Alexandre Orlov

Un article de Wikipédia, l'encyclopédie libre.
Alexandre Orlov
Alexandre Orlov.
Biographie
Naissance
Décès
Voir et modifier les données sur Wikidata (à 77 ans)
ClevelandVoir et modifier les données sur Wikidata
Pseudonyme
Lev Lazarevič Nikol‘skijVoir et modifier les données sur Wikidata
Nationalités
Activités
Autres informations
Parti politique
Arme
Grade militaire
Major de la sécurité de l'État (en) (à partir de )Voir et modifier les données sur Wikidata
Conflit
Distinctions

Lev (Leïba) Lazarevitch Feldbine (en russe : Лев Лазаревич Фельбинг) dit Alexandre Mikhaïlovitch Orlov (en russe : Александр Михайлович Орлов), ou encore Lev Lazarevitch Nikolski (dans les registres du NKVD) ou encore, aux États-Unis, Igor Berg ou William Goldin[1], est un espion soviétique né le à Bobrouïsk (Empire russe) et mort le à Cleveland (États-Unis).

Biographie[modifier | modifier le code]

Il naît à Bobrouïsk en Russie blanche dans le gouvernement de Minsk (aujourd'hui République de Biélorussie), au sein d'une famille juive. Son père est un homme d'affaires[2]. La petite ville compte beaucoup de socialistes de l'aile gauche du Bund[3]. Il fait son service militaire de l'automne 1916 au début 1917 à l'arrière. Il intègre le parti socialiste russe des travailleurs internationalistes après la révolution de février. Il entre dans l'Armée rouge des ouvriers et des paysans au début de la guerre civile russe et est affecté comme commissaire politique à la Section spéciale de la 12e armée, chargée de la conformité idéologique. Il se distingue en faisant la chasse aux « contre-révolutionnaires » de Kiev (en fait, tout opposant au parti bolchevik) et se trouve alors à la tête de la Section spéciale. Il entre au parti communiste en .

Il fait partie de la tchéka d'Arkhanguelsk en 1920-1921 et traque les « ennemis » supposés du régime. Il est chef du département des opérations secrètes et du département de surveillance des agents de la frontière nord et d'autres sections. Il a plein pouvoir pour rechercher et exécuter les anciens officiers des Armées blanches de la région nord. À la fin de la guerre civile en 1921-1924, il se trouve à l'université de Moscou sur les bancs de la faculté de droit. Il se fait connaître à la même époque (à partir de 1920) en étant recruté, sous le nom de Lev Nikolski, par le NKVD dans les services de surveillance. Il termine ses études en 1924 à l'âge de vingt-neuf ans. Il est ensuite attaché au service de l'administration économique de la Guépéou qui est dirigée par son cousin germain Zinovi Katznelson (1892-1938)[4]. Plus tard, il travaille à la Guépéou en Transcaucasie.

Carrière d'espion[modifier | modifier le code]

En 1926, Lev Nikolski est enrôlé à la Première direction générale de la Guépéou. Il est chargé les années suivantes de missions plus ou moins longues en France, en Allemagne, aux États-Unis, en Italie, en Autriche, en Tchécoslovaquie, en Suisse, en Grande-Bretagne, en Estonie, en Suède et au Danemark. Il travaille en particulier avec Kim Philby en 1934 pour mieux coordonner le groupe de Cambridge.

Agent résident du NKVD au sein de la Seconde République espagnole, Orlov est chargé à partir de de « liquider » les trotskistes et anarchistes espagnols. Il est conseiller en chef de la sécurité intérieure et du contre-renseignement du gouvernement républicain de Madrid. C'est lui qui organise le transfert du trésor espagnol à Moscou (affaire dite de l'or de Moscou)[2]. Il surveille en même temps la conformité idéologique des officiers républicains au sein du Servicio de Información Militar, SIM. Il fonde une école de formation de groupes chargés de monter des opérations de diversion à l'arrière de l'ennemi. Il fut le principal acteur de la destruction du POUM en Catalogne (et indirectement de la chute de Barcelone), et de l'exécution de ses dirigeants (dont Andreu Nin en qu'il fait sortir de prison pour le faire tuer)[5].

Alexandre Orlov (plus connu sous le nom de Lev Nikolski à cette époque) recrute en Morris Cohen (1910-1995), brigadiste internationaliste, qui sera plus tard en contact avec Rudolf Abel et Konon Molody, et qui sera l'un des organisateurs de l'assassinat de Iossif Grigoulevitch.

