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On peut définir l’évolution rapide comme tout changement génétique héritable et qui se produit suffisamment vite pour avoir un impact relativement important par rapport aux autres facteurs (plasticité phénotypique) sur le changement écologique qui se fait sur la même échelle de temps[1]. De nombreux mécanismes peuvent être à l’origine d’une évolution rapide. En effet, cette évolution peut être causée par des changements de l’environnement entraînant une pression de sélection par la sélection naturelle sur ces individus qui peuvent conduire à des impacts sur l’environnement. Des événements stochastiques touchant l’ensemble de la population peuvent survenir comme les catastrophes par exemple,qui peuvent entraîner une évolution rapide des individus. On aura dans ce cas-là une dérive génétique faisant évoluer la population très rapidement puisque les individus seront très différents des individus de la population de départ, la dérive étant d'autant plus importante lorsqu’il s'agit de petites populations.

L'étude de l'évolution rapide s'intéresse principalement aux effets de la sélection naturelle sur la population mais aussi aux interactions existantes entre les individus et l’environnement qui les entoure favorisant probablement l’évolution rapide des individus.

Contexte historique[modifier | modifier le code]

Dès 1859, Charles Darwin, dans De l’Origine des espèces​, admet qu’il est probable que les modifications des habitudes (échelle écologique) et de la structure (échelle évolutive) des individus à l’échelle d’une population se réalisent simultanément ou bien sur une toute petite échelle de temps. Dans les années 1950 à 1960, l’idée que l’évolution peut avoir une influence sur l’écologie et la dynamique des populations sur des échelles de temps courtes en comparaison à l'évolution se développe notamment chez des scientifiques comme D.Chitty ou encore D.Pimentel. J.A. Endler​, en 1986, a initié une compilation d’exemples d’évolution rapide qui n’a fait que s’accroître au fil des observations et inclut désormais des analyses sur le long terme de l’évolution rapide en réponse à des changements environnementaux. La caractérisation de l’évolution rapide par Endler fut poursuivie par J.N. Thompson​, en 1998, qui démontra que l’évolution rapide due à la sélection naturelle est fréquente dans la nature. Ces conclusions suggèrent que les dynamiques écologiques et évolutives se produisent à des échelles de temps proches l’une de l’autre.

Principes généraux de l'évolution rapide[modifier | modifier le code]

On a longtemps cru que les processus écologiques étaient tellement rapides par rapport aux processus évolutifs qu’ils ne pouvaient pas avoir lieu à la même échelle de temps. Cependant, depuis 30 ans maintenant, on ne peut plus comprendre l’évolution des espèces sans prendre en compte que les espèces sont en interaction avec leur environnement et qu’elles évoluent avec lui.

Principes des boucles de rétroaction évolution-environnement[modifier | modifier le code]

On peut observer l’évolution rapide des individus d’une population dans le cas où on a des boucles de rétroaction entre l’écologie et l’évolution car l’évolution a lieu à la même échelle de temps que l’environnement qui a un effet sur cette évolution.

Définition de la boucle de rétroaction[modifier | modifier le code]

Boucle de rétroaction

En effet, on peut définir les boucles de rétroaction entre l’écologie et l’évolution[2] comme les cycles d’interaction reliant les effets de l’environnement sur l’évolution et de l’évolution sur l’environnement.

Les changements écologiques de l’environnement agissent sur les individus de la population et vont conduire à un changement évolutif des ses traits (les pressions de sélection comme la sélection naturelle agissent sur  la variabilité phénotypique des individus). Les individus évoluent en réponse à ces pressions de sélection et la variabilité phénotypique dans la population qui est issue de la variabilité génétique entre les individus (la variabilité phénotypique peut aussi avoir un faible effet sur la variabilité génétique) va modifier à son tour l’environnement et les interactions écologiques dans cet environnement.

On désigne ici l’environnement comme l’ensemble de toutes les conditions biologiques et physico-chimiques externes aux individus qui peuvent influencer leur évolution.

Prenons un exemple simple. On définit l’environnement comme la quantité de ressources et d’herbivores pour une population de plantes pouvant avoir 2 stratégies :

  • Soit la plante se défend (cela a un coût pour la plante, il y aura moins d’énergie allouée à sa croissance et à sa reproduction) : S1
  • Soit la plante ne se défend pas : S2

On a une variabilité phénotypique qui dépend de la défense des plantes contre les herbivores qui va avoir des conséquences différentes pour l’environnement.

Pour une variabilité V1, beaucoup d’individus se défendent (S1), donc il y a beaucoup moins de ressources disponibles pour chaque plante, et la population d’herbivores est faible donc l’environnement est constitué d’une quantité de ressources et d’herbivores faibles.

Pour la variabilité V2, peu d’individus se défendent (S2), donc il y a beaucoup de ressources disponibles pour les plantes, la population d’herbivores est forte donc l’environnement est constitué d’une quantité de ressources et d’herbivores plus forte que pour la variabilité V1.

