André Fortin
| Nom de naissance | André Fortin |
|---|---|
| Naissance |
Saint-Thomas-Didyme |
| Décès |
Entre le 8 et le Montréal |
| Activité principale | Auteur-compositeur-interprète |
| Activités annexes | Cinéaste, acteur |
| Genre musical | Musique alternative, rock, rockabilly, swing, blues, jazz, musiques du monde |
| Instruments | Guitare, batterie, claquettes |
| Années actives | De 1986 à 2000 |
| Labels | BMG, Musicomptoir |
| Site officiel | « Site officiel d'André Fortin et les Colocs » |
André « Dédé » Fortin est un auteur-compositeur-interprète québécois né le 17 novembre 1962 à Saint-Thomas-Didyme et mort le 8 mai 2000 à Montréal.
Chanteur et musicien autodidacte, il joue avec différents groupes avant de fonder Les Colocs en 1990. Issus de la contre-culture, Les Colocs participent de façon décisive à l'émergence d'un nouveau genre de musique alternative au Québec. Leur premier album, Les Colocs, est lancé en 1993. Ils remportent quatre prix de l'ADISQ en 1993 et celui du groupe de l'année en 1994. Leur second album, Atrocetomique, est lancé le jour du référendum de 1995. Après quelques changements de personnel, Les Colocs lancent un troisième album, Dehors novembre, en 1998.
Dans les dernières années de sa vie, André Fortin lutte avec des problèmes de santé mentale. Le 10 mai 2000, il est retrouvé mort à son domicile du Plateau Mont-Royal, où il s'est suicidé.
Son énergie festive, sa volonté de chanter en français et son engagement social et politique font d'André Fortin et des Colocs des figures majeures de la musique québécoise des années 1990. De nombreux hommages posthumes lui ont été rendus, dont la médaille de l'Assemblée nationale en 2006 et le film Dédé, à travers les brumes en 2009.
Biographie
[modifier | modifier le code]Jeunesse
[modifier | modifier le code]Premières années
[modifier | modifier le code]André Fortin naît à Saint-Thomas-Didyme au Lac-Saint-Jean. Il est le dixième d'une famille de onze enfants nés d'Alfred Fortin et de Gisèle Tremblay[1]. À l'âge de huit ans, il déménage sur l'avenue du Rocher à Normandin[2],[Note 1].
André Fortin grandit dans une famille de condition modeste, mais nombreuse. Dans l'enfance, il est un garçon sociable mais craintif. Doté d'un esprit vif et curieux, ainsi que d'une grande sensibilité artistique, il est attiré peu à peu par la musique. Un jour, lors d'un mariage, il assiste au concert d'un orchestre professionnel invité pour l'événement. La vue de ces musiciens « bien habillés qui maniaient leurs instruments avec grâce et précision [qui] obéissaient au rythme et aux mélodies des chansons comme s'ils étaient ensorcelés, envoûtés par celles-ci » impressionne grandement le jeune André Fortin[3]. De retour chez lui, il prend l'habitude après les repas de s'amuser en tapant sur des casseroles et des bacs de bleuets vides pour faire de la musique[4].
Encouragé par sa famille, son intérêt pour la musique se transforme en passion. Il tente ainsi de se faire admettre dans la chorale de son école. Pour y parvenir, chaque enfant devait chanter en reproduisant des notes jouées par le directeur de la chorale. Ce directeur de chorale, un frère enseignant particulièrement sévère, fait passer l'audition à André Fortin. Toutefois, le garçon n'ayant pas encore développé l'oreille musicale n'arrive pas à chanter juste. Il est alors refusé pour la chorale. Cette expérience le déçoit terriblement[5]. Malgré cet échec, André Fortin persiste. Il décide d'apprendre à jouer de la musique par lui-même. Pour ce faire, il profite de la collection de vinyles de son frère aîné Claude et passe de longues heures à écouter des albums qui formeront la base de sa culture musicale. Il découvre ainsi le rock progressif anglais, le jazz français, le blues américain, la musique québécoise populaire et d'autres styles. Puis, un peu après son dixième anniversaire, il commence à apprendre la guitare avec l'aide de son frère Benoît[6].
Adolescence
[modifier | modifier le code]À l'adolescence, André Fortin continue à faire de la musique dans ses temps libres. Un jour d'été en 1979, il décide de se rendre avec ses amis à Roberval pour voir un concert d'un de ses artistes préférés. Chaque année, Roberval accueille la Traversée du lac Saint-Jean, une compétition de nage internationale. L'événement, très populaire, se conclut toujours par le concert d'un groupe ou d'un artiste renommé. Cette année-là, l'artiste invité est Plume Latraverse[7],[8]. Fortin admirait Plume et sa musique, mais il n'avait jamais eu l'occasion d'en vivre l'expérience en salle, en personne. Fortin se rend donc comme prévu avec ses amis et assiste au spectacle. Connu pour sa réputation sulfureuse, ses textes outranciers et ses multiples excès, le chanteur offre une prestation exceptionnelle qui soulève le public[9]. Le jeune Fortin ressort de ce spectacle « complètement soufflé par la poésie de Plume, par son attitude rebelle et désinvolte, par sa musique à la fois accessible et anticonformiste[10] ». Le souvenir de ce spectacle sera d'ailleurs évoqué plus tard, dans la chanson La Traversée :
« À Roberval / Pour voir un bon show / Avec mononcle Plume / La traversée du lac St-Jean / Avec nous-autres ça prend trois jours / L'année passée on a coulé / C't'année on fait l'tour![11] ».


Durant cette période, André Fortin développe une autre grande passion qui le suivra toute sa vie : le cinéma. À la même époque, il participe à un voyage étudiant de quatre mois à Lethbridge en Alberta, dans le cadre d'un programme d'immersion anglaise. N'ayant jamais eu l'occasion de fréquenter régulièrement une salle de cinéma dans sa région natale, il découvre alors le septième art en compagnie de l'un de ses amis appelé Gino, connu lors d'un voyage précédent à Owen Sound en Ontario. Au cours de ce voyage, il apprend l'anglais et devient bilingue[12].
De retour à Normandin, il remarque l'arrivée d'un nouveau centre commercial, la Place Gerbier, sur la rue principale de Saint-Cyrille. Des années plus tard, cet endroit lui inspirera une chanson : La Rue principale[13].
Études
[modifier | modifier le code]Cégep
[modifier | modifier le code]À l'automne 1980, André Fortin entame un DEC en arts et lettres au Cégep de Saint-Félicien. Cette entrée au cégep lui permet de découvrir le monde de la littérature. Ayant appris par oreille les textes de plusieurs grands auteurs, il approfondit cette fois sa culture littéraire. Toutefois, une douloureuse rupture l'amène à vouloir quitter sa région natale. Cherchant à tourner la page, mais aussi à rencontrer d'autres gens passionnés par la création comme lui, il quitte Normandin et s'établit à Montréal. Au printemps de 1982, il complète un DEC en arts et lettres au Cégep du Vieux-Montréal[14].
Afin de payer ses études, André Fortin se trouve un emploi au port de Montréal. Il y répare des pièces de métal pour des navires[15].
