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Viol pornographique

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Le viol pornographique est un sous-genre de film pornographique qui met en scène la description voire la perpétration d'un viol. Ce type de film peut présenter un viol simulé, dans lequel des adultes consentants imitent un viol, ou bien un viol réel. Les victimes de viol réel peuvent être contraintes de simuler un consentement afin que le film apparaisse, de façon frauduleuse, comme une simulation de viol ou comme une pornographie sans viol. La représentation du viol dans des médias non-pornographiques n'est pas considérée comme relevant du viol pornographique. Le cinéma comporte depuis longtemps des scènes de simulation du viol ou d'autres violences sexuelles apparaissent dans des films à grande diffusion, y compris dans le genre rape and revenge[1].

La légalité de la pornographie montrant un viol simulé varie selon les juridictions. Ce type de film soulève des polémiques car il pourrait inciter des gens à commettre des agressions sexuelles. Néanmoins, les études sur les effets de la pornographie quand elle représente des violences sexuelles conduisent à des conclusions contradictoires[2]. La création de films pornographiques montrant un viol réel est une infraction sexuelle dans les pays où le viol est illégal. C'est l'intention d'engranger des bénéfices, ou d'autres motifs, qui président à la création de films pornographiques basés sur des viols réels, y compris le viol sur mineurs et la pédopornographie[3]. Le viol pornographique, de même que le revenge porn et d'autres catégories similaires représentant des violences, est corrélée à la culture du viol[4],[5],[6].

Légalité du viol pornographique

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Royaume-Uni

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La détention de films pornographiques montrant un viol est illégale en Écosse, en Angleterre et au pays de Galles.

En Écosse, la loi Criminal Justice and Licensing (Scotland) Act 2010 pénalise la possession de pornographie « extrême ». La loi englobe les représentations de viol et « les autres activités sexuelles avec pénétration non consentie, que le film soit violent ou non », y compris quand les personnes impliquées sont des adultes consentants et si les scènes sont factices[7]. La peine maximale est une amende non plafonnée ainsi qu'un emprisonnement de trois ans[8]. Cette loi est rarement appliquée : il n'y a eu qu'une seule poursuite au cours des quatre premières années après son entrée en vigueur[9].

En Angleterre et au pays de Galles, la loi s'est alignée cinq ans plus tard sur l'Écosse pour interdire la pornographie qui représente le viol (y compris les simulations entre adultes consentants). La section 63 du Criminal Justice and Immigration Act 2008 (en) punissait déjà la possession de « pornographie extrême » mais sans y inclure explicitement les représentations du viol[10]. À cette époque, les autorités pensaient que la vente de viol pornographique était déjà illégale en Angleterre et au pays de Galles à cause de la loi Obscene Publications Act 1959 (en), or, en janvier 2012, l'arrêt R v Peacock (en) a contredit cette supposition. Le projet de loi est annoncé pour la première fois par David Cameron en 2013[11]. Dans un discours devant la National Society for the Prevention of Cruelty to Children (en), il déclare que la pornographie montrant un viol simulé « banalise la violence sexuelle commise contre les femmes », même si le ministère de la Justice avait auparavant annoncé qu'il « ne possède aucune preuve étayant l'idée que la création d'images montrant un viol simulé ait lésé les droits des participants ni de la société dans son ensemble »[12].

En février 2015, le chapitre 16 de la loi Criminal Justice and Courts Act 2015 (en) établit une modification du Criminal Justice and Immigration Act 2008 (en) et pénalise la détention d'images pornographiques montrant un viol. La loi ne s'applique qu'à du matériel consenti, simulé et fictif. La possession d'une image montrant un viol réel, par exemple un extrait d'une caméra de surveillance, n'est pas illégale ; ce sont les images « réalistes » créées par et pour des adultes qui sont passibles de poursuites[12].

En Allemagne, il est illégal de distribuer des images pornographiques montrant un viol réel ou simulé[13].

États-Unis

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Il existe peu de restrictions légales sur le viol pornographique aux États-Unis. Les organismes chargés de l'application de la loi se concentrent sur des affaires dans lesquelles elles pensent qu'un crime a été commis pendant la production. La pornographie « fantasmée » montrant une simulation de viol entre adultes consentants n'est pas une priorité pour la police[14].

Après le verdict People v. Turner (en) au sujet d'une agression sexuelle, xHamster a établi la « règle Brock Turner », qui interdit les vidéos montrant un viol, y compris celles où un partenaire est inconscient ou sous hypnose[15].

Affaires de viol réel

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Hors Internet

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L'actrice américaine de film X Linda Lovelace, dans son autobiographie Ordeal, écrit qu'elle a subi la coercition et des viols dans des films pornographiques au cours des années 1970[16].