L’environnement change la variabilité phénotypique par sélection naturelle. Mais en fonction de cette variabilité phénotypique, si on a une stratégie de forte ou de faible défense, on ne va pas avoir le même environnement. Donc la variabilité phénotypique influence aussi l’environnement.

Conditions d'apparition[modifier | modifier le code]

Cette boucle de rétroaction entre l’environnement et l’évolution peut avoir lieu sous certaines conditions, notamment les individus qui composent la population doivent avoir de fortes interactions avec leur environnement et cet environnement doit pouvoir provoquer l’évolution de la population. Cela implique que les changements de l’environnement affectent les individus qui sont sélectionnés selon leur différence de fitness (sélection de la population directionnelle ou disruptive) et que la population ait une capacité génétique suffisante pour évoluer en réponse à la sélection causée par ces changements : on parle d’évolvabilité.

Pour que les boucles de rétroaction (et donc l’évolution rapide) puissent se réaliser, il ne faut pas que le changement évolutif soit rapide ou que le changement écologique soit lent, il faut que l’échelle de temps de l’écologie et l’échelle de temps de l’évolution soient suffisamment similaires pour permettre la boucle de rétroaction entre l’environnement et l’évolution des individus de la population[2].

Il existe de nombreux exemples de boucles de rétroaction dans la nature comme l’exemple des interactions algues-rotifères, des communautés de gaspareaux-zooplanctons dans les lacs d’Amérique du Nord-Est, des guppys dans les cours d’eau, etc. même si elles sont difficiles à tester.

Exemple d’évolution rapide : le cas des interactions algues-rotifères[modifier | modifier le code]

Rotifère Notholca

Il semblerait que l’évolution rapide des proies en réponse à la densité oscillante des prédateurs affecte les interactions proie-prédateur entre les rotifères et les algues lors d’expériences en laboratoire.

L’étude de Yoshida et al.[3] a consisté à comparer les dynamiques des systèmes algues-rotifères avec des cultures composées d’un seul clone d’algue (pas de variabilité génétique) et avec des cultures composées de plusieurs clones d’algues (génétiquement variable). Ils ont trouvé que les cultures avec un seul clone d’algue ont une dynamique typique du modèle de Lotka-Volterra avec un cycle court et une différence de phase entre les algues et les rotifères d’un quart du cycle. Alors que les cultures avec plusieurs clones d’algues, la dynamique des populations d’algues et de rotifères ne suivent pas les prédictions prévues par le modèle de Lotka-Volterra, les rotifères et les algues sont presque exactement en phase opposée (lorsque l’on a un minimum de rotifères, il y a un maximum d’algues) et les cycles entre les proies et les prédateurs sont plus longs.

Les résultats de cette étude ont montré que l’évolution rapide des proies peut modifier la dynamique proie-prédateur (durée du cycle et relations de phase) d’où l’idée qu’on ne peut pas ignorer les effets de l’évolution rapide pour comprendre les oscillations de la population de rotifères en lien avec celles des algues dans la nature. Les cycles des populations de proies fluctuent suite à la sélection et influent sur la dynamique des populations de prédateurs et inversement. Les interactions entre les proies et les prédateurs changent en permanence à travers l’évolution rapide.

De la théorie des jeux à la dynamique adaptative[modifier | modifier le code]

Dans les années 1930, on étudiait l’évolution des allèles dans le temps par des modélisations basées sur une approche discrète selon la génétique des populations (Wright, Fisher). A partir de cette génétique des populations, les chercheurs ont pu utiliser des modélisations pour comprendre les phénotypes de manière continue selon la génétique quantitative (Lande, Kirkpatrich). D’autres approches pour étudier la dynamique des populations ignorant la génétique existent comme la théorie des jeux (Von Newmann et Maynard Smith). Cette théorie permet de déduire si une stratégie va se fixer ou si 2 stratégies peuvent coexister, l’étude étant basée sur des phénotypes discrets. C’est à partir de cette théorie des jeux que la dynamique adaptative a été créée. La dynamique adaptative est probablement la méthode la plus simple pour étudier les effets des boucles de rétroaction entre l’environnement et l’évolution de manière efficace même si les autres modèles peuvent aussi fonctionner.

Modélisation de la dynamique adaptative : lecture graphique de l’évolution rapide[modifier | modifier le code]

On peut étudier l’évolution rapide d’un phénotype graphiquement grâce à la dynamique adaptative.

Paysage adaptatif de la fitness W dans la population en fonction du phénotype Z

La fitness moyenne dans la population varie selon le phénotype. Ces différences peuvent être représentées selon un graphique du paysage adaptatif correspondant à l’environnement. Si un mutant de phénotype  apparaît dans la population de phénotype , il est avantagé si la fitness relative du mutant par rapport à la fitness moyenne de la population est positive (donc si ) sinon le mutant finit par disparaître. Ici, est désavantageux donc il va disparaître de la population alors que est avantageux donc il va envahir la population et finir par remplacer le phénotype résident .

