Nuage moléculaire 1 du Taureau

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Nuage moléculaire 1 du Taureau
Image illustrative de l’article Nuage moléculaire 1 du Taureau
Partie du nuage moléculaire Taurus 1.
Données d’observation
(Époque J2000.0[1])
Constellation Taureau
Ascension droite (α) 04h 41m 0s[1]
Déclinaison (δ) +25° 52′ 0″ [1]

Localisation dans la constellation : Taureau

(Voir situation dans la constellation : Taureau)
Astrométrie
Distance 400 al
(122,6 pc)
Caractéristiques physiques
Découverte
Découvreur(s) John Russell Hind
Date 1852
Désignation(s) HCL 2, Heiles's cloud 2, TMC-1, Taurus Molecular Cloud 1[1]
Liste des objets célestes

Le nuage moléculaire 1 du Taureau[2] (TMC-1 pour l'anglais Taurus Molecular Cloud 1) est un nuage moléculaire situé à environ 125 pc (∼408 al) de la Terre dans la constellation du Taureau[3].

Avec le nuage moléculaire 2 du Taureau ou le nuage de Kutner (TMC-2), il est un des nuages individuels du complexe Taureau-Cocher, une formation en groupes d'étoiles [4].

À la suite de la découverte de la vague de Radcliffe (2020), le nuage moléculaire est considéré comme objet le plus proche du Soleil dans cette vaste structure, dans le bras spiral de la Voie lactée. De surcroît, de nos jours, il s'agit de la région la plus proche du système solaire dans laquelle est observée la formation de nouvelles étoiles[5].

Ce nuage est de nos jours indispensable, pour l'étude de l'origine de composé organique autant que celle de la formation de l'étoile.

L'origine de ce nuage est l'explosion de plusieurs supernovæ qui firent former une immense bulle de poussière interstellaire dans cette région, il y a 22 millions années[6].

Observation en lumière visible[modifier | modifier le code]

Image du nuage moléculaire 1 du Taureau en lumière visible. Au centre, T Tauri et NGC 1555.

En lumière visible, le nuage moléculaire 1 du Taureau est un nuage très obscur. Il est impossible de l'observer à l'œil nu, en dépit de sa proximité de la Terre[7]. Car, dans cet objet, il n'existe pas d'étoile capable de l'éclairer, faute de fusion nucléaire. De surcroît, il manque de région HII qui est très lumineuse[7]. Seules exceptions sont l'étoile rouge T Tauri (IC2087 IRS) et la nébuleuse NGC 1555, qui est éclairée par la T Tauri. Ces objets sont situés au centre de l'image[8]. Près du nuage, à l'extérieur, il y a un group de petites étoiles, DO Tau, GM Tau et HV Tau en triple système (en bas et à gauche)[8].

Ce nuage fut découvert par John Russell Hind en 1852, lorsqu'il observait la nébuleuse NGC 1555[7].

Tout comme l'observation à l'œil nu, il est difficile à photographier le nuage du Taureau. C'était Edward Emerson Barnard qui réussit à prendre les premières images de cet objet, le 9 janvier 1907. Mais il lui fallait 25,4 cm et 15,2 cm de lentilles optiques et 5 heures et 28 minutes d'exposition [9][10][9].

En dépit de son obscurité profonde, l'astronome américaine Beverly Turner Lynds y distinguait un certain nombre de nébuleuses obscures. Elle publia en 1962 son Catalogue of Dark Nebulae, comptant 1802 nébuleuses dans les constellations de Taureau et de Cocher. Parmi eux, les L1495, L1521, L1524, L1527, L1529, L1536 et L1544, qui étaient déterminés par Lynds, se trouvent dans le nuage moléculaire de Taureau[10]. Une partie de la nébuleuse L1495 se trouve également dans le catalogue de Barnard, en tant que B213[10],[11].

Observation en infrarouge[modifier | modifier le code]

Le nuage reste très froid et sans lumière, tout comme d'autres nuages moléculaires[8]. En 2007, l'équipe dirigée par David Nutter s'aperçut que la périphérie du nuage n'a que 12 K alors qu'au centre, la température chute jusqu'à 8 K[12].

Or, les observations en infrarouge permettent d'obtenir des images qui présentent la formation des étoiles en taille modeste. Dans le nuage, se cachent plusieurs nébuleuses obscures, objets Herbig-Haro et jeunes objets stellaires, qui caractérisent le nuage du Taureau[8].

