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Utilisateur:GaiusLater/Brouillon/René Lecavalier

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René Lecavalier (né le 5 juillet 1918 à Montréal, mort le 6 septembre 1991 à l'âge de 81 ans) est un commentateur sportif à la télévision, un journaliste et un animateur de radio. Au Québec, son nom est pour toujours associé à la Soirée du hockey, à Radio-Canada, émission télévisée principalement axée sur les activités du club de hockey Les Canadiens de Montréal.

Biographie[modifier | modifier le code]

Jeunesse[modifier | modifier le code]

Né le 5 juillet 1919 à Montréal, René Lecavalier suit le cursus classique au collège Mont Saint-Louis. En 1937, à l'âge de 19 ans, René Lecavalier entre à l’emploi de la Société Radio-Canada en tant que commis, où il distribue la paie et s’occupe de différentes tâches administratives[1]. En 1941, un collègue l’invite à auditionner pour un poste d’annonceur. Radio-Canada vient alors de créer son Service des nouvelles et cherche à combler les nouveaux emplois. Lecavalier n’a jamais ambitionné d’embrasser cette profession, et bien qu’il se laisse convaincre, il considère manquer de préparation. Ce sera un saut dans l’inconnu heureux. Le jeune homme intègre le service des annonceurs comme liseur de bulletins de nouvelles durant le jour. Il présente aussi des disques en français et en anglais. Tout en poursuivant cette nouvelle carrière, il conserve l’ambition de poursuivre une carrière d'hockeyeur, mais rapidement ce rêve est supplanté par celui de poursuivre une carrière d’annonceur[1].

Correspondant de guerre[modifier | modifier le code]

De 1942 et 1944, il est correspondant de guerre en Afrique du Nord au service des Nations unies . En novembre 1942, lors de l’opération Torch, les troupes étatsuniennes débarquent au Maroc. Le Maroc est alors libéré de l’influence du régime collaborationniste français de Vichy[2]. À cette occasion, Radio-Canda et CBC renforcent leur correspondant outre-mer. Des correspondants alimentent le bureau montréalais de Radio-Canada via les bureaux de Londres en nouvelles du front. D’autres correspondants sont basés à Londres ou à Alger. Ils y produisent du contenu et des programmes destinés aux zones occupées, notamment la France. René Lecavalier avec d’autres correspondants, dont François Bertrand et Paul Dupuis, s’embarque pour Londres. Alors que le caricaturiste Paul Dupuis anime l’émission Sur le qui-vive, René Lecavalier et François Bertrand débarquent à Oran puis s’installent à Alger, en Algérie française, où les jeunes annonceurs produisent des émissions de radio à destination des pays occupés.

Animateur de variétés[modifier | modifier le code]

De retour au pays en 1944, Lecavalier co-anime l’émission quotidienne P’tit train du matin dans laquelle il présente des romans-savons et des chansonnettes. En 1945, il chante dans une émission de variétés L’escargot d’or diffusée par Radio-Canada[3]. De 1945 à 1951, il est l’hôte de nombreuses émissions culturelles , dont « Les concerts symphoniques » et « Les chefs-d'œuvre de la musique ». Il participe, à la même époque, à plusieurs radio-romans[1].

Après quelques années d'animation à la radio, il devient annonceur de nouvelles. Coanimateur du P'tit train du matin avec Miville Couture, de 1944 à 1949, il se dirige ensuite vers la chronique sportive[1].

La soirée du hockey[modifier | modifier le code]

Le 11 octobre 1952, à 21 heures, René Lecavalier pilote la première la La Soirée du hockey sur les ondes de la télévision de Radio-Canada. L’émission débute alors que s’entame la troisième période, les propriétaires de l'aréna, le Forum, et du Club de Hockey Canadien de Montréal craignant alors que la rediffusion télévisée ne nuise à la vente de billets[4]. À partir de 1956, les matchs sont diffusés à partir de la mi-temps de la deuxième période . René Lecavalier se voit obligé d’user du passé simple pour décrire les faits saillants de la première période. Il faut attendre 1968 pour qu’une rencontre soit télédiffusée dans son entièreté. Diffusée pendant 51 ans, soit de 1952 à 2004, La Soirée du Hockey trône au sommet du palmarès nord-américain des émissions pour sa longévité. Lecavalier commente la première partie de hockey diffusée, à la fois, à la radio et à la télévision de Radio-Canada et devient l'animateur attitré.

