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Utilisateur:Christellilalala/Brouillon

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Octavie est une tragédie latine écrite au Ier siècle après J.-C. et attribuée à Sénèque. C’est le seul exemple de tragédie prétexte (en latin fabula praetexta) conservé. L’intrigue se place au début du règne de Néron, après les assassinats de l’empereur Claude, d’Agrippine, dite Agrippine la Jeune et de Britannicus.

Bien qu’on ne trouve aucune indication sur l'organisation de la pièce, nous choisirons[style à revoir] le découpage en cinq actes généralement admis[1].

La pièce débute par un long dialogue entre Octavie et sa nourrice, qui est l’occasion de rappeler au spectateur les meurtres scandaleux perpétrés au sein de la famille et l’alliance contre-nature que représente le mariage d’Octavie avec Néron. On apprend alors la haine réciproque que se portent les deux époux et l’existence d’une rivale, Poppée, qui règne sur le cœur de Néron et menace ainsi la légitimité d’Octavie. Et de fait, le chœur annonce, à la fin de l’acte, le désir de Néron de prendre Poppée comme nouvelle épouse.

L’acte s’ouvre sur un monologue de Sénèque, le précepteur de Néron, qui regrette la retraite loin de Rome où il pouvait étudier librement la nature et s’adonner à la philosophie. Néron entre en scène, et au cours d’un échange tendu avec son précepteur, il défend sa conception d’une politique basée sur la force et l'obéissance. Au terme de ce dialogue, on apprend qu’une révolte populaire est imminente. Sénèque tente de dissuader Néron de répudier Octavie pour épouser Poppée, afin d'apaiser le mécontentement du peuple.

Le fantôme d’Agrippine, assassinée par Néron, son propre fils, apparaît. Elle promet de se venger en ruinant ce mariage impie, qu’elle veut transformer en deuil national. Le chœur reproche ensuite aux Romains de ne rien faire pour empêcher cette répudiation et l’accuse d’avoir perdu sa rage patriotique d’antan.

Poppée nous apparaît pour la première fois en personne. Elle est horrifiée car elle a fait un terrible cauchemar dans lequel elle a vu le fantôme d’Agrippine. Sa nourrice tente de la rassurer, mais ses explications ne parviennent pas à la convaincre, et la jeune femme se rend au temple pour prier les dieux et apaiser leur colère. Un messager entre alors pour annoncer au chœur que le peuple en colère est aux portes du palais impérial.

Fou de colère devant la révolte populaire, Néron menace de mettre feu à la ville et réclame la tête d’Octavie, coupable selon lui du soulèvement. La pièce se clôt sur une longue plainte d’Octavie relayée par le chœur (cette plainte funèbre est appelée kommos. En grec, κομμος), au moment où elle est emmené par les gardes pour la terre d’exil où elle s’attend à un sort funeste.

Personnages principaux

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Cette tragédie nous donne une image particulière de la sœur de Néron qui ne correspond pas forcément aux éléments qui nous sont parvenus grâce à Tacite[2] et à Suétone[3].

On voit une Octavie qui a pris conscience du destin tragique qui l’attend, comme si elle assumait son statut d'héroïne tragique: sa mort a été décidée par une force supérieure (l’Histoire) et son meurtre va permettre le déroulement des événements tel qu’on le connaît. Cela pourrait expliquer pourquoi Octavie, bien qu’étant le personnage principal, est passive et n’agit pas directement dans l’intrigue. Ce qui fait son importance est la dénonciation qu’elle fait envers le comportement et la tyrannie de Néron: elle s’exprime librement car elle sait déjà que sa fin est proche, donc elle n’a pas peur d’une éventuelle vengeance de la part de l’empereur. Dans la tragédie, on a aussi accès à la sphère la plus intime de la héroïne, on voit par exemple son désespoir ou sa relation étroite avec sa belle-mère Agrippine qui suscitera «l’âpre courroux du prince» (amor nostrique favor principis acres suscitet iras).