Sur Internet

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Les enquêtes sur Internet concernant un crime réel deviennent de plus en plus difficiles car les sites proposant des viols pornographiques sont gérés de façon anonyme, sans respecter les règles de l'Internet Corporation for Assigned Names and Numbers et en fournissant des données fausses auprès de la base Whois database[14].

De 2009 à 2020, la société pornographique GirlsDoPorn a créé des centaines de films montrant des femmes sous l'influence de manipulations, de contraintes, de mensonges, de marijuana ou d'autres drogues, ou physiquement forcées d'exécuter des actes sexuels, d'après les récits des victimes et les documents saisis dans le cadre d'une poursuite judiciaire contre l'entreprise[17],[18],[19],[20]. En novembre 2019, six personnes participant au site web sont accusées de trafic sexuel par la force, la fraude ou la coercition[19]. Les vidéos officielles de cette société ont été visionnées plus d'un milliard de fois, y compris par un abonnement payant et, selon une estimation, elles ont fait l'objet de 680 millions de visionnages sur Pornhub, où la chaîne officielle était parmi les plus suivies. Des copies pirates de ces vidéos circulent encore[18],[21],[22]. D'après le dossier déposé au tribunal, en décembre 2020 ces vidéos sont encore distribuées sur des sites pornographiques largement consultés[23].

Des films de viols réels contre des femmes et des jeunes filles ont été tournés dans le cadre de Doctor's Room et Nth Room en Corée du Sud entre la fin des années 2010 et le début des années 2020[24],[25],[26].

Des films montrant des viols réels sont hébergés sur des sites populaire de partage de vidéos pornographiques[27],[28], ce qui leur a valu des critiques[29],[30].

Traite sexuelle sur Internet

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Des victimes de traite sexuelle par Internet sont forcées de figurer dans des vidéos où elles subissent des viols et qui sont diffusées en direct sur Internet[31],[32],[33] ; ces vidéos peuvent faire l'objet d'un enregistrement afin d'être ensuite vendues. Les victimes subissent des viols aux mains des trafiquants devant une webcam ou elles sont forcées d'exécuter des actes sexuels, soit sur elles-mêmes, soit sur d'autres victimes. Les trafiquants filment et diffusent le crime en temps réel. Souvent, les victimes sont obligées de regarder les clients sur un écran partagé et de suivre leurs ordres. Ces crimes sont perpétrés dans des lieux surnommés les « antres du cybersexe », qui peuvent être des domiciles, des hôtels, des bureaux, des cybercafés et d'autres bâtiments commerciaux[34].