Image du proto-étoile L1527 IRS, prise en 2022 par le télescope spatial James-Webb en infrarouge.

Ainsi, l'objet L1527 IRS est une jeune proto-étoile en phase de transition, entre classe 0 et classe I. Plusieurs groupes d'astronomes étudient intensivement cet objet, en raison de sa taille équivalente au Soleil. Leurs études approfondies contribueront à comprendre la formation du système solaire et l'origine des planètes. Notamment, cette image présente exactement l'existence du disque protoplanétaire au centre.

Image prise par le télescope spatial Herschel. En haut et à gauche, on observe le noyau de la nébuleuse L1544 auquel, pour la première fois, l'existence de l'eau fut découverte.

L'un des résultats obtenus par observation en infrarouge est celui du télescope spatial Herschel, fonctionné entre 2009 et 2013. Pour la première fois, il détecta l'existence de la vapeur d'eau dans ce nuage, à la nébuleuse L1544. La quantité d'eau, estimée par les scientifiques, serait plus de 2 000 fois supérieure à celle que tous les océans contiennent sur la Terre[13].

D'autres protos-étoiles aussi restent invisibles, y compris IRAS04361+2547 et IRAS04365+2535 (ou TMC1A)[8].

Observation en spectre d'émission[modifier | modifier le code]

Le nuage contient plusieurs molécules complexes telles des cyanopolyynes HCnN où n=3, 5, 7 et 9. Le découvert remonte en 1983[14].

À partir des années 1970, les observations en spectre d'émission firent découvrir cette richesse, d'abord il s'agissait de celle de l'ammoniac NH3 (1989). L'étude fit apercevoir l'existence des noyaux compacts dans ce nuage[15].

La liste des composés organiques est assez longue. Il s'agit, en plus de cyanopolyynes, de CH3OH (méthanol), CH2O (méthanal), C18O, H2CCO (cétène), CH3CHO (acétaldéhyde), HCOOCH3 (formiate de méthyle), CH3OCH3 (méthoxyméthane), C3H2O (cyclopropénone), C34S, C2S (thioxoéthénylidène)[16],[17]. Les chercheurs profitent des observations sur le nuage du Taureau, surtout pour certains composés qui étaient inconnus auparavant, tels cyanopolyyne et thioxoéthénylidène. Une équipe de l'université de l'Arizona constatait en 2020 qu'au noyau de 31 nébuleuses du Taureau, le méthanol (CH3OH) se trouve 100% (31 sur 31) tandis que l'acétaldéhyde (CH3OCH3) 70% (22 sur 31)[18].

En ce qui concerne la découverte la plus récente, ces scientifiques de l'Arizona, Samantha Scibelli et son professeur Yancy Shirley, conclurent en 2022, après avoir effectué plus de 700 heures d'observation à l'observatoire de Kitt Peak, que ces composés organiques se trouvent même avant la phase de formation de l'étoile, au contraire de ce que l'on considérait. C'est-à-dire, d'après la théorie traditionnelle, il faut de l'énergie pour former les moléculaires organiques. Pourtant, dans le nuage du Taureau, il existe ces composés même dans des noyaux très froids avant qu'ils ne deviennent assez chauds grâce à l'effet de la gravité[19]. Ainsi, le méthanol existe dans le noyau de toutes 31 nébuleuses très froides, à l'état congelé[20].

Observation en micro-onde[modifier | modifier le code]

En 2018, l'observation en micro-onde permit de découvrir au moins trois régions où l'intensité de rayonnement est supérieure dans le nuage. Surtout, dans les régions auxquelles sont situées les nébuleuses L1527 IRS et L1495 IRS, on constate une immense intensité de micro-onde. Or, aucune théorie n'est pas encore établie, pour expliquer ce phénomène, découvert en 1995 par le COBE[21].

Sous-groupes[modifier | modifier le code]

Le nuage moléculaire 1 du Taureau se compose des sous-groupes suivants :

Nuage dans la vague de Radcliffe (Observation en 3D)[modifier | modifier le code]

Les chercheurs considéraient que ce nuage moléculaire serait situé dans la ceinture de Gould, ceinture hypothétique. Or, une équipe de l'université Harvard auprès du Radcliffe Institute for Advanced Study identifia, au lieu de cette dernière, une immense structure, nommée vague de Radcliffe (en anglais, « Radcliffe wave ») en raison de sa forme. Cette structure dans un bras spiral de la Voie lactée, si vaste, a un diamètre de 8 800 années-lumière[28],[29],[N 1].