On a une évolution rapide si la pente de la fitness de  vers la fitness du mutant est forte car le mutant envahit très facilement et très vite la population et au contraire, quand la fitness du mutant est proche du pic d’optimum de fitness (phénotype optimal), la pente est faible et donc on n’a pas d’évolution rapide. Donc on a une évolution rapide pour le phénotype mutant alors que pour le phénotype mutant (qui apparaît dans une population résidente où le phénotype est ), on a une évolution plus lente.

Cette dynamique adaptative est basée sur le fait que l’environnement guide les différences de fitness et donc les phénotypes par la sélection naturelle. De plus, le paysage adaptatif change au fur et à mesure que le phénotype change.

Formule de l'équation canonique de la dynamique adaptative[modifier | modifier le code]

On peut expliquer la diversité du vivant comme le résultat de processus évolutifs en réponse à des changements de l’environnement. Cette diversité phénotypique reflète en grande partie des adaptations face à des pressions de sélection très diverses : on parle d’évolution adaptative.

Prenons un trait phénotypique  dans une population de taille N. La dynamique adaptative de ce trait dans la population peut s’écrire comme le trait à la génération précédente et sa réponse adaptative à l’environnement :

avec  la variation du trait  au cours des générations, en réponse à la sélection.

On peut s’intéresser maintenant à l’expression de cette variation  par « l’équation des éleveurs » (« breeder’s equation ») qui a été établie par Jay Lawrence Rush en 1937 :

avec   et h² l’héritabilité du trait,

On peut décomposer l’héritabilité en :

avec la variance additive pour le trait et la variance phénotypique (, la variance phénotypique résultant de la variance génétique  et de la variance environnementale ).

D’où la transformation de l’équation initiale en :

avec  la variance additive génétique par le trait  et  le gradient de sélection (la variation de fitness  du trait  dans la population).

D’après cette formule de la variation du trait dans la population de départ ou résidente, on peut établir une équation de la dynamique adaptative de la variation d’un trait par unité de temps qu’on appelle l’équation canonique de la dynamique adaptative[4] :

 : probabilité par individu d’avoir une mutation

 : amplitude de variation du phénotype procurée par une mutation

 : densité de la population à l’équilibre

 : nombre total de mutations observées sur un temps donné

 : variabilité phénotypique totale apportée par une mutation (la variance phénotypique est permise par l’héritabilité du trait, la variabilité du trait et la différence de fitness)

 : gradient de fitness : dérivée partielle de la fitness du mutant dans la population résidente (taux de croissance du mutant dans la population résidente) quand le trait mutant  est proche du trait résident (sans mutation)

car la fonction  en fonction de  est une courbe (pente du paysage de fitness) et coupe l’axe des abscisses en . Quand la fitness est supérieure à 0, la mutation est sélectionnée et quand la fitness est inférieure à 0, la mutation est contre-sélectionnée. Autour du point , on a la variance de la mutation qui suit une courbe gaussienne et qui est donc symétrique autour de ce point. Plus  est grande, plus la mutation est de grande amplitude (donc plus la mutation est éloignée du trait de la population résidente). Pour , le trait disparaît (il n’est pas sélectionné) donc la moitié de la variance correspondante à cette partie de la mutation ne peut pas être prise en compte. On ne prend en compte que la moitié de la variance correspondant à la partie où le trait est sélectionné.

Cette formule de l’équation canonique de la dynamique adaptative présente les variations du trait après apparition d’un trait mutant  dans la population résidente. Donc si ce trait subit une évolution rapide après l’apparition de ce mutant, ces variations vont être rapides dans le temps. Si l’évolution est rapide, cela est équivalent de dire que les variations du trait vont être grandes sur une unité de temps . Donc plus l’évolution est rapide, plus  est grand. Par conséquent, on peut utiliser la formule de l’équation canonique de la dynamique adaptative : il faut  soit très supérieur à 0 pour avoir une évolution rapide. 

Applications à l'évolution rapide[modifier | modifier le code]

< 0 signifie que la fitness du mutant apportée par le phénotype mutant est inférieure à la fitness du résident. Le mutant est moins adapté à son environnement que le résident, le mutant va disparaître de la population (  < 0).

> 0 signifie que la fitness du mutant apportée par le phénotype mutant est supérieure à la fitness du résident. Le mutant est mieux adapté à son environnement que le résident, le mutant va envahir la population ( > 0).

Plus le gradient de sélection est grand, autrement dit, plus la fitness relative du mutant par rapport aux résidents est grande, plus le mutant va envahir rapidement la population résidente. L’évolution peut alors être qualifiée de « rapide »  

( >>> 0 ) . Le gradient de sélection peut être lu graphiquement car il correspond à la pente du paysage adaptatif. Si la pente est forte cela veut dire que la fitness du mutant est très différente de la fitness du résident. Le mutant va envahir très vite la population résidente et par conséquent il y aura évolution rapide (voir graphique du paysage adaptatif). L’avantage de la dynamique adaptative est qu’elle s’intéresse à la variation des phénotypes en continu contrairement à la théorie des jeux qui étudie des phénotypes discrets. 