Bien que ses apparitions scéniques soient limitées en nombre (il n’apparaît que deux fois), il est présent tout au long de la pièce à travers les propos des autres personnages. Néron apparaît comme un personnage autoritaire et sans scrupules[4], impie[5] et pervers[6]. Néanmoins, il apparaît aussi comme quelqu’un qui a peur[7].

Auteur et datation

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Problème de datation

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L’histoire se déroule pendant le règne de Néron, en 62 après JC, après la mort d'Agrippine et au moment de l'exil d'Octavie, mais la date d'écriture de la tragédie reste incertaine. Elle serait comprise entre 68, date de la mort de Néron, puisque plusieurs passages de la tragédie y font référence[8] et 112-113, date de l'écriture des Annales, puisque Tacite connaissait la tragédie d'Octavie et l'aurait utilisée comme source secondaire pour son ouvrage historique[9].

  • Selon certains[10], l'auteur aurait écrit Octavie très tôt après la mort de Néron, dès 69-70. Ils s'appuient sur les nombreuses allusions vagues présentes dans la pièce qui ne semblent pouvoir être comprises que par des contemporains (c'est le cas par exemple de la mention de l'assassinat de Plautus et Sulla[11], de l'allusion aux monuments élevés aux dieux par Acté, première maîtresse de Néron[12] ou de la référence à la damnatio memoriae dont a été victime Agrippine[13] et qui n'est mentionnée que par des sources historiques très tardives. Selon ces spécialistes, l'auteur de l'Octavie serait un témoin oculaire, proche de la cour impériale, écrivant à partir de ses souvenirs.
  • Pour d'autres[14], la tragédie aurait été écrite plus tard, à la fin de l'époque flavienne, après Domitien (81-96) puisque ce dernier apparaissait comme un nouveau Néron tyrannique. L'auteur dans ce cas se serait appuyé sur des sources livresques (notamment les Silves de Stace et des ouvrages historiques de l'époque flavienne comme ceux de Cluvius Rufus, Fabius Rusticus ou Pline l'Ancien).

Pourquoi Sénèque ne peut-il pas être l’auteur ?

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  • Etant donné que la tragédie fait plusieurs allusions à la mort de Néron[15], postérieure à la mort de Sénèque[16], il n'est pas possible que ce dernier en ai eu connaissance.
  • Certes, l’auteur utilise le style, les mots et la manière de Sénèque. Il imite aussi les formes de la tragédie sénécienne. Cependant on peut remarquer de nombreuses maladresses[17], et une versification différente. En effet chez Sénèque le mètre des parties lyriques est varié alors que dans cette tragédie, seul l'anapeste est utilisé.
  • Enfin, les tragédies de Sénèque sont toutes des "tragédies en cothurnes" (fabula cothurnata), c'est-à-dire des tragédies à la manière grecque à sujet mythologique, alors que l’Octavie appartient à un genre totalement différent, la "tragédie prétexte" (fabula praetexta), à sujet historique puisqu’elle met en scène des événements historiquement attestés comme le divorce de Néron et d’Octavie.

Qui pourrait-être l’auteur d’Octavie ?

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Nous ignorons tout de l’identité de l’auteur. Cependant, certains aspects de son portrait peuvent être définis :

  • Il connaît très bien la pensée et les œuvres de Sénèque, aussi bien ses tragédies, puisqu'il fait parfois référence à Agamemnon[18] ou Médée[19], que ses œuvres philosophiques(la scène entre Néron et Sénèque reprend de façon explicite la thématique du De Clementia, "Sur la Clémence" et le personnage d'Octavie illustre la colère telle que l'expose Sénèque dans son De Ira, "Sur la colère".
  • L’auteur n’a aucune intention de faire passer la tragédie pour un pastiche mais plutôt comme un hommage vu que Sénèque fait partie de la tragédie et qu'il est dressé de lui un portrait laudatif.
  • Il possède enfin une culture littéraire et poétique non négligeable. Il connaît bien la tragédie grecque et fait référence à plusieurs reprises à l’Electre de Sophocle[20].

