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Auguste Achte

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Auguste Achte
Biographie
Naissance
Décès
Voir et modifier les données sur Wikidata (à 43 ans)
Virika (d)Voir et modifier les données sur Wikidata
Nom de naissance
Auguste Amand AiméVoir et modifier les données sur Wikidata
Nationalité
Activités
Autres informations
Ordre religieux

Auguste Amand Aimé Achte, né le [1] à Warhem, près de Dunkerque, dans la Flandre française et mort le à Virika, dans le protectorat de l'Ouganda, est un missionnaire français catholique, membre des Pères blancs, qui fut un des pionniers de l'Église en Ouganda, un linguiste et un ethnographe de ces régions.

Maison-Carrée, maison-mère et noviciat des Pères blancs.

Auguste Achte (toutes ses initiales commencent par A) naît[2] dans une famille de paysans[3] flamands pieuse (et flamingante, comme dans toutes les campagnes de Flandre française à cette époque) de quinze enfants. Le jeune Achte sent très tôt la vocation missionnaire en lisant entre autres la vie de Théophane Vénard. Il est envoyé au petit séminaire d'Hazebrouck[4] à quatorze ans. Il demande son entrée à la Société des missionnaires d'Afrique à l'âge de dix-neuf ans. Il fait aussitôt son noviciat[5] des Pères à Maison-Carrée, près d'Alger, puis son scolasticat à Carthage, où il est ordonné prêtre en 1885 à l'âge de vingt-quatre ans. Deux de ses frères seront également missionnaires : Stanislas rejoint en 1888 l'ordre de Cîteaux (les cisterciens) et sera envoyé à Pékin, tandis que Jérémie s'apprête[6] à devenir frère coadjuteur des Pères blancs. Sa sœur et filleule Germaine entrera en 1891 chez les religieuses de Saint-Joseph de Nazareth, sous le nom de Sœur Marie-Joseph.

Auguste Achte se distingue par ses dons intellectuels. Il est affecté par ses supérieurs à la faculté théologique des Pères blancs à leur mission de Jérusalem pour la formation des futurs prêtres melkites (dont la plupart sont originaires des provinces de Palestine et de Syrie[7]) à Sainte-Anne. Comme tous les Pères blancs à cette époque, Auguste Achte avait appris l'arabe obligatoirement dès son arrivée en Afrique du Nord[1].

Afrique orientale

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En 1889, il demande de partir pour l'Afrique équatoriale, et il est envoyé à la procure des Missionnaires d'Afrique de Zanzibar, où il commence l'étude du swahili, langue véhiculaire dans toute l'Afrique orientale. En plus du flamand, du français, bien sûr du latin, puis de l'arabe et du swahili, il a par la suite appris le luganda, le runyoro-rutoro et le kiziba, et a réalisé des traductions d'évangiles, des rédactions de catéchismes, de recueils de chants, d'ouvrages de spiritualité, etc. dans ces langues. En outre, le P. Achte s'est mis à apprendre l'anglais pour communiquer avec les autorités coloniales britanniques, bien qu'au début (au moins jusqu'à la fin de la Première Guerre mondiale) les Pères blancs, francophones, dont le plus ferme est Henri Streicher, fussent réticents à faire apprendre à leurs ouailles l'anglais, par crainte de « contagion protestante ». À Zanzibar, le P. Achte prépare au baptême et enseigne des enfants rachetés de l'esclavage, esclavage dont le sultanat de Zanzibar est une plaque tournante dans toute l'Afrique orientale et au-delà.

Il se rend aussi en face de l'île, à Bagamoyo, sur le continent, petite bourgade qui sert de capitale administrative à l'Afrique orientale allemande où se trouve une mission des Pères blancs. L'un d'eux, le P. August Schynse (qui avait participé auparavant à l'expédition au secours d'Emin Pacha), voulait accompagner une nouvelle expédition dirigée par Emin Pacha en de Bagamoyo, jusqu'au sud du lac Victoria. Le P. Achte reçoit la permission de s'y joindre. Avec le P. Schynse et Franz Stuhlmann et près de quatre cents porteurs, ils font les 1 200 kilomètres à pied jusqu'au sud du lac Victoria. Le P. August Schynse mourra épuisé en à Bukumbi[8]. Il décrira dans ses livres comment Stanley s'était servi de l'expédition de secours de 1886-1889 pour renforcer l'influence britannique en Afrique orientale au détriment des autres puissances coloniales.