Ce modèle à des limites car il repose sur quatre hypothèses :

-         Les échelles de temps sont séparées : l’échelle de temps écologique est plus rapide que l’échelle de temps évolutive

-         Des petites mutations : mon mutant diffère un tout petit peu

-         Reproduction clonale : héritabilité=1 (pas de reproduction sexué)

-          est stable : la dynamique écologique est stable (population à l’équilibre)

Sélection naturelle[modifier | modifier le code]

La sélection naturelle est l’un des moteurs de l’évolution. Des événements d’évolution rapide peuvent subvenir lorsque cette pression de sélection intervient de manière forte. De nombreux cas d’évolution rapide sont causés par l’Homme.

mouflon d'Amérique du Nord

Les mouflons d’Amérique du nord[5] :

Les chasseurs de mouflons choisissent leur mouflon dans une optique de chasse aux trophées. Les chasseurs tuent préférentiellement les mouflons les plus gros avec les cornes les plus longues. L’étude des populations de mouflons de 1970 à 2005 a montré que le poids moyen des mouflons était passé de 85 kg à 65kg et que la taille moyenne des cornes était passée de 70cm à 45cm, tout ceci en l’espace de 35 ans. Les mouflons sont donc plus petits avec de plus petites cornes. Les mouflons ont été chassés selon leur qualité génétique ; il y a donc un risque de perturbation de la dynamique des populations de mouflons. C’est la pression de chasse qui est à l’origine de cette évolution rapide.

Conséquences écologiques[modifier | modifier le code]

Au niveau des populations[modifier | modifier le code]

Une population peut être définie comme un ensemble d'individus d'une même espèce se trouvant à un même endroit à un même instant. L'évolution rapide peut entraîner des modifications sur la dynamique des populations, entraînant des conséquences écologiques diverses. Nous expliquerons des conséquences écologiques possibles à travers l'exemple de la surexploitation des morues de l'Atlantique.

Morue de l'Atlantique

La morue de l’Atlantique (Gadus morhua) est un poisson qui a fait l’objet de pêcheries intensives au cours du dernier siècle, ayant provoqué un effondrement de la population dans les années 1980-1990. Un moratoire en mer a donc été mis en place par le gouvernement Canadien en 1992 provoquant un effondrement de la pêcherie dans le but de permettre le rétablissement de la population de morue. Mais cette dernière croît si lentement qu’actuellement, les pêcheurs ne peuvent toujours pas pêcher la morue[6].

S’il est clair que cette surexploitation de la morue de l’Atlantique a eu un effet important sur le déclin de la population, il est aussi intéressant de constater qu’avant cet effondrement et en quelques décennies, des modifications dans les traits d’histoire de vie (ou traits biologiques) de cette population ont également été observées. On peut dès lors parler d’une évolution rapide de ces traits d’histoire de vie qui est due à une pression de sélection exercée par la pêche[7].

En effet, la pêche préférentielle des individus de grande taille se reproduisant à un âge tardif (maturité sexuelle vers 6 ans) entraînait une forte mortalité de ces individus avant leur reproduction. Les individus se reproduisant plus tôt, avant d’attendre une grande taille, ont donc été favorisés.

Graphique présentant l'évolution de l'âge à maturité sexuelle des morues au cours du temps

Nous préciserons ici que la taille des individus, la maturité sexuelle et donc l'investissement reproducteur sont des traits liés par les trade-offs (ou compromis évolutifs).

Les travaux d’Olsen et al. effectués en 2004 ont permis de mettre en évidence au sein de la population une diminution de la taille moyenne des poissons ainsi qu’une maturité sexuelle bien plus précoce qu’avant (la maturité sexuelle est passée de 6 à 5 ans) conduisant à une diminution de la fitness moyenne (ou succès reproducteur) des individus, ce qui signifie donc une diminution de la production et de la qualité des descendants[6].

Cette évolution rapide présente un fort impact sur la dynamique des populations de morues puisqu’en provoquant une diminution de la fitness des individus, elle induit une diminution du taux de croissance, qui explique alors la croissance très lente des populations de morues[8].

Au niveau des communautés[modifier | modifier le code]

Une communauté est un ensemble de populations d’espèces différentes vivant en un lieu donné, à un moment donné. Au sein d’une communauté, les espèces interagissent les unes avec les autres et forment notamment des réseaux trophiques. Les communautés possèdent diverses propriétés, telles que la richesse ou l’assemblage spécifique (espèces composant la communauté), l’abondance relative des espèces et la dynamique des populations en interaction (par exemple les interactions proie-prédateur entraînent des dynamiques particulières pour les populations de la proie et du prédateur considérés). Ces propriétés peuvent changer au cours du temps.

Nous savons que l’évolution rapide d’une population peut avoir des conséquences écologiques au niveau de sa dynamique (voir partie dynamique des populations). Étant donné qu’au sein d’une communauté, différentes populations interagissent entre elles, l’évolution rapide d’une ou plusieurs populations peut avoir des conséquence au niveau de leur communauté.

