Iffat bint Mohammad Al Thunayan

Un article de Wikipédia, l'encyclopédie libre.
Iffat Al-Thunayan
La reine visitant l'école Dar Al Hannan.
Biographie
Naissance
Décès
Nationalités
Famille
Conjoint
Enfants

Iffat bint Mohammad Al Thunayan[Note 1] (en arabe : عفت بنت محمد الثنيان), née en et morte le , est une princesse saoudienne d'origine turque, épouse du roi Fayçal ben Abdelaziz Al Saoud. Parfois appelée reine ou princesse Iffat, elle est connue pour son militantisme en faveur de l'amélioration de l'éducation saoudienne. Elle est la fondatrice de l'école modèle de Taïf et du premier collège de filles du pays.

Biographie[modifier | modifier le code]

Origines[modifier | modifier le code]

Elle fait partie de la branche cadette des Al Saoud, les Al Thunayan[1],[2]. Elle naît à Constantinople en 1916[1],[3].

Son grand-père est Abdullah bin Abdullah bin Thunayan Al Saud (en)[4]. Il naît en 1843, le jour de la mort de son père Abdullah bin Thunayan Al Saud (en), émir du Nejd[5]. En raison de cette coïncidence, il reçoit le nom de ce dernier[5]. Il quitte Nejd pour Constantinople, où il épouse une femme turque d'origine circassienne, Tazeruh Hanım[4]. Ils ont quatre enfants : Mohammad, Ahmed (en), Suleiman et Jawhara[4]. Mohammad bin Abdullah Al Thunayan, le père d'Iffat, est médecin dans l'armée ottomane et sa mère, Asia, est une Turque[4],[6]. Mohammad est tué alors qu'il combattait dans la guerre des Balkans[4]. Iffat a un frère, Zaki[4], et deux demi-frères maternels, Kamal Adham (en) et Mozaffar Adham[7]. Son oncle paternel, Ahmed bin Abdullah, est l'un des conseillers du roi Abdulaziz[7],[8].

Après le remariage de sa mère avec un autre homme, Iffat et sa tante Jawhara vivent ensemble. Iffat fait ses études à Constantinople[9]. Elle fréquente des écoles ottomanes et des écoles modernes après la création de la République de Turquie[4]. Elle obtient un diplôme d'enseignement[4]. En 1925, la famille d'Iffat demande une aide financière afin qu'elle puisse faire un pèlerinage à La Mecque[10].

Laila Al Thunayan, membre de sa famille, est mariée à Sultan ben Abdelaziz Al Saoud[11].

Mariage avec Fayçal[modifier | modifier le code]

En 1931, le prince Fayçal rencontre Iffat pour la première fois alors qu'elle fait un pèlerinage à La Mecque avec sa tante[1]. Alors vice-roi du Hedjaz, il raccompagne Iffat en Turquie avec sa tante[2]. Il existe une autre version de leur première rencontre, selon laquelle ils se seraient connus pour la première fois à Constantinople en 1932, lorsque le prince Fayçal parcourait la ville après une visite officielle en URSS[12]. Fayçal et Iffat se rendent ensuite à Djeddah[12],[8], où ils se marient en 1932[13]. Le couple réside à La Mecque[8].

Comme aucun ne parle la langue de l'autre, ils s'instruisent mutuellement. Ils ont neuf enfants[3], cinq fils et quatre filles : Mohammed (en), Bandar (en), Saoud, Turki, Abdul Rahman (en), Lolowah, Sara bint Fayçal, Latifa et Haifa (en)[4],[14]. Quatre de leurs enfants apprennent le turc à la maison. Iffat devient arabophone mais sans abandonner son accent turc[1].

Leurs fils sont très instruits, étudiant à Princeton, Harvard, Georgetown, Sandhurst et Cranwell (en). Iffat contacte des tuteurs étrangers pour éduquer ses filles. Pour comparaison, seuls 6 des 107 enfants du demi-frère aîné de Fayçal, Saoud, ont terminé leurs études secondaires[1],[15],[16].

La reine Iffat[modifier | modifier le code]

« Reine Iffat » est un titre informel, qui lui est donné en raison de son statut et de sa popularité en Arabie saoudite[9].