Pendant les mois qui suivent, le P. Achte stationne à la mission de Nyegezi, qu'il reconstruit, et instruit les élèves[9] en swahili et en luganda. En , il traverse avec Jean-Joseph Hirth (vicaire apostolique du Victoria-Nyanza)[10], au péril de leurs vies, le lac avec une petite flottille de pirogues transportant des cargaisons et d'autres confrères, afin de rejoindre le territoire de l'actuel Ouganda. Au cours d'une tempête, ils sont obligés d'envoyer par-dessus bord un précieux harmonium, pour alléger l'embarcation[11]. Arrivé en Ouganda, le Père Achte aide à la fondation de la mission de Kyagwe, puis s'installe aux îles Sessé du lac Victoria, pour réclamer la région qui y avait été assignée aux catholiques. Il était aux Sessé lors des événements dramatiques qui ont eu lieu autour de Rubaga (et la future Kampala) en [1].

Le capitaine Lugard[12], représentant de l'Imperial British East Africa Company (société impériale britannique de l'Afrique orientale), arrive avec l'ordre de prendre l'Ouganda (ou Bouganda), ce qui exacerbe la minorité anglicane contre la majorité loyaliste catholique. Les Anglais arment les convertis anglicans contre les tribus catholiques qui sont mises en déroute, avec le roi ganda à leur tête, provoquant l'emprisonnement de Antonin Guillermain et le pillage des stations missionnaires[13].

Le P. Achte reçoit l'ordre de son évêque de s'occuper des réfugiés catholiques, regroupés à Buddu (en) et au-delà de la frontière de l'Afrique orientale allemande. Achte, homme de paix, parvient à négocier avec Lugard le retour du kabaka Ganda, malgré sa perversité. Il fonde ensuite la mission de Bikira et poursuit ses études linguistiques, puis à Koki, dans le sud-est du pays Ganda, et à Bukumi[14], malgré les incursions hostiles des rebelles Nyoro. Le Bouganda entre dans l'Empire colonial britannique, comme protectorat, en 1894 et devient l'Ouganda.

En 1895, le nouveau vicaire apostolique, Henri Streicher, l'envoie missionner en pays Toro[15] et fonder Virika[16] au pied des monts Rwenzori. En 1897, il explore la région méridionale du lac Albert dans le but de fonder une station à Katwe et de prendre contact avec les Belges de l'État libre du Congo sur la rive opposée du Semliki, mais son groupe est pris par les bandes du redoutable Mulamba[17]. Ils sont molestés et affamés pendant quelques jours avant d'être relâchés, l'ayant convaincu de n'être pas sujets belges.

Le P. Achte se rend à la mission de Rubaga (un des noyaux futurs de Kampala), qui est la principale du vicariat apostolique du Victoria-Nyanza septentrional, dans le but de se réconcilier avec les Anglais; mais le roi Ganda, Mwanga, bien que s'étant entretemps rendu à des offices protestants, célébrés par des ministres du culte anglais, s'allie avec les rebelles Nyoros contre les Anglais, ce qui provoque encore des troubles[18]. Auguste Achte devient provicaire, visite toute la région et ses missions et rédige une Histoire de l'Ouganda, document précieux sur l'histoire précoloniale et d'avant 1900 de ces contrées. Il est élu membre du chapitre général des Pères blancs qui doit se réunir en 1900 à Maison-Carrée. Au cours du voyage, il s'arrête d'abord en pèlerinage à Jérusalem, va retrouver quelque temps sa famille en France, part pour Rome afin de rendre compte et servir le la messe pontificale de la canonisation de saint Jean-Baptiste de La Salle à la basilique Saint-Pierre par Pie X, puis il passe un séjour à Glasgow chez les maristes pour perfectionner son anglais[19]. Ensuite, il participe au chapitre général des Pères blancs en Algérie (qui réélit Léon Livinhac), puis, après presque deux ans de voyage, retourne à Rubaga, jusqu'en 1902.