Diverses études ont mis ce phénomène en évidence. La revue de Fussman et al, parue en 2007[9], rend compte de l’état actuel des connaissances sur la compréhension des conséquences de l’évolution rapide sur la dynamique des communautés.

Du fait de la complexité liée à l’étude de systèmes comprenant plusieurs espèces en laboratoire et en conditions naturelles, la majorité des études réalisées sont théoriques et se basent sur des modèles mathématiques. Les études se focalisent le plus souvent sur des systèmes simples comprenant uniquement deux espèces ou ne considérant que deux espèces au sein de la communauté. Les espèces utilisés ont souvent un cycle de vie court qui permet un suivi aisé sur plusieurs générations et forment des interactions proie-prédateur ou hôte-parasite dans la majorité des cas. Un exemple d’évolution rapide mêlant expérimentation et modélisation dans un système de deux espèces (proie-prédateur) est donné dans la partie "Exemple d’évolution rapide : le cas des interactions algues-rotifères".

De telles études ont permis de mieux comprendre les effets de l’évolution rapide au niveau des interactions interspécifiques.

Il a également été observé que l’évolution rapide d’une population peut entraîner l’évolution d’une autre population avec laquelle elle interagit. Plusieurs espèces peuvent ainsi évoluer en parallèle, en réponse à des pressions qu’elles exercent l’une sur l’autre : ce phénomène est appelé coévolution. Lorsque la coévolution a lieu à la même échelle de temps que la dynamique résultant de l’interaction et la modifie, elle peut représenter un cas particulier d’évolution rapide au sein d’une communauté, suivant la définition d’évolution rapide proposée par Thomson en 1998 et Hairston et al. en 2005.

Certaines études, en particulier théoriques, ont tenté de comprendre les effets de l’évolution rapide au niveau de communautés plus complexes de trois espèces ou plus, malgré l’augmentation croissante de la complexité des modèles et du nombre d’équations à considérer lors de l’augmentation du nombre d’espèces prises en compte. En effet, il faut six équations au minimum pour modéliser un système à trois populations en considérant leurs interactions écologiques et leur évolution, et ce chiffre augmente lorsque le nombre d’espèces augmente. Il apparaît qu’aucun motif ne semble être généralisable : les conséquences écologiques de l’évolution rapide changent selon les modèles et les interactions étudiés.

Dans la nature les communauté sont extrêmement complexes et comprennent une grande diversité d’espèces et d’interactions. De plus, les interactions ayant lieu entre deux espèces peuvent différer selon le système dans lequel elles se trouvent. La présence de populations appartenant à d’autres espèces peut modifier les interactions ayant lieu entre deux espèces particulières au sein d’une communauté, par exemple en « empêchant » leur coévolution ou au contraire en la rendant plus rapide.  A ce jour, du fait de la complexité que présentent des études au niveau de communauté complexes, l’importance relative des processus écologiques et de l’évolution et les conséquences que peut avoir l’évolution rapide au niveau des communautés naturelles restent très mal connues.

Il existe néanmoins des exemples permettant d’apporter des éléments dans la compréhension de ces phénomènes. Nous pouvons ainsi citer l’étude réalisées par Johnson et al. au Canada, parue en 2009[10]. Cette étude combine une approche expérimentale en milieu naturel et une approche théorique via la modélisation et montre que l’évolution rapide d’une population de plante par sélection naturelle entraîne des modifications au niveau de la communauté d’arthropodes qui lui est associée.

L'Onagre bisannuelle (Oenothera biennis), est l'hôte d'une communauté de plus de 150 espèces d'arthropodes dans son aire de répartition d'origine, l'est de l'Amérique du Nord.

Johnson et ses collègues ont utilisé comme modèle l’Onagre bisannuelle (Oenothera biennis), une herbacée de la famille des Onagraceae originaire des milieux ouverts de l’est de l’Amérique du Nord. Cette plante est connue pour être l’hôte de plus de 150 espèces d’arthropodes différentes. Il s’agit d’une plante sémelpare se reproduisant par autofédondation : les graines produites par la plante mère lui sont génétiquement identiques. En d’autre thermes, la plante se reproduit de façon clonale. Deux stratégies de reproduction coexistent dans son milieu d’origine : une stratégie annuelle (les plantes vivent un an et se reproduisent une fois) et une stratégie bisannuelle (les plantes vivent deux ans et ne se reproduisent que la deuxième année, puis meurent).

Pour mener à bien cette étude, l’équipe a produit en serre, au même moment, un total de 184 plantes issues de 14 génotypes différents (12 à 15 réplicats ou clones par génotype) puis les a plantées dans un ancien champs au Canada, dans l’est de l’Ontario, dans l’aire de répartition d’origine de la plante. La végétation alentour n’a pas été modifiée afin que les arthropodes puissent naturellement coloniser les plantes. Une population génétiquement variable a ainsi été produite. L’équipe a ensuite vérifié expérimentalement l’héritabilité de certains traits chez la plante et la présence d’une sélection directionnelle sur ces traits. En d’autres termes, les scientifiques ont cherché à savoir si la population pouvait évoluer par sélection naturelle. Il s’est avéré que, parmi les traits héritables, la biomasse de la plante et un cycle de vie bisannuel étaient sélectionnés.

