Noël Fiessinger

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Noël Fiessinger
Collection de portraits [s.d.] Biu Santé
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ParisVoir et modifier les données sur Wikidata
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Noël Armand FiessingerVoir et modifier les données sur Wikidata
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Noël Armand Fiessinger, né le à Thaon-les-Vosges et mort le à Paris, est un médecin et physiologiste français.

Biographie[modifier | modifier le code]

Une grande famille de médecins[modifier | modifier le code]

Il est l'arrière petit-fils de Jacques Samuel Fiessinger, infirmier major à l'hôpital de Strasbourg après les campagnes napoléoniennes. Son grand père sera médecin cantonal à Mutzig. Son père Charles Fiessinger (1857-1942), qui quittera l'Alsace après les événements de 1870, sera lui aussi médecin dans les monts du Jura, à Oyonnax, puis à Paris à partir de 1901; il met un terme à la pratique médicale au début des années 1930. Ce dernier, correspondant national de l'Académie nationale de médecine (1896), a dirigé pendant plusieurs dizaines d'années Le Journal des praticiens, de 1901 à sa mort, a collaboré à des périodiques comme Candide ou Le Figaro, et a publié de nombreux ouvrages[1].

Carrière médicale[modifier | modifier le code]

Il commence ses études de médecine à Lyon, nommé major à l'externat en 1900. En 1904, il est interne des Hôpitaux de Paris. Il exerce alors dans le service du professeur Anatole Chauffard qu'il considère comme son grand maître.

Durant la guerre de 1914-1918, Noël Fiessinger s'engage et dès le début du conflit il rejoint le front ; il est rapidement affecté au laboratoire d'un centre hospitalier (Montdidier) où il crée un laboratoire de fortune dédié à la biologie des plaies de guerre. Ses travaux se concluent par la publication d'un Traité de Biologie de la plaie de guerre, en collaboration avec le professeur Pierre Delbet.

Son engagement et ses missions aux postes les plus avancés lui valent la Croix de guerre et la Légion d'honneur à titre militaire. Au début de la seconde guerre mondiale, âgé de 60 ans, il s'enrôle à nouveau et suit les forces armées lors de l'embarquement à Dunkerque. Il est un des rares médecins à avoir les médailles militaires pour les deux guerres mondiales .

Revenu à la vie civile, il travaille sur les ferments des leucocytes (ouvrage paru en 1920) et l'exploration fonctionnelle du foie (ouvrage paru en 1925). Il est agrégé et nommé médecin des hôpitaux en 1920, chef de service en 1925, professeur de médecine expérimentale en 1931. Six fois lauréat de l'Académie de médecine (1910, 1915, 1917, 1918, 1924) et trois fois lauréat de l'Académie des sciences (1920, 1924), il a été prix Montyon pour la médecine et la chirurgie.

Il accumule les titres et les honneurs : codirecteur du Journal des Praticiens, vice-président de l'Association de la Presse médicale française, président de la Société de pathologie comparée, président de la Société anatomique, vice-président de la Société de biologie, officier de la Légion d'honneur... Il a été élu à l'Académie de médecine dans la section médecine le 15 octobre 1940, succédant à l'illustre neurobiologiste Pierre Marie.

À la retraite du professeur Carnot en 1939, il est nommé à la chaire de Clinique médicale de l'Hôtel-Dieu, mais la Deuxième Guerre mondiale le mobilise le 3 septembre 1939 avec fonction de consultant de l'Armée du Nord (1re armée), et ce n'est que le 13 octobre 1940 sous l'occupation qu'il prendra en charge la chaire de l'Hôtel-Dieu. À la fin de sa leçon d'ouverture, le médecin général Mahaut lui remit la croix de guerre, si bien que Fiessinger portait les croix de guerre des deux conflits mondiaux.

Il s'est investi dans le syndicalisme médical et a été Président de la Chambre syndicale des médecins de la Seine et président de la Confédération des syndicats médicaux français (CSMF).