Vague de Radcliffe dans la Voie lactée. Pour les images détaillées en 3D, voir le site Surf The Radcliffe Wave de l'université Harvard [8].
Le nuage moléculaire du Taureau se trouve près du bras d'Orion (en jaune et proche du Soleil). Il s'agit d'une partie de la vaste vague de Radcliffe, récemment découverte. Plus précisément, c'est le bout d'une grande bulle, issue des supernovæ.

D'ailleurs, cette étude de l'université Harvard (2020) permit, avec certitude, de déterminer la distance du nuage. Cette dernière varie entre 120 et 160 parsec, car le nuage possède une dimension assez grande[3]. D'où, la partie la plus proche du nuage est située à justement 400 années lumière à partir du système solaire.

À la suite de cette étude, qui s'illustre de sa précision de distance et de la technique en 3D, l'origine de ce nuage aussi fut identifiée en 2021. Une équipe du Harvard-Smithsonian Center for Astrophysics découvrit, à nouveau grâce à leur technique en 3D, que le nuage moléculaire du Taureau est une partie de la région, baptisée « Perseus-Taurus Shell » (enveloppe Persée-Taureau). Il s'agit d'une immense bulle en poussière interstellaire, et formée par l'explosion de plusieurs supernovæ il y a 22 millions années[30],[6],[31].

L'observation en 3D fit renouveler profondément la connaissance. À partir du Soleil, on voit le nuage de Taureau et celui de Persée (à gauche) dans la même direction. En fait, ces nuages sont situés, en 3D, sur les côtés opposés d'une vaste ceinture, issue des supernovæ[31].

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]

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Notes[modifier | modifier le code]

  1. Cette découverte fut publiée le 7 janvier 2020 dans la revue Nature, après que l'équipe avait développé une nouvelle façon de calcul, dans l'optique de déterminer en haute précision la distance entre le Soleil et les objets. Le satellite Gaia avait contribué à donner les renseignements corrects pour ce projet. La forme de vague apparut, pour la première fois, d'une part, après que les distances avaient été déterminées avec moins de 5% d'incertitude. D'autre part, il avait fallu que tous les objets soient fixés en trois dimensions (en deux dimensions, cette structure n'est pas visible), avec ces calculs corrects et des ordinateurs de haut de gamme. C'était un fruit de l'amélioration de la technologie sur les satellites et l'ordinateur.

Références[modifier | modifier le code]