Il restait à répondre à une question : l’évolution de la population d’Onagre bisannuelle peut-elle avoir un effet sur la communauté d’arthropodes qui lui est associée ? Du fait de la complexité du suivi de la population d’Onagre et de la communauté d’arthropodes dans la nature, Johnson et ses collègues ont opté pour une approche théorique. Les résultats de cette étude ont montré que pour des modèles prenant en compte l’évolution de la plante hôte uniquement, il s’est avéré que des changements importants pouvaient être prédits au niveau de la communauté d’arthropodes.

Philaenus spumarius (Hemiptera, Cercopidae), l'une des espèces les plus abondantes de la communauté d'arthropodes associée à l'Onagre bisannuelle.

L'évolution de la biomasse et de la stratégie de reproduction entrainent un changement d'abondance relative de quatre des cinq espèces d'arthropodes les plus abondante parmi celles que l'ont trouve sur cette plante, sachant que ces espèces représentent 80% de la communauté. Ainsi, l'abondance de Philaenus spumarius (Cercopidae, Hemiptera), augmente avec une biomasse plus importante et une fréquence plus élevée de plantes présentant une stratégie bisannuelle. Entre la première et la seconde génération d'Onagre, soit en l'espace d'une génération, les modèles prévoient une augmentation de l'abondance de trois des cinq espèces d'arthropodes les plus courantes sur la plante (Philaenus spumarius, Mompha stellella et Sparaganothis recticulatana) et de l'abondance totales en arthropodes. On observe une augmentation rapide de l'abondance d'arthropodes durant les premières génération pour des populations évoluant par sélection naturelle, ce qui n'est pas le cas dans les modèles sans sélection. Les effets sont surtout visibles pour de grandes populations de taille constante où la sélection joue un rôle important. Les petites populations évoluant principalement par dérive génétique, leur évolution peut également entraîner des effets au niveau de la communauté d'arthropodes mais ils ne sont pas prédictibles du fait de la stochasticité du phénomène.

Cet exemple montre que l'évolution rapide d'une population peut entraîner des effets significatifs au niveau d'une communauté complexe. Cependant, les résultats de cette étude restent théoriques. De nombreux facteurs influencent la dynamique des communautés et des facteurs écologiques peuvent en réalité se révéler plus importants que l'évolution rapide, ce qui aura pour conséquence d'en masquer les effets.

Pour conclure, nous savons que l’évolution rapide peut influencer les propriétés des communautés mais l’importance de ce phénomène relativement aux facteurs écologiques reste mal connue. De plus, les conséquences de l’évolution rapide entraînée par des mécanismes évolutifs autres que la sélection naturelle (migration, mutation, dérive génétique) demeurent très peu étudiés.

Au niveau des écosystèmes[modifier | modifier le code]

Par ses implications dans la dynamique des populations et des communautés, l’évolution des populations a la capacité de modifier l’écosystème dans lequel celles-ci vivent. Un écosystème est défini[11] comme étant la somme des interactions entre la biocénose (ensemble des organismes vivants dans un écosystème à un instant donné) et le biotope (ensemble des facteurs abiotiques). Le produit tensoriel suivant prend en compte d’une part la biocénose et le biotope mais aussi les interactions entre les deux:

Les propriétés, le fonctionnement et l’évolution des éléments composant un écosystème dépendent de ce dernier. Cela signifie qu’un élément peut être différent lorsqu'il est au sein du système et lorsqu'il en est isolé. Un système est donc lié à la fois par l’action des sous-systèmes qui le composent et par le système plus vaste dont il fait partie.

La théorie selon laquelle l’évolution peut se produire sur une échelle de temps écologique suggère que les phénotypes en résultant peuvent avoir différents effets sur les fonctions et la structure de l’écosystème. Des différences entre les individus peuvent via des mécanismes évolutifs comme la sélection naturelle mener à la différenciation des populations et par conséquent avoir un impact sur l’adaptation d’une population au sein d’un écosystème. L’écosystème lui-même peut par la suite être modifié en conséquence de l’évolution rapide d’une population. Cette modification de l’environnement par l’évolution d’une population sur une échelle écologique (évolution rapide selon Thomson 1998 et Hairston et al 2005) est principalement causée par une modification de l’utilisation des ressources présentes dans l’écosystème, perturbant ou modifiant ainsi les flux de nutriments, la productivité primaire, le taux de décomposition de la matière organique ou encore les cycles biogéochimiques. Les conséquences sont la modification de la dynamique des écosystèmes et la mise en place de feed-back entre les processus écologiques et évolutifs (écoévolution)[12].

