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Utilisateur:Leonard Fibonacci/Maître de Justice

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Le Maître de Justice (en hébreu מורה צדק) ou le Prêtre maître de Justice est un personnage qui apparaît dans certains des manuscrits de la mer Morte. Il serait le fondateur ou le refondateur du mouvement sectaire dont il est question dans une centaine de ces manuscrits retrouvés dans des grottes près des ruines de Qumrân.

Les textes[modifier | modifier le code]

Le « Maître de Justice » est cité dans certains Manuscrits de la mer Morte retrouvés dans onze grottes situées à proximité des ruines de Qumrân où ils avaient été entreposés probablement pendant la Grande révolte juive, avant le contrôle de la région par l'armée romaine (68-70). Parmi ces 870 manuscrits rédigés entre le IIIe siècle av. J.-C. et le Ier siècle apr. J.-C. — dont il ne reste parfois que quelques fragments — une trentaine mentionnent le « Yahad » (« Unité », « Alliance »)[1], un mouvement religieux derrière lequel bon nombre de chercheurs reconnaissent les esséniens. Dans d'autres manuscrits qui ne mentionnent pas le Yahad, on repère un vrai système de mots ou de formules qui les font classer également parmi les écrits sectaires[1]. Ils sont à eux tous une bonne centaine[1]. Certains d'entre-eux présentent le « Maître de Justice » comme le fondateur

Plusieurs points de convergence entre la description des esséniens chez les auteurs antiques et la doctrine décrite dans les manuscrits semblent effectivement permettre d'identifier avec eux les membres de la communauté du Yahad. Un grand nombre de critiques estiment que ce mouvement doit être identifié aux esséniens, toutefois des chercheurs comme André Paul[2], Norman Golb, Michael Wise, Martin Abbeg, Edward Cook, Robert Eisenman préfèrent distinguer les deux groupes, à cause de quelques différences existant entre eux.

Personnages et pseudonymes symboliques[modifier | modifier le code]

Les textes de Qumrân qui décrivent la vie de la secte (notamment les pesharim et le livre de l'Alliance de Damas) ne mentionnent que rarement des noms propres. Des pseudonymes symboliques désignent le principal acteur de la communauté et leurs adversaires[3],[4]. Chez le « Maître de Justice » on reconnaît le fondateur du groupe, un prêtre qui grâce à son intuition religieuse hors du commun a « reçu de Dieu la révélation du sens caché des Écritures[4] » et de la juste interprétation de la Loi de Moïse[3],[4]. « Deux figures, ou « deux instruments de la violence » (4Q175, Les témoignages ou Testimonia) s'opposent à lui et persécutent son groupe[3]. » Le « Prêtre Impie »[4] (en hébreu, Grand Prêtre se dit Kohen haRosh. Kohen haRasha, qui signifie "Prêtre Impie", est ici un jeu de mot) qui est « cupide, violent, corrompu ; il harcèle le « Maître », tente de l'assassiner et finalement le contraint à l'exil[3]. » Le second ennemi du groupe est le « Cracheur de mensonges » aussi appelé « l'Homme du Mensonge »[3],[4]. « Par ses mensonges et avec sa clique sinistre, composée des « Chercheurs de flatteries », il dissuade les hommes de suivre le « Maître »[3]. » L'identification de ces personnages et de ces groupes sont l'objet de plusieurs suppositions parmi les historiens. Aucun consensus ne se dégage à ce sujet, ni à propos de la période où se déroule ces événements.

Il y a aussi un autre chef dénommé « Le Lion de la Colère »[4] en général identifié à Alexandre Jannée et une puissance étrangère menaçante les « Kittim »[4] derrière lesquels on reconnaît les Romains. Le « Commandant des Kittim » désignant un général ou un proconsul romain. Apparaissent aussi Les Traîtres, Ephraïm et Manassé, le Chef des Rois de Yavan.