Défection[modifier | modifier le code]

À l'automne 1936 les grandes purges s'intensifient au sein des cadres militaires et politiques de l'Union soviétique. La répression frappe aussi au NKVD, dont de nombreux cadres des premiers temps, témoins et bons connaisseurs de l'histoire du régime soviétique et de l'ascension de Staline, sont au mieux renvoyés de leur poste, au pire assassinés[2]. Parmi les dirigeants du contre-espionnage assassinés : Gleb Boky, Yakov Peters (ru), Josef Unschlicht (ru), Fiodor Eikmans (ru), etc.

Dans le courant de l'année 1937 les purges frappent le milieu des diplomates. Parmi eux, le plénipotentiaire d'URSS à Madrid, Marcel Rosenberg (ru), et Léon Gaikis (ru) sont rappelés à Moscou et fusillés quelque temps plus tard (Gaikis en , Rosenberg en )[6] et Vladimir Antonov-Ovseïenko, consul général soviétique à Barcelone et ambassadeur de fait, rappelé en , arrêté en octobre et fusillé en .

Le , le supérieur direct d'Alexandre Orlov, Abram Sloutski, meurt inopinément, et en juillet Orlov reçoit l'ordre d'embarquer à bord du navire soviétique Le Svir à Anvers pour rencontrer Sergueï Spiegelglass qui faisait l'intérim après la mort de Sloutski. Mais Orlov ne paraît pas, et au lieu de cela dérobe soixante mille dollars des caisses de la section d'opération du NKVD. Secrètement, Orlov, sa femme et sa fille passent en France, puis embarquent pour le Canada d'où ils passent la frontière vers les États-Unis[2]. Avant sa fuite, Orlov envoie une lettre à Nikolaï Iejov et à Staline, où il prévient que s'il arrivait que sa famille ou ses proches demeurés en Union soviétique soient arrêtés, il révèlerait alors aux Américains les noms d'un grand nombre d'agents soviétiques[7]).

Il s'installe aux États-Unis sous le nom d'Igor Berg[2], et aucune poursuite n'est engagée contre lui en URSS. Il commence une carrière d'enseignant à l'université. Il est l'auteur, sous le pseudonyme d'Alexander Orlov, d'un manuel sur l'espionnage paru à Ann Arbor en 1963.

En littérature[modifier | modifier le code]

Alexandre Orlov est reconnaissable sous les traits de Varlov dans le roman d'Hemingway, Pour qui sonne le glas[8].

Il apparaît sous ses vrais traits dans le roman de l'écrivain cubain Leonardo Padura L'homme qui aimait les chiens[9] et de même dans le roman policier de Víctor del Árbol Toutes les vagues de l'océan[10].

Il est un des personnages importants de la bande dessinée 'les noces de sang' (T46 et T47 de la série Jour J).

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. (en) Boris Volodarsky, Stalin's Agent : The Life and Death of Alexander Orlov, Oxford University Press, , 789 p. (ISBN 978-0-19-965658-5, présentation en ligne), p. 672
  2. a b c d et e (en) Jay Robert Nash, Spies : A Narrative Encyclopedia of Dirty Tricks and Double Dealing from Biblical Times to Today, M. Evans and Company, Inc, , 624 p. (ISBN 978-0-87131-790-2, lire en ligne), p. 374
  3. Nat Lilenstein (réal.), Les Révolutionnaires du Yiddishland, 1983, Kuiv productions & A2 (recension)
  4. Fusillé pendant les purges staliniennes
  5. (en) Christopher Andrew et Vasili Mitrokhin, The Mitrokhin Archive : The KGB in Europe and the West, Penguin UK; New Ed edition, , 995 p. (ISBN 978-0-14-028487-4, lire en ligne), p. 202-203
  6. Ignacio Martínez de Pisón, L'encre et le sang : histoire d'une trahison, Markus Haller, , 252 p. (ISBN 978-2-940427-05-5, présentation en ligne), p. 203-204
  7. Remi Kauffer, Les Espions de Cambridge, Perrin 2022 p. 108
  8. (ru) Oleg Zoubov, Voilà un bien étrange espion, article du Novy Mir, 1996, N°12
  9. Editions Métailié - 2011 (ISBN 978-2864247555)
  10. Editions Babel (collection Babel Noire, janvier 2017) pages 380 à 392

Bibliographie[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]