Université
[modifier | modifier le code]Fasciné par le petit et le grand écran, André Fortin cherche à faire carrière dans ce domaine dans un premier temps. À l'automne 1982, il entreprend une majeure en études cinématographiques et une mineure en communication à l'Université de Montréal. Il était un étudiant très assidu : « Quand il arrivait en classe, dix minutes avant le début du cours, il traînait souvent un sac à dos rempli de tous les livres du programme de cinéma, au cas où il en aurait besoin[16] ».
Ses amis le trouvaient toujours en état de réflexion, comme s'il était habité par de multiples pensées à la fois : « Quand il s'installait le matin devant Le Devoir, il le lisait en plissant des yeux, se mordillant la lèvre inférieure, tapant frénétiquement du pied, l'air de réfléchir aux articles comme si sa vie en dépendait. Il voulait tout comprendre, tout apprendre, tout mettre en ordre, assimiler toutes les connaissances à sa portée[17] ». Cette nervosité s'accompagnait de problèmes d'insomnie qu'il soignait par la lecture de romans ou de journaux, dans la solitude de son appartement[17].
Débuts
[modifier | modifier le code]Les Sneakers
[modifier | modifier le code]C'est à l'université qu'André Fortin fait la rencontre d'Éric Henry, un autre étudiant en cinéma. C'est avec lui qu'il réalise ses premiers films étudiants, BS Blues et Tranche de vie. Également musicien, Éric Henry jouait de la guitare dans ses temps libres avec un groupe de blues. André Fortin lui propose un jour de jouer ensemble pour le plaisir, avec son colocataire de l'époque, Fred Roverselli, qui étudiait la musique à l'école Vincent-d'Indy. C'est ainsi que naissent les Sneakers, un trio rockabilly, blues et boogie avec Henry à la guitare et au chant, Roverselli à la basse et Fortin à la batterie. Influencés par les Stray Cats, un groupe rockabilly marquant sur les modes musicales et vestimentaires d'Amérique du Nord et d'Europe au milieu des années 1980, les Sneakers s'inspirent grandement de leur style effréné et de leur allure de rockeurs des années 1950. Interprétant des succès des Stray Cats, des Cramps et des Meteors, toutes leurs chansons étaient chantées en anglais[18].
Sentant qu'ils avaient un grand potentiel, avec l'attitude d'Henry, la technique de basse remarquable de Roverselli et le talent de Fortin qui « debout derrière sa petite batterie, tenait le rythme comme s'il l'avait fait toute sa vie », après plusieurs répétitions, les Sneakers donnent leurs premiers spectacles au bar alternatif Le Grand Bock ainsi qu'au bar 50's, au centre-ville de Montréal[19],[20]. En 1984, ils jouent sur la scène du Vélodrome lors du Salon de la jeunesse. Toutefois, après quelques concerts, le groupe finit par se séparer au bout d'un an[21].
Perfo 30
[modifier | modifier le code]À la même époque, le monde de la musique est encore ébranlé par l'arrivée de MTV. Cette chaîne américaine (et sa contrepartie canadienne-anglaise Much Music) diffusait des vidéoclips, un genre alors à ses balbutiements, ouvrant de toutes nouvelles possibilités de rayonnement pour les groupes de musique. Toutefois, les artistes pouvant produire un vidéoclip étaient alors peu nombreux, compte tenu des coûts de production, et devaient faire appel à des cinéastes établis. Cherchant donc à se faire un nom dans le domaine, André Fortin conçoit avec deux autres cinéastes un ambitieux projet intitulé Perfo 30 : une série de 30 vidéoclips mettant en vedette des groupes de musique émergents[22].
Avec un budget de 50 000 $ (soit moins de 2 000 $ par vidéoclip), Perfo 30 mobilise plusieurs jeunes cinéastes issus de l'Université de Montréal : André Fortin, ses deux complices Martin-Éric Ouellet et Martin Saint-Pierre, Éric Henry, Claude Grégoire ainsi que Jean-Marc Vallée. Au total, plus de 150 formations feront parvenir leur démo aux jeunes producteurs, un nombre qui dépassera largement leurs attentes et qui les forcera à faire un tri minutieux. Parmi tous ces groupes, quelques-uns connaîtront un modeste succès : Disappointed A Few People, Déjà Voodoo et Wild Touch. Celui qui connaîtra le plus grand succès sera la formation heavy métal Voivod. Également, signe de la morosité artistique des francophones dans cette époque suivant la défaite référendaire de 1980, sur ces 150 groupes, 143 chantaient en anglais[23].
Malgré tout le travail et le talent investis dans Perfo 30, le résultat est très mal reçu par les groupes. Cet échec est une lourde déception pour André Fortin. Épuisé physiquement et psychologiquement par le projet, ainsi que par une nouvelle rupture amoureuse, le cinéaste de 23 ans traverse alors une période difficile. Se plaignant de maux de ventre, d'étourdissements, tenant des propos confus, Fortin est finalement conduit par sa sœur Doris à l'Hôpital Notre-Dame, où il passera une dizaine de jours en soins psychiatriques[24].

Hollywood Mufflers
[modifier | modifier le code]Après avoir passé plusieurs mois en convalescence chez ses parents dans leur nouvelle maison à Sorel, André Fortin reprend ses études et se réinstalle à Montréal, sur le Plateau Mont-Royal cette fois, au début de l'année 1987[25].
Un soir, lors d'une fête avec des amis où chacun devait apporter un instrument de musique pour faire une séance d'improvisation, Fortin fait la rencontre de Louis Léger, un musicien d'origine française établi à Montréal. Les deux s'étaient brièvement connus lors du projet Perfo 30. En effet, André Fortin avait réalisé le vidéoclip de la chanson Chain Gang du groupe Cha Cha and the Chain Gang. Léger en était le guitariste, ainsi que le conjoint de la meneuse Cha Cha Da Vinci. Le groupe se spécialisait dans le blues, swing, vieux rock et interprétait des succès de Wanda Jackson, Etta James et Louis Prima dans les bars de Montréal[26],[27].
Impressionné par ses talents de batteur, à l'issue de cette soirée, Louis Léger propose à André Fortin de former un nouveau groupe avec lui. Séduit par l'idée, Fortin invite l'ex-bassiste des Sneakers Fred Roverselli à se joindre à eux. Complété avec le chanteur Serge Lotosky, le quatuor suit alors la vision artistique proposée par Louis Léger. Les membres s'habillent à la mode country chic, avec des chapeaux de cowboy, des chemises blanches, des vestons noirs et des cordons argentés au cou. Ils interprètent des chansons de Hank Williams et Jimmy Buffett, du honky-tonk, du boogie-woogie, du rock and roll et du jazz. Afin de refléter l'éclectisme de ces influences variées, le groupe se donne pour nom Hollywood Mufflers[28].
Bien qu'il donne quelques concerts pour le plaisir avec les Hollywood Mufflers, notamment aux Foufounes électriques, André Fortin cherche toujours à faire carrière en cinéma. Employé comme monteur dans une boîte de production, il travaille sur quelques émissions populaires comme Surprise sur prise et 100 limite[29]. Ayant récupéré de son passage à vide suivant l'échec de Perfo 30, il continue également de vouloir faire des vidéoclips. À la suite d'une audition, il est choisi pour jouer un voyou sympathique dans le vidéoclip Libérez le trésor de Michel Rivard[30].