Notes et références

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  1. Clare Simpson, « 10 Controversial Films With Scenes Of Explicit Sexual Violence », WhatCulture.com, (consulté le )
  2. « Pornography, Rape and Sex Crimes in Japan » [archive du ], sur Pacific Center for Sex and Society, University of Hawaii,
  3. « Website selling 'real' rape and child pornography videos shut down after arrest in Netherlands, Justice Department says », sur The Washington Post,
  4. Gert Martin Hald, Neil M. Malamuth et Carlin Yuen, « Pornography and attitudes supporting violence against women: revisiting the relationship in nonexperimental studies », Aggressive Behavior, vol. 36, no 1,‎ , p. 14–20 (ISSN 1098-2337, PMID 19862768, DOI 10.1002/ab.20328)
  5. Ellen Willis, « Feminism, Moralism, and Pornography », New York Law School Law Review, vol. 38,‎ , p. 351 (lire en ligne, consulté le )
  6. Mary E. Odem et Jody Clay-Warner, Confronting Rape and Sexual Assault, Rowman & Littlefield, (ISBN 978-0-8420-2599-7, lire en ligne), p. 111
  7. « Revitalising Justice – Proposals To Modernise And Improve The Criminal Justice System », Scotland.gov.uk, (consulté le )
  8. « Information on the new offence of Possession of Extreme Pornographic Images », The Scottish Government, (consulté le )
  9. Dan Bunting, « Criminal Justice and Courts Bill – new criminal offences », Halsbury's Law Exchange,
  10. « Crackdown on violent porn », The Scotsman, Johnston Publishing,‎ (lire en ligne)
  11. « Online pornography to be blocked by default, PM announces », BBC News,‎ (lire en ligne, consulté le )
  12. a et b Myles Jackman, « Government to "get to grips" with Rape-Porn », Myles Jackman, (consulté le )
  13. « German Criminal Code », Gesetze-im-internet.de (consulté le )
  14. a et b Craig Timberg, « How violent porn site operators disappear behind Internet privacy protections », The Washington Post,‎ (lire en ligne, consulté le )
  15. Mary-Ann Russon, « xHamster to crack down on rape porn, adopts 'Brock Turner Rule' », International Business Times,‎ (lire en ligne)
  16. Catherine A. MacKinnon, Are Women Human?: And Other International Dialogues, Cambridge, MA, The Belknap Press of Harvard University Press,
  17. Dorian Hargrove, Mari Payton et Tom Jones, « Uncovering A San Diego Porn Scheme: Deception, Humiliation Follow Online Ads », NBC 7 San Diego (en), (consulté le )
  18. a et b Dorian Hargrove, « San Diego's porn studios », sur San Diego Reader (en), (consulté le )
  19. a et b Gustavo Turner, « Here's What You Need to Know About the GirlsDoPorn Case », sur XBIZ, (consulté le )
  20. Timothy B. Lee, « GirlsDoPorn, on trial for fraud, still isn't leveling with new models », sur Ars Technica, (consulté le )
  21. Jared Savage, « Childhood friends from Christchurch Michael James Pratt and Matthew Isaac Wolfe face FBI sex trafficking charges over GirlsDoPorn website », sur The New Zealand Herald, (consulté le )
  22. Ana Valens, « Pornhub pulls Girls Do Porn videos amid sex trafficking charges », sur The Daily Dot, (consulté le )
  23. Emanuel Maiberg et Samantha Cole, « Tube Sites Are Scrubbing Girls Do Porn Videos After Pornhub Lawsuit », sur Vice, (consulté le )
  24. Choe Sang-Hun, « Suspect Held in South Korean Crackdown on Sexually Explicit Videos », The New York Times, SEOUL, South Korea,‎ (lire en ligne)
  25. Laura Bicker, « Cho Ju-bin: South Korea chatroom sex abuse suspect named after outcry », BBC News,‎ (lire en ligne)
  26. Min Joo Kim, « South Korea identifies suspected leader of sexual blackmail ring after uproar », The Washington Post, Seoul,‎ (lire en ligne)
  27. « I was raped at 14, and the video ended up on a porn site », BBC News,
  28. « Call for credit card freeze on porn sites », sur BBC News,
  29. « Pornhub needs to change – or shut down », sur The Guardian,
  30. « Anti-porn activists come after Montreal-based Pornhub », sur National Post,
  31. « Philippine children exploited in billion-dollar webcam paedophilia industry », sur The Sydney Morning Herald,
  32. « IJM Seeks to End Cybersex Trafficking of Children and #RestartFreedom this Cyber Monday and Giving Tuesday », sur PR Newswire,
  33. « Cybersex Trafficking », sur IJM,
  34. « Cyber-sex trafficking: A 21st century scourge », sur CNN,

Articles connexes

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Bibliographie

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  • Ana J. Bridges, Handbook of Sexual Assault and Sexual Assault Prevention, Routledge, , 129–149 p. (ISBN 978-3030236441), « Chapter 7: Pornography and Sexual Assault »
  • Milton Diamond, « Pornography, public acceptance and sex related crime: A review », dans International Journal of Law and Psychiatry, vol. 32, , 304–314 p. (PMID 19665229, DOI 10.1016/j.ijlp.2009.06.004), chap. 5 Abstract.
  • Milton Diamond et Ayako Uchiyama, « Pornography, Rape and Sex Crimes in Japan », dans International Journal of Law and Psychiatry, vol. 22, , 1–22 p. (PMID 10086287, DOI 10.1016/s0160-2527(98)00035-1), chap. 1 Abstract.
  • David A. Makin et Amber L. Morczek, « The dark side of internet searches: a macro level assessment of rape culture », dans International Journal of Cyber Criminology, vol. 9, , 1–23 p., chap. 1 Abstract.
  • David A. Makin et Amber L. Morczek, « X Views and Counting: Interest in Rape-Oriented Pornography as Gendered Microaggression », dans Journal of Interpersonal Violence, vol. 25, , 244–257 p., chap. 3 Abstract.
  • Neal M. Malamuth, Pornography and Sexual Aggression, Elsevier Science, (ISBN 9781483295794)
  • Sharif Mowlabocus et Rachel Wood, « Introduction: audiences and consumers of porn », dans Porn Studies, vol. 2, , 118–122 p. (DOI 10.1080/23268743.2015.1056465 Accès libre), chap. 3 Abstract.
  • Alisia M. Palermo et Laleh Dadgardoust, « Examining the role of pornography and rape supportive cognitions in lone and multiple perpetrator rape proclivity », dans Journal of Sexual Aggression, vol. 31, , 2131–2155 p., chap. 12 Abstract.
  • Natalie Purcell, Pornography and Violence, Routledge, (ISBN 9781136274473)
  • Lorraine de Foucher, Samuel Laurent et Nicolas Chapuis, « L'enquête tentaculaire qui fait trembler le porno français », Le Monde, décembre 2021.