Quelques textes retrouvés dans la grotte no 4 désignent explicitement des personnages historiques[5]. À certaines dates du Calendrier des annales (4Q448b) du mouvement sont associés des personnages et des événements historiques parfaitement identifiables[6]. Une pratique que l'on trouve aujourd'hui aussi sur nos calendriers[7]. Il est toutefois très parcellaire, mais on peut ainsi lire « Hyrcan s'est révolté contre Aristobule » (Hyrcan II et Aristobule II) « Shelomziyon est venue... », allusion à leur mère Salomé Alexandra, et « Amelius a tué », allusion à Amelius Scaurus qui conduisit les armées de Pompée durant les années 60 av. J.-C.[6]. On y reconnaît aussi Alexandre Jannée dans « le roi Jonathan » (Ywtn hmlk). L'identification de ce « roi Jonathan » avec Jonathan Maccabée ne paraît pas concevable, car comme l'indique André Lemaire, le frère de Judas Maccabée ne portait pas le titre royal[5],[8]. Par ailleurs, l'expression Ywtn hmlk est comparable à celle qui apparaît sur les monnaies d'Alexandre Jannée, ou encore sur une bulle de ce roi[5].

Activité du Maître de Justice[modifier | modifier le code]

Le Maître de Justice est probablement le fondateur, ou plutôt le re-fondateur du mouvement, car il semble que le mouvement existait déjà avant son arrivée. Le Document de Damas dit en effet :

Mais ils [les membres de la secte] furent comme des aveugles, comme des gens qui cherchent leur chemin en tâtonnant pendant 20 ans. Et Dieu considéra leurs œuvres […] et il leur suscita un Maître de Justice

La durée de 20 années écoulées avant l’arrivée du Maître ne doit cependant pas être prise trop littéralement. Elle peut avoir une signification symbolique. Si on accepte littéralement les indications du livre de l'Alliance de Damas, la formation du groupe aurait eu lieu vers -196 (390 ans après la destruction du Temple, or celui-ci a été détruit en -586). Cependant cette durée de 390 ans vient du livre d'Ezechiel (4:5)[9] et indique surtout que le groupe se considère comme portant l'iniquité de la maison d'Israël.

À partir des divers textes qui en parlent, il est possible de reconstituer la trame de l'histoire du Maître de Justice[4]. Celui-ci était un prêtre qui grâce à son intuition religieuse hors du commun a « reçu de Dieu la révélation du sens caché des Écritures[4] » et de la juste interprétation de la Loi de Moïse[3],[4]. Il parvint à rassembler derrière ses idées un grand nombres de prêtres et de Juifs vertueux[4]. Toutefois, « l'Homme du mensonge » s'opposa à lui et grâce à une habile rhétorique, il en dissuada un grand nombre de suivre le Maître[4]. Les « Chercheurs de flatterie » — dont « l'Homme du mensonge » était probablement le chef — s'opposèrent aussi à lui[4]. « Au départ, le « Prêtre impie » semblait être favorable au Maître mais, « quand il gouverna en Israël », il se montra irréligieux, cupide, corrompu et violent[4]. » Il harcèle le « Maître », tente de l'assassiner et finalement le contraint à l'exil[3],[4] et tente au moins une fois de l'assassiner sans y parvenir[4]. Les nations des Gentils s'emparèrent du « Prêtre impie », le maltraitèrent et le menacèrent[4]. Il n'est pas impossible que le Maître périt finalement de mort violente, bien qu'il n'y ait aucune certitude à ce sujet[4].

Dans ces textes, parmi les imprécations contre les ennemis du Maître, la venue imminente des féroces Kittim est assimilée à un châtiment divin s'abattant sur les Juifs pour avoir rejeté le Maître et ses disciples[4].

Identification[modifier | modifier le code]

Il n’y a pas de consensus sur l’identité du Maître ni sur les dates de son existence. Son vrai nom n’est peut-être pas mentionné dans les sources anciennes, ce qui rendrait impossible son identification. La mention dans les manuscrits de personnages historiquement attestés (de Jonathan au romain Scaurus) fixent un cadre chronologique pour l'activité du Maître de Justice qui s'étend du IIe siècle au milieu du Ier siècle.