(en) Cet article est partiellement ou en totalité issu de l’article de Wikipédia en anglais intitulé « Taurus Molecular Cloud 1 » (voir la liste des auteurs).
  1. a b c et d (en) Nuage moléculaire 1 du Taureau sur la base de données Simbad du Centre de données astronomiques de Strasbourg.
  2. Excitation collisionnelle du formaldéhyde interstellaire : Théorie et Observations, thèse de doctorat de Nicolas Troscompt, Université Joseph-Fourier - Grenoble 1, 2010. Consulté le 10 novembre 2014 sur l'archive ouverte HAL.
  3. a et b Université Harvard (Institut Radcliffe), Taurus, 2020 [graphique en ligne] ; consulté le 12 janvier 2023 ; en comparaison avec le nuage Orion A [1]
  4. (en) « Taurus-Auriga Complex », sur Astrophysics
  5. Brian Ventrudo (éditorial de Cosmic Pursuits), The Taurus Molecular Cloud, le 25 janvier 2021 (en)[2] consulté le 11 janvier 2023
  6. a et b (en) Keith Cooper, « Superbubble region of star formation was created by supernovae, study suggests », Physics World,‎ (lire en ligne)
  7. a b et c Martin Beech, The Pillars of Creation : Giant Molecular Clouds, Star Formation and Cosmic Recycling, p. 146 [lire en ligne]
  8. a b c d et e Scott J. Kenyon et al., Low Mass Star Formation in the Taurus-Auriga Clouds, dans le Handbook of Star Forming Regions, tome I, p. 35 - 36 (image 14), Astronomical Society of the Pacific, 2008 [lire en ligne]
  9. Edward Emerson Barnard, On A Neblulous Groundwork in the Constellation Taurus, dans le Astrophysical Journal, tome 25, p. 218 - 225, 1907 (en)[3]
  10. a et b Voir l'image (p. 5) dans l'article Gaia EDR3 Reveals the Substructure and Complicated Star Formation, septembre 2021 [4]
  11. A. Hacal et al., « Cores, filaments, and bundles : hierarcical core formation in the L1495/B213 Taurus region », Astronomy & Astrophysics, vol. 554,‎ (lire en ligne)
  12. (en) David Nutter, « SCUBA and Spitzer observations of the Taurus molecular cloud - pulling the bull's tail », Monthly Notices of the Royal Astronomycal Society, vol. 384-2,‎ (lire en ligne)
  13. (en) « Herschel's view of the Taurus Molecular Cloud », Agence spatiale européenne,‎ (lire en ligne)
  14. (en) A. Freeman et T. J. Millar, « Formation of complex molecules in TMC-1 » [« Formation de molécules complexes dans TMC-1 »], Nature, vol. 301,‎ , p. 402-404 (DOI 10.1038/301402a0)
  15. Priscilla J. Benson et Philip C. Myers, A Survey for Dense Cores in Dark Clouds, dans le Astrophysical Journal Supplement, tome 71, p. 89 - 108, septembre 1989 (en)[lire en ligne]
  16. (en) S. Spezzano et al., « Gas phase Elemental abundance in Molecular clouds, V. Methanol in Taurus », Astronomy & Astrophysics, vol. 657,‎ (lire en ligne)
  17. (en) Tatuya Soma et al., « Complex Organic Molecules in Taurus Molecular Cloud-1 », The Astrophysical Journal, vol. 854,‎ (lire en ligne)
  18. (en) Samantha Scibelli et Yancy Shirley, « Prevalence of Complex Organic Molecules in Starless and Prestellar Cores within the Taurus Molecular Cloud », The Astrophysical Journal, vol. 891,‎ (lire en ligne)
  19. Présentation de Samantha Scibelli, lors du conférence de Prebiotic Chemistry and Early Earth Environments Consotium (PCE3), session n° 21 tenue le 1er décembre 2022 (en)[5] (article Complex Organic Comounds Formed Where Stars Are Being Born dans le site Astrobiology de NASA, le 10 janvier 2023), consulté le 18 janvier 2023
  20. (en) Marc Kaufman, « Many Complex Organic Compounds - Evolved Building Blocks of Life - Are Formed Where Stars Are Being Born », Many Worlds,‎ (lire en ligne)
  21. F. Poidevin et al., « QUIJOTE scientific results - III. Microwave spectrum of intensity and polarization in the Taurus Molecular Cloud complex and L1527 [notamment images 1 et 9] », Monthly Notices of the Royal Astronomical Socity,‎ (lire en ligne)
  22. (en) TMC 1A sur la base de données Simbad du Centre de données astronomiques de Strasbourg.
  23. « La formation des planètes commencerait avant la naissance des étoiles », sur Archipel des Sciences,
  24. (en) TMC 1B sur la base de données Simbad du Centre de données astronomiques de Strasbourg.
  25. (en) TMC 1C sur la base de données Simbad du Centre de données astronomiques de Strasbourg.
  26. (en) TMC 1D sur la base de données Simbad du Centre de données astronomiques de Strasbourg.
  27. (en) TMC 1E sur la base de données Simbad du Centre de données astronomiques de Strasbourg.
  28. Cosmic Pursuits (Brian Ventrudo), The Taurus Molecular Clous, le 25 janvier 2021 (en)[6] consulté le 11 janvier 2023
  29. Trust My Science, Une mystérieuse « vague » de gaz formant des étoiles pourrait être la plus grande structure de la galaxie, le 8 janvier 2020 [7]
  30. (en) Shmuel Bialy et al., « The Per-Tau Shell : A Giant Star-forming Spherical Shell Revealed by 3D Dust Observations », The Astrophysical Journal Letters, vol. 919,‎ (lire en ligne)
  31. a et b (en) Michael Irving, « Astronomers discover where a cosmic cataclysm blew a huge hole in space », New Atlas,‎ (lire en ligne)