En 1967, Iffat commence à faire des apparitions publiques lors d'événements officiels. Elle devient présidente honoraire de la Saudi Arabian Renaissance Society, une organisation de femmes de Riyad promouvant l'éducation des femmes dans le secteur de l'artisanat et l'aide aux familles dans le besoin[17]. Par ailleurs, son Mouvement de la Renaissance saoudienne parraine des cliniques gratuites et des cours littéraires pour les femmes[18].

Elle s'implique dans des activités philanthropiques, notamment le bien-être social des femmes. Dans les années 1960, elle crée les deux premières institutions sociales d'Arabie saoudite, l'Association pour le bien-être des femmes à Djeddah et l'Association pour le bien-être des femmes Al Nahdah à Riyad. Ces programmes existent encore de nos jours[19].

Éducation[modifier | modifier le code]

En 1942-1943, le prince Fayçal et la princesse Ìffat créent le pensionnat Al Madrasa Al Numuthagiya (« l'école modèle »), pour garçons et filles[19]. De nombreux enfants de la famille royale élargie, y compris les leurs, y étudient[19]. La majorité des enseignants sont égyptiens ou yéménites, et la section féminine est réservée aux filles de la famille royale élargie[1].

En 1955, elle initie la première école privée pour femmes d'Arabie saoudite, à Djeddah, Dar Al Hanan (littéralement « Maison de l'affection »)[19]. Une de ses filles fréquente l'établissement[19]. Il accueille au départ 15 élèves[1]. En 1956, Iffat fait don d'argent et de terres pour construire un orphelinat pour filles, où elles seraient également éduquées[12]. Elle fonde aussi le premier collège pour filles de Riyad, Kulliyat ul Banat, en 1960[20].

En 1967, elle lance la Nahdah Al Saudiyyah, une organisation qui éduque les femmes analphabètes de Riyad[1]. Dans les années 1970, Iffat crée le premier collège communautaire pour femmes du pays[21].

En août 1999, quelques mois avant sa mort, elle est à l'origine de la fondation de l'université Effat, près de Dar Al Hanan[1]. Il s'agit du premier collège féminin privé à but non lucratif du royaume[22].

Elle a participé à de nombreuses cérémonies de remise des diplômes. Ses devises étaient : « Renseignez-vous. Soyez de bonnes mères. Élevez des Saoudiens parfaits. Construisez votre pays » et « La mère peut être une école en elle-même si vous la préparez bien »[23],[24].

Vie privée et mort[modifier | modifier le code]

Iffat aimait cultiver les roses. Elle parlait couramment le français et appréciait lire[1],[16]. Lorsque sa tante Jawhara a été frappée d'incapacité à Constantinople, elle s'est occupée d'elle[7].

Elle est apparue lors de nombreux événements officiels et a reçu des personnalités féminines. Elle a voyagé partout en Arabie saoudite. Son palais avait une politique de la porte ouverte, qui permettait à tout citoyen saoudien de lui rendre visite[1]. Elle a rarement été photographiée en public et elle n'est jamais intervenue à la télévision[16],[25].

En août 1993, elle subit une intervention chirurgicale en raison d'une maladie intestinale, au centre médical de l'université Duke[26]. Elle meurt en février 2000 après une opération infructueuse[10],[27]. Elle est enterrée à Riyad, après la prière du vendredi[13].

Postérité[modifier | modifier le code]

Le prix Princesse Iffat Al Thunayan récompense des réalisations de femmes[28]. En 2014, Joseph A. Kéchichian (en) publie le livre Iffat Al Thunayan : An Arab Queen[25],[29].

Notes et références[modifier | modifier le code]

Notes[modifier | modifier le code]

  1. Aussi appelée Effat.

Références[modifier | modifier le code]