C’est donc probablement un disciple, un ami ou peut-être un client de Sénèque.

Une tragédie prétexte

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Une tragédie prétexte (fabula praetexta) est une tragédie à sujet historique en habits romains, à la différence de la tragédie en cothurnes (fabula cothurnata) à sujet mythologique en habits grecs. L' Octavie est le seul exemple de tragédie prétexte (fabula praetexta) qui nous soit intégralement parvenu, mais nous savons qu'il existait plusieurs exemples de tragédies prétextes dans la littérature latine, comme l' Ambracia de Névius, le Paulus de Pacuvius ou le Brutus d'Accius. La tragédie historique, peu courante pour nous puisque nous associons volontiers la tragédie à un sujet lointain ou mythologique, avait pourtant un illustre exemple dans la littérature grecque avec Les Perses d'Eschyle.

Notes et références

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  1. par G. Liberman ou Fr.-R. Chaumartin pour les éditions Les Belles Lettres
  2. Annales, 14
  3. Vie de Néron, 35
  4. Oct. v. 437-438: perage imperata : mitte, qui Plauti mihi / Sullaque caesi referat abscisum caput , "voilà mes ordres, exécute-les. Envoie un agent assassiner Plautus et Sulla ; qu’on m’apporte leur tête tranchée" (traduction G. Liberman, éditions Les Belles Lettres)
  5. Oct. v. 459: Stulte verebor, ipse cum faciam, deos ?, "Craindrai-je bêtement les dieux, alors que c’est moi qui les fais?" (traduction de G. Liberman, éditions Les Belles Lettres)
  6. Oct. v. 152-153: iuuenis infandi ingendi / scelerum capaxque, "un jeune homme pervers et doué pour le crime" (traduction de G. Liberman, éditions Les Belles Lettres)
  7. Oct. v. 441: Iusto esse facile est cui uacat pectus metu, "il est facile d’être juste quand la peur n’occupe pas votre cœur" (traduction de G. Liberman, éditions Les Belles Lettres)
  8. Oct. v. 618-623 et 629-631, qu'on peut rapprocher du récit de la mort de Néron par Suétone dans sa Vie de Néron (48-49)
  9. voir l'article de R. Ferri, "Octavia's heroines. Tac., Ann. 14, 63, 4 and the Praetexta Octavia", Harvard Studies in Classical Philology, 98, 1998, p. 339-356
  10. C'est la théorie d'Herrmann, Viansino et Liberman
  11. Oct. v. 438
  12. Oct. v. 195-197
  13. Oct. v. 611-612
  14. C'est la théorie de Ferri dans son ouvrage Octavia, A play attributed to Seneca
  15. Oct. v. 618-631, à rapprocher de Suétone, Vie de Néron, 48-49
  16. Sénèque est mort en 65, Néron en 68
  17. "Ainsi, l'auteur abuse de la juxtaposition en lieu et place de la coordination, il emploie trop souvent, à la fin du scénaire ïambique, les mêmes mots disyllabiques qui lui servent de chevilles. Il est loin d'avoir le talent inventif et la souple aisance du maître qu'il imite" (G. Liberman, éditions Les Belles Lettres, p. XIX)
  18. par exemple, Oct. v. 35-70: l'histoire de la maison de Claude rappelle celle des Atrides ou v. 57-59 où Octavie se compare à Electre
  19. Oct. v. 112-113: la mort du frère rappelle celle du frère de Médée. le vers 243b peut être rapproché de Médée v. 29
  20. le songe de Clytemnestre, El. 644-654, a sans doute inspiré le songe de Poppée et Octavie est souvent comparée à l'héroïne grecque.