La ligue du Vieux Poêle[modifier | modifier le code]

Le prédécesseur de René Lecavalier, Jean-Maurice Bailly, anime dès 1947 La ligue du vieux poêle, une émission dans laquelle il analyse avec des invités et des coanimateurs la rencontre présentée à la radio puis, après 1952, à la télévision. Comme il n’y a pas de studio au Forum, cinq minutes avant la fin de la deuxième période, le commentateur radio déboule vers la station sur René-Lévesque où l’attend un véritable poêle à bois autour duquel des comparses, dont Charles Mayer, Camille Desroches ou Zotique Lespérance, analysent à coup d’anecdotes28, de statistiques et de rires bien sentis dans le déroulement du match. Le décor se veut une réminiscence nostalgique d’une ruralité perdue et d’une sociabilité paysanne masculine. Le ton est convivial et perdure durant cinq saisons. La ligue du vieux poêle fonde une tradition télévisuelle qui perdure avec des émissions comme 110%, L’après-match LNH et d’autres. Le ton et le style familier feront école et l’expression « La Ligue du vieux poêle » se greffera dans la langue populaire pour désigner de manière un peu dérisoire et taquine les fidèles et les anciens d’un cercle masculin[5].

Le commentateur sportif[modifier | modifier le code]

Lecavalier quitte la bar de La Soirée du hockey en 1985. Il sort néanmoins ponctuellement de sa retraite au fils des années pour animer des évènements sportif d'importance internationales, telles qu'en 1972, durant la Série du siècle, l'affrontement entre les meilleurs joueurs de hockey canadiens et soviétiques et, en février 1987, Rendez-vous '87 à Québec, une série de deux matchs opposant une sélections de joueurs issus de la Ligue Nationale de Hockey (LNH) et de l'URSS, qui fut sa dernière prestation comme descripteur d'un match de hockey[6].

Toujours pour le compte de la télévision de Radio-Canada, il amorce sa carrière de commentateur aux Olympiques lors des Jeux de Rome en 1960 et fait partie de l’équipe de diffusion de Radio-Canada en 1964 (Innsbruck), 1968 (Tokyo), 1976 (Montréal), 1980 (Lake Placid) et 1984 (Los Angeles) en plus d’être l’un des principaux commentateurs lors de nombreux Jeux du Commonwealth et Jeux panaméricains1. Pendant les Jeux olympiques d'été de 1976, tenus à Montréal, il est le chef d'antenne à la télévision de Radio-Canada.

Contribution à la francisation du journalisme sportif[modifier | modifier le code]

Les origines du hockey restent difficiles à déterminer, mais il est certain que son introduction dans la province de Québec est surtout le fait des anglophones, quelque part avant les années 1870. L’une des dates à retenir est le premier match intérieur « codifié » ayant eu lieu au Canada : le 3 mars 1875, au Victoria Skating Rink, près de l’université McGill. C’est peut-être aussi vers cette époque que l’on remplace la balle ou le bouchon (bung) par une rondelle de bois plate, plus susceptible de rester sur la glace, et donc pour protéger les spectateurs. Le Rink est une simple patinoire, alors il n’y a ni bande ni sièges pour les spectateurs. La popularité du hockey, à la fin du XIXe siècle, est palpable surtout chez les anglophones. Vers 1900, le public des joutes est surtout formé d’anglophones. Mais les parties commencent à être couvertes par les journaux francophones malgré tout. La question du vocabulaire sportif, anglais à la base, commence donc à se poser sérieusement.

Lorsque les journaux francophones de Montréal commencent à donner des comptes rendus détaillés des joutes de hockey, après 1895, ils empruntent largement les termes techniques dont se sert la presse anglophone et dont les amateurs de hockey canadiens-français font un usage oral courant[7]. Les premiers gestes posés pour favoriser une francisation du vocabulaire du hockey proviennent du Bulletin du Parler français au Canada. Un premier glossaire est proposé en 1906 par la Société du Parler français au Canada[8]. Notons qu’à cette époque, on tente encore d’imposer le terme « gouret » au lieu de hockey, pour désigner le sport. Ce mot disparaîtra vers 1920, supplanté par hockey. Pour la « puck », le Bulletin propose le disque ou le caoutchouc avant rondelle. À partir de 1910, le journal Le Devoir d’Henri Bourassa entre dans le combat, même si ses journalistes ne sont pas toujours exemplaires en la matière. Mais celui qui personnifie le mieux ce combat pour la francisation des termes sportif, c’est l’abbé Étienne Blanchard[7].

Néanmoins, avec 45 ans de carrière, dont 33 comme commentateur sportif, René Lecavalier s’est érigé comme une figure incontournable de l’histoire du journalisme. Il participe à l’imaginaire de deux générations de francophones canadiens, participant à construire par sa langue des référents linguistiques et nationaux. Récipiendaire de plusieurs prix et honneurs pour sa contribution à la francisation de la terminologie du journalisme sportif, Lecavalier n’en demeurera pas moins un homme pétri d’humilité et conservera un sens aigu du travail d’équipe.