Cha Cha and the Chain Gang
[modifier | modifier le code]À partir de 1988, la musique prend une place croissante dans la vie d'André Fortin. Mettant fin à l'aventure des Hollywood Mufflers, Louis Léger lui propose alors de se joindre à Cha Cha and the Chain Gang, en remplacement de leur batteur qui venait de quitter. La Chain Gang s'était fait remarquer par une prestation particulièrement mémorable à l'automne 1988, dans le cadre du deuxième Festival international rock de Montréal (FIRM). Le groupe était devenu un partenaire de scène régulier de Ray Condo and His Hardrock Goners, autre formation très populaire auprès des amateurs de rockabilly, dans les milieux nocturnes montréalais de l'époque[31].
Dépassant la simple performance musicale, les spectacles de Cha Cha and the Chain Gang se veulent une expérience complète. Misant sur le charisme exceptionnel de la chanteuse et sur la combinaison unique des talents des musiciens, les chansons sont choisies pour leur caractère ludique ainsi que pour leur haut niveau d'énergie. Les transitions entre les chansons sont également planifiées, avec des monologues et des blagues choisies en fonction du public. Le tout se déroule sur un rythme effréné, afin de garder les spectateurs toujours en haleine[32].
À la fois flatté et intimidé par l'offre de Louis Léger, André Fortin finit par accepter. Ce choix sera déterminant dans son parcours artistique. Découvrant « une toute nouvelle approche de la musique et de la performance scénique » au contact de Cha Cha Da Vinci, il commence ainsi peu à peu à se forger sa propre personnalité sur scène[33]. Suivant sa fantaisie, il se laisse pousser les cheveux et commence à intégrer des séquences de claquettes dans ses spectacles.
André Fortin devient aussi durant cette période un ami intime de la chanteuse Cha Cha Da Vinci. C'est elle d'ailleurs qui lui ouvre la porte de son loft situé au 2116, boulevard Saint-Laurent[34].
Les Colocs
[modifier | modifier le code]Formation et débuts (1989-1992)
[modifier | modifier le code]À la suite d'un voyage en Louisiane avec Fred Roverselli, la tête pleine d'idées et de sonorités nouvelles, à l'été 1989, André Fortin commence à composer ses premières chansons. C'est dans son 7 ½ de l'avenue Mont-Royal, près de la rue Garnier, qu'il décide de former un nouveau groupe avec son colocataire Pierre Lanthier. Ils se baptisent Les Colocs[35].
Sous l'appartement d'André Fortin habitait une famille très pauvre, composée d'un père, de sa conjointe, de sa fille et de son garçon souffrant d'un retard de développement surnommé Dédé. Ému par la vue de ce garçon laissé le plus souvent à lui-même, s'amusant dans une ruelle parmi les poubelles et les caisses de bières vides, André Fortin y trouve une grande source d'inspiration. Toutefois, il éprouve toujours de la difficulté à écrire les paroles de ses chansons. Les mots ne lui viennent qu'après de longs efforts, se décourageant souvent après une seule phrase. Cherchant par tous les moyens à chanter ce qu'il ressentait, il partage alors ses pensées avec son ami Guy Lapointe :
« Qu'est-ce que tu connais de la vie de ce p'tit gars? lui a-t-il demandé.
– Qu'il habite en bas d'chez moi sur l'avenue Mont-Royal et qu'il n'a pas de bicycle, a répondu André sans réfléchir.
– Ben voilà tes premières phrases. »[36]

C'est ainsi qu'il écrit une autre chanson promise à un grand succès : Dédé.
Vers la fin de l'hiver 1990, André Fortin quitte son logement sur l'avenue Mont-Royal et emménage dans un logement au troisième étage du 2116, boulevard Saint-Laurent. L'endroit, propriété de membres de la communauté grecque de Montréal, comprenait six lofts répartis sur trois étages. Malgré leur délabrement, les lofts accueillaient plusieurs artistes et musiciens, ainsi que des punks en quête d'un toit ou d'un endroit pour faire la fête[37].
S'éloignant du rock anglophone, pour trouver de l'inspiration, André Fortin se tourne vers des artistes québécois comme Jean-Pierre Ferland, Robert Charlebois, Diane Dufresne, Gilles Vigneault, Louise Portal et Jim Corcoran. Inspiré par la musique à texte québécoise « qui fait danser et réfléchir en même temps » et par « tout ce qui tournait autour du blues et du rockabilly, vestige de son voyage en Louisiane et de son aventure avec les Sneakers », Fortin commence à tisser des liens entre différents styles de musiques et celle de son pays. Une idée commence alors à germer dans sa tête : créer un nouveau groupe « entièrement francophone, un peu rock, un peu chanson, un peu rockabilly, un peu swing… Quelque chose d'original et de férocement québécois[38] ». Mélangeant différents styles musicaux, André Fortin tient à ce que la musique du groupe soit enracinée dans le Québec, pour toucher les Québécois droit au cœur en jouant une musique à laquelle ils pourraient aussitôt s'identifier.
Dans un premier temps, Fortin recrute ses amis guitaristes Louis Léger et Guy Lapointe, le bassiste Marc Déry et le batteur Jimmy Bourgoing. Cherchant un meneur pour le groupe, il propose d'abord la position à Louis Léger. Celui-ci refuse. Fortin se tourne alors vers Marc Déry. Celui-ci refuse aussi, préférant plutôt jouer un rôle de soutien dans le groupe. Face à ces deux refus, André Fortin décide de prendre la tête du groupe. Un cinquième membre viendra ensuite s'ajouter : l'harmoniciste Patrick « Pat » Esposito di Napoli, un Français de Perpignan[39].
Les Colocs donnent leurs premiers spectacles au début d'octobre 1990 au bar Le Tallulah Darling, au centre-ville de Montréal, en première partie de Ray Condo and His Hardrock Goners dans le cadre du deuxième FIRM[40],[41],[Note 2]. Le groupe enregistre ensuite un démo de leurs trois meilleures chansons : Dédé, La P'tite bébitte et Tous les matins. Quelques jours après l'enregistrement, Marc Déry quitte le groupe afin de lancer le sien, Zébulon. À la recherche d'un nouveau bassiste, en lisant le Voir, Pat di Napoli trouve l'annonce d'un jeune de dix-neuf ans nommé Serge Robert. Bassiste pour le groupe Anticosti, le jeune homme cherchait à jouer une musique plus festive et moins dramatique. Il vient à leur rencontre au 2116, Saint-Laurent au début de décembre 1990. Remarquant son sens du rythme et sa capacité à suivre le groupe dans n'importe quel standard blues, après une séance d'improvisation d'une heure ou deux, Les Colocs décident d'intégrer Serge Robert au sein de leur groupe[42].
