Dominique Natanson

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Dominique Natanson
Dominique Natanson lors d'une conférence à la Cité des Sciences, Paris, décembre 2013..
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Parentèle

Dominique Natanson, né le à Cherbourg[1], est un pédagogue, un écrivain et un militant antiraciste.

Biographie[modifier | modifier le code]

Dominique Natanson est le fils du professeur Jacques Natanson et de la psychanalyste Madeleine Natanson et le neveu du poète Daniel Lefèvre[2],[3].

Il est né après la guerre dans une famille marquée par la déportation et le génocide des Juifs[4]. Son grand-père, Aron Natanson, juif roumain arrivé en France dans les années 1920, est libraire à Paris[5]. Sa tante de 13 ans, Miryam (Mireille) Natanson est arrêtée en même temps qu’Aron Natanson, le 23 septembre 1942. Ils sont déportés, deux jours plus tard, par le convoi n°37 et assassinés à Auschwitz. D’autres membres de la famille Natanson sont victimes, à la fin de la guerre, de la barbarie nazie (fusillé, suicidés)[6]. Durant cette période, Jacques Natanson, son père, est caché par des moines dominicains [7].

Cette histoire marque Dominique Natanson qui devient l'un des pédagogues de la Shoah en France[8] et dont le ressort de l’activité politique est l’antiracisme[9].

Enseignant et pédagogue[modifier | modifier le code]

Enseigner la Shoah[modifier | modifier le code]

Professeur d’histoire, il enseigne à Cuffies dans un collège de l’Aisne qui porte, à son initiative, le nom d’un enfant juif déporté et assassiné à Auschwitz, Maurice Wajsfelner ; puis au Lycée Gérard de Nerval de Soissons. Il devient formateur d’enseignants dans l’Académie d’Amiens et formateur de formateurs[10]. Il forme des enseignants à l’enseignement de la Shoah, amène des groupes de lycéens à Auschwitz et mène une réflexion sur les conditions pour rendre utile une telle démarche[11]. Selon Le Café pédagogique, il a une vision constructiviste du travail de mémoire, terme qu'il préfère à celui de devoir de mémoire[12]. Sa démarche mémorielle est évoquée par André Weill dans Le Marchant de bonheur à pied d'Auschwitz à Jérusalem.

En 1992, il publie La Mémoire juive en Soissonnais, écrit avec ses élèves[13], et reçoit le Prix Corrin contre l’oubli et la banalisation de la Shoah[14],[15],[16].

En 1997, dans le but de contrer le négationnisme[17], il crée le site internet Mémoire Juive & Éducation[18] dans lequel il répond aux questions posées par des adolescents sur la déportation et le génocide[19]. Selon Le Café pédagogique, c'est « un site qui fait référence sur la pédagogie de la Shoah »[20],[21]. Il publie J'enseigne avec l'Internet la Shoah et les crimes nazis, « un ouvrage destiné à présenter aux enseignants la manière d'aborder la question de la Shoah avec Internet comme outil de mémoire »[22]. Il souhaite « transmettre par l’école : à la fois, la connaissance précise du génocide, des mécanismes du meurtre de masse, et, en même temps, cette brûlure, cette indicible meurtrissure de tout être humain confronté à la Shoah »[23].

Autres aspects pédagogiques[modifier | modifier le code]

Selon Le Café pédagogique, « Dominique Natanson est connu des enseignants d'histoire. Il est l'auteur de du cédérom « J'ai vécu au XVIIIe siècle »[24] qui permet un véritable apprentissage du métier d'historien dès le collège. »[25]

Collaborant à la revue Les Cahiers Pédagogiques, il se situe dans le courant de la pédagogie institutionnelle. « Pour évaluer les progrès de ses élèves, Dominique Natanson se sert de « l'évaluation par ceintures » qui vient de Fernand Oury et de la Pédagogie institutionnelle, dans le prolongement de la pédagogie de Célestin Freinet »[26],[27]. Il écrit sur le travail de groupe qu’il pratique[28].