Il demande à retourner en pays Toro et à Virika où il meurt d'une brève maladie le à l'âge de quarante-quatre ans et est enterré le lendemain.

Lorsqu'il est arrivé en 1891, il y avait neuf missionnaires catholiques, trois stations missionnaires, et un grand total de 12 000 personnes baptisées et catéchumènes. Quand il est mort, quatorze ans plus tard, l'Église catholique en Ouganda comptait soixante-douze pères et frères missionnaires, seize sœurs missionnaires de Notre-Dame d'Afrique, près d'un millier de catéchistes, plus de vingt stations missionnaires, un petit séminaire et un séminaire, plus de 92 000 catholiques et plus de 100 000 catéchumènes[20]. Il a rédigé plus d'une douzaine d'articles savants sur l'ethnologie et une Histoire de l'Ouganda, ou Histoire des rois Bagandas[21].

Notes et références

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  1. a b et c Shorter 2011.
  2. Il est baptisé le 5 août 1861 dans l'église de Warhem
  3. Liévain Achte et son épouse, née Sophie 2Vandaele. Il est leur onzième enfant
  4. Devenu ensuite Institution Saint-François-d'Assise, cf. Leblond 1928, p. 7.
  5. Le P. Léonce Bridoux est alors Père maître, cf. Leblond 1928, p. 19.
  6. Il entre au postulat de Lille le 28 octobre 1886, et après avoir été missionnaire dans le Sahara, les Aurès et en Tunisie, part en 1898 dans le vicariat apostolique d'Ounyanyembé où il meurt peu de temps après son arrivée à la station de Msalala. Son frère se recueillera sur sa tombe en 1900
  7. Également province ottomane
  8. (de) Richard Hölzl, « Pater August Schynse (1857-1891). Prediger, Wissensvermittler und Symbolfigur », dans Rebekka Habermas et Alexandra Przyrembel (éd.), Von Käfern, Märkten und Menschen. Kolonialismus und Wissen in der Moderne, Göttingen, (ISBN 978-3-525-30019-0), p. 61-72
  9. D'ethnies Sukuma et Ganda
  10. Nommé vicaire apostolique du Nyanza-Victoria en mai de l'année précédente, succédant à Léon Livinhac, nommé supérieur général
  11. Leblond 1928, p. 92.
  12. 1858-1945
  13. Par la suite, le gouvernement britannique verse des indemnités à l'Église catholique à cet égard, cf. Shorter 2011.
  14. Il y fonde une station en mai 1894 qu'il place sous le vocable de Notre-Dame de la Garde, Bikira wa Bukumi, cf. Leblond 1928, p. 163.
  15. Ouest de l'Ouganda actuel, mis sous la pression des anglicans
  16. Il y a trois mille catéchumènes catholiques deux ans plus tard, malgré l'hostilité anglicane
  17. Qui se distinguaient avec leurs affidés Manyemas par leurs pratiques anthropophages
  18. Mwanga a été capturé en 1898 et exilé aux Seychelles par les Anglais
  19. C'est à Glasgow qu'il apprend que son frère trappiste Stanislas, en religion Père Albéric, comme d'autres Européens, est aux prises à Pékin avec les Boxers; mais heureusement est sain et sauf
  20. (en) Aylward Shorter, « Achte, Auguste-Amand-Aimé », dans Dictionary of African Christian Biography, (lire en ligne)
  21. « Notice des Missions africaines sur Achte »(Archive.orgWikiwixArchive.isGoogleQue faire ?)

Bibliographie

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  • Georges Leblond, Le Père Auguste Achte, des missionnaires d'Afrique (Pères blancs) : missionnaire au Nyanza septentrional, Maison-Carrée (Alger); Paris, Procure des Missionnaires d'Afrique, , 2e éd. (1re éd. 1912)
  • Aylward Shorter (trad. de l'anglais), Les Pères Blancs au temps de la conquête coloniale. Histoire des Missionnaires d'Afrique 1892-1914, Paris, éd. Karthala, , 348 p. (ISBN 9782811105754)

Liens externes

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