En 1959, la Société Saint-Jean-Baptiste de Montréal (SJBM) lui décerne – après décision unanime du jury – le Prix du Journalisme. La SJBM veut alors signaler l’importante contribution de René Lecavalier « à la francisation et à l’anoblissement du langage des sports »[9]. C’est la première d’une série de reconnaissance.

En 1992, René Lecavalier, âgé alors de 74 ans, accorde une entrevue au journaliste Jean Dion pour le magazine Circuit, une publication portant sur la langue et la communication. Il affirme alors qu’il a toujours fait les choses intensément, « et que quand c’est fini, c’est fini »18. D’un naturel humble, le gentleman souhaite alors avoir une retraite discrète : « Moins on parle de moi, plus je suis heureux. Ma vie a été racontée plusieurs fois. Mais je voudrais qu'on m'oublie et, surtout, qu'on ne croie pas que j'ai inventé quoi que ce soit. Dites-le dans votre article, s'il vous plaît », prie-t-il Jean Dion[10].

Lecavalier, détenteur de deux doctorats honoris causa pour l’excellence de sa contribution à la francisation du journalisme sportif, considère avoir été favorisé par les circonstances :

« “On m'a souvent qualifié d'inventeur, de précurseur du français sportif”, explique-t-il en entrevue. ‘Mais la chose a pris des proportions exagérées. Il faut tenir compte du contexte : le hockey était, aux débuts de la télé, le seul sport à être présenté de manière régulière, voire à être présenté tout court. Son ampleur est venue de là, et le fait que j'y sois associé ne tient qu'à ce que, à titre d'aîné à Radio-Canada s'intéressant au sport, je me suis vu confier la description des matchs[10].’ »

Le pionnier du journalisme sportif télévisé raconte que :

« La télévision était, à l'époque, un phénomène entièrement nouveau. Il n'y avait pas d'experts, pas de formule préétablie, pas de lieu de formation. J'ai donc appris le métier en le faisant, sans stratégie particulière. L'important, c'était de changer à mesure qu'on avançait, de faire en sorte que la langue bouge. On ne voulait surtout rien figer de manière irréversible[10]. »

Jean Dion souligne que René Lecavalier « emploie presque toujours le terme “nous” pour désigner les responsables de la petite révolution qui naissait ». Les noms de Jean-Maurice Bailly, de Miville Couture, ses camarades de la première heure, sont évoqués parce qu’« [il] voit dans l'essor du français sportif un travail collectif dont lui-même n'aura en définitive été que l'un des agents »20. Lecavalier explique sa méthode de travail collectif :

« Souvent, les gens nous écrivaient pour suggérer un mot, une expression. D'autres nouveautés surgissaient, par exemple, lors des longs voyages où nous avions amplement le temps de lire. Au hasard, je retenais les termes qui me semblaient intéressants. Nous en faisions ensuite l'essai et, lorsqu' on voyait que ça ne fonctionnait pas, que ça ne correspondait pas à la réalité ou que ça sonnait faux, on les mettait de côté. Il n'y avait pas de plan défini: l'intuition servait de fil conducteur. […] Les premiers pas se sont faits prudemment : on voulait surtout éviter le faux pas. Mais, rapidement, je devais constater que la seule façon d'apprendre, c'était de plonger tête première. C'est ce que nous avons fait[10]. »

La Voix du hockey reconnaît tout de même éprouver une passion pour la « musique qui s'en dégage lorsqu'elle est parlée correctement22. » Il concède également qu‘il n’y avait aucune tentation dogmatique ou normée dans sa démarche de francisation; l’usage dictait ce qui était bon :

« [il] y a une francisation, graduelle, qui était nécessaire, note-t-il. Mais je n'ai jamais cherché à être dogmatique. Je suggérais des mots, et seul l'usage pouvait dire s'il était justifié d'y avoir recours. J'ai d'ailleurs aussi fréquemment emprunté à d'autres langues : en appliquant au hockey le mot lob, par exemple, ou en parlant d'un smash ou d'un match[10]

L’exercice de la francisation n’en est pas un uniquement de traduction littérale. Lecavalier entreprend une véritable démarche réflexive :

« Je croyais nécessaire de tenir compte des origines d'un sport, ainsi que de témoigner de ce que certaines expressions soit ne souffrent pas la traduction, soit n'ont pas d'équivalent satisfaisant. Il peut parfois devenir absurde de franciser pour franciser. Il faut laisser sa place à la musique du propos et savoir l'adapter à une situation donnée[10]. »