Avec Marc Berthou, il réfléchit à la pratique du jeu pédagogique, dans Jouer en classe en collège et en lycée[29], dans l'esprit d'une pédagogie du détour[30].

Écrivain[modifier | modifier le code]

Jeune, il publie quelques poèmes et des nouvelles[31], sur le thème de la Shoah, ou plus précisément, selon son expression, des « traces qu’elle laisse dans nos vies »[32]. Il publie un premier roman en 2018, toujours autour de la question de la déportation : On ne sait pas grand-chose de la vie de A.[33], avant de se lancer dans des romans policiers « décoloniaux » où il traite des réfugiés sans papiers (La cavale de Ferddy Mbemba, 2019)[34] et des « bavures policières » (Quand bave la police..., 2020)[35].

En septembre 2023, il publie un roman uchronique, Mutineries de l'imaginaire, dans lequel il imagine une survie d'une famille de Juifs déportés en 1942, l'imagination leur prêtant évasions, caches et retrouvailles, contre toute vraisemblance[36].

Parallèlement, il fonde une maison d'édition sans but lucratif, « L'échelle du temple »[37].

Militant antiraciste[modifier | modifier le code]

Il préside le comité de Soissons du MRAP de 1985 à 1995[38],[39]. À partir de 2006, il est l'un des porte-parole du Collectif de défense des sans papiers de l'Aisne, appartenant au Réseau éducation sans frontières[40]. Le journal L'Union rapporte qu'il est à l'initiative du Manifeste des enfants cachés, signé par des personnes juives qui ont été cachées sous l'Occupation nazie ou par leurs descendants, « en signe de solidarité à ceux qui aident les migrants, en dépit des risques pris »[41].

Co-président de l’UJFP en 2016-2017, il sillonne les banlieues pour des interventions antiracistes : il affirme dans une interview au Muslim Post : « En tant que juifs, dans les quartiers populaires, nous sommes extraordinairement accueillis »[42]. Il est qualifié d'antisioniste[43],[44], se réclamant de l’héritage du Bund[45].

Dominique Natanson dirige, avec André Rosevègue, la publication de Une parole juive contre le racisme.

Il se définit comme antiraciste « politique et décolonial » et vient publiquement en soutien à la militante antiraciste Houria Bouteldja lorsqu’elle est accusée d’antisémitisme, signant plusieurs tribunes[46], et hébergeant sur son blog Mediapart la réponse de la militante à ses détracteurs[47].

Il publie, en 2020, un Guide du Soissons colonial qui critique l’omniprésence des noms de militaires colonialistes dans l’odonymie soissonnaise[48].

En 2021, il dépose plainte après la publication de son nom dans une liste intitulée « islamo-gauchistes », téléchargeable sur le site d'extrême droite Fdesouche[49],[50],[51].

En octobre 2023, il figure parmi les signataires d'une tribune parue dans Libération : Frappes sur Gaza : "Vous n’aurez pas le silence des juifs de France"[52].

Publications[modifier | modifier le code]

Mémoire[modifier | modifier le code]

  • La Mémoire juive en Soissonnais, Mémoires, 1990 (Prix Corrin contre l’oubli et la banalisation de la Shoah).
  • Le Coup de sifflet du couvreur, Mémoires de jeunesse de Robert Carré de 1923 à 1946, Mémoires, 1994 (Préface et présentation).
  • Guide du Soissons colonial, Éditions Syllepse et éditions de l’échelle du temple, 2020.

Pédagogie[modifier | modifier le code]

  • J’ai vécu au XVIIIe siècle, cédérom, CNDP, 2001.
  • J'enseigne, avec l'Internet, la Shoah et les crimes nazis, CRDP de Bretagne, 2002.
  • Oser le travail de groupe, avec Jacques Natanson et Isabelle Andriot, Les clefs du quotidien, CRDP de Bourgogne, 2008.
  • Jouer en classe en collège et en lycée, avec Marc Berthou, Fabert, 2013.
  • Des ceintures pour évaluer les compétences des élèves, avec Marc Berthou, Fabert, 2014.
  • Une parole juive contre le racisme (dir.), Syllepse, 2016-2018.

