Jean-Jacques Rousseau (réalisateur)
Jean-Jacques Rousseau, né à Souvret le et mort à Montigny-le-Tilleul le , est un réalisateur belge de cinéma indépendant. Défendant un cinéma fait de budgets limités, de 2 000 à 2 500 € par film, avec des acteurs non professionnels, il est néanmoins, avec une quarantaine de films réalisés, le plus prolifique des cinéastes belges[1].
Biographie
Il est difficile de décrire la vie privée de Jean-Jacques Rousseau[2] car il cache soigneusement tout ce qui s'y rapporte, afin de ne pas laisser les médias jouer avec son image. Il apparaît toujours en public avec une cagoule. Il considère la révélation de son identité comme une fin en soi.
Néanmoins, on sait de lui qu'il est né à Souvret, près de Courcelles, le 16 décembre 1946[3] et qu'il a exercé la profession d'ouvrier-maçon. Après que les distributeurs et exploitants de sa région ont refusé ses films, Jean-Jacques Rousseau a été exploitant de salle de cinéma afin de pouvoir les projeter et, afin de rentabiliser la salle, il n’est pas rare de voir ses propres films précéder des blockbusters.
Reconnaissance publique
Héritier du cinéma forain[4], situé totalement en marge des marchés du cinéma, aucun de ses films, faits de bric et de broc, n'est sorti en salle mais quelques festivals ont occasionnellement organisé de très courtes rétrospectives de son œuvre. Son film Karminsky-Grad a bénéficié d'une distribution en DVD via la collection Actes Belges[5]. Il est régulièrement invité à projeter ses films au Festival International du Film Fantastique de Bruxelles. En 2011, le cinéaste comptait parmi le jury de la sélection "7e parallèle" de ce même festival[6].
Sa reconnaissance par certaines personnalités est palpable sous différentes formes. Ainsi Jan Kounen l'a accueilli sur les bonus du DVD de 99 francs[7], et il a reçu le soutien de diverses personnalités comme Noël Godin, Bouli Lanners, Benoît Poelvoorde[8] ou Miss Ming[9].
En 2004, Frédéric Sojcher réalise Cinéastes à tout prix, documentaire sur le travail de Jean-Jacques Rousseau, Max Naveaux et Jacques Hardy. Le film, qui affirme la position particulière des réalisateurs, figure dans la sélection officielle Hors Compétition du Festival de Cannes.
Si sa manière de faire est franchement marginale, son ton marqué par l'absurde, le surréalisme et la contestation, le rapproche d'autres acteurs originaux du cinéma belge : Noël Godin, Jan Bucquoy, Frédéric Sojcher, Jean Louvet ou Baudhuin Simon.
Décès
Le 15 juillet 2014, il est blessé gravement et délibérément en rue par une voiture, après s'être interposé dans une altercation de café à Courcelles[10],[11]. Plongé dans le coma, il meurt le 5 novembre à l'hôpital de Montigny-le-Tilleul des suites de ses blessures[12].
Thématiques
Son travail porte la marque de son statut d'autodidacte et témoigne de la création d'un langage propre à un cinéaste. Ainsi, c'est en filmant qu'il apprend le cadrage, l'éclairage, le son, le montage, la postsynchronisation, la direction d’acteurs.
Vers le début des années 1980, des grands thèmes commencent à se dégager de son travail. Son emploi fréquent de créatures de toutes sortes (savants fous dépassés par leurs créations, sociétés secrètes, tortures, malédictions diverses, etc.) le place en expérimentateur du film fantastique d'épouvante. Par ailleurs, on remarque aussi un certain ancrage dans l’histoire, en particulier les deux guerres mondiales, présentant la Wallonie industrielle avec tout son passé de luttes et de révoltes[13].
L'œuvre de Jean-Jacques Rousseau se veut la démonstration qu'une insoumission face aux diktats économiques et financiers du cinéma est possible. Il s'y élève aussi contre les exigences techniques et esthétiques des cinéastes « professionnels ». Il a ainsi filmé la bataille de Waterloo dans son jardin, ou reconstitué la bataille de l’Yser avec trois acteurs et une vache. Il n'est cependant pas réductible à un « Ed Wood belge »[4], dans la mesure où il a conscience de la pauvreté de ses moyens mais l'assume et en joue comme un moyen de souligner sa volonté artistique[14].