Avec le regard du sage faisant le bilan de sa vie, Lecavalier lâche ceci :

« Je regarde les choses aujourd'hui, et je me dis que ce que j'ai fait, le plus parfait des débutants d'aujourd'hui pourrait le faire. D'ailleurs, je ne réécoute jamais mes vieux reportages, car je sais que je trouverais le tout particulièrement moche. J'étais beaucoup moins sûr de moi que ne le sont les Garneau, Lebrun, Quenneville, etc. Si on me demandait de conseiller un jeune, je ne saurais absolument pas quoi lui dire[10]. »

Or, ce rôle de mentor désavoué, il l’a bien joué. Gilles Tremblay, le premier à avoir occupé le poste d’analyste des matchs télévisés du Canadien de Montréal en 1971, a confié à plusieurs personnes l’accompagnement précieux que René Lecavalier lui a prodigué. Feu Jean Pagé (1946-2019), animateur durant 15 ans de La Soirée du hockey et analyste à l’émission 110% (TQS), témoignait en 2014 dans les pages du Journal de Montréal à l’annonce du décès de Tremblay : « [Gilles] m’a toujours dit que René Lecavalier l’avait beaucoup aidé. Il a été très généreux avec Gilles, tant dans son [vocabulaire] français que dans son élocution »25.

Dion insère en cartouche dans son article, comme un gentil pied de nez au gentleman, cette citation de Marc Robitaille dans son livre Des histoires d’hiver avec des rues, des écoles et du hockey (VLB, 1991) : « J'aime encore mieux M[onsieur] René Lecavalier parce qu'il parle toujours avec plein de mots nouveaux[10]

Honneurs[modifier | modifier le code]

• 1959 : Prix Olivar-Asselin, prix de journalisme, de la Société Saint-Jean-Baptiste

• 1960 : Trophée Laflèche, Commentateur sportif de l'année[11]

• 1966 : Trophée Foster-Hewitt, Meilleur commentateur au Canada[11]

• 1970 : Membre de l'Ordre du Canada[12]

• 1970 : Membre du Temple de la renommée du hockey

• 1973 : Membre de l'Ordre de la Fidélité française[1]

• 1979 : Ordre des francophones d'Amérique[1]

• 1987 : Chevalier de l'Ordre national du Québec[1]

• 1994 : Intronisé au Panthéon des sports canadiens[13]

• 1996 : Sports Media Canada Achievement Award

Il a, en outre, reçu un doctorat honoris causa de l'Université de Montréal et de l'.

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. a b c d e f et g Ordre national du Québec, « René Lecavalier (1918-1999) | Chevalier (1987) » Accès libre, sur Site officiel de l'Ordre national du Québec, (consulté le )
  2. Aimé-Jules Bizimana, « Les correspondants de guerre canadiens-français de 1939-1945 », Bulletin d'histoire politique, vol. volume 16, no numéro 2,‎ , p.168 (lire en ligne Accès limité)
  3. Radio-Canada, « Archives | La voix de René Lecavalier » Accès libre, sur Radio-Canada, (consulté le )
  4. Sophie Caron, « La Soirée du hockey, un jeu d'équipe » Accès libre, sur Radio-Canada, (consulté le )
  5. Jean Dion, « Souvenirs retrouvés », sur Le Devoir, (consulté le )
  6. Guy Fournier, « René Lecavalier est bel et bien mort » Accès libre, sur Journal de Montréal, (consulté le )
  7. a et b Donald Guay, L'histoire du hockey au Québec : Origine et développement d'un phénomène culturel, Saguenay, JCL éditions, , 293 p. (ISBN 978-2-920-17681-2), p. 218
  8. Benoît Melançon, « La langue du hockey à travers les âges (comme) » Accès libre, sur L'Oreille tendue, (consulté le )
  9. « Bravo, René Lecavalier! », Radiomonde et télémonde,‎ , p. 9 (lire en ligne [PDF])
  10. a b c d e f g et h Jean Dion, « Je vous parle d'un temps que les moins de vingt ans eux-mêmes devraient connaître... », Circuit,‎ , p. 4 (lire en ligne [PDF])
  11. a et b « René Lecavalier | Temple de la renommée du hockey » Accès libre, sur Temple de la renommée du hockey, (consulté le )
  12. « La gouverneure générale du Canada | Distinctions| Récipendiaires | René Lecavalier_Ordre du Canada » Accès libre, sur La gouverneure générale du Canada | Distinctions| Récipendiaires, (consulté le )
  13. « Biographie René Lecavalier » Accès libre, sur Panthéon des sports du Québec, (consulté le )