent traditionnellement "l'amaria" et font appel a des "negafa" dans leurs mariages, comme on retrouve cela partout au Maroc. Plus largement dans le pays, dans certaines villes plus orientales comme Constantine, à la fin des années 2000, il avait commencé à rivaliser avec l'habit traditionnel local (la gandoura constantinoise). Malgré le fait que le caftan marocain se vend cher, son succès peut s'expliquer par sa vente en prêt-à-porter et son assimilation plus facile au costume traditionnel local[19],[20].

En France, il est entré dans la catégorie de la Haute-Couture dite « marocaine ». Des défilés internationaux de créateurs y sont organisés, avec l'emergence de stylistes locaux, d'origine marocaine[21]. À titre d'exemple, il est aujourd'hui possible de voir des Parisiennes adopter le caftan comme robe de soirée[22].

Le succès est tel que la réputée fashion week 2020 à Paris vit plusieurs défilés de caftans marocain,avec la participation de célèbres designers et stylistes marocaines telles que Samira Haddouchi, Houda Serbouti et Fatima-Zahra El Filali Idrissi, sous le thème « Les merveilles de la route de la soie »[23].

Notes et références

  1. « Le caftan marocain à l'Oriental Fashion Show à Paris », sur Quid.ma (consulté le )
  2. Étymologie de Caftan selon le dictionnaire du CNRS.
  3. « Le Caftan, un voyage dans les dédales d'une histoire millénaire », sur Atlasinfo, (consulté le )
  4. « Le raffinement du caftan marocain en vedette à Montréal », sur Libération (consulté le )
  5. « Le caftan marocain, chef d’œuvre de l'artisanat », sur Vicedi : voyager comme Ulysse, (consulté le )
  6. Jean Besancenot, Costumes du Maroc, Eddif, (ISBN 978-9954-1-0256-5, lire en ligne), p. 16
  7. Ivo Grammet, Min Dewachter et Els de Palmenaer, Maroc: les artisans de la mémoire, Quo Vadis, (ISBN 978-90-5349-577-3, lire en ligne), p. 178
  8. Galerie Charpentier, Deux mille ans d'art au Maroc, Galerie Charpentier, (lire en ligne)
  9. (en) Stephen Cory, Reviving the Islamic Caliphate in Early Modern Morocco, Routledge, (ISBN 978-1-317-06343-8, lire en ligne)
  10. (en) Venetia Porter et Mariam Rosser-Owen, Metalwork and Material Culture in the Islamic World: Art, Craft and Text, Bloomsbury Publishing, (ISBN 978-0-85773-343-6, lire en ligne)
  11. Narjess Ghachem-Benkirane et Philippe Saharoff, Marrakech, demeures et jardins secrets, www.acr-edition.com, (ISBN 978-2-86770-043-9, lire en ligne)
  12. Bulletin de la Société de géographie du Maroc, Société de géographie du Maroc, (lire en ligne)
  13. Collectif, Le Maroc au présent: D'une époque à l'autre, une société en mutation, Centre Jacques-Berque, (ISBN 979-10-92046-30-4, lire en ligne), page 352
  14. (en) Cl Huart, « Ḳaftān », dans Encyclopaedia of Islam, First Edition (1913-1936), Brill, (lire en ligne)
  15. ATLASINFO, « Le Caftan, un voyage dans les dédales d'une histoire millénaire », sur Atlasinfo, (consulté le )
  16. a et b PASS Technologie, 26, rue Louis Braille, 75012 Paris France, « Tarz ntaâ », sur www.idpc.ma (consulté le )
  17. Jean Besancenot, Costumes du Maroc, Eddif, (ISBN 978-9954-1-0256-5, lire en ligne)
  18. Habitat de la bourgeoisie marocaine, Mouna M'Hammedi
  19. Le caftan marocain en passe de détrôner la légendaire gandoura
  20. « Le caftan marocain séduit les Algériennes », sur Libération, (consulté le )
  21. La styliste au rendez-vous de la haute-couture marocaine, Journal leparisien
  22. L’enseignement supérieur dans la mondialisation libérale: Une comparaison, Sylvie Mazzella
  23. Le Caftan marocain à la Fashion week de Paris 2020, VH Magazine

Bibliographie