Filmographie
- 1964 : L'Étrange histoire du professeur Igor Yaboutich
- 1965 : Le Poignard maudit
- 1966 : Les Malfaiteurs
- 1966 : La Vallée de la Sûre
- 1968 : L'Abstrait
- 1969 : Le Cauchemar
- 1972 : Germaine Grandier
- 1974 : Les Compagnons de justice
- 1975 : Le Reposoir
- 1975 : Les Immortels
- 1976 : Catalepsie
- 1977 : L'Étoile du mal
- 1977 : Dossier réincarnation
- 1978 : Les Marcheurs de la grande armée
- 1978 : Le Diabolique Docteur Flak
- 1983 : L'Histoire du cinéma 16
- 1988 : Cannes année européenne du cinéma
- 1988 : Ciné Effet
- 1988 : L'Internement de Karyl Chessman
- 1997 : Dossier Absurdus
- 1999 : Furor Teutonicus
- 2001 : Irkutz 88 (autre titre : Le Goulag de la Terreur)
- 2002 : Road Movie
- 2003 : Wallonie 2084
- 2004 : La Revanche du sacristain cannibale
- 2005 : Le Chasseur de succubes
- 2005 : L'Histoire du cinéma 16 II
- 2006 : La Mécanique du rasoir
- 2006 : L'Invasion des succubes
- 2007 : Rock Mendès
- 2007 : Fuyons les monstres
- 2007 : Les Maîtresses du docteur Loiseau
- 2008 : L'Histoire du cinéma 16 III
- 2008 : Le Docteur Loiseau et ses Sinistres Augures
- 2008 : Le Retour du Docteur Loiseau
- 2009 : Un colonial chez les Celtes
- 2010 : Karminsky-Grad
- 2010 : Casanova Forever
- 2010 : L'Amputeur Wallon
- 2011 : Le 1er juillet chez Olga
- 2013 : Docteur Loiseau : La solution finale
- 2013 : Le Couturier
Sur l'œuvre
- 1987 : Cargo de nuit, portrait de Jean-Jacques Rousseau cinéaste insoumis, RTBF, 10 min[15].
- 1997 : L'Œil du Cyclone, Une belge histoire, Canal+, 20min. Sur Jean-Jacques Rousseau, cinéaste belge amateur et excentrique.
- 2004 : Cinéastes à tout prix, de Frédéric Sojcher. Documentaire sur le travail de Jean-Jacques Rousseau, Max Naveaux et Jacques Hardy. Bouli Lanners, Noël Godin et Benoît Poelvoorde y interviennent. Le film figure en sélection officielle lors du Festival de Cannes 2004 ; 66 minutes.
- 2008 : Jean-Jacques Rousseau, cinéaste de l'absurde, Collectif, Archimbaud-Klincksieck, Paris, 240 p[16].
- 2009 : Qu'est-ce qu'une star aujourd'hui ?, de NT Binh et Luc Dellisse, Retranscription de débats, Éditions du Rocher, Paris, 243 p[17].
- 2012 : Furor Absurdüs, de Maxime et Michel Pasque. Documentaire qui a pour cadre un tournage de film ; 85 minutes[18].
Notes et références
- « Le cinéaste de l'absurde Jean-Jacques Rousseau entre la vie et la mort », La Libre Belgique, (lire en ligne)
- Site officiel
- Frantz Vaillant, « Belgique : Jean-Jacques Rousseau est mort. Absurde ! », sur le site de TV5 Monde,
- David Ramasseul, « Mort du cinéaste de l'absurde : Clap de fin pour Jean-Jacques Rousseau », Paris Match, (Mort du cinéaste de l'absurde Clap de fin pour Jean-Jacques Rousseau)
- Fiche du film Karminsky-Grad sur le site de la collection Actes Belges.
- Palmarès du BIFFF 2011
- Présentation du DVD sur filmsactu
- Fiche du film Cinéastes à tout prix
- Article de Sud Presse
- Courcelles: trois personnes délibérement fauchées, dont le cinéaste Jean-Jacques Rousseau, Le Soir,
- Courcelles : trois personnes, dont le cinéaste Jean-Jacques Rousseau, fauchées volontairement après une altercation au café "Le Napoléon" - La Meuse,
- Belgique : Jean-Jacques Rousseau est mort. Absurde !, par Frantz Vaillant, TV5 Monde,
- voir notamment émission de Marc Preyat, L'Hebdo, RTBF, 2000
- Condensé d'article de la revue Toudi : http://www.larevuetoudi.org/fr/story/jean-jacques-rousseau-cin%C3%A9aste-wallon
- Reportage visible en ligne sur le site de la SONUMA, archives audiovisuelles belges.
- Fiche du livre sur le site de l'éditeur Archimbaud-Klincksieck
- Fiche du livre sur le site du Master Pro Ciné Sorbonne.
- Fiche du film sur le site du producteur Left Field Ventures