Les Colocs continuent à se produire dans les bars de la région de Montréal (notamment au Quai des Brumes et aux Bobards). Gagnant en cohésion et en assurance sur scène, néanmoins, des désaccords divisent André Fortin et Louis Léger. Fortin souhaitait se produire en concert hors de Montréal à tout prix, tandis que Léger refusait de parcourir des centaines de kilomètres pour des cachets qu'il jugeait trop maigres. Finalement, au printemps 1991, Louis Léger décide de quitter le groupe. Il est alors remplacé par Mike Sawatsky, un Cri originaire de Saskatoon rencontré par Pat di Napoli[43].
Afin de se faire connaître, André Fortin décide de réaliser des vidéoclips de trois chansons des Colocs : La P'tite bébitte, Dédé et Julie[Note 3]. Dans le but de réduire les coûts en pellicule, les clips sont tournés en pixilation, une technique d'animation consistant à faire bouger des personnes et des objets réels à partir de prises de vue réelles en image par image, leur donnant l'illusion de faire des mouvements étranges et saccadés. Cette décision donnera une apparence ludique aux vidéoclips. Puis, suivant les indications d'André Fortin, Les Colocs improvisent leurs clips en s'amusant avec des objets du quotidien, des marionnettes, des animaux en peluche, des instruments de musique, ainsi que des costumes et des éléments de décor accumulés au fil des ans[44].
L'Empire des futures stars
[modifier | modifier le code]En 1992, le groupe participe à L'Empire des futures stars, un concours de relève musicale francophone organisé par la radio CKOI-FM[45]. Chaque mardi pendant neuf semaines, trois groupes devaient se produire au Club Soda, alors situé sur l'avenue du Parc. À partir de ces préliminaires, un jury de professionnels de l'industrie du disque choisissait neuf demi-finalistes. Le processus était ensuite répété jusqu'à la nomination de trois finalistes devant s'affronter dans un ultime concert. Le grand prix de ce concours était un contrat avec une maison de disques établie, « valable pour au moins un single et assorti d'une clause permettant l'enregistrement conditionnel d'un album complet[46] ».
Déterminés, sachant également que chaque groupe devait jouer pendant un temps minuté avec précision, André Fortin et Les Colocs se lancent dans ce concours avec toute leur énergie. Avec leurs vêtements bigarrés, leurs textes mélangeant le langage chansonnier, l'humour absurde et les pulsions affectives, leur musique empruntant à des styles très variés (pop, blues, swing, rockabilly, chanson à texte, country), ils échappaient à toute catégorisation. Ce caractère inédit les distingue aussitôt de leurs concurrents. Le biographe Philippe Meilleur raconte : « Le spectacle donné [le 17 mars 1992] au Club Soda a marqué ceux qui y étaient [...]. Les spectateurs criaient, tapaient des mains, levaient bien haut leur verre de bière à la fin des refrains, encourageaient le chanteur entre les pièces... Certains dansaient même sur les tables installées à l'arrière du parterre. C'était du jamais vu à L'Empire. Quand Dédé racontait une blague, la foule s'esclaffait. S'il demandait au public de battre la cadence, tous obéissaient, sourire aux lèvres. Ils étaient sous son emprise[47] ».
Durant ce concours, André Fortin rencontre Raymond Paquin. Imprésario d'artistes comme Térez Montcalm et Richard Desjardins, Paquin avait vu Les Colocs en spectacle au Quai des Brumes. Stupéfait par les réactions survoltées du public, il avait proposé au chanteur des Colocs de devenir leur représentant. André Fortin hésite. Il est préoccupé par le sort de son ami Pat di Napoli. En effet, l'harmoniciste était atteint du sida. Ses jours étant comptés, l'objectif du groupe était d'enregistrer un album le plus rapidement possible, et donc de gagner le concours de L'Empire afin de signer le contrat. Cependant, Les Colocs ignoraient qu'avec les clauses de ce contrat, l'enregistrement de leur premier album risquait d'être retardé d'au moins deux ans. Ne réussissant pas à convaincre André Fortin de l'engager comme imprésario, Raymond Paquin réussit néanmoins à lui faire promettre de ne rien signer avant de se revoir, avant la fin du concours[48].
Entretemps, Raymond Paquin parvient à convaincre la filiale québécoise de la maison BMG de produire le premier album du groupe. Le jour de la finale, Les Colocs se retirent du concours et signent leur contrat avec BMG[49].
Les Colocs (1993)
[modifier | modifier le code]L'album Les Colocs sort le 23 février 1993. Dès le mois de mars, l'album et la chanson Julie sont en tête de palmarès. La critique encense le groupe. Alain Brunet de La Presse écrit :
« À droite comme à gauche, les Colocs effectuent une montée fulgurante, virent leurs salles à l'envers, font se cramper les plus crispés. […] Fous furieux de l'heure, les Colocs représentent de loin le plus gros buzz depuis l'arrivée de Jean Leloup et de Vilain Pingouin. Et, assurément, cet influx de popularité n'est pas que médiatique […]. Depuis plus de deux ans (le premier alignement des Colocs remonte à 1990), les esprits attentifs ont vu ces brillants desperados progresser sur les scènes parallèles. Ils ont vu les auditoires transportés par Dédé Fortin et ses sbires. Et comme le public, la plupart des journalistes ont capoté l'an dernier à l'Empire des Futures Stars – d'où cette signature rapide des Colocs chez BMG avant même que la compétition de CKOI FM ne soit terminée[50] ».
Leur album échappe aux étiquettes conventionnelles de la musique commerciale. Il est décrit tantôt comme un « party […] délire hétéroclite […] blues-rock-country-folk-skiffle-manouche », tantôt comme un mélange de rock, de rockabilly, de rythm and blues, de blues, de rap, « et même de jazz à la Stéphane Grappelli[51] ». Malgré ce succès critique et populaire, André Fortin est psychologiquement instable[52]. Sous sa personnalité de scène déchaînée, le chanteur des Colocs demeure un homme angoissé et très timide. Il demande notamment à Raymond Paquin de pouvoir faire « comme Réjean Ducharme [...]. Jusse écrire, enregistrer, donner des shows pis faire des p'tits[53] ». Selon son imprésario, André Fortin se donnait à fond dans tout ce qu'il faisait et en attendait autant des autres. Ce tempérament bouillant et ce besoin d'absolu pouvaient le rendre intransigeant et parfois injuste envers ses collaborateurs[54],[55].
Malgré ces défis, Les Colocs continuent de récolter les marques de reconnaissance. Après plus d'une centaine de spectacles donnés tout au long de l'année, à l'automne 1993, le groupe est choisi pour faire le spectacle d'ouverture du gala de l'ADISQ avec Mara Tremblay et la Famille Botte. Le gala est une consécration pour Les Colocs. Ils remportent quatre Félix sur six nominations : découverte de l'année, groupe de l'année, clip de l'année (Julie) et réalisateur de vidéoclips de l'année[56],[57].