Les différentes propositions sur son identification à un personnage connu dépendent de l'époque à laquelle on fait remonter la fondation de la secte. L'hypothèse qui date la vie du Maître de Justice du début du IIe siècle l'identifie au Grand Prêtre Onias III, déposé en -175 par Antiochus IV Epiphane, puis assassiné en -170 dans son exil de Syrie à l'instigation de son successeur Ménélas, auquel il ne ménageait pas ses reproches. Onias III serait donc le Maître de Justice et Ménélas le Prêtre Impie. On sait qu'Onias III fut le dernier grand prêtre légitime de la descendance de Sadoq (grand prêtre de Salomon, le fondateur du Temple de Jérusalem). Les esséniens, qui se déclaraient « fils de Sadoq », seraient donc les partisans légitimistes d'Onias III, avant tout des gens de race sacerdotale, ou les alliés de ces derniers. Cela expliquerait leur fidélité fondamentale à la religion de leurs ancêtres juifs, et leur vénération extrême à l'égard du Temple de Jérusalem, dans lequel pourtant ils ne célébraient pas, parce qu'ils l'estimaient occupé par des usurpateurs. Pour la même période, une autre hypothèse identifie le Maître de Justice à Yosé ben Yoezer. Le Prêtre Impie serait alors le Grand Prêtre Alcime[10].

L'hypothèse qui place la création de la secte à la fin du IIe siècle lors de la révolte des Maccabées propose que le Maître de Justice serait un prêtre opposé à la confiscation de la fonction de Grand Prêtre par les premiers souverains hasmonéens, Jonathan ou Simon, l'un des deux occupant alors le rôle de Prêtre Impie[11].

Une troisième hypothèse place la fondation de la secte plus tardivement, au Ier siècle, sous Alexandre Jannée ou lors de la guerre civile entre ses fils Hyrcan II et Aristobule II. Le Maître de Justice serait dans ce cas un sadducéen victime des persécutions des pharisiens et Alexandre Jannée[12] ou Hyrcan II[13] occuperaient le rôle de Prêtre Impie.

Des noms plus fantaisistes, mettant en avant un lien supposé avec les premiers chrétiens, ont également été avancés, tel que Jacques le Juste, le Prêtre Impie étant alors Paul de Tarse, ou Jean le Baptiste, Jésus ayant alors le rôle de Prêtre Impie.

La théorie anti-hasmonéenne[modifier | modifier le code]

Pour Geza Vermes,

Les éléments biographiques qu'on peut déduire des manuscrits sont les suivants :

  • Le Maître de Justice est entré en conflit avec un chef religieux, l'Homme du Mensonge. L'Homme du Mensonge est le chef d'un groupe qui ne suit pas la halakha du Maître de Justice. Selon David Flusser, il pourrait s'agit d'un chef des pharisiens, notamment Yossé ben Yoezer.
  • Un chef politique, le Prêtre Impie, tenta de s'en prendre à lui. Le Maître dut alors s'enfuir.
  • Il est également persécuté par deux groupes, Ephraïm et Manassé. À la suite de Flusser, on identifie Ephraïm aux pharisiens et Manassé aux sadducéens.
  • Une crise survint entre ses disciples après sa mort. Une partie quitta le groupe.

Murphy O'Connor[14] met en relation la formation du groupe avec un élan religieux suscité par les victoires de Judas Maccabée. Selon Hanan Eshel, la formation du groupe sera pourtant intervenue avant la révolte des Maccabées. Flavius Josèphe mentionne l'existence de trois formations (pharisien, sadducéens, esséniens) lorsqu'il décrit le règne de Jonathan. Si Ephraïm et Manassé désignent effectivement les pharisiens et les sadducéens, la formation du groupe dirigé par le Maître de Justice pourra alors avoir accompagné l'établissement de l'état hasmonéen.

La théorie pro-hasmonéenne[modifier | modifier le code]

Synthèse impossible[modifier | modifier le code]