Fiction[modifier | modifier le code]

  • Dernières nouvelles de l'absence, nouvelles, Le Décaèdre, 2002.
  • Oubliez toutes ces histoires, nouvelles, L’Échelle du temple, 2018.
  • On ne sait pas grand-chose de la vie de A., roman, L’Échelle du temple, 2018.
  • La Cavale de Freddy Mbemba, polar, L’Échelle du temple, 2019.
  • Quand bave la police..., polar, L’Échelle du temple, 2020.
  • Mutineries de l'imaginaire, roman, L’Échelle du temple, 2023

Références[modifier | modifier le code]

  1. Cherbourg-Octeville en 2000, puis commune déléguée dans Cherbourg-en-Cotentin depuis 2016.
  2. Denis Mahaffey, ‘Dominique Natanson : militant contre le silence’.
  3. Notice biographique courte sur le site de Babelio.
  4. « Dominique Natanson, lutteur né », L’Union,‎ (lire en ligne).
  5. Voir Autour de la librairie d’Aron Natanson : Étude de la vie intellectuelle autour d'une librairie du Quartier latin, à travers les Carnets et la correspondance d'Armand Petitjean(1932-1938).
  6. « Tragique destin de Lucien Natanson et de ses parents », sur d-d.natanson.pagesperso-orange.fr (consulté le ).
  7. Voir Les Justes qui m’ont sauvé.
  8. Interview de Dominique natanson dans la revue en ligne Le Café pédagogique.
  9. Voir ses déclarations dans le clip 1 de Paroles juives contre le racisme : 4’47’’.
  10. Voir ses propositions de dispositif de stage dans la revue Les Cahiers pédagogiques, n°23, décembre 2011.
  11. « Apporter quelque chose de soi à Auschwitz », Les Cahiers pédagogiques, no 434,‎ (lire en ligne).
  12. Le Café pédagogique évoque la parution d'un travail réalisé avec ses élèves qui ont écrit à partir des dessins de l'ancien déporté d'Auschwitz-Monowitz, Serge Smulevic, voir : « - A la Une : Jeune mémoire », sur www.cafepedagogique.net (consulté le ).
  13. Patrick Petit-Ohayon, Transmettre l'histoire de la Shoah ( Biblieurope éditeur, 2000, page 64) évoque ce travail réalisé « avec participation de la classe de 3e du Collège Maurice Wajsfelner de Cuffies (Aisne), nom d'un enfant juif de 10 ans, déporté depuis Soissons et disparu à Auschwitz. Ce travail retrace les douloureux évènements et les déportations de Juifs qui vivaient encore dans le Soissonnais à la veille de la Seconde guerre mondiale, grâce à des témoignages et à des documents d'archive. »
  14. Discours du récipiendaire : « Mémoire juive en Soissonnais », Différences, no 139,‎ (lire en ligne).
  15. Anonymes, Justes et persécutés durant la période nazie : [1].
  16. Attribution du Prix Corrin contre l'oubli et la banalisation de la Shoah, dans Le Monde juif, n°149, 1993 et dans Le Monde de l'éducation, 1993.
  17. Le site de Dominique Natanson est ainsi évoqué par Gilles Karmasyn, en collaboration avec Gérard Panczer, Michel Fingerhut, Le négationnisme sur Internet - Genèse, stratégies, antidotes, dans Revue d’Histoire de la Shoah, 2000/3 (N° 170).
  18. « Mémoire Juive – Ce site est dédié à Miryam, Aron, Lucien Natanson… » (consulté le )
  19. Site recommandé par Le Café pédagogique : [2].
  20. Le Café pédagogique, 25 janvier 2009 : [3].
  21. Le site est présenté comme un outil pédagogique important par Barbara Lefebvre et Sophie Ferhadjian, Comprendre les génocides du XXe siècle comparer-enseigner, Éditions Bréal, 2007.
  22. Selon L'Union, 18 décembre 2002 : Internet utilisé comme outil de mémoire.
  23. Selon Daniel Letouzey, de l'Association des professeurs d'histoire-géographie : [4].