Tournée du spectacle Terminus (1994-1995)
[modifier | modifier le code]Au printemps 1994, Les Colocs lancent leur spectacle Terminus, pour faire suite à leur prestation remarquée du gala de l'ADISQ[58],[59]. Ce spectacle à grand déploiement mise sur des décors de style artisanal conçus par des proches du groupe, mettant de l'avant tout le talent créatif des Colocs. Au-dessus de la scène, des oiseaux géants en origami flottent, suspendus par des fils, comme s'ils étaient en plein vol. À l'arrière de la scène, une murale multicolore peinte à la main cachait le fond. Le décor était complété par un énorme réfrigérateur en styromousse, dont la porte donnait sur les coulisses. Le spectacle commençait lorsque la porte du réfrigérateur s'ouvrait, donnant l'illusion que les membres du groupe en sortaient[60].
Durant l'entracte de Terminus, un court-métrage était diffusé : Terreur dans le Chinatown, Master Qok the Avenger of the Night. Ce film déjanté, conçu et réalisé par André Fortin, raconte l'histoire des cinq Colocs qui se retrouvent à court d'argent et qui doivent faire fondre leurs Félix pour payer leur loyer en retard. Ils se louent ensuite un film de kung-fu, puis s'endorment en faisant des rêves étranges. Dans leurs rêves, ils se font attaquer par des personnages du film, notamment le mystérieux Master Qok. En plus de ce court-métrage, Les Colocs invitent plusieurs de leurs amis musiciens en première partie, dont Karen Young, Cha Cha Da Vinci et Les Frères à ch'val, faisant de Terminus un spectacle d'une durée de plus de quatre heures[61].
À l'automne, après avoir remporté une deuxième fois le Félix du groupe de l'année au gala de l'ADISQ, Patrick Esposito « di » Napoli tombe gravement malade. Trouvé très affaibli chez lui, il est conduit d'urgence à l'hôpital Saint-Luc. Il meurt le 13 novembre 1994[62].
Atrocetomique (1995)
[modifier | modifier le code]Profondément attristé par la mort de son ami, André Fortin entame la production du deuxième album des Colocs, Atrocetomique, au début de 1995. Durant la même période, le Parti québécois dirigé par Jacques Parizeau annonce la tenue d'un nouveau référendum sur l'indépendance du Québec. Cette annonce incite le chanteur Paul Piché à fonder un mouvement, les Artistes pour la souveraineté (AS). Indépendantiste depuis la tendre enfance, André Fortin adhère aussitôt à ce collectif[63].
Cet album double comprend les chansons du premier album, les chansons du spectacle Terminus, en plus de trois compositions d'autres membres du groupe (Mike Sawatsky et Serge Robert), ainsi que des reprises de vieux succès, le tout joué devant public[64]. L'album comprend notamment la chanson Bon Yeu, dont les paroles ont été coécrites par Alan Lord[65]. Les chansons de l'album sont enregistrées les 19 et 20 mai 1995 au Spectrum de Montréal. Le disque est officiellement lancé le soir du 30 octobre 1995 – celui du référendum – devant un public de plus de 2000 personnes, en présence de journalistes des principaux médias. Ceux-ci capteront en direct la réaction d'André Fortin à l'annonce des résultats, indiquant la victoire du Non par 50,4 % des voix[66].
À la fin de 1995, le bassiste Serge Robert quitte Les Colocs. Il est remplacé par André « Vander » Vanderbist, musicien d'origine belge, ancien membre du groupe Les Frères Brozeur[67]. En février 1996, André Fortin réalise le vidéoclip de la chanson Bon Yeu dans une église abandonnée, avec l'aide de 140 bénéficiaires de l'aide sociale agissant comme figurants[68]. Au printemps 1996, Les Colocs participent au Printemps de Bourges en France. Malgré tous ces efforts, les ventes d'Atrocetomique sont affectées par un conflit juridique au sein de leur étiquette de disques et ce deuxième album ne rencontre pas le succès du premier[69].
Dehors novembre (1998)
[modifier | modifier le code]Au début de 1997, après un changement de maison de disques, Les Colocs commencent à travailler sur leur troisième album. Celui-ci marquera une rupture avec l'image de groupe festif entretenue par les médias depuis leurs débuts. Afin de trouver de l'inspiration pour ses nouvelles chansons, André Fortin marque une autre rupture en quittant le 2116, boulevard Saint-Laurent et en s'installant dans un chalet à Saint-Étienne-de-Bolton dans les Cantons-de-l'Est[70].
À son arrivée, le chanteur avait terminé le texte de la chanson Dehors novembre. Ce titre est apparu tôt dans le processus de création, faisant allusion à la mort de l'ancien harmoniciste du groupe, racontant de façon imagée l'agonie d'un mourant. D'autres textes étaient ébauchés. Tous étaient habités par les préoccupations du chanteur (la pauvreté, l'injustice, la dépendance aux drogues, la douleur des ruptures amoureuses, la détresse) reflétant ses engagements et sa conscience sociale. Ces textes à caractère sombre contrastent fortement avec les premières chansons des Colocs, pour la plupart légères et festives en apparence. Ce nouvel album est également marqué par des tensions entre André Fortin et le batteur Jimmy Bourgoing. Sentant que ses idées n'étaient pas suffisamment incluses dans les discussions, à la suite d'une dispute, Bourgoing est expulsé du groupe à l'hiver 1997-1998. De jeunes musiciens, Justin Allard, Michel Dufour, ainsi que les frères Élage et Karim Diouf se joignent aux Colocs[71].
Dehors novembre est lancé le 5 mai 1998. La critique remarque aussitôt la souffrance et le désespoir présents dans les textes. Malgré ce caractère sombre, l'album connaît un véritable succès et se vend à plus de 150 000 exemplaires. Il est marqué par la présence du wolof, en particulier dans le refrain de Tassez-vous de d'là interprété par les frères Diouf. Ce succès est suivi d'une tournée à travers le Québec, notamment aux Francofolies ainsi qu'au Festival d'été de Québec. En 1999, au sommet de leur popularité, Les Colocs remportent à nouveau le Félix du groupe de l'année au gala de l'ADISQ[72].
Mort
[modifier | modifier le code]Une année 2000 pleine de projets
[modifier | modifier le code]L'année 2000 s'annonce fructueuse pour André Fortin. Le 1er janvier 2000, il célèbre avec son groupe l'arrivée du Nouvel An sur la scène du cabaret Le Lion d'Or à Montréal[73].
Au printemps 2000, il est attendu au spectacle du 24 juin dans son village de naissance[74]. Le 7 mai, il rencontre son gérant Raymond Paquin. Celui-ci le reconduit chez Éric Henry. Le même soir, le gérant reçoit par télécopieur le poème La comète, le dernier texte de Dédé Fortin[75].
10 mai 2000
[modifier | modifier le code]Le 10 mai 2000, André Fortin est attendu. Des amis, qui avaient rendez-vous avec lui en début d'après-midi, se rendent à son domicile de la rue Rachel. Mike Sawatzky, présent, tente d'entrer dans l'appartement mais se retrouve devant une porte verrouillée. Réussissant à pénétrer dans le domicile par la fenêtre, il découvre le corps d'André Fortin, gisant sur le plancher de son salon avec un couteau enfoncé dans le ventre[76],[77]. Selon le rapport de police, la mort serait survenue dans la nuit du 8 au 9 mai 2000.