Guppy (Poecilia reticulata)

Il existe plusieurs exemples de modifications d’un écosystème résultant de l’évolution rapide d’une population et ayant pu être mesurées. C’est ce que montre l’étude de l’écosystème de rivières de Trinidad[13][14]. Cet écosystème est notamment constitué de guppies omnivores (Poecilia reticulata) qui vivent dans des milieux avec une faible prédation (LP) et dans des milieux avec une forte prédation (HP). Les Guppies HP subissent une plus grande mortalité due à la prédation de ses larves par le killifish (Rivulus hartii). Le système proie-prédateur est à l’origine d’une évolution sur une échelle de temps écologique de la part des Guppies dont la morphologie, la performance de nage mais aussi le comportement divergent de l’autre population LP. Les deux populations sont génétiquement différentes et ces modifications des traits sont héritables.

Rivière de Trinidad, milieu de vie des guppies

Dans des mésocosmes (lieu confiné dont les paramètres sont modifiables par un expérimentateur qui simule un écosystème) sans guppies (seulement killifish) l’ajout de guppies HP révèle une évolution des traits sur une échelle de temps écologique ce qui laisse penser que les prédateurs ont un rôle direct sur l’évolution rapide des guppies. Cette modification des traits entre les deux populations de guppies a des implications dans l’excrétion d’azote, dans les cascades trophiques et aussi dans le régime alimentaire des guppies. En effet, les habitats HP ont moins de vertébrés comme sources nutritives (plus de compétition entre les killifish et les guppies pour cette ressource) et plus d’algues que les habitats LP. Il a été observé expérimentalement dans ces mésocosmes que les guppies des environnements HP sont plus sélectifs dans leur régime alimentaire, ils consomment plus d’invertébrés que les LP et consomment moins de diatomées et de détritus. Ce régime alimentaire différentiel entre les deux populations et les différences de cascades trophiques qui s’en suivent modifient considérablement l’écosystème considéré. Dans les milieux HP, comparativement aux milieux LP, le stock d’algues est plus important mais la biomasse de la production primaire, les stocks d’invertébrés et la décomposition des feuilles sont moins importants. La modification de l’excrétion de nitrate chez les deux populations fait varier le taux de production d’algues dans l’écosystème et plus généralement de producteurs primaires. La modification de l’écosystème de rivières de Trinidad est donc liée à la fois par l’évolution rapide locale des guppies et l’effet de la prédation sur les densités des guppies présents.

L’évolution rapide d’une population, c’est-à-dire sur une échelle temporelle écologique, peut donc avoir des conséquences sur la structure et le fonctionnement des écosystèmes.

Implications en biologie de la conservation[modifier | modifier le code]

Le crapaud buffle (Rhinella marina), un batracien toxique invasif en Australie.

L'évolution rapide peut permettre à une population de s'adapter et de persister face à de nouvelles pressions environnementales : on appelle ce phénomène le secours évolutif. Plusieurs cas ont été observés dans la nature. Par exemple, en Australie des serpents se sont adaptés à la toxicité du crapaud buffle (Rhinella marina), une espèce invasive récemment introduite. Cependant, actuellement, les changements environnementaux d'origine anthropique comme la pollution et l'introduction d'espèces invasives entraînent de nombreuses extinctions. On peut alors se demander sous quelles conditions l'évolution rapide peut-être permettre de secourir une population ? Dans un article paru en 2007, Kinnison et Hairston[15] ont tenté d'apporter des éléments pour répondre à cette problématique.

Dans une population isolée (sans immigration et sans émigration) et de taille suffisamment petite pour ne pas subir de régulation densité-dépendante (la quantité de ressources disponible est importante par rapport au nombre d'individus et la compétition est donc faible), les taux de mortalité et de natalité sont uniquement influencés par des facteurs externes de l'environnement. On peut représenter la dynamique d'une telle population avec l'équation de Malthus en temps continu :

Pseudechis porphyriacus, un serpent Australien présentant des adaptations à la toxicité du crapaud buffle.

où N est la taille de la population, dN/dt la variation de la taille de la population au cours du temps et r le taux de croissance de la population (natalité – mortalité). Lorsque r est positif, la croissance est exponentielle et lorsque r est négatif, l'effectif de la population décroît exponentiellement.

Si l’on ajoute les régulations densité-dépendantes (effet de la compétition), la dynamique de la population peut être décrite par le modèle logistique :

est le coefficient de freinage de la croissance de la population et K la capacité de charge (taille maximale de la population à l’équilibre).

Les facteurs environnementaux peuvent faire décliner une population en réduisant son taux de croissance r ou en diminuant la capacité de charge K (par exemple lorsque la quantité de ressources disponibles diminue).

Représentation graphique de 3 dynamiques de populations faisant face à un changement environnemental brusque d'après le modèle de Gomulkiewicz et Holt de 1995. Nc représente la taille critique de la population. La zone en rose est la zone dans laquelle le risque d'extinction est très élevé. a, b et c sont trois dynamiques que la population peut suivre. La population "a" s'éteint en l'absence d'évolution où lorsque l'évolution n'est pas suffisante pour qu'elle persiste. Les populations "b" et "c" persistent grâce à leur évolution : il s'agit de cas de secours évolutif.

