Forêt des Landes

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Forêt des Landes

La forêt des Landes de Gascogne (en occitan gascon las Lanas) est le plus grand massif forestier d'Europe.

Article similaire: Landes de Gascogne

Géographie

La forêt des Landes (appelées Landes de Gascogne, et autrefois Landes de Bordeaux) s'étend sur une grande partie des départements français des Landes et de la Gironde. Elle déborde également sur les départements du Lot-et-Garonne et du Gers. Le massif des Landes donne naissance à quelques fleuves (la Leyre, le Boudigau, etc.) et des rivières (le Ciron, le Gat mort, etc.).

Plantation

Elle est constituée principalement de pins maritimes.

Contrairement à beaucoup d'autres forêts européennes, elle est presque entièrement constituée de forêt plantée et exploitée industriellement. La plantation massive de pins a été amorcée en Pays de Buch pour stopper la progression des sables mobiles et assainir le sol dès le XVIIIe siècle. Ces plantations se traduisent par des caractéristiques très observables et des conséquences mesurables :

  • On peut observer des parcelles où tous les arbres ont été plantés simultanément et ont donc le même âge et la même taille (contrairement à une forêt primaire).
  • Les parcelles sont parcourues de larges coupes et de chemins (destinés à limiter la propagation des incendies et à faciliter l'approche des troupes de pompiers) qui quadrillent la forêt sur des kilomètres. Ces larges coupes et ces chemins sont appelés des pare-feux.
  • On trouve des équipements spécifiques de lutte contre les incendies de forêt : tours d'observation, bassins de stockage d'eau, chemins, etc.
  • Le nombre d'incendies et leur gravité a considérablement décru depuis les dernières catastrophes des années 1950 et 1960.
  • En se promenant dans cette forêt, on trouve des traces multiples des coupes d'éclaircie, des coupes rases (en particulier, des stocks de bois coupé en bordure de chemin).

Histoire

La plus grande partie de la zone aujourd'hui occupée par la forêt des Landes était marécageuse et très faiblement habitée jusqu'au XIXe siècle. C'est cette période de l'histoire locale dont des traces sont conservées dans la mémoire locale par des personnages comme le berger landais perché sur ses échasses.

Toutefois, la forêt a été plantée en manière de réhabilitation et en vue de tirer un parti économique important de cette région peu développée industriellement.

Dans les années 1970, certaines parties de la forêt ont cédé la place localement à des exploitations agricoles intensives (en particulier pour la culture du maïs) sans pour autant perdre sa nature traditionnelle.

Aujourd'hui, la forêt des Landes de Gascogne est à cheval sur trois départements (Landes, Gironde et Lot-et-Garonne). Sa surface actuelle est évaluée à environ un million d'hectares, dont les 9/10 sont exclusivement constitués de pins maritimes. Mais il existe au sein de ce pinhadar (massif de pins plantés en langue gasconne) une forêt naturelle, variée, héritée du boisement post-glaciaire de cette partie du Sud-Ouest : le pin y côtoie le chêne, l'aulne, le bouleau, le saule, le houx. Sa zone de prédilection est le bord des cours d'eau, terrains particulièrement biens drainés. Cette forêt-souche était vraisemblablement plus étendue jusqu'au milieu du Moyen Âge ; à partir de là, la mise en place d'un climat plus humide et frais et surtout les défrichements liés à l'extension de l'activité pastorale et au besoin en bois de construction vont entraîner le recul des zones forestières entre le XIVe siècle et le XVIIIe siècle.

La loi de 1857

On retrouve les traces écrites de plantations de pins dès le XVe siècle dans les Landes : le premier document en faisant état sont les Coutumes de Dax. La consultation de la Carte de Belleyme, dont les relevés débutent dès les années 1760 à l'initiative de l'Intendant Charles Boutin, autorise à relativiser l'idée répandue que les Landes étaient un « désert » avant le XIXe siècle : de nombreuses exploitations agricoles landaises (les « quartiers ») possèdent une plantation de pin à disposition. Les vallées de l'Estrigon ou de la Leyre, le Marensin et le Pays de Born sont déjà en bonne partie plantés de pins. L'évolution proto-industrielle du département s'est finalement amorcée au XVIIIe siècle. Mais en 1857, une loi va accélérer le processus : Napoléon III, ainsi qu'une partie de l'élite politique d'Aquitaine ne sont pas intéressés par une région qui vit sous un régime qualifié alors d'archaïque et d'improductif : il s'agit d'un système agropastoral d'autosubsistance, où l'élevage ne sert qu'à fournir les champs en fumier, statut de libre usage d'immenses parcelles de landes communales pour nourrir les moutons et les brebis (quasi droit coutumier de libre-parcours). Deux opinions s'opposent alors : d'un côté, la classe politique, désireuse de « modernité » supposant la lande comme étant un paysage inutile ; de l'autre, les Landais, laboureurs ou métayers, conscients que sans lande, l'agriculture est impossible. Napoléon a choisi son camp. La Loi d'assainissement et de mise en culture des Landes de Gascogne peut être résumée en trois aspects. Elle s'adresse, en premier lieu, à une centaine de communes du nord des Landes et du sud de la Gironde, détentrices de plus de la moitié des terrains (les communaux), recouverts de végétation basse (fougères, bruyères, ajoncs, genêts, herbes, mousses, etc.) sur un substrat sablonneux, acide et pauvre :