Réactions à la mort d'André Fortin
[modifier | modifier le code]Sa mort provoque la consternation au sein du grand public[78]. Ses funérailles se déroulent le 14 mai 2000 à Sorel, où ses parents avaient déménagé au milieu des années 1980[79]. Plus de 1 200 personnes assistent à l'événement[80]. De nombreux hommages lui sont rendus par des personnalités publiques, dont Michel Rivard, Richard Desjardins, Agnès Maltais[81].
En 2006, la famille Fortin met sur pied la Fondation Dédé Fortin, un organisme de sensibilisation en santé mentale et de prévention du suicide. Elle organise son premier événement, un spectacle-hommage, le 7 février 2007[82]. Dirigé par le chanteur Éric Goulet, l'événement rassemble des personnalités comme Michel Rivard, Richard Séguin, Marc Déry, Cha Cha Da Vinci, Antoine Gratton, Stéphane Côté, Damien Robitaille, Biz, Jonathan Savage, Lilison Di Kinara, Xavier Caféine, François Parenteau et Monique Giroux[83].
Hypothèses
[modifier | modifier le code]Plusieurs hypothèses ont été émises sur la mort d'André Fortin. Selon le rapport d’investigation de René-Maurice Bélanger, le chanteur avait consulté un psychologue le jour de sa mort. Il était tourmenté par plusieurs choses, dont sa popularité, sa créativité et une récente rupture amoureuse[84]. Dédé s’est réfugié un temps dans la poésie, selon son gérant, Raymond Paquin[85]. Plusieurs signes avant-coureurs de sa dépression ont été repérés. Au gala de l’ADISQ de 1999, après que Les Colocs ont remporté le Félix du groupe de l’année, il lance un « adieu » à la foule[86]. Ses textes sombres sur l’album Dehors novembre suggéraient aussi une grande tristesse.
Plusieurs hypothèses ont été émises sur la raison de son suicide, le liant notamment à un problème possible de bipolarité ou à une peine d’amour. On peut aussi penser que le référendum de 1995, perdu par le camp du oui à 49,4 % contre 50,6 % pour le non[87], l’a profondément affecté, tout comme la mort de Patrick Esposito Di Napoli.
Il a envoyé un poème intitulé La Comète à son gérant la veille de sa mort. Celui-ci a été publié dans La Presse le lendemain. En 2009, les membres restants des Colocs se sont réunis pour mettre en musique ce texte de Dédé. Une version du défunt chanteur existait déjà, sans musique.
Après sa mort, les membres restants du groupe ont fait paraître le disque Suite 2116 en hommage à André Fortin. Cet album contenait, entre autres, la chanson inédite Paysage, qui est une adaptation musicale du poème du même nom de Charles Baudelaire. Suite 2116 connut moins de succès que les disques précédents, les membres du groupe se refusant à capitaliser sur le décès d'André Fortin et à faire une promotion dynamique de l’album posthume.
En , le film Dédé, à travers les brumes de Jean-Philippe Duval, qui relate la vie de Dédé Fortin à travers son œuvre artistique, sort en salles au Québec. Le film est bien reçu par la critique et obtient de bonnes recettes au guichet. Sébastien Ricard remporte le Jutra du meilleur acteur pour son interprétation de Dédé en 2010[88].
Fondation André Dédé Fortin
[modifier | modifier le code]En 2006, la famille Fortin a mis sur pied la fondation André Dédé Fortin, qui s’occupe de récolter des fonds et de promouvoir les services des organismes communautaires d’aide aux personnes vivant des problématiques reliées à la santé mentale et au suicide[89].
Héritage et hommages
[modifier | modifier le code]- En , le village de Saint-Thomas-Didyme a renommé le rang St-Henri, où l'artiste avait vu le jour, « chemin Dédé-Fortin »[90].
- En paraît le film Dédé, à travers les brumes, relatant sa vie et mettant en vedette Sébastien Ricard, du groupe Loco Locass, qui interprète le rôle principal ainsi que les chansons[91].
- Le , le spectacle Poussière d'étoiles avec les Colocs est présenté aux FrancoFolies de Montréal puis diffusé à la Télévision de Radio-Canada le . Les Colocs présents sont Mike Sawatzky et André Vanderbiest. Ils sont accompagnés par les Colocs « invités » (ayant été d'étroits collaborateurs du groupe) El Hadji Diouf, Karim Diouf, Benoit Piché, Joel Zifkin (en), Michel Dufour, Benoit Gagné, Guy Bélanger et Justin Alard. Pour chanter Dédé, Paul Piché, Pierre Lapointe, Marc Déry, Martin Léon, Sébastien Plante et Loco Locass ont partagé la scène. Différents portraits de Dédé et des Colocs sont diffusés sur un bâtiment de l'Université du Québec à Montréal durant la prestation. Un disque est produit dans ce cadre avec différentes versions de La comète, la dernière chanson produite par André Fortin[92].
- En , Loco Locass rend hommage à Dédé en incluant une parcelle d'enregistrement dans leur chanson Occupation double. Cette chanson sera chantée lors des festivités de la Fête nationale du Québec, le , sur les plaines d'Abraham.
- Sa guitare électrique, une réédition de fabrication japonaise de la Fender Telecaster Thinline f-hole '72, a été léguée par sa succession et exposée au Musée de la civilisation de Québec avec, à ses côtés, sa « guitare de feu », une guitare acoustique de marque inconnue sur laquelle il composait et jouait pour sa famille et ses amis[93].
- L'Hôtel10, situé au croisement du boulevard Saint-Laurent et de la rue Sherbrooke où le chanteur a vécu de 1991 à 1998, a inauguré une murale lui rendant hommage, ainsi qu'à Gino Vannelli, en novembre 2023 tout en aménageant son ancien loft, devenu la "Suite 2116", et les pièces communes par diverses affaires qu'il a laissé lors de son passage[94].
Discographie
[modifier | modifier le code]Filmographie
[modifier | modifier le code]- Libérer le trésor (1987), acteur, vidéoclip de Michel Rivard, album Un trou dans les nuages
- Chasseur de robots (1988), acteur et scénariste[95]
- Terreur dans le Chinatown (ou Master Kwok, The Advenger of the Night), acteur et réalisateur
Notes et références
[modifier | modifier le code]Notes
[modifier | modifier le code]Références
[modifier | modifier le code]- ↑ André St-Pierre (réal.), Musicographie : Dédé Fortin, MusiMax, 2001, 45 min.
- ↑ Philippe Meilleur, André Fortin. L'homme qui brillait comme une comète, VLB Éditeur, 2013, p. 13.
- ↑ Philippe Meilleur, André Fortin: L'homme qui brillait comme une comète, VLB Éditeur, 2013, p. 22.
- ↑ Philippe Meilleur, André Fortin. L'homme qui brillait comme une comète, VLB Éditeur, 2013, p. 14.
- ↑ Philippe Meilleur, André Fortin. L'homme qui brillait comme une comète, VLB Éditeur, 2013, p. 22.
- ↑ Philippe Meilleur, André Fortin: L'homme qui brillait comme une comète, VLB Éditeur, 2013, p. 22-23.
- ↑ Réjean Tremblay, « Du sabotage à la Traversée », La Presse, 28 juillet 1979, cahier C, p. 3. Consulté le 5 mai 2025.