Le modèle de Gomulkiewicz et Holt, présenté en 1995, considère une population suivant une dynamique malthusienne et faisant face à un changement environnemental brusque. Ce modèle prédit que sous certaines conditions la population peut évoluer suffisamment vite grâce à une sélection directionnelle pour persister et croître dans le nouvel environnement. L'évolution rapide peut permettre au taux de croissance de devenir assez importants pour que la population croisse de nouveau et atteigne une taille suffisante pour persister. Dans ce modèle, il existe une taille critique de la population (Nc) à partir de laquelle le risque d'extinction de la population devient très important. La population peut se comporter de trois façons : (a) en l'absence d'évolution ou si l'évolution ne permet pas au taux de croissance de devenir suffisamment important, la population décline et s'éteint. (b) dans un premier temps l'évolution ne permet pas d'enrayer le déclin de la population, qui passe sous le seuil critique, mais si la population persiste suffisamment longtemps elle peut s'adapter et sa taille peut de nouveau croître et repasser au dessus du seuil. (c) l'évolution permet à la population de se rétablir sans atteindre la zone critique.

Selon ce modèle, plus la sélection est forte, plus l'évolution est rapide. Cependant la taille de la population décroît d'autant plus puisque le nombre d'individus sélectionnés est faible, ce qui entraîne un risque d'extinction plus élevé.

Les populations de petites taille sont souvent touchées par des phénomènes telles que les effets Allee, la dépression de consanguinité ou une stochasticité démographique avec un poids important. Cela peut donner lieu à des vortex d'extinction qui entraînent le déclin puis l'extinction de la population. Cela explique la probabilité d’extinction plus importante lorsque la taille devient inférieure au seuil critique. Lorsque l'évolution permet aux populations de se rétablir bien que l'effectif soit passé sous ce seuil, on observe d'après le modèle de Gomulkiewicz et Holt qu'elles mettent plus de temps à croître de nouveau que les populations qui n'ont pas atteint le seuil. Des populations peuvent évoluer et croître sans rencontrer ces problèmes ou en les surmontant. C'est le cas par exemple des espèces invasives dont les populations introduites sont souvent fondées à partir d'un très petit nombre d'individus.

L’évolution peut permettre d’augmenter le taux de croissance r de la population en augmentant le taux de natalité ou en diminuant le taux de mortalité, c’est à dire en augmentant la fitness moyenne des individus de la population. Dans le cas d’une dynamique logistique, la capacité de charge peut être augmentée en améliorant la capacité des individus à exploiter les ressources disponibles ou en leur permettant d’utiliser d’autre ressources. Un phénomène de vortex de persistance peut avoir lieu : l’évolution peut augmenter le taux de croissance et la taille de la population, ce qui permet d’éviter les problèmes liés aux petites tailles de population et augmente la probabilité que la population persiste.

Cependant, la sélection n’est pas toujours directionnelle. Un changement environnemental peut également entraîner une sélection fluctuante si des conditions environnementales différentes se succèdent et que le phénotype optimal est différent selon les conditions. Si la population a le temps de s’adapter à des conditions et qu’elles changent de manière non prédictible, le risque d’extinction de la population sera plus grand. En effet, la population peut ne pas être adaptée aux autres conditions et la sélection ayant conduit à l’adaptation de la population réduit la variabilité génétique, et donc les possibilités d’adaptation futures.

Sur des échelles de temps courtes, l’augmentation de la variabilité génétique est surtout permise par des flux de gènes grâce à l’émigration et à l’immigration. Lorsque l’environnement change, les individus provenant d’autres populations peuvent avoir un phénotype mieux adapté que ceux de la population locale. L’apport de phénotypes héritables favorables peut permettre l’évolution rapide et la persistance de la population via la sélection naturelle. Les populations bénéficient d’autant plus de l’immigration que leur taille est petite et leur variabilité faible. Cependant, un apport trop important de variabilité peut empêcher l’adaptation locale : les flux de gènes ne doivent pas être trop importants pour permettre l’adaptation.

L’évolution rapide peut donc permettre à des populations en déclin de subsister et de se rétablir. Elle permet également le succès de certaines espèces invasives. Il est donc nécessaire la prendre en compte en biologie de la conservation. Néanmoins, toutes les populations ne peuvent être secourues par l’évolution rapide : si la sélection est trop forte, la taille de la population peut se trouver très réduite. La consanguinité, la dérive génétique, le manque de variabilité génétique et d’autres problèmes liés à une petite taille de population peuvent alors mener à sa disparition bien que la population ait subit une évolution rapide. Ainsi, l’évolution rapide peut aussi permettre de prévoir l’effondrement d’une population. Une taille et une variabilité génétique importantes peuvent permettre à la population de subsister suffisamment longtemps pour s’adapter. Enfin, le potentiel qu’une petite population a de croître et de persister dépend notamment des individus qui la composent.

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