Quelle attitude adopter dès lors ? […][2]
Laissons le deux disciplines avancer ainsi, chacune en son domaine propre, d'une manière libre et autonome. Que l'une soit à l'écoute de l'autre et réciproquement. [… le désenclavement, la sécularisation et la décommunautérisation au moins partielle du site se trouvent engagés sur des bases solides[2].
Quand on traite des textes, il convient d'être circonspect d'en l'emploi du mot Qumrân, objet familier de métonymies trop peu contrôlées. On emploie d'ailleurs à tort et à travers la formule « de Qumrân » ou l’adjectif « Qumrânien ». Discernement et réserve s'imposent donc. Et de plus, à titre d'opinion méthodique, il serait sage de suspendre l'emploi du vocable « essénien », substantif ou adjectif, à propos des manuscrits découverts. On évitera donc d'attribuer nommément aux esséniens la part singulière des manuscrits que l'on dit couramment sectaires ou pudiquement communautaires, deux adjectifs à n'utiliser qu'avec réserves. Au demeurant le mot secte ne convient pas. Il est une traduction anachronique et partant erronée du grec aïrésis employé par Josèphe à propos des groupes ou mouvements qu'il distinguait et nommait dans la société judaïque la sienne, à savoir : les Sadducéens, les Pharisiens, les Esséniens et les Zélotes[2].

Période[modifier | modifier le code]

  • (en) Document de Damas
  • la formation du groupe aurait eu lieu vers -196 (390 ans après la destruction du premier Temple, or celui-ci a été détruit en -586).
  • Ils errent pendant 20 ans, avant que Dieu ne leur suscite un maître de Justice => -176
  • Naissance des 3 groupes selon Flavius Josèphe

Lieu[modifier | modifier le code]

Selon le Commentaire d'Habacuc, le méchant prêtre a poursuivi le maître de Justice dans sa retraite au pays de Damas (Balaam ?).
Wikipedia en Hébreu :

« Signification du mauvais prêtre qui a poursuivi le Maître de justice avaler sa colère colère wahhabite exil, et à la fin de Yom Kippour temps de repos, ils vint à Balaam et mûrissent sur le jeûne de repos. »


Liens utiles[modifier | modifier le code]

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. a b et c André Paul, Qumrân et les esséniens – L'éclatement d'un dogme, Paris, Cerf, 2008, p. 26.
  2. a b c et d André Paul, Qumrân et les esséniens – L'éclatement d'un dogme, Paris, Cerf, 2008, p. 72-73.
  3. a b c d e f g et h Christian-Georges Schwentzel, Juifs et nabatéens: Les monarchies ethniques du Proche-Orient hellénistique et romain, Presses Universitaires de Rennes, 2013, Rennes (France), p. 95.
  4. a b c d e f g h i j k l m n o p q r et s Michael Wise, Martin Abegg, Edward Cook, Les Manuscrits de la mer Morte, Paris, Perrin, 2003, p. 28.
  5. a b et c Christian-Georges Schwentzel, Juifs et nabatéens: Les monarchies ethniques du Proche-Orient hellénistique et romain, Presses Universitaires de Rennes, 2013, Rennes (France), p. 94.
  6. a et b Michael Wise, Martin Abegg, Edward Cook, Les Manuscrits de la mer Morte, Paris, éd. Perrin, 2003, p. 42.
  7. Par exemple lorsque le est associé à la prise de la Bastille.
  8. André Lemaire, Le roi Jonathan à Qoumrân (4 Q 448, B-C), dans Ernest-Marie Laperrousaz (dir.), Qoumrân et les manuscrits de la mer Morte, un cinquantenaire, Paris, 2000, p. 55-68 et 64-66.
  9. Et moi, je te compte en jours les années de leur iniquité, trois cent quatre-vingt-dix jours, et ainsi tu porteras l'iniquité de la maison d'Israël. [1]
  10. Jacqueline Genot-Bismuth, Le scénario de Damas. Jérusalem hellénisée et les origines de l’essénisme, Paris, éditions François-Xavier De Guibert, 1992
  11. Franck Moore Cross, « Le contexte historique des manuscrits », dans L'aventure des manuscrits de la mer Morte sous la direction d'Hershel Shanks, Editions du Seuil, 1996 (ISBN 2-02-054952-2)
  12. Flusser, Le secte de la mer Morte, Desclée de Brouwer (ISBN 2-220-05143-9)
  13. André Dupont-Sommer, Les écrits esseniens découvertes près de la mer Morte Payot, Paris, 1960 (ISBN 2-228-89043-X)
  14. ...

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • (he) Hanan Eshel, Les manuscrits de la mer Morte et l'état hasmonéen, Yad Ben-Zvi, Jérusalem, 2004 (ISBN 965-217-231-3[à vérifier : ISBN invalide])