- ↑ Marcel Rivard, « Plume a été écœurant », Le quotidien du Saguenay-Lac-St-Jean, 31 juillet 1979, cahier 1, p. 6. Consulté le 5 mai 2025.
- ↑ Louis Potvin, « La foule défie un ciel menaçant... et gagne! », Le Quotidien, 27 juillet 2006, p. 2. Consulté le 7 mai 2025.
- ↑ Philippe Meilleur, André Fortin: L'homme qui brillait comme une comète, VLB Éditeur, 2013, p. 31-32.
- ↑ André Fortin, « La traversée », Les Colocs, BMG Musique Québec, 1993.
- ↑ Philippe Meilleur, André Fortin: L'homme qui brillait comme une comète, VLB Éditeur, 2013, p. 34-38.
- ↑ Philippe Meilleur, André Fortin: L'homme qui brillait comme une comète, VLB Éditeur, 2013, p. 37, 258-259.
- ↑ Philippe Meilleur, André Fortin: L'homme qui brillait comme une comète, VLB Éditeur, 2013, p. 40-43.
- ↑ Les Colocs chez les Souverains anonymes, 1re partie, 2 juin 1994. Consulté le 9 mai 2025.
- ↑ Philippe Meilleur, André Fortin: L'homme qui brillait comme une comète, VLB Éditeur, 2013, p. 45-46.
- Philippe Meilleur, André Fortin: L'homme qui brillait comme une comète, VLB Éditeur, 2013, p. 47.
- ↑ Philippe Meilleur, André Fortin: L'homme qui brillait comme une comète, VLB Éditeur, 2013, p. 48-50.
- ↑ Philippe Meilleur, André Fortin: L'homme qui brillait comme une comète, VLB Éditeur, 2013, p. 51.
- ↑ « Spectacles » section Variétés, La Presse, 31 mai 1984, cahier D, p. 10. Consulté le 7 mai 2025.
- ↑ Philippe Meilleur, André Fortin: L'homme qui brillait comme une comète, VLB Éditeur, 2013, p. 57-59.
- ↑ Philippe Meilleur, André Fortin: L'homme qui brillait comme une comète, VLB Éditeur, 2013, p. 62-64.
- ↑ Philippe Meilleur, André Fortin: L'homme qui brillait comme une comète, VLB Éditeur, 2013, p. 65.
- ↑ Philippe Meilleur, André Fortin: L'homme qui brillait comme une comète, VLB Éditeur, 2013, p. 66-71.
- ↑ Philippe Meilleur, André Fortin: L'homme qui brillait comme une comète, VLB Éditeur, 2013, p. 75-78.
- ↑ Alain Brunet, « Artiste jusqu'au bout des ongles », La Presse, 3 février 1994, cahier D, p. 12. Consulté le 1er mai 2025.
- ↑ Sylvain Cormier, « Ne trouvez-vous pas qu'il fait chaud, Cha Cha? », Le Devoir, 21 avril 1995, cahier B, p. 11. Consulté le 1er mai 2025.
- ↑ Philippe Meilleur, André Fortin: L'homme qui brillait comme une comète, VLB Éditeur, 2013, p. 80-83.
- ↑ Philippe Meilleur, André Fortin: L'homme qui brillait comme une comète, VLB Éditeur, 2013, p. 56.
- ↑ Philippe Meilleur, André Fortin: L'homme qui brillait comme une comète, VLB Éditeur, 2013, p. 84-88.
- ↑ Philippe Meilleur, André Fortin: L'homme qui brillait comme une comète, VLB Éditeur, 2013, p. 114.
- ↑ Philippe Meilleur, André Fortin: L'homme qui brillait comme une comète, VLB Éditeur, 2013, p. 110-111.
- ↑ Philippe Meilleur, André Fortin: L'homme qui brillait comme une comète, VLB Éditeur, 2013, p. 111.
- ↑ Philippe Meilleur, André Fortin: L'homme qui brillait comme une comète, VLB Éditeur, 2013, p. 113-115, 130.
- ↑ Philippe Meilleur, André Fortin: L'homme qui brillait comme une comète, VLB Éditeur, 2013, p. 123, 128.
- ↑ Philippe Meilleur, André Fortin: L'homme qui brillait comme une comète, VLB Éditeur, 2013, p. 133.
- ↑ Philippe Meilleur, André Fortin: L'homme qui brillait comme une comète, VLB Éditeur, 2013, p. 136-137.
- ↑ Philippe Meilleur, André Fortin: L'homme qui brillait comme une comète, VLB Éditeur, 2013, p. 138.
- ↑ Philippe Meilleur, André Fortin: L'homme qui brillait comme une comète, VLB Éditeur, 2013, p. 143-148.
- ↑ Philippe Meilleur, André Fortin: L'homme qui brillait comme une comète, VLB Éditeur, 2013, p. 153.
- ↑ Sylvain Cormier, « Garder le contrôle, c'est rock and roll », Le Devoir, 6 mars 1993, cahier C, p. 7. Consulté le 1er mai 2025.
- ↑ Philippe Meilleur, André Fortin: L'homme qui brillait comme une comète, VLB Éditeur, 2013, p. 160-162.
- ↑ Philippe Meilleur, André Fortin: L'homme qui brillait comme une comète, VLB Éditeur, 2013, p. 162-165.
- ↑ Philippe Meilleur, André Fortin: L'homme qui brillait comme une comète, VLB Éditeur, 2013, p. 165-168.
- ↑ Alain Brunet, « Le plus gros "buzz" de l'heure », La Presse, 6 mars 1993, cahier E, p. 4. Consulté le 1er mai 2025.
- ↑ Philippe Meilleur, André Fortin: L'homme qui brillait comme une comète, VLB Éditeur, 2013, p. 190.
- ↑ Philippe Meilleur, André Fortin: L'homme qui brillait comme une comète, VLB Éditeur, 2013, p. 192-193.
- ↑ Raymond Paquin, Dédé, Quitte ou Double, 2004, p. 27-36.
- ↑ Raymond Paquin, Dédé, Quitte ou Double, 2004, p. 45-60.
- ↑ Alain Brunet, « Le plus gros "buzz" de l'heure », La Presse, 6 mars 1993, cahier E, p. 4.
- ↑ Roland Paillé, « L'humour a sa place dans le rock », Le Nouvelliste, 29 mai 1993, cahier 2, p. 10. Consulté le 7 mai 2025.
- ↑ Raymond Paquin, Dédé, Quitte ou Double, 2004, p. 100.
- ↑ Raymond Paquin, Dédé, Quitte ou Double, 2004, p. 91.
- ↑ Raymond Paquin, Dédé, Quitte ou Double, 2004, p. 97-98.
- ↑ Philippe Meilleur, André Fortin: L'homme qui brillait comme une comète, VLB Éditeur, 2013, p. 234-235.
- ↑ Raymond Paquin, Dédé, Quitte ou Double, 2004, p. 97-99.
- ↑ Daniel Lemay, « Les Colocs et Marie Carmen dominent le 15e gala de l'ADISQ » et Alain Brunet, « "Ça va trop vite" pour les Colocs », La Presse, 18 octobre 1993, cahier A, p. 1-2, 12. Consulté le 12 mai 2025.