Il meurt en son domicile, 16 Boulevard Raspail dans le 7e arrondissement, le 15 janvier 1946 [2].

De nombreuses salles dans plusieurs hôpitaux parisiens portent le nom du professeur Fiessinger (hôpital Laennec, hôpital Saint-Antoine…), ainsi qu'un bâtiment du CHU d'Angers.

Polémiques[modifier | modifier le code]

Noël Fiessinger est le fils de Charles Fiessinger, royaliste, soutien assumé de l'Action française, ami et médecin de Charles Maurras[3]. Charles Fiessinger, qui publie quelques articles dans L'Action française[4], a été l'un des animateurs principaux des banquets médicaux d'Action française dans les années 1930, à Paris et en province[5]. Il loue Maurras, qu'il a soigné lorsque ce dernier était en prison (1936-37) pour provocation au meurtre, lors d'une réunion en hommage au "maître du nationalisme intégral" en 1937[6]. Il s'intéresse aussi aux étudiants d'Action française[7].

Proche de jeunes médecins d'origine juive comme Louis Lyon-Caen, Robert Debré[8] ou Maurice Tubiana[9], Noël Fiessinger inspire et dirige en 1939 une thèse de médecine intitulée Aspect médical et social du problème des étrangers en France, rédigée par Albin Faivre[10],[11]. Un chapitre y est en particulier consacré à « l'envahissement de la profession médicale par les étrangers et principalement par les Israélites. » Ouvertement antisémite et xénophobe[12],[13], la thèse reprend largement les thèmes idéologiques de l'Action française[14]. Médecin et historien, auteur d'une étude consacrée à La Médecine française et les juifs, 1930-1945, Henri Nahum souligne à ce propos qu'« il est inhabituel qu'une thèse de médecine soit consacrée à un sujet autre que proprement médical, en particulier à un sujet social et, à plus forte raison, politique [...] On peut donc raisonnablement penser que les auteurs de ces deux thèses ainsi que les présidents ont voulu exprimer avec éclat leurs opinions et qu'ils n'ont pas été désavoués par les autres membres du jury[15]. »

Travaux et publications[modifier | modifier le code]

Le Docteur Fiessinger,Chanteclair, 1926
Le Docteur Noël Fiessinger, Chanteclair, 1926

Il est à l'origine de la découverte de la maladie de Fiessinger-Leroy-Reiter, et a élucidé l'histogenèse des cirrhoses (Thèse de Doctorat en 1908).

Ses travaux de recherche ont été publiés dans plus de 700 articles et ses manuels et traités médicaux ont été des références durant de nombreuses années:

  • Exposé des titres et des travaux scientifiques du Dr Noël Fiessinger, Paris : Impr. de C. Schlaeber, 1910, Texte intégral.
  • « Feuillets de laboratoire du praticien », Journal des Praticiens, 1912.
  • Les ictères toxiques et leur traitement, Paris, Maloine, 1913.
  • Les pronostics du praticien en clientèle, Paris, A. Maloine, 1923.
  • La médecine française au Maroc, Paris, A. Maloine, 1923, lire en ligne sur Gallica.
  • Les ferments des leucocytes en physiologie, pathologie et thérapeutique générales, Paris, Masson et cie, 1923.
  • Exposé des titres et des travaux scientifiques du docteur Noël Fiessinger, Coulommiers, Impr. Paul Brodard, Paris, Masson et Cie, éditeurs, 1929, Texte intégral.
  • Anémies. Le traitement par la méthode de Whipple, Tours, Impr. Arrault et Cie, Paris, Gaston Doin et Cie, éditeurs, 1930.
  • La méthode comparative en pathologie, [leçon inaugurale donnée à la Faculté de médecine de Paris, chaire de pathologie expérimentale et comparée, le 17 novembre 1931], [Paris], [impr. de Tournon], 1931.
  • Physiopathologie des syndromes endocriniens, Paris, Masson et Cie., 1933.
  • Physiopathologie des traversées chimiques et bactériennes dans l'organisme, Paris, Masson et Cie., 1934.
  • Nouveaux procédés d'exploration fonctionnelle du foie, 1934.
  • Quelques remarques sur les artérites ectasiantes de l'endocardite maligne, Paris, Masson, 1935.
  • Endocrinologie, Paris, Masson et Cie, 1935, 2ème édition, 1940.
  • Traitement des ictères infectieux, Paris, Baillière, 1936.
  • Explorations fonctionnelles, 1937.
  • Quelques vérités premières (ou soi-disant telles) sur les maladies du foie, Paris, Masson et Cie, 1937.
  • Les diagnostics biologiques, 1938.
  • La Traversée digestive de l'eau, Saint-Dizier, Impr. de Brulliard, 1939.
  • Les premiers pas en médecine, Paris, Masson et cie, 1940.
  • Les Réserves de la santé en face de la maladie, Paris, Palais de la Découverte, 1941.
  • Syndromes et maladies, Paris, Masson et cie, 1942.
  • Les déficiences vitaminiques et hormonales, Paris, Masson et cie, 1942.
  • Diagnostics difficiles, Paris, Masson, 1943.
  • Étapes de maladies, Paris, Vigot, 1945.
  • Les diagnostics biologiques et fonctionnels, Paris, Maloine, 1949.


En collaboration
  • avec Pierre Marie, Les ferments digestifs des leucocytes, protéase et lipase : le zymodiagnostic : applications à la physiologie et à la pathologie générale, au diagnostic clinique et à la thérapeutique moderne, A. Maloine, Paris, 1910, lire en ligne sur Gallica.
  • avec J Castaigne, Maladies du foie et des voies biliaires, méthodes générales de diagnostic et de thérapeutique, Paris, A. Poinat, 1918.
  • avec Lucien Panisset, Les maladies infectieuses des animaux transmissibles à l'homme, Paris, Vigot frères éditeurs, 1933.
  • avec Henry Walter, Nouveaux procédés d'exploration fonctionnelle du foie, Paris, Masson et Cie. , 1934.
  • avec Alfred Gajdos, Urticaire et histamine, Paris, Vigot, 1937.
  • avec Louis Bory, Clinique et pathologie comparée : vénéréologie, cancérologie, dermatoses, médecine générale, phyto-pathologie, Paris, Masson, 1939.
  • avec Henri René Olivier et Maurice Herbain, Les diagnostics biologiques, Paris, Maloine, 1944.
  • avec Michel Albeaux-Fernet, Les Hormones en thérapeutique, Paris, A. Legrand, 1948.

Distinctions et reconnaissance[modifier | modifier le code]