  24. François Jarraud le présente ainsi : « J'ai vécu au XVIIIe siècle est d'abord une immense base de données sur la société française au XVIIIe. Les 1686 documents concernent tous les métiers (36 catégories sociales) et tous les aspects (éducation, vêtement, loisirs, famille etc.) de la vie quotidienne. » : [5].
  25. Dans un article du Café pédagogique : [6].
  26. Fernand Muller, Manuel de survie à l'usage de l'enseignant (même débutant), L'étudiant éditeur, Prix Louis-Cros 2005 de l'Académie des sciences morales et politiques, page 387.
  27. Recension de son ouvrage Des ceintures pour évaluer les compétences des élèves par Les Cahiers pédagogiques : [7].
  28. Recension de son ouvrage Oser le travail de groupe par la revue Les Cahiers pédagogiques : [8].
  29. Recension dans la revue Les cahiers pédagogiques : [9].
  30. Cette utilisation du jeu pédagogique participe d'une pédagogie du détour, comme l'analyse Julie Poirier dans son travail universitaire intitulé Travailler autrement pour motiver : la pédagogie du détour, sur le site du CNRS : [10].
  31. Une de ces nouvelles a paru dans la revue de psychanalyse, Imaginaire et Inconscient, 2001/3, p. 105 à 110 : [11].
  32. Article de L’Union, 26 mars 2002 : La Shoah au cœur des nouvelles de Dominique Natanson.
  33. [12].
  34. Recension dans L’Anticapitaliste : [13].
  35. {https://nouveautes-editeurs.bnf.fr/annonces.html?id_declaration=10000000587766&titre_livre=Quand_bave_la_police...].
  36. L'Union, 30 septembre 2023, Le Soissonnais Dominique Natanson signe un roman uchronique.
  37. Denis Mahaffey, « Une nouvelle maison d'édition associative à Soissons », levase.fr, 30 octobre 2020.
  38. Différences, périodique du MRAP, n°138, février 1993, page 10.
  39. L'Aisne nouvelle, 14 décembre 1993, Le M.R.A.P. en assemblée, Dossiers locaux et lois Pasqua, Les anti-racistes veillent.
  40. Voir Le Vase communicant, n°287, 3 au 16 février 2020, page 10.
  41. L'Union, 13 avril 2017.
  42. Interview dans le Muslim Post : « En tant que juifs, dans les quartiers populaires, nous sommes extraordinairement accueillis ».
  43. « Le professeur d’histoire (...), Dominique Natanson, juif antisioniste, défend l’idée que toutes les manifestations du racisme doivent être combattues, pas seulement l’antisémitisme. » selon L'Union, 21 février 2019 : [14].
  44. Sa position antisioniste est rapportée par Hassina Mechaï, Middle East Eye, 9 octobre 2018 : [15].
  45. Voir son article : ‘’Après la déclaration Balfour, l’antisionisme du Bund polonais dans l’Entre-deux-guerres’’ : [16].
  46. En 2017, dans Le Monde : [17] et en 2021 : [18].
  47. Clavreul, Césaire et moi. De l’Innocence des uns et de la Conscience des autres. [19].
  48. Voir L’Union : Les hommes qui ont des rues à leur nom à Soissons le méritent-ils vraiment ? [20].
  49. David Perrotin et Jérôme Hourdeaux, « Une cinquantaine de plaintes annoncées contre un fichier diffusé par l’extrême droite », sur Mediapart, (consulté le )
  50. Fabien Leboucq, « Que sait-on de cette liste de personnalités «islamogauchistes» hébergée par Fdesouche ? », sur Libération (consulté le )
  51. Olivier Tesquet, « Liste d’islamo-gauchistes de Fdesouche : les concernés contre-attaquent en justice », sur Télérama, (consulté le )
  52. « Libération, Tribune : Frappes sur Gaza : «Vous n’aurez pas le silence des juifs de France» », sur liberation.fr, (consulté le )

Liens externes[modifier | modifier le code]