- ↑ Alain Brunet, « Les Colocs, de Larochelière, Crowded House... », La Presse, 14 avril 1994, cahier D, p. 4. Consulté le 1er mai 2025.
- ↑ Sylvain Cormier, « Les Colocs cassent la baraque », Le Devoir, 9 mai 1994, cahier B, p. 8. Consulté le 1er mai 2025.
- ↑ Raymond Paquin, Dédé, Quitte ou Double, 2004, p. 254-255.
- ↑ Philippe Meilleur, André Fortin: L'homme qui brillait comme une comète, VLB Éditeur, 2013, p. 253-255.
- ↑ Presse canadienne, « L'harmoniciste des Colocs "ne mourra plus jamais" », La Tribune, 16 novembre 1994, cahier 2, p. 6. Consulté le 7 mai 2025.
- ↑ Philippe Meilleur, André Fortin: L'homme qui brillait comme une comète, VLB Éditeur, 2013, p. 267-268.
- ↑ Philippe Meilleur, André Fortin: L'homme qui brillait comme une comète, VLB Éditeur, 2013, p. 271.
- ↑ Alan Lord, High Friends in Low Places, Guernica Editions, 2022, p. 251, 263.
- ↑ Philippe Meilleur, André Fortin: L'homme qui brillait comme une comète, VLB Éditeur, 2013, p. 275-278.
- ↑ Philippe Meilleur, André Fortin: L'homme qui brillait comme une comète, VLB Éditeur, 2013, p. 283-284.
- ↑ Philippe Meilleur, André Fortin: L'homme qui brillait comme une comète, VLB Éditeur, 2013, p. 286-289.
- ↑ Alain Brunet, « Bourges : le printemps pour les Colocs », La Presse, 18 avril 1996, cahier D, p. 8. Consulté le 1er mai 2025.
- ↑ Philippe Meilleur, André Fortin: L'homme qui brillait comme une comète, VLB Éditeur, 2013, p. 300.
- ↑ Philippe Meilleur, André Fortin: L'homme qui brillait comme une comète, VLB Éditeur, 2013, p. 303-305.
- ↑ Philippe Meilleur, André Fortin: L'homme qui brillait comme une comète, VLB Éditeur, 2013, p. 315-319, 324.
- ↑ Raymond Paquin, Dédé, Quitte ou Double, 2004, p. 23.
- ↑ Roger Tremblay, « "Nous avons appris sa mort à la télé" - Gisèle et Alfred Fortin », Progrès-Dimanche, 14 mai 2000, cahier 1, p. 4. Consulté le 1er mai 2025.
- ↑ Raymond Paquin, Dédé, Quitte ou Double, 2004, p. 15-16.
- ↑ Sylvain Cormier, « Dédé Fortin, des Colocs, trouvé mort », Le Devoir, 11 mai 2000, cahier A, p. 1 et 8. Consulté le 1er mai 2025.
- ↑ Hugo Dumas, « Le chanteur des Colocs trouvé mort », La Presse, 11 mai 2000, cahier A, p. 1.
- ↑ Alain Brunet, « André Fortin, un artiste qui doutait... », La Presse, 11 mai 2000, cahier D, p. 5. Consulté le 1er mai 2025.
- ↑ Pierre Bourdon, « "Dédé" Fortin et ses Colocs nous font honneur », Le Quotidien, 2 septembre 1994, p. 12. Consulté le 1er mai 2025.
- ↑ Lia Lévesque, « Des funérailles jeunes et multiculturelles », Le Quotidien, 16 mai 2000, p. 4. Consulté le 1er mai 2025.
- ↑ André Duchesne, « Triste journée, rue du Prince », La Presse, 15 mai 2000, cahier A, p. 3. Consulté le 1er mai 2025.
- ↑ Sylvain Cormier, « Dehors février », Le Devoir, 8 février 2007, cahier B, p. 7. Consulté le 1er mai 2025.
- ↑ Sylvain Cormier, « Volontaire pour Dédé... et pour le rock », Le Devoir, 2 février 2007, cahier B, p. 5. Consulté le 1er mai 2025.
- ↑ Stéphane Alarie, « Le jour où il s'est fait hara-kiri, Dédé Fortin venait de consulter un psy », Journal de Montréal, 17 janvier 2001, page 2.
- ↑ « L'immensité du vide », Skarlatine, vol. 10, no 5, mai 2010, consulté le 10 mai 2010).
- ↑ « Adieu Dédé! », Skarlatine, vol. 10, no 5, mai 2010, consulté le 10 mai 2010.
- ↑ Pierre Drouilly, « Le référendum du 30 octobre 1995 : une analyse des résultats », Université du Québec à Montréal, consulté le 9 mars 2009.
- ↑ « L'industrie du cinéma rend hommage à Dédé Fortin », sur Skarlatine, (consulté le ).
- ↑ « A propos de la fondation », Fondation André Dédé Fortin (consulté le ).
- ↑ Renommage du rang Saint-Henri.
- ↑ Normand Provencher, Dédé dans la peau, Le Soleil, 7 mars 2009, p. A2.
- ↑ Alexandre Vigneault, « Une nouvelle chanson signée Dédé Fortin », La Presse, 26 juin 2006. Consulté le 21 mai 2025.
- ↑ « Dédé Fortin: la guitare tourmentée », La Presse, (lire en ligne, consulté le ).
- ↑ « Photoreportage: Gino Vannelli et Dédé Fortin cohabitent dans un hôtel du centre-ville », La Presse, (lire en ligne, consulté le )
- ↑ (fr) « Dédé Fortin Vidéaste 1 », YouTube.
Annexes
[modifier | modifier le code]Articles connexes
[modifier | modifier le code]- Culture québécoise
- Musique québécoise
- Mouvement souverainiste du Québec
- Liste de personnalités liées au Saguenay–Lac-Saint-Jean
- Liste des réalisateurs québécois
Liens externes
[modifier | modifier le code]- Le site de la Fondation André Dédé Fortin créée pour la prévention du suicide
- Site sur Les Colocs et André Fortin
- Biographie
Bibliographie
[modifier | modifier le code]- Jean Barbe, Autour de Dédé Fortin, Leméac,
- André St-Pierre (réal.), Musicographie : Dédé Fortin, MusiMax, 2001, 45 min.
- Raymond Paquin, Dédé, Quitte ou double,
- Philippe Meilleur, André Fortin. L'homme qui brillait comme une comète, VLB Éditeur, 2013
- Naissance en novembre 1962
- Naissance dans le comté de Lac-Saint-Jean-Ouest
- Décès en mai 2000
- Décès à Montréal
- Décès à 37 ans
- Batteur québécois
- Chanteur québécois francophone
- Guitariste québécois
- Percussionniste québécois
- Réalisateur québécois
- Étudiant de l'Université de Montréal
- Auteur-compositeur-interprète québécois
- Auteur-compositeur-interprète francophone
- Multi-instrumentiste canadien
- Suicide par sectionnement
- Suicide au Canada
- Batteur canadien de rock
- Musicien suicidé