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Cf. son dossier de la Légion d'honneur ( chevalier en 1921 ): Dossier de la Légion d'honneur de Charles Albert Fiessinger , L'Archer, novembre 1932, "Le docteur Charles Fiessinger", p. 274-287 , Dictionnaire national des contemporains, tome 5, Journal des débats, 21 juillet 1935, "Causerie médicale". Liste de ses ouvrages sur le site IdRef, Charles Fiessinger
  2. Archives de Paris 7e, acte de décès no 99, année 1946 (vue 10/31)
  3. L'Action française, 19 mars 1942, "Le docteur Charles Fiessinger", p. 1 et 2: témoignage de Maurras (qui fait faussement de Fiessinger un natif de la Franche-Comté). C'est Paul Bourget, qu'il soigne, et Lucien Moreau qui lui ont fait rencontrer Maurras à près de 70 ans, après la Première Guerre mondiale. Fiessinger a soigné Maurras et est devenu son ami. Dans une lettre de 1944, Maurras le qualifie de « cher et grand ami regretté »: Jean-Louis Lagor ( alias Jean Madiran, La philosophie politique de Saint-Thomas, lettre-préface de Charles Maurras, Les Éditions nouvelles, p. 31. Cf. aussi Charles Maurras, Lettres de prison, Flammarion, 1958, p. 63, 68, 242. Il fréquente dans des dîners les tenants académiques de droite liés à l'Action française: L'Archer, novembre 1932: évocation d'un dîner avec Maurras, Paul Bourget ( qu'il soigne ), Abel Bonnard, André Bellessort, Louis Bertrand, Léon Daudet.
  4. L'Action française, 23 août 1931, Ch. Fiessinger, "Sur la lassitude"
  5. L'Action française, 24 mai 1927, "Le banquet des médecins d'Action française", L'Action française, 11 juin 1931, L'Action française, 16 juin 1932 (discours de Ch. Fiessinger, qui préside le banquet), L'Action française, 19 juin 1933, (discours de Ch. Fiessinger), L'Action française, 7 juin 1934, (annonce du banquet médical parisien et banquet médical de Vittel), Ibid., 8 juin 1934, L'Action française, 18 mars 1935, "Un magnifique banquet corporatif des professions libérales" ( à Bordeaux ), Ibid., 17 mai 1935, Almanach de l'Action française, 1936, p. 191, L'Express du Midi, 10 mars 1936, "Un banquet corporatif des professions libérales à Reims", p. 2, L'Action française, 22 mars 1939 (discours de Fiessinger lors du banquet, qu'il préside)
  6. L'Action française, 30 octobre 1937, Albert Marty, L'Action française racontée par elle-même, NEL, 1986, p. 345
  7. L'Etudiant français (organe des étudiants d'AF), avril 1936 'Une consultation du dr C. Fiessinger. L'école du praticien", Ibid., 10 janvier 1937, "P.C.B."
  8. Henri Nahum, La Médecine française et les Juifs 1930-1945, L'Harmattan, 2006, 412 pages, p. 78. (ISBN 978-2747598514)
  9. Maurice Tubiana, N’oublions pas demain. Mémoires, Bernard de Fallois, 2007, 505 pages, p. 184
  10. Bruno Halioua, Blouses blanches, étoiles jaunes: l'exclusion des médecins juifs en France sous l'Occupation, Liana Levi, 2002, 285 pages, p. 45.
  11. Bénédicte Vergez-Chaignon, « Les milieux médicaux et l'Action française », dans Michel Leymarie (dir.), Jacques Prévotat (dir.), L'Action Française. Culture, société, politique, Presses Universitaires du Septentrion, 2008, 434 pages, p. 118.
  12. Nahum, p. 70
  13. Gérard Noiriel, Immigration, antisémitisme et racisme en France (XIXe-XXe siècle) : Discours publics, humiliations privées, Fayard, 2007, 718 pages, note 90, p. 259
  14. Nahum, p. 71. Le nom de Noël Fiessinger n'est cependant jamais cité lors des banquets médicaux de l'AF.
  15. Nahum, p. 69
  16. « Comptes rendus hebdomadaires des séances de l'Académie des sciences », sur Gallica, (consulté le )

Annexes[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Marcel Lelong, « Les nouveaux académiciens. Le professeur Noël Fisessinger », Paris médical : la semaine du clinicien, 1940, n° 116_118, p. 422, J.-B. Baillière et fils, 1940, Texte intégral.
  • Henri Gougerot, « Notice nécrologique du professeur Noël Fiessinger (24 décembre 1884 - 15 janvier 1946) », Bulletin de l'Académie nationale de médecine, 1946, p. 128-132, J.-B. Baillière (Paris), Masson (Paris), Académie nationale de médecine (Paris), lire en ligne sur Gallica.
  • Noël Fiessinger - 1881-1946, [S.l. , s.n.], 1952, Paris, impr. Chantenay, 1 vol. (30 p.)

Liens externes[modifier | modifier le code]