  1. Les communes doivent assainir les communaux par drainage, afin d'enlever le surplus d'eau de la partie capillaire de la nappe phréatique et ainsi rendre le sable apte à la plantation. Le creusement des crastes (fossés de drainage) se fait évidemment aux frais des villages.
  2. Les communes doivent vendre aux enchères leurs communaux à des propriétaires privés, à raison d'un douzième chaque année pour ne pas brusquer cette réforme foncière.
  3. Les propriétaires ont à leur charge de rentabiliser les sols par la plantation (la loi n'excluait pas que les communes plantent avant de vendre, mais l'investissement était bien trop lourd). Ce serait une erreur de croire que la loi obligeait à planter du pin : les acheteurs ont eu le choix. Mais quitte à planter quelque chose dans cette partie de la Gascogne, autant choisir une essence que l'on connaît, que l'on sait planter et qui rapporte rapidement. Il y eut des tentatives d'acclimatation d'essences étrangères qui échouèrent pour la plupart.

La conséquence majeure est connue : l'extension du massif forestier jusqu'à 1914, année où disparaissent les derniers hectares de lande à Lencouacq. Mais les implications socio-économiques furent terribles durant une trentaine d'années : les premiers grands acheteurs de parcelles étaient les alliés du régime, issus de la bourgeoisie parisienne et bordelaise. Les habitants des Landes qui auraient eu posssibilité d'accéder à la propriété des parcelles mises en vente ont eu l'impression d'une spoliation ; les bergers, mécontents de leur côté de voir disparaître les terrains de parcours, apportèrent leur concours aux propriétaires landais : incendies de nombreuses parcelles afin de créer une mauvaise presse autour de la loi de 1857, jusqu'à en menacer son existence même dans les années 1870. L'impact de ces actions fut réel et une bonne partie des terrains furent vendus et rachetés par la bourgeoisie foncière locale. C'est davantage la disparition du système agropastoral qui aura une résonance bien plus profonde : en 1850, un million de moutons et brebis divaguent sur de vastes parcelles de landes publiques (entre 50 et 60% des terrains sont communaux) et fournissent en fumier les métairies, à raison d'un troupeau de cent bêtes pour un champ de quatre hectares. En 1914, il ne reste plus que deux cent cinquante mille bêtes, les derniers hectares de landes ont disparu, les terrains sont privés à plus de 80% et ne sont donc plus libres d'usage. Pour compléter le tableau, la grande majorité des parcelles de pin ont été plantées entre 1857 et 1870. Elle n'ont, par conséquent, pas pu être travaillées pour leur résine avant 1890-1900. Trente ans, une génération d'hommes : c'est la durée du malaise social et économique qui s'est saisi des Landais, conscients qu'il fallait abandonner leur ancien système agricole pour le remplacer par la sylviculture ; mais les choses ont été plus lentes que prévu. L'élément le plus éloquent est le nombre de missives qui vont circuler dans les années 1870 et 1880 de mairies à mairies, de mairies à gendarmeries, sur lesquelles les rédacteurs sont démesurément alarmistes : tous s'attendent à une révolution tant la situation est tendue. La révolution escomptée n'éclatera pas, pas encore : la société landaise héritée du métayage est ainsi faite que les métayers, pris dans une gangue de paternalisme protecteur et castrateur à la fois, ont appris à se taire. Trente ans plus tard, dans l'entre-deux guerres, la révolte des métayers gemmeurs sera d'autant plus violente, exutoire d'une pression socio-économique de plus de soixante ans… mais c'est là une autre histoire.

Industrie

Après avoir connu pendant la première partie du XXe siècle un essor important, les industries du bois, du papier et de la gemme (résine du pin récoltée sur l'arbre) sont devenues des acteurs notables de l'économie régionale.

Une filière économique complète est organisée autour du bois :

Au contraire, la gemme qui reposait sur une collecte exigeant une main d'œuvre importante a presque totalement disparu au profit de technologies chimiques plus courantes. On trouve ainsi des entreprises de transformation/distillation chimique comme la DRT qui utilisent les sous-produits de l'exploitation du pin.

Avant le milieu du XIXe siècle, seul l'élevage extensif des brebis dans la lande, permettait la production d'un engrais (soutrage) qui permettait la culture du seigle principalement avec une pratique sur billon, pour limiter l'influence de l'humidité pendant l'hiver. La disparition de la lande par un semis généralisé de pin a entrainé la disparition de cette culture et des bergers sur échasses qui en sont le stéréotype. La prochaine image landaise sera le gemmeur et son hapchot.

Liens internes

Modèle:Landes de Gascogne

Bibliographie

  • SARGOS, Jacques, Histoire de la Forêt landaise - Du désert à l'âge d'or, Bordeaux, L'horizon chimérique, 1997, rééd. en 2004.