  1. a b c d e f g h i j et k Joseph A. Kechichian, « Pioneer who gave wings to Saudi women's dreams », Gulf News,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  2. a et b Jennifer S. Uglow, Frances Hinton et Maggy Hendry, The Northeastern Dictionary of Women's Biography, UPNE, (ISBN 978-1-55553-421-9, lire en ligne), p. 273.
  3. a et b Delinda C. Henley, « Late Queen Effat of Saudi Arabia », Washington Report on Middle East Affairs, vol. 22, no 10,‎ (lire en ligne).
  4. a b c d e f g h et i (ar) Rania Suleiman Salama, « الأميرة عفت الثنيان », Arabiyat Magazine (consulté le ).
  5. a et b Joseph A. Kechichian, 'Iffat Al Thunayan: An Arabian Queen, Sussex Academic Press, (ISBN 978-1-8451-9685-1, lire en ligne), p. 10.
  6. Steve Coll, The Bin Ladens: An Arabian Family in the American Century, Penguin Publishing Group, (ISBN 978-1-101-20272-2, lire en ligne), p. 163.
  7. a b et c Joseph A. Kechichian, « Self-assurance in the face of military might », Gulf News,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  8. a b et c Rebecca Stefoff, Faisal, World Leaders Past and Present, Chelsea House Publishing, (ISBN 9781555468330), « 5, The Kingdom ».
  9. a et b « Effat's New Roses », sur Saudi Aramco World (consulté le ).
  10. a et b « Waging Peace: Baghdad: The Movie », sur Wrmea (consulté le ).
  11. As'ad AbuKhalil, The Battle for Saudi Arabia. Royalty, fundamentalism and global power, New York City, Seven Stories Press, (ISBN 978-1-58322-610-0, lire en ligne).
  12. a b et c Leon Hesser, Nurture the Heart, Feed the World: The Inspiring Life Journeys of Two Vagabonds, BookPros, LLC, (ISBN 978-0-9744668-8-0, lire en ligne), p. 104.
  13. a et b Ghada Talhami, Historical Dictionary of Women in the Middle East and North Africa, Rowman & Littlefield, (ISBN 978-0-8108-6858-8, lire en ligne), p. 170.
  14. Winberg Chai, Saudi Arabia: A Modern Reader, University Press, (ISBN 978-0-88093-859-4, lire en ligne), p. 193.
  15. Sharaf Sabri. (2001). The House of Saud in Commerce: a Study of Royal Entrepreneurship in Saudi Arabia. New Delhi: I.S. Publications. Print.
  16. a b et c Mark Weston, Prophets and Princes: Saudi Arabia from Muhammad to the Present, John Wiley & Sons, (ISBN 978-0-470-18257-4, lire en ligne), p. 450.
  17. "Gradual Emancipation Greets Saudi Women." St. Petersburg Times 20 déc. 1967: 3D. Print. [1].
  18. Miranda Miller, A Thousand and One Coffee Mornings: Scenes from Saudi Arabia, Owen, (ISBN 978-0-7206-0761-1, lire en ligne).
  19. a b c d et e Muhammad Younes, History of the Middle East, Fairleigh Dickinson University, (ISBN 978-1-4507-9087-1), « Women and Education ».
  20. Andy Liang, « Opinion: Old and new freedoms for Saudi Arabia », The Tech, vol. 131, no 41,‎ (lire en ligne).
  21. Kaelen Wilson, « More talk, less distortion », Common Ground News,‎ (lire en ligne [archive du ], consulté le ).
  22. Stig Stenslie, « Power Behind the Veil: Princesses of the House of Saud », Journal of Arabian Studies: Arabia, the Gulf, and the Red Sea, vol. 1, no 1,‎ , p. 69–79 (DOI 10.1080/21534764.2011.576050, S2CID 153320942).
  23. Mai Yamani et Andrew Allen, Feminism and Islam: Legal and Literary Perspectives, Ithaca Press, (ISBN 978-0-86372-215-8, lire en ligne), p. 269.
  24. Geraldine Brooks, Nine Parts of Desire: The Hidden World of Islamic Women, Knopf Doubleday Publishing Group, (ISBN 978-0-307-43445-6, lire en ligne), p. 173.
  25. a et b Sinem Cengiz, « Book Review. 'ʿIffat Al Thunayan: An Arabian Queen' by Joseph Kéchechian », (consulté le ).
  26. « Saudi royalty to be treated at Duke », New Bern Sun Journal, Durham,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  27. « Saudi Arabia mourns passing away of princess », KUNA,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  28. K.S. Ramkumar, « Women's empowerment stressed at Effat University function », Arab News, Jeddah,‎ (lire en ligne [archive du ], consulté le ).
  29. « Book Review », Foreign Affairs, vol. 94, no 5,‎ (JSTOR 24483780).

Liens